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EAN : 9782714456595
200 pages
Belfond (17/10/2013)
2.36/5   11 notes
Résumé :
Unique roman de Francis Picabia, Caravansérail a été écrit en 1924, l'année où paraissait le premier Manifeste du surréalisme. À la rigueur dogmatique de Breton, Picabia oppose son incorrigible désinvolture, choisissant en toutes circonstances la liberté et la vie, qu'il traverse à cent cinquante à l'heure dans une Mercer d'importation. «Je suis vivant» : tel est le sésame et l'ultime réponse de ce roman où il exprime l'essentiel de ses idées.

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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
« Caravansérail » est son unique roman, conçu en 12 chapitres dont les titres ne renseignent en rien sur le contenu. On trouve ainsi « le Galuchat », « La Bulle de Savon », puis « Out », « Cheveux d'ange », « Mimosas » ou « Quinze-seize ». Tout comme le titre d'ailleurs, puisqu'il s'agit da la cour entourée de bâtiments divers, où les caravanes faisaient leur halte. On a ainsi un ensemble de douze lieux, où les artistes de l'époque se rencontrent dans leurs occupations, que ce soit un diner, un bar à la mode « où un Nègre devenu méridional par la fréquentation de Paris, poussait de véritable hurlement ». Mais, comme dans toute société artistique tout lasse, très vite. « La musique nègre, les chansons nègres, j'en ai assez ». On passe alors à une séance de poésie sous hypnose chez André Breton (c'était du temps où ils se fréquentaient), une virée sur la Riviera avec Rosine Hauteruche, sa femme ou sa maitresse, il ne sait pas bien. D'ailleurs il ne savait pas non plus son nom. Roulette à Monte Carlo et ambiance de fêtes continuelles. « On aurait dit qu'elles portaient leurs fesses dans la fourrure ainsi que les Négresses du Dahomey portent sur les reins leur enfant serré dans un cabas », dans un garage pour y chercher sa « Mercer », voiture décapotable d‘importation, « toute petite et fine voiture […] qui faisait habituellement du cent cinquante à l'heure ».
Il ne faut tout de même pas prendre ces clichés ou scènes de la vie mondaine pour argent comptant. La séance de spiritisme chez André Breton est à double sens. On sait que les relations entre Picabia et Breton n'étaient pas toujours au beau fixe. Picabia reconnait volontiers qu'il se rendait alors rue Fontaine comme on allait au cirque. C'était, non point pour lui une curiosité, mais une distraction. Petit coup de griffe en passant avec cette incursion passe à la postérité grâce à la poésie car « dans le garage des Rolls-Royce, la fumée descend du ciel et transforme toutes les guitares en parapluie ». Les relations entre Picabia et Breton vont se tendre, ce qui vaudra ce jugement à la sortie du livre « roman fort ennuyeux ». C'est aussi le moment où pour regrouper ses adeptes, André Breton lance son Manifeste. Résultat, la revue « 391 » reparait avec ses articles au vitriol. J'avais il y a longtemps cherché et même trouvé le tome 2 de la revue, rassemblée (1966, Losfeld, 284 p.) où sous la direction de Michel Sanouillet il reprenait en format A4 les articles publiés une quarantaine d'années avant. Les douze chapitres s'écoulent, ainsi va la vie. Au passage, on l'a vu, ce n'est que côtoiement de personnages célèbres. Certains sous leur véritable identité, d'autres masqués, mais le lecteur dispose d'une cinquantaine de pages de notes, en plus des 150 du texte. On découvre ainsi Gabrielle Buffet, la première femme de Picabia, modèle plausible de Berthe Bocage, alors que Germaine Everling, sa seconde femme pourrait être la Rosine Hauteruche, rencontrée un peu plus loin dans le livre.
On continue d'avancer dans cette plongée de la vie mondaine. On y découvre « le commandant Mulart écrivait chaque jour, entre deux lancers de torpilles sous marines, des lettres de cent cinquante deux pages, parfumées à la brillantine de Grasse, pour déclarer à la belle Georgette-Georgette, qu'il était amoureux d'elle ! Que d'éléments contraires dans le coeur d'un officier ! ». le chapitre se clôt d'ailleurs sur cette remarque interne du narrateur « En route, je me mis à songer que j'avais raté ma vie en ne me faisant pas officier de marine ». de nos jours, on rate sa vie en n'ayant pas une montre au poignet. Les vraies valeurs de la nation ne sont décidément plus ce qu'elles étaient. On assiste à une séance théâtrale dans laquelle on peut assister à « l'ingéniosité déployée par les gens de la critique pour se glisser à leur place en évitant le pourboire à l'ouvreuse ». Un petit coup de griffe aussi envers la Comédie Française, « famille imbécile, grotesque qui n'apporte au théâtre que la valeur du persil sur une tête de veau »
A travers ces douze chapitres, on voit passer Claude Lareincay, « jeune littérateur, candidat au génie », certes débutant, qui ne cherche qu'à placer son livre, ou plutôt les successions de manuscrits de son roman « Omnibus ». Et effectivement, il est là à chacune des stations. Picabia nous fait grâce des deux dernières stations et de la fin, hélas, du jeune auteur. Mais que l'on se rassure, l'épisode se termine bien. D'ailleurs, « un nouveau jeune homme de figure romantique, et qui portait sous le bras une petite serviette noire » et un dernier roman « d'un esprit des plus modernes » s'annonce déjà.
C'est un brillant témoignage de ces années d'après les horreurs de la guerre qui nous est donné là. Années où l'on cherche, enfin, à vivre. A toute vitesse, à gouter à toute sortes de dangers. Des portraits, à l'acide, de ce milieu, avec une comtesse Triple, un Pierre Moribond, fabuleux auteur d'« Ovaire toute la nuit », sans doute Paul Morand. On pourra lire et relire les notes de Luc-Henri Mercié en fin d'ouvrage. Il est intéressant à ce stade de comparer le style de Picabia, qui apparemment s'amuse bien, avec celui d'André Breton, qui est train d'écrire son « Manifeste du surréalisme ». On pourra ensuite s'étonner de la rupture entre les deux personnages. le quasi mandarinat de l'un et le dilettantisme de l'autre. Je viens de vérifier dans l'« Anthologie de l'Humour Noir » (1966, Jean Jacques Pauvert, 596 p.). Aussi surprenant soit-il, Picabia y figure, à la page 401, avec une note qui commence par « le polémiste souvent moins bien inspiré a fait tort chez Picabia au peintre et au poète ». Et toc pour les propos lémistes. On trouve alors sur les quatre pages suivantes « L'Oeil Froid », « Entracte de cinq minutes » et un poème « l'Enfant ».
« Caravansérail » livre, au passage, quelques ouvertures sur la pensée de Picabia. « Regarde au loin, ne regarde pas en arrière / on déraisonne / quand on veut toujours connaître les raisons ». Mais il faudrait y ajouter nombre de ses répliques. Dont celle à son grand père, consul de Cuba à Paris. « Tu peux photographier un paysage, mais pas les idées que j'ai dans la tête ». Cependant, ses fréquentations avec Tristan Tzara et André Breton ne sont pas sans heurts. Il en dénonce « la médiocrité de leurs idées maintenant conformistes ».
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L'éditeur Belfond a eu la bonne idée, à la fin de l'année 2013, de rééditer ce roman, devenu introuvable depuis quelques décennies et qui est le seul qu'écrivit son auteur : Francis Picabia, bien connu des amateurs d'art, en particulier du mouvement Dada où il fut l'un des artistes, avec Marcel Duchamp (bien que celui-ci préféra de tout-temps garder son indépendance loin de tout mouvement artistique), les plus marquants.

Rédigé en 1924 initialement prévu avec une préface d'Aragon qui ne fut pas retrouvée, qui donc n'a probablement jamais été écrite, ce roman est avant tout un document d'époque précieux qui nous renvoie directement à l'année où le mouvement Surréaliste fit ses premiers pas officiellement symbolisé par la publication de son premier manifeste. Nombreuses sont les personnalité connues que côtoya Picabia lors de ses différentes pérégrinations dans les soirées mondaines de son époque ou lors de ses virées impromptues en automobile. Picabia parcoure ces lieux avec une grande désinvolture, ce qui est un peu sa marque de fabrique ainsi qu'une grande irrévérence et une grande acuité sur les travers de ses contemporains, un anticonformiste aimant jouir de l'instant présent avant tout, un dilettante de premier ordre, c'était ce qu'il était.

Picabia n'est pas vraiment un grand écrivain, ce qui le sauve à mon avis, c'est son sens de la formule, des aphorismes qu'il détenait déjà dans « Jésus-Christ rastaquouère » et son ironie mordante, cachant mal un nihilisme véritable pour celui qui prétendait n'avoir lu qu'un seul livre : « Ainsi parlait Zarathoustra ».
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De pair avec Germaine Everling, Luc-Henri Mercié s'est lancé le défi de mettre un peu de cohérence dans le joyeux désordre qu'était Caravansérail. Et quel défi... !

A travers cette oeuvre, que l'on peut considérer comme un véritable manifesto, Picabia s'est en effet appliqué à traiter aussi bien de sujets qui le mettaient en rage que de sujets qui le passionnaient : le jeu, l'amour, l'argent, la critique d'art, l'éducation et la politique se voient tour à tour magnifiés puis stigmatisés. La première impression de "pêle-mêle" donnée par une première lecture disparaît très vite au profit d'une cohérence certaine : d'un chapitre à l'autre, on retombe toujours sur un fil conducteur sur lequel de gracieux personnages tiennent tels des funambules. On se prend vite au jeu, bon gré, mal gré, ne cherchant plus à distinguer le vrai du faux, le réel de l'imaginaire, l'avéré du fantasmé.

Tout au long du livre, on assiste avec plaisir et amusement à un défilé de célébrités, toutes plus excentriques les unes que les autres - on croise Man Ray au détour d'une page, faisons la rencontre de Marcel Duchamp au coeur d'une ligne -, à un mélange subtil des tonalités, le tout exprimé dans un style libre, alerte et bigrement ironique. Certaines répliques font sourire, d'autres, rire franchement. Aucun doute, l'absurde est au rendez-vous !

J'ai passé un très bon moment aux côtés des surréalistes et des ambassadeurs du dada. J'ai été séduite par le narrateur, touchée par l'incompris qu'était Lareincay. L'idée de mise en abîme m'a plue également, avec la lecture des oeuvres de cet écrivain en soif de reconnaissance, dont le thème et le style tranchaient radicalement avec le récit cadre.

Défi relevé avec brio donc !
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3à jours sont passés et je n'ai pas fini de lire Caravansérail....
Premier contact avec le livre : un bel objet, on peut même se découper son propre marque-page. Il est beau et le papier est agréable.
Ensuite on passe à la lecture. Je dois avouer avoir eu du mal à rentrer dedans. Je crois que quand on n'est pas un spécialiste ou un fan de la période, c'est un livre difficile d'accès. Beaucoup de notes à lire pour comprendre les sous-entendus, qui certes nous éclairent mais cassent pas mal la lecture.
C'est un livre intéressant comme témoignage d'une époque et surtout d'une personnalité : celle de Picabia. Se lit donc tranquillement à tête reposé mais pas vraiment comme un roman dont la trame narrative serait prenante.
Je le conseille plutôt au fan de la période, ceux qui ont déjà une bonne culture sur la question ou alors à ceux que les notes en bas de page de dérangent pas.

En résumer je dirais que ça n'a pas été une lecture désagréable mais une lecture qui nécessite de la concentration :D
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Merci à Babelio et aux éditions Belfond pour ce livre remporté lors de la dernière Masse Critique...
Malheureusement,je n'ai pas été transportée par cette lecture ,je l'ai plutôt subie.

Ce récit de Picabia nous plonge dans ses années "Dada",où il est très critique face à ses contemporains,anti-tout,cynique et egocentrique.
De dîners en escapades,de salles de jeux en virées automobiles,nous suivons le personnage et le regard qu'il pose sur les gens qu'il côtoie.

Quand à la construction du livre,les références à consulter au fil des pages m'ont déstabilisée.Je n'ai pas vraiment compris leur intérêt.
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critiques presse (1)
Lhumanite
23 décembre 2013
Cette curiosité est aujourd’hui rééditée. Elle ne révèle certes pas un auteur de grande envergure, mais témoigne remarquablement 
d’une époque et de son ambiance. [...] L’intérêt documentaire est évident. La portée littéraire beaucoup moins certaine. Il n’y eut d’ailleurs aucun autre roman.
Lire la critique sur le site : Lhumanite
Citations et extraits (1) Ajouter une citation
"Actuellement,la vogue est à une sorte de muflerie inutile et voulue,elle a comme écrin le snobisme,les hommes sont mufles pour être mufles,souvent parce qu'ils n'ont pas assez vécu et au fond ne savent rien aimer,les uns n'ont pas de bas-ventre,les autres s'en servent comme d'une bicyclette,pour faire les courses qui peuvent leur rapporter!..."

"Cette femme que je méprisais un peu,cette femme à laquelle je me croyais supérieur,me montra que l'être possédant des vices est au dessus de celui qui est simplement intelligent."
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Vidéo de Francis Picabia
Francis PICABIA – Au prisme de son écriture (France Culture, 1978 L’émission « Relecture », par Hubert Juin, diffusée le 24 février 1978 sur France Culture. Invités : Olivier Revault D'allonnes, Jean Jacques Brochier, Gabrielle Buffet Picabia, Marc Le Bot et Bernard Delvaille.
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