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EAN : 9782070404568
199 pages
Gallimard (14/01/1998)
4.47/5   16 notes
Résumé :
«Remettre en circulation, vingt ans après ses premiers éclats, cette œuvre explosive, risque aujourd'hui de passer pour malice.On y vante l'amour libre (Mieux vaut courir que tenir), on y conteste les maîtres (qui excellent à donner le goût de cadavre), on y récuse les représentants de l'ordre (Ni valets ni soldats ni jésuites ni même francs-juges), on y raille l'état civil (Déclarez vos biens, votre épouse et le fruit de ses entrailles).Il est vrai que Les Épiphani... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Un livre… non! Une oeuvre d'art…non! Un livre-objet…on s'approche, mais…. non!

C'est indescriptible, car unique! Jamais vu une "chose" pareille ailleurs.
Des pages qui parlent, qui pleurent, qui aiment, qui crient, dans la lecture et, soutenu par touches, par l'apparition de formes et de fonds de pages qui vont à la limite de la violence visuelle…
Il n'y a pas d'images réelles, exceptés les amusants symboles-personnages, mais aux bons moments des coups de pouces graphiques bousculent le lecteur, parfois perdu dans la lecture d'une logorrhée verbale fantastique.
Une "pièce" de théâtre…Oui!
Cinq parties: La genèse. L'amour. La guerre. le délire. L' état.
Parmi les personnages: le poète (symbolisé par): P majuscule en gras; Monsieur Diable: M majuscule en gras; l'amoureuse a minuscule en gras; l'ami: M majuscule en gras; l'antidote: T couché & majuscule en gras; la bandeuse: cheval affrayé; la communiante: lune décroissante à visage; le fébrile: oeil gauche ouvert; l'index: main av. l'index tendu; etc.
Il semble ne subsister que peu de documents concernant la représentation théâtrale des épiphanies! Quelques images connues… C'est tout. Un bout de film nous permettrait probablement de mieux saisir le lien, s'il existe, entre ces apparitions graphiques, et la mise en scène théâtrale…
Sinon difficile, voir impossible de résumer les cinq parties de cette pièce. Un tel délire verbal dépasse les facultés d'adaptations de Mijouet. Mais il est clair que nous sommes devant un OVNI qui est apparu dans la littérature française, le 3 décembre 1947 au théâtre des Noctambules, et que rien que pour ça, il mérite notre attention.

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Dans ma bibliothèque c'est un des plus anciens livres, en tout cas je sais qu'il était déjà en ma possession en 1976, époque où j'en connaissais des pans entiers par coeur. En effet le petit club de théâtre dont je faisais partie voulait le mettre en scène sous la houlette de Charles Berling, à peine plus âgé que nous. C'était ambitieux si l'on tient compte que la pièce n'avait été mise en scène qu'une seule fois, en 1947, avec Gérard Philipe et Maria Casarès. Elle n'a plus été mise en scène avant 2016. Il faut dire qu'à la lecture, il y a déjà de quoi être perplexe : les personnages, nombreux, sont indiqués par des signes ou codes (à la manière de ceux de la Horde du Contrevent). En guise d'indications scéniques peu nombreuses (en dehors des bruits et éclairages), il faut interpréter l'emploi des italiques, des majuscules, d'une mise en page parfois à la limite de calligrammes, et même deux pages avec le texte en blanc sur fond noir ! Inutile de préciser qu'après des mois de répétition nous avons fini par jouer tout autre chose… Cette pièce est composée de 5 parties, elle est impossible à raconter, encore moins à résumer. C'est un délire verbal surréaliste : parole fluide, logorrhée hermétique, paroles qui fusent, éclatent comme des bulles. En fait comme le dit Georges Vitaly « Les Épiphanies appartiennent, plus que n'importe quelle oeuvre similaire de la même époque, à ce théâtre de "rupture" que nous recherchions. Rupture, dans la forme, avec le dialogue normal, avec l'enchaînement normal des scènes, rupture aussi dans le contact avec le public, car on ne s'adresse plus à sa raison et à son sens critique, mais à sensibilité, à sa disponibilité émotionnelle, à son impressionnabilité. Rupture encore dans les décors, décors abstraits, synthétisant le climat de chaque acte. Rupture enfin dans la musique d'accompagnement »
En conséquence de quoi je mets, pour des raisons purement émotionnelles, une excellente note, mais cette oeuvre est objectivement assez illisible, je l'avoue.
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Citations et extraits (45) Voir plus Ajouter une citation
Laisse-moi te dire : j’ai besoin d’être voyagée comme une femme. Depuis des jours et des nuits tu me révèles. Depuis des nuits et des jours je me préparais à la noce parfaite. Je suis libre avec ton corps. Je t’aime au fil de mes ongles, je te dessine. Le cœur te lave. Je t’endimanche. Je te filtre dans mes lèvres. Tu te ramasses entre mes membres. Je m’évase. Je te déchaîne
Le Poète : Je t’imprime
L’Amoureuse : je te savoure
Le Poète : je te rame
L’Amoureuse : je te précède
Le Poète : je te vertige
L’Amoureuse : et tu me recommences
Le Poète : je t’innerve te musique
L’Amoureuse : te gamme te greffe
Le Poète : te mouve
L’Amoureuse : te luge
Le Poète : te hanche te harpe te herse te larme
L’Amoureuse : te mire t’infuse te cytise te valve
Le Poète : te balise te losange te pylône te spirale te corymbe
L’Amoureuse : l’hirondelle te reptile t’anémone te pouliche te cigale te nageoire
Le Poète : te calcaire te pulpe te golfe te disque
L’Amoureuse : te langue le lune te givre
Le Poète : te chaise te table te lucarne te môle
L’Amoureuse : te meule
Le Poète : te havre te cèdre
L’Amoureuse : te rose te rouge te jaune te mauve te laine te lyre te guêpe
Le Poète : te troène
L’Amoureuse : te corolle
Le Poète : te résine
L’Amoureuse : te margelle
Le Poète : te savane
L’Amoureuse : te panthère
Le Poète : te goyave
L’Amoureuse : te salive
Le Poète : te scaphandre
L’Amoureuse : te navire te nomade
Le Poète : t’arque-en-ciel
L’Amoureuse : te neige
Le Poète : te marécage
L’Amoureuse : te luzule
Le Poète : te sisymbre te gingembre t’amande te chatte
L’Amoureuse : t’émeraude
Le Poète : t’ardoise
L’Amoureuse : te fruite
Le Poète : te liège
L’Amoureuse : te loutre
Le Poète : te phalène
L’Amoureuse : te pervenche
Le Poète : te septembre octobre novembre décembre et le temps qu’il faudra
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2. L'AMOUR

La scène est au soleil de midi,
l'été, entre plaine et forêt.


le poète
Le lit des choses est grand ouvert. Je me suis endormi, pensant que c'était trop beau et que la terre s'échapperait. Je craignais tout des ventilations absurdes d'une nuit en colère. Les matins me fustigeaient. Je vivais crédulement. Sourcier infatigable, je cherchais l'Orifice originel, premier ouvrage par où passer la tête et crier au Soleil. J'ai trouvé! Je confectionne sur mesure une amoureuse. (En vérité, elle m'est venue d'une ville rêvée posée sur de grands boutons-d'or.)
Les peupliers s'organisent. Les rossignols composent. Il me souvient que l'ivresse nous emporta dans un vivant exercice : le mariage. Elle était si naturelle sous sa robe. Je fus sensible aux courbes aux frémissements particuliers aux aspérités inattendues de sa chair, à la marée montante ou descendante des muscles, à la dentelle des phrases ajourées de soupirs, à ses lianes ses diadèmes ses chevelures ses crépuscules d'Eve naissante, à la sagesse et à la déchirure de ses bords.
Elle me parla comme à un bouclier. J'avais autorité pour prendre sa défense. Pieds nus sur le fil blanc du rêve, nous courions après nos vêtements en allés. Jamais funambules ne furent si heureux de se rejoindre. Et je m'éveille, à l'unisson des terrasses où nos corps à bien menèrent leur cure. Désormais l'invention demeure. Ma femme sera mon paysage sensuel, le diorama de mon âme. Le monde s'est embelli. J'aspire littéralement l'avenir. La clarté du jour m'assiste. Je grimpe à l'échelle de corde de l'enthousiasme. O c'est plus que jamais l'heure des diamants érectiles ! Les alentours se métamorphosent. De coutume le cœur de la biche ne boule pas ainsi, l'eau a moins de charme, les oiseaux ne tombent pas si verticalement sur le ciel, l'air n'offre pas sa charpente avec autant de pompe ou de vigueur. Je vois enfin le plus beau frisson de l'arbre. Et le silence a trop vite plongé son glaive dans la pierre pour que je ne devine rien : Tu es là.

l'amoureuse
Je t'aime.

p.52-53


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5. L'ACCOMPLISSEMENT



le poète
Donc je suis équinoxial : printemps solidaire
d'Automne. Tout ensemble la joie d'or de
l'oiseau des cerises et la griserie de la grive
chanteuse, le levain dans la fleur de farine
et la parole comestible! — et les peuples
déjeunent autour des fontaines et le jour
et la nuit ont le même niveau

l'amoureuse
C'est le Rêve en pleine lucidité. La gravitation
de l'amour avec les corps célestes

le poète
Ce sont les roses comme le dedans de la main
et le dessous du pied des Papous sur les
avenues à 9 heures le matin

l'amoureuse
C'est l'émerveillement des géraniums par les Tziganes

le poète
C'est la traversée en musique des grands
après-minuit d'équitation par le feu de femme

l'amoureuse
Serait-ce la légende enroulée au destin comme
un volubilis ?

le poète
C'est le livre du monde, le vent tourne la
page, voici le fragment du cœur singulier,
voici les pluriels dans leur unisson, c'est
l'espèce par tous les temps du verbe et la
mise à jour sous l'œil immémorial



l'amoureuse
Les bergères des nuages
les cristalliers de la neige
les archers du soleil pacifique
les pontonniers de l'arc-en-ciel
les vents oiseleurs
les artificiers d'aurore boréale
les pilotes d'étoiles filantes
les plénipotentiaires de l'orage
les navigateurs de l'azur précis…

p.151-152

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3. LA GUERRE

salve de roquettes



Monsieur Diable
À vos postes !

le poète
J'ai les yeux révulsés de l'océan. Je percute contre le roc. La rage écume les plages. Le soleil se caille. Je m'étoupe. Je me bétonne. Je me hérisse jusqu'aux nuages. Ma bonne étoile file et s'éteint. Je nage, je nage. Je sue sang et eau. Je nage en nage. Mon cœur s'insurge dans sa cage. Bientôt la contre-attaque! Je veux trois fleurs à la séance :

l'ami
Bleuet Marguerite et Pavot,

Monsieur Diable
comme qui dirait les sommets d'un triangle aux couleurs du Drapeau!

le poète
J'orchestre la fusillade. Je bous. Je traverse le tonnerre. Les sapeurs font des prodiges. Je me dope. Le plafond se fisse. À lui seul, mon voisin est un escadron. Il y en a un qui, plus loin aspirine sur aspirine. Celui-là pense exorciser le plomb. Celui-ci, les affres lui lâchent le ventre. D'autres sont impassibles comme des menhirs. Puis le fouet du ciel claque à ras de nos casques.

Monsieur Diable
À mon commandement…

p.79-80
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1. LA GÉNÈSE

La scène est aux portes
d'une ville haute de ciel.

aurore


le poète
Depuis la première pulsation du monde je tournais sur moi-même je pensais comme une circonférence Intérieurement le barouf me fut toujours intolérable Je faisais chambre commune avec la monotonie Les sons me parvenaient sans que je pusse les classer J’avais une peur bleue de l’espace Je n’insisterai pas sur la froideur du parcours ni sur l’antipathie des soleils croisés à toute allure Cependant que des mouvements d'eaux d'algues d'herbe d'arbres de sable de fluides et d'ingrédients annonçaient qu'il naîtrait un corps de tout cela Par les fissures de la solitude le sang s’infiltra et désormais circule…

p.25

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