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EAN : 9782360120918
120 pages
La ville brûle (21/09/2017)
4.1/5   39 notes
Résumé :
Une analyse sociologique du déchaînement de violence de la part d'habitants du XVIe arrondissement de Paris suite à la présentation du projet d'installation d'un centre d'hébergement de sans-abri, le 16 mars 2016. L'enquête des deux sociologues est accompagnée d'un reportage dessiné.
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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« Mais nous n'avons rien contre les SDF ! Tant qu'ils restent chez eux ! », déclare un couple de bourgeois friqués du XVIe interrogé par les auteurs.
C'est où, chez un SDF ? 😲 Assurément pas dans les quartiers chics et chers en lisière du Bois de Boulogne.

Lancé en 2015, ce projet de centre d'hébergement dans le XVIe à Paris a suscité de vives réactions de la part des riverains (entraînés par le maire de l'arrondissement, Claude Goasguen, remonté comme une pendule suisse) : réunions houleuses, protestations haineuses, référés juridiques, incendies criminels... Le centre a néanmoins vu le jour et les premières familles ont pu s'y installer à l'automne 2016.

Les sociologues Monique et Michel Pinçon ont suivi sur le terrain cette tumultueuse affaire. Ils en relatent les différentes étapes dans cet album qui est moins une BD qu'un petit essai sociologique sur la reproduction sociale - garder ses privilèges, maintenir un entre-soi, ne surtout pas côtoyer la misère (dont on peut être en partie responsable), ne pas montrer ses richesses et les inégalités criantes...
Les illustrations d'Etienne Lécroart résument quelques idées et viennent ajouter un peu d'ironie.

Intéressant, instructif, et forcément révoltant.
Où l'on voit que « la délinquance est aussi celle des costumes et des tailleurs sur-mesure », celle des très-très-très-très-riches (comme dirait un 'humoriste' pas drôle à propos de lui-même).
« L'installation de ce centre d'hébergement d'urgence a montré combien l'égalité et la fraternité, valeurs cardinales de notre République, ne sont pas les bienvenues dans les beaux quartiers. Il semble que les 'zones de non-droit' dont sont si friands les médias en quête de sensationnalisme, ne sont pas celles que l'on croit ! [...] L'argent et le pouvoir permettent aux nantis d'imposer leur entre-soi résidentiel, condition décisive pour la reproduction des rapports sociaux de domination. »
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Monique Pinçon-Charlotte et Michel Pinçon, sociologues connus pour leurs travaux sur la grande bourgeoise française et l'étude des comportements de celle-ci, nous invite à une véritable promenade sociologique à travers le bois de Boulogne, et sur la "frontière" entre le XVIe arrondissement de Paris et sa banlieue.
Le motif de cette visite : l'altercation, violente, le 14 mars 2016 entre des habitants du quartier et les maîtres d'oeuvres d'un projet d'ouverture d'un centre d'accueil pour sans-abri. Porté par La Ville de Paris, ce projet, d'installation provisoire (une durée de trois ans est envisagée) a pour but d'amener un peu de mixité sociale et répondre aussi à des besoins d'urgence. La colère des riverains, sans limite verbale, se dechaînera alors lors cette réunion d'information.
L'occasion pour ce couple de sociologues engagés de disséquer les comportements de la grande bourgeoisie dans l'acharnement de celle-ci à préserver son cadre de vie, et donc, son mode de vie. Il est intérressant en effet de voir comment une petite partie de population française, au mépris de toute loi, et dans une impunité totale, s'octroie des droits, qui pour elle lui sont dûs. Un véritable "accaparement spatial par les dominants" (p. 43), pour préserver un "entre-soi" (p. 43). Il y aurait donc d'autres ghettos où l'impunité régne que les cités populaires tant décriées ?

Leur but étant de préserver un système économique qui les enrichit sans cesse, et d'asseoir leur domination spatiale et sociale, avec des valeurs claniques, pour ne pas dire mafieuses : "l'énergie dépensée par ceux qui s'accaparent toutes les richesses et tous les pouvoirs pour préserver de génération en génération des espaces purifiés socialement, ce qui est l'une des conditions de la reproduction de l'ordre des rapports de classe" (p. 9).
Pour la justice sociale, un peu de charité salvatrice bien ordonnée suffira, à condition qu'elle soit loin des yeux...

C'est une promenade passionnante et jubilatoire (notamment grâce aux dessins et illustrations de second degré d'Étienne Lécroart) aussi que l'on suit à travers le regard de ces deux sociologues. Un regard engagé, il est vrai, mais pas plus que le discours médiatique officiel habituel. Ce n'est juste pas le même angle de vue...

Lu en septembre 2017.
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En 2016, la Mairie de Paris décide de construire un centre d'hébergement pour sans-abris dans le 16è arrondissement, en bordure du bois de Boulogne, seul arrondissement à n'avoir aucun centre d'accueil.
Dire que c'est mal accueilli est un euphémisme !
Il y a une levée de boucliers et notamment une réunion à Dauphine où les habitants injurient l'architecte et l'élu de gauche présents.
Suivront des déclarations haineuses et même des incendies volontaires.

Le couple Pinçon-Charlot a repris les études qu'ils ont faites sur les habitants des beaux quartiers et sur les très riches en général, pour écrire ce petit livre joyeusement illustré par Etienne Lécroart.
Ils expliquent la tendance des très riches, et surtout ceux du 16è, à considérer que le quartier leur appartient et que cela doit rester ainsi.
Les plus grands industriels habitent là, pas mal de politiques aussi, aussi se considèrent-ils légitimes pour intenter des procès à la Mairie de Paris (pourtant élue démocratiquement) contre toute construction qui ne leur plairait pas.
Pourtant la fondation Louis Vuitton se voit beaucoup plus, et dénature bien plus le bois de Boulogne que ces quatre petits cubes de bois en bordure du bois !

Je vous engage à lire ce petit livre écrit avec beaucoup d'humour mais qui met bien le doigt sur l'intolérance en général et sur le pouvoir des plus riches, en particulier de ce microcosme habitant dans le 16è ! (heu j'espère qu'il n'y a pas trop de Babeliotes dans le 16è... ;-) )
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Un lundi soir ordinaire dans le 16ème doit être relativement calme mais ce lundi 14 mars 2016 à l'Université Paris Dauphine, un déchaînement de violences verbales va s'abattre sur les orateurs du jour. Leur tort ? Avoir eu l'outrecuidance de vouloir installer un centre d'hébergement pour personnes sans-abri en lisière du bois de Boulogne.
Sauf que dans ce petit paradis de bourgeois, on ne veut pas voir la misère et les pauvres, les SDF et autres migrants sont priés d'aller souffrir en silence très loin de leurs fenêtres.

Un tel égoïsme ne pouvait pas échapper à Monique Pinçon-Charlot & Michel Pinçon, sociologues spécialisés dans l'étude de la haute bourgeoisie et des élites sociales. Accompagnés par le dessinateur Etienne Lécroart, ils nous livrent un objet hybride entre le livre et le reportage dessiné, une plongée dans ce 16ème arrondissement de Paris où l'on pratique volontiers l'entre-soi résidentiel afin d'assurer la reproduction des “élites” et la préservation des privilèges de classe. Et pour défendre les intérêts particuliers de ce tout ce petit monde, rien de mieux que la droite la plus bête du monde à savoir l'UMP - Les Républicains. Sarkozy et Fillon y ont fait des scores très élevées au premier tour des dernières élections présidentielles et le député-maire Claude Goasguen (uniquement député depuis l'application de la loi sur le non-cumul des mandats) est réélu dans un fauteuil à chaque élection.

Monique et Michel Pinçon explorent les agissements de cette bourgeoisie qui considère que le bois de Boulogne lui appartient, qui se bat contre ce centre d'hébergement en s'abritant derrière des motifs écologiques alors que - l'hypocrisie n'ayant décidément pas de limite - ces mêmes bourgeois bénéficient d'infrastructures privés dans le bois de Boulogne à travers les multiples cercles sportifs existants.

L'enquête sociologique est fluide, bien structurée, facile à lire et les dessins apportent une touche d'humour à défaut d'apporter de l'information systématiquement pertinente.
Merci au couple Pinçon d'éclairer nos lanternes sur les comportements de ces grands bourgeois qui après s'être accaparés la plus grosse part du gâteau veulent que les pauvres hères s'en aillent manger les miettes bien loin de leurs appartements cossus. Une lecture chaudement recommandée.
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Je n'ai pas résisté longtemps à ce nouvel opus du plus célèbre couple de sociologues, consacré au plus riche des arrondissements parisiens, arrondissement qui fit la une de l'actualité en mars 2016 lors d'une réunion - de présentation d'un futur centre d'hébergement d'urgence - hallucinante : les habitants des spacieux appartements bordant le bois de Boulogne se comportèrent de façon tellement grossière, insultante et plus généralement médiocre que la salle dût être évacuée.
Nos deux sociologues experts es riches ne pouvaient que se saisir de cette occasion pour enquêter sur ces gens, tellement isolés du monde et accrochés à leur entre-soi qu'ils ne pouvaient imaginer que la misère (même sous forme de logements en bois harmonieux) s'immisce dans leur quotidien. Au fil de leurs pérégrinations, ils nous font découvrir cet univers à part, son histoire avec les fortifications de Thiers, son domaine avec son bois quasiment annexé par quelques nantis, sa population repliée sur elle-même. A travers des observations de terrain, des récits historiques et des entretiens, on y découvre les indigènes du quartier, étudiés telles des bêtes curieuses, comme le fameux Goasguen, espèce particulièrement antipathique de maire d'arrondissement.
Un an plus tard, le bilan de ce centre est positif, la tension est retombée, et on peut même espérer que certains ont ouvert les yeux sur leurs agissements passés. On ne sait pas s'il faut rire ou pleurer de tels individus et comportements, heureusement les dessins et BD font pencher l'ensemble du côté du rire et effacent le côté parfois déprimant du livre. Ces illustrations d'Etienne Lécroart complètent parfaitement les textes et aident par ailleurs à nous situer dans ce voyage en terres inconnues quand un plan des rues ou du bois est dessiné.
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critiques presse (1)
ActuaBD
21 septembre 2017
Nous sommes là clairement dans un ouvrage engagé, sur des enjeux cruciaux, qui livrent des enseignements non seulement pertinents mais surtout trop rares dans les médias traditionnels.
Lire la critique sur le site : ActuaBD
Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Quatre jeunes discutent devant le centre d'hébergement. Nous nous présentons à eux et découvrons que ces élèves de première ES * dans un lycée privé du secteur [16e arrdt] connaissent notre travail. Bien que conscients des limites de cet entretien, nous souhaitons partager avec vous ces échanges révélateurs : les points de vue et arguments de ces jeunes sont les mêmes que ceux de leurs parents.
Pour eux, la décision de la ville de Paris d'installer ici ce centre d'hébergement est éminemment politique, et ils s'interrogent sur la promiscuité entre richesse et misère.
« Pour les habitants du quartier, les SDF logés dans ce centre feront tache », nous disent-ils.
Cette cohabitation sera défavorable aux personnes sans-abri, le mépris et l'élégance des riverains contribuant à stigmatiser ces corps meurtris par la rue. Une ébauche de compassion aussitôt bousculée par la dénonciation de cet hébergement gratuit dans les beaux quartiers, quand leurs parents paient cher cette localisation privilégiée...
Nos lycéens, déjà pétris des théories néo-libérales, déplorent qu'il n'y ait « aucun retour sur investissement à en attendre ». « Ce sera même un frein pour l'économie » déclare l'un d'eux. Pour ne pas nuire à l'image et au prestige de Paris, « il vaudrait mieux installer les SDF dans les périphéries de la région parisienne ou en province ».
(p. 87)
* bac général, filière Economique et Sociale (16-17 ans)
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- Christophe Blanchard-Dignac, riverain et président de la coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne.
Cet énarque, ancien PDG de la Française des Jeux, préside la coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne qui regroupe vingt associations actives sur cette question. Aussi ne sommes-nous pas étonnés de le voir dans la foule qui attend l'ouverture des portes de l'université Paris-Dauphine [pour la réunion publique].
« Ce centre d'hébergement est un projet insensé, a-t-il déclaré au 'Monde' le 6 mars 2016. Le site fait partie intégrante du Bois de Boulogne, il est donc classé. S'il s'agissait d'installer ici des touristes dans un complexe cinq étoiles, notre combat serait le même. C'est un des rares espaces verts parisiens, il doit le rester. » Ce riverain, qui habite à une centaine de mètres du futur centre d'hébergement, ne serait donc pas opposé à son principe mais il souhaiterait le voir 'ailleurs', dans un lieu plus 'propice'.
« Nous ne sommes pas des révolutionnaires, nous demandons simplement que le Bois de Boulogne reste public, nous sommes farouchement opposés à sa privatisation ! » dit-il à Charlotte Perry au micro de France Inter pour l'émission 'Comme un bruit qui court' du 19 mars 2016. Des propos d'autant plus savoureux que sa femme est membre du Lagardère Racing Club, une enclave privée de plus de 7 hectares, située au coeur du Bois de Boulogne et réservée aux seuls membres cooptés.*
(p. 21)
* Pour entrer dans ce club, il faut être coopté et acquitter une cotisation annuelle de 1 825 € + 6 870 € de droits d'admission.
(p. 17)
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L'impossibilité de construire dans le bois de Boulogne semble être à géométrie variable selon qu'il s'agit de défendre les intérêts de l'oligarchie, qui préempte ses lieux de vie en se présentant comme étant au service de l'intérêt général, ou ceux des sans-abri : un vaisseau dans les arbres demeurera et couronnera l'immortalité symbolique de la première fortune de France, tandis que des modules en bois posés pour trois ans à meme l'Allée des Fortifications pour les exclus du néolibéralisme déclenchera la colère des riches riverains. Des racines et des fondations pour les uns, du provisoire éternel pour les autres. Cercle vertueux ou cercle vicieux ? La Fondation Louis-Vuitton dans le bois de Boulogne ou les tentes Quechua dans le bois de Vincennes ?

Page 53, La Ville brûle, 2017.
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Que l'on soit logé dans le 16e ou dans le 93, règne la même peur panique du déclassement social qui se manifeste dans la haine de l'immigré et du plus pauvre que soi. Conditionnés par les médias dominants, les TF1 et BFM, les classes populaires se trompent de colère ! Au lieu de s'en prendre aux milliardaires, ils se fourvoient dans la xénophobie, le racisme et le vote pour l'extrême-droite. Atteints du choléra, ils choisissent la peste pour tenter de s'en sortir.

Page 24, La Ville brûle, 2017.
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Loin des cités et des quartiers défavorisés, le comportement et les stratégies mises en œuvre par les grands bourgeois dans leur refus d'accueillir de façon pérenne des sans-abri viennent nous rappeler que la délinquance est aussi celle des costumes et des tailleurs sur mesure. L'argent et le pouvoir permettent aux nantis d'imposer leur entre-soit résidentiel, condition décisive pour la reproduction des rapports sociaux de domination.

Page 91, La Ville brûle, 2017.
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Vidéo de Monique Pinçon-Charlot
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