Violence de l'exploitation et des dominations, violence de la bourgeoisie
Il n'est pas besoin de partager le vocabulaire des auteur-e-s (guerre de classe, riches, domination dans les têtes, etc) pour apprécier leurs analyses de la violence des dominant-e-s, de la bourgeoisie, du mode de production capitaliste et de son actualité néolibérale.
Les auteur-e-s nous parlent de cette violence sociale, masquée, enfouie, derrière le
libre marché, la concurrence non faussée, le droit de propriété lucrative, les restructurations industrielles, etc.
Michel Pinçon et
Monique Pinçon-Charlot évoquent les ouvrier-e-s maltraité-e-s, les salarié-e-s jetables et jeté-e-s, les entreprises fermées, les décors sinistrés, les délocalisations, les subventions distribuées sans contrôle ou l'invention de la précarité institutionnelle et défiscalisée des zones dites franches…
Les auteur-e-s parlent aussi de ces patrons, membres de multiples conseils d'administration, de leurs propriétés, de leurs appartements, de leurs dépenses somptuaires, de leurs ghettos dorés, de leur mépris de classe…
Entreprises, et « relais sécurisés dans les paradis fiscaux », opacité des montages financiers, financiarisation des ressources naturelles, déréglementations institutionnalisées…
Michel Pinçon et
Monique Pinçon-Charlot analysent, entre autres, les délinquances des « riches », la fraude fiscale, leur impunité, la justice à deux faces, la violence de la répression des délits commis par les jeunes, sauf pour les « blousons dorés », la criminalisation de la contestation sociale, la volonté de construire un « ennemi de l'intérieur »…
Elle et il présentent cette oligarchie présente, ses discours, les liens entre patrons et dirigeant-e-s politiques, et pas seulement à droite, les responsabilités des socialistes français dans la mondialisation néolibérale…
J'ai notamment apprécié les pages sur les espaces sociaux, les modes de vie, de la bourgeoisie, sur l'inscription des rapports sociaux de domination « dans les corps, dans le maintien et la gestuelle », sur les voyages des sociologues ou des lycéen-ne-s chez les riches, les effets de sidération et les sentiments d'impuissance…
Une promenade dans les beaux quartiers, une entrée dans les boutiques de luxe, et « nous » sommes dans un autre monde. Confrontation des univers et « violence sociale inouïe ».
Une plongée dans la réalité de certain-e-s, dans cette richesse débordante, cette richesse produite par les salarié-e-s et concentrée, très concentrée dans une classe sociale qui sait défendre ses intérêts. Une invitation à penser et à mettre en cause une organisation de la société basée sur la dictature de la propriété lucrative…
Des mêmes auteur-e-s : le président des riches. Enquête sur l'oligarchie dans la France de
Nicolas Sarkozy, Zones 2010.