Rodin : Le baiser

Partie pour aller me coucher après avoir râlé depuis des jours à cause du président de la République française, du gouvernement, du porte-parole du gouvernement, de la REM en général, du RN (notez que si certains partis ont échappé à mon mécontentement, c'est essentiellement parce que mon cerveau est en surcharge cognitive), de BFM TV, de mon maire, de la Comédie-Française, de Boris Johnson, des gens dans la rue et dans les magasins, des gens qui ne mettent plus de masques dans les cinémas et les musées et même dans certaines boutiques, de Roselyne Bachelot, des soldes qui décidément ne sont plus ce qu'elle étaient, de mon conjoint et du monde entier (et j'en oublie, j'en oublie !)... donc, au moment d'aller me coucher, je prends un livre sur Rodin par nécessité (comme vous l'avez compris, je ne suis pas d'humeur à faire les choses par plaisir en ce moment), je lis une page, et là, je flanche, incapable de me concentrer. "Faisons donc les choses autrement", me dis-je. Je me relève donc pour écrire une critique sur un livre pas forcément très intéressant, mais qui va peut-être me permettre de me détendre un peu (juste à cet instant, mes trapèzes, mes dorsaux, mes cervicales et ma capsulite me répondent : "Non, non, ne crois pas te détendre à si bon compte, ce serait trop beau").


Relisant un Découvertes Gallimard sur Rodin (ah oui, vous vous imaginiez que je lisais un truc de 500 pages, vous êtes naïfs !), et de plus ayant fait l'inventaire de tous mes livres sur Rodin (je pense que c'est trop, clairement), je redécouvre ce petit Hors-série de la même collection. Que je n'ai jamais lu. Ou alors je ne m'en souviens pas. Après tout, un livre de huit pages, ça peut s'oublier. Car, oui, apportons quelques précisions sur le format. Ce livre ne fait pas 48 pages comme le prétend Gallimard sur son site web (oh, les menteurs, quand même !), ou alors il faut savoir qu'il est nécessaire retrancher le chiffre 4 pour avoir le nombre réel de pages. Certes, ce sont des pages très épaisses, qui se déplient et se replient (donc elles sont grandes pour un si petit livre), mais enfin, de là à multiplier le nombre de pages par 6, ça me paraît un tantinet exagéré. Pour ceux qui n'ont jamais vu un Hors-série Découvertes Gallimard, ça ressemble vaguement aux livres pop-up pour enfants, mais en beaucoup moins amusant. En fait, mais ça c'est parce que je suis une grincheuse, ça ne m'amuse pas du tout. Avec ces pages vraiment très épaisses, j'ai tout le temps l'impression que j'ai raté un truc entre deux pages, je m'acharne à essayer de trouver une page qui n'existe pas, puis je déplie et je replie chacune trois fois croyant n'avoir pas tout lu, mais en fait si, mais en fait il y avait si peu de texte que c'est certain, j'ai pas tout lu, sauf que si, en vrai il y avait vraiment très très peu de texte et il faut que je passe à la page suivante, pensant en avoir raté une autre, etc. etc. Je m'éclate beaucoup plus à relire mon exemplaire pop-up de Cendrillon, que je traîne avec moi depuis plus de quarante ans.


J'en oublierais presque de parler du contenu, dites-donc ! Ben, le contenu est mince (contrairement aux pages). Ce qu'il faut préciser, c'est que ces Hors-séries sortent uniquement lors d'expositions ou événements du même genre, et qu'en fait, ce sont plus des goodies qu'autre chose. Nous laisser espérer que nous allons suivre la genèse et la vie du Baiser de Rodin, comme c'est dit en quatrième de couverture, là aussi c'est exagéré. On apprend l'essentiel sur la sculpture, mais on a surtout droit à des photos des pieds de Paolo Malatesta et Francesca da Rimini par Rodin, des jambes de Paolo et Francesca, du torse de Paolo et du dos de Francesca, et des têtes de Paolo et Francesca. Pour le coup, je pense qu'Hèlène Pinet a casé un peu tout ce qu'elle pouvait dans un format aussi peu propice aux développements de commentaires. Et elle a repris tels quels quelques trucs qu'on trouve dans son Découvertes Gallimard sur Rodin, plus ancien. Cela dit, elle réussit à nous apprendre que la sculpture a failli s'intituler Françoise de Rimini, et ça, c'est quand même rigolo (et c'est pourquoi je pense n'avoir jamais lu ce livre auparavant, car je me serais probablement souvenu de ça. Mais peut-être pas, après tout.)


Voilà : c'est le genre de truc que vous achetez dans un élan de passion après avoir vu une expo, ou parce que vous avez raté l'expo, ou parce que vous êtes un peu naïfs comme moi et que vous vous dites que pour 3€, d'occasion et en très bon état, c'est une affaire. Or ça ne l'est pas. Si vous voulez en connaître plus sur le Baiser, qui n'a pas tant d'intérêt que ça présenté en dehors du reste de la production de Rodin (ne me huez pas, je peux prouver ce que j'avance !), lancez-vous carrément dans une monographie et oubliez les fantaisies pour touristes. Je vous aurais bien dit de filer derechef au musée Rodin, mais bon... voilà, quoi, hein (et puis c'est pas tout le monde qui peut se permettre d'aller à Paris, de toute façon). On reparle bientôt de Rodin, avec d'autres titres plus passionnants.


Pour ce qui est d'être plus détendue, cette critique a bien marché pour le mental... mais pas pour mon pauvre dos, qui n'en peux mais.

Où l'on apprend à bien embrasser et à s'étreindre. Rodin, un art de sculpter qui ne laisse pas de marbre...