En introduction à « L'âge des extrêmes » le célèbre historien
Eric J. Hobsbawm écrivait : « A la fin de ce siècle, il est devenu possible pour la première fois de voir à quoi peut ressembler un monde dans lequel le passé, y compris « le passé dans le présent », a perdu son rôle, où les cartes et les repères de jadis qui guidaient les êtres humains, seuls ou collectivement, tout au long de leur vie, ne présentent plus le paysage dans lequel nous évoluons, ni les mers sur lesquelles nous faisons voile : nous ne savons pas où notre voyage nous conduit ni même où il devrait nous conduire. » Lorsque nous jetons un oeil pressé sur nos écrans, généralement il y apparait un foutoireux mélange d'informations. Et nous ne savons plus pourquoi nous sommes traités de si légère manière. le plus souvent, nous ne disposons pas d'un cadastre qui présenterait les parcelles autres que celles libérales de la conquête de la liberté de la presse ; nous ne disposons pas d'avantage d'une boussole qui permettrait de prendre d'autres chemins que le tortillard sentier libertarien qui toujours fait reculer l'État devant les magnats de la presse. Aussi, sans les jalons historiques des luttes pour une presse totalement libre, affranchie de l'État mais aussi de l'argent, nous ne savons plus, pour reprendre les mots d'
Eric J. Hobsbawm, où notre voyage nous conduit ni même où il devrait nous conduire.
C'est sans doute pourquoi l'auteur détaille pour nous dans son passionnant essais deux siècles de combats le plus souvent perdus pour la liberté de l'information. Il y fait utilement son histoire intellectuelle, matérielle, sociale et politique. C'est l'énorme mérite de
Dominique Pinsolle de rappeler sans cesse dans son livre que la liberté de la presse ne saurait être attribuée aux seuls libéraux bien au contraire, qu'elle a surtout partie liée avec la lutte qui tente de briser à la racine le lien unissant les médias au pouvoir de l'argent. Il apparait d'ailleurs à travers ces pages fort documentées que les débats autour de cette liberté toujours fonctionnent comme les vases communicants, plus leur dimension libérale est exacerbée moins leur nature économique et sociale transparait. le vase néolibéral aujourd'hui atteint des dimensions colossales. Quinze années de libéralisme économique, de mondialisation ont détestablement remodelé le secteur de la communication et consacré les grands groupes multimédias, elles ont effacé jusqu'au souvenir d'une critique en la matière. Il est grand temps avec
Dominique Pinsolle de nous souvenir.