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Critique de colka


A l'heure où les crimes pédophiles ne cessent d'éclabousser l'Eglise catholique, à l'heure où l'excellent film de François Ozon constitue une formidable caisse de résonance à la condamnation judiciaire du cardinal Barbarin, à la mise en accusation et sous contrôle judiciaire du prêtre pédophile Bruno Preynat, je suis passée de l'autre côté du miroir avec le roman de Alessandro Piperno : Persécution. Titre évocateur et en parfaite adéquation avec la situation du héros de cette histoire, puisqu'il s'agit de la longue descente aux enfers d'un brillant professeur de médecine, Leo Pontecorvo, suite aux fausses accusations d'une lolita de douze ans, Camilla, qui va l'accuser de viol.
Sujet ô combien délicat, s'il en est... Alessandro Piperno choisit au début du roman un point de vue intéressant, celui d'un narrateur extérieur qui nous annonce d'emblée le drame à venir et va ensuite procéder par flashbacks successifs interférant avec le vécu de Leo après après sa mise en accusation pour viol. On aurait pu espérer de cette structure que chacun des retours dans le passé nous donne des pistes nous permettant de comprendre ou au moins de faire des hypothèses sur la situation présente. Or il n'en est rien, et j'ai ressenti ces flashbacks comme de longues digressions qui m'ont fait perdre de vue Leo Pontecorvo, retranché dans le sous-sol de la villa où il vit avec sa famille depuis le triste soir où il a appris à la télévision de quel scandale il était l'objet.
Bien sûr, Alessandro Piperno lorsqu'il remonte dans le passé de Leo en profite pour brosser un portrait féroce de cette bourgeoisie juive romaine, monde auquel appartient notre héros et certains passages sont à ce titre fort savoureux. Mais aucune prise en compte de l'issue tragique à venir, aucune tension dramatique sous-jacente . Il m'a fallu attendre la moitié du roman pour que je sente vraiment que Leo vivait un drame faisant de lui une victime sur laquelle allait se refermer, comme un piège, un appareil judiciaire décidé à le condamner. Et la scène avec le procureur qui va enfin lui faire part de sa mise en accusation pour viol est à ce titre très réussie car elle évoque d'autres scènes similaires de bien d'autres procès politiques, religieux ou autres, où un accusé est condamné d'avance , où tout ce qu'il a pu faire ou dire dans le passé est décontextualisé et retissé de façon à constituer des preuves à charge irréfutables.
D'ailleurs Leo lorsqu'il va comprendre que sa cause est perdue va devenir à lui-même son propre bourreau : paranoïa, goût du complotisme, paradoxe de la honte qui le pousse à aller plus loin encore dans la douleur pour voir jusqu'où il peut aller, lassitude de celui qui se sent traqué et qui de guerre lasse tend son cou au bourreau. Tout cela est fort bien vu et rendu... jusqu'au moment où une dernière et longue digression me fasse de nouveau perdre de vue Leo et sa longue descente aux enfers. Et la fin du roman ne m'a pas permis de replonger dans le drame et d'y voir un point d'orgue incontournable.
C'est dommage, car la plume de Alessandro Piperno a une force de dénonciation évidente...
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