Gérard Pirlot est l'un de ces psychiatres qui trouvent dans les découvertes des neurosciences la confirmation stricte et bienvenue de la pensée de
Freud : dans l'étiologie – et par conséquent dans la prise en charge psychothérapique des addictions (qui n'est pas traitée ici) – il utilise et préconise la psychanalyse. de plus, dans cet essai, sont mis en évidence les rapports étrangement enchevêtrés entre addictions et pathologies psychosomatiques, sous forme non seulement de parallélismes mais aussi de substitutions des unes aux autres.
Cet ouvrage est d'un grand technicisme, il s'adresse aux spécialistes en opérant une synthèse exhaustive du paradigme psychanalytique tout entier – dans la grande complexité de ses notions –, de la recherche neuroscientifique actuelle (non sans quelques intrusions pharmacologiques), ainsi que de certaines observations cliniques siennes et d'autrui (cf. les « vignettes cliniques » incluses dans le texte). Je ne suis parvenu à le suivre que dans une certaine mesure et serai incapable de résumer les découvertes propres à l'auteur et même les principales acquisitions que je lui dois. Les cit. ci-dessous m'ont paru, tour à tour, de flamboyantes illuminations ou des révélations qui attendent une maturation par des approfondissements et réflexions ultérieurs.
Je relève et apprécie l'originalité de la structure de l'ouvrage : de l'Introduction, « Généralités sur les addictions », je retiens l'ampleur du phénomène addictif, la pertinence épistémologique de la psychanalyse, l'excitation comme antidote à la dépression, et les addictions comme remèdes aux blessures narcissiques et aux problèmes liés aux émotions ;
Chap. 1, « Prémices conceptuelles de l'addiction : la psychanalyse freudienne » - d'après les premiers travaux de
Freud, en passant par le concept d'« homéostasie psychosomatique », jusqu'à ceux d'« incorporation », de « dépendance du nourrisson » et d'« oralité » ;
Chap. 2, « Modèles métapsychologiques de l'addiction : défaillances des autoérotismes, du narcissisme et de la représentance pulsionnelle » : similitude entre addictions et états-limites, autoérotisme et narcissisme, le défaut de holding et la fréquence de l'alexithymie, les fonctions du rêve, le cauchemar et les hallucinations ;
Chap. 3, « L'apport de la psychosomatique psychanalytique » : « le rapport psyché/soma dans les addictions », similitude entre addictions et troubles compulsifs alimentaires (TCA), la topique du clivage, addictions, jeux, perversion, images ;
Chap. 4, « Des concepts neurobiologiques à la passion addictive » : « neurobiologie de l'addiction », similitude entre l'amour passionnel, l'amour maternel et l'amour du toxique, traitements médicamenteux de l'enfant hyperactif aux États-Unis (avec dérivés amphétaminiques) et leurs dangers.
Conclusions comportant quelques indications sur les limites des prises en charge actuelles, notamment en psychiatrie hospitalière où les addicts ne sont pas nécessairement consentants.