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Thérèse Moreau (Autre)Eric Hicks (Autre)
EAN : 9782234019898
300 pages
Stock (30/11/-1)
3.89/5   38 notes
Résumé :

À la plus italienne des Parisiennes du XVe siècle revint la gloire de défendre l’honneur des femmes : en 1405, Christine de Pizan achevait le Livre de la Cité des dames qui donnait en exemple les femmes illustres de tous les temps. Il y eut ensuite le Livre des trois vertus ou Trésor de la Cité des dames, où Christine faisait une analyse lucide et précise de la société française, vue du côté féminin, détaillant tous les « états des femmes » et donnant de cha... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Si Christine de Pizan (1364-1430) est peut-être considérée comme l'un des premiers auteurs de la littérature française, ayant importé de son Italie d'origine « l'umanesimo » de Pétrarque et de Boccace, elle est assurément l'une des grandes voix du féminisme du XVe siècle. Sa Cité des Dames est une double allégorie : trois valeurs incarnées en personnages féminins – dame Raison, dame Droiture et dame Justice – dialoguent avec la narratrice pour dénoncer la misogynie de l'époque tout en la guidant dans l'édification d'une Cité (respectivement de ses remparts, de ses bâtiments, de ses toitures) où seront réunies une série de femmes illustres et vertueuses des tous les temps, dont les récits biographiques constituent la matière du livre. Bien que la perspective féministe de l'autrice soit plutôt éloignée de la nôtre, puisqu'elle reflète résolument la doctrine de l'Église (pré-Réforme), qu'elle n'aspire aucunement à l'égalité des genres ni ne conteste la misogynie d'Aristote et des Pères de l'Église, se limitant en somme à un niveau de misogynie « infra-philosophique », on est stupéfait de retrouver presque à l'identique un grand nombre de préjugés sexistes qui restent d'actualité aujourd'hui : l'infériorité intellectuelle et morale des femmes, l'inopportunité des les autoriser à l'étude et à l'exercice des professions « masculines », leurs fautes et responsabilités dans les défauts de l'institution matrimoniale et dans le couple en général, la coquetterie, l'inconstance et la luxure jusqu'à leur plaisir inavoué à être violées, leur avarice ou prodigalité... Les arguments de réfutation de ces préjugés, ce sont les trois divines interlocutrices de Christine qui les lui apportent, en invoquant l'exemple de plus d'une centaines de personnages féminins. En bref, cet ouvrage inaugure le genre, encore en usage de nos jours, des oeuvres féministes qui consistent dans des dictionnaires biographiques de femmes remarquables.
Mais ce qui est très dissonant par rapport à notre manière d'argumenter d'aujourd'hui, c'est qu'aucune distinction de forme ni de fond n'est envisagée entre les personnages historiques réels, y compris les contemporaines de l'autrice dont elle a choisi ici uniquement les membres de la haute aristocratie (ce qui ne semble pas être le cas dans d'autres ouvrages féministes siens), les femmes illustres de l'Histoire grecque et romaine, d'une part, et les personnages de fiction, de l'épos homérique, des tragédies grecques, de la poésie antique, de la prose contemporaine – surtout de Boccace qui est si souvent convoqué, d'autre part, et encore les personnages bibliques, évangéliques, et l'hagiographie des saintes, avec tout ce que cette dernière comporte de prodiges, miracles et autres narrations fantastiques ou symboliques. Ainsi, l'invention de l'agriculture par Cérès, celle du jardinage par Isis, celle des chiffres par Minerve sont mises sur le même plan que l'oeuvre poétique avérée de Sappho, avec pour seule « précaution méthodologique » de préciser que celles que « l'erreur païenne » considérait comme des déesses avaient été en réalité d'anciennes reines ou princesses bien humaines ayant vécu en Grèce ou en Italie ou en Égypte naguère... Boccace lui-même, dans son contrat de réalisme avec le lectorat, était plus moderne que Christine de Pizan, dans la mesure où il ne laissait planer aucun doute sur la nature fictionnelle de ses personnages et de leurs histoires et en faisait allégrement usage au second degré, notamment dans le but de l'humour. Moins grave mais aussi dissonant, tous ces personnages féminins de tous les temps et de plusieurs contextes culturels sont réduits et « formatés » dans le même moule de la morale chrétienne rigoriste de l'autrice, estimés à l'aune de leur vertu, de leur honneur, de leur « modestie » presque un synonyme de chasteté, de leur piété, en somme des valeurs spécifiques de son époque (et sans doute de sa classe sociale). Cela provoque des anachronismes qui nous rendent presque méconnaissables certains personnages, par ex. Médée, dont notre vision est peut-être aussi le fruit d'un autre anachronisme, mais qui a au moins le mérite de nous les rendre plus compréhensibles, car plus proches de nous. Par contre, je ne cesse de m'étonner de la familiarité, presque de l'intimité que les auteurs et autrices de ces siècles pré-modernes entretenaient et cultivaient avec l'ensemble du corpus écrit dont ils disposaient (littéraire, religieux, philosophique) depuis l'Antiquité jusqu'à leurs jours sans solution de continuité ni sentiment d'étrangeté, comme si aujourd'hui quelqu'un pouvait être aussi intime à la fois de Marie Madeleine, de Judith et de Pénélope (la femme d'Ulysse, tout comme celle de Fillon...) que d'Emma Bovary, de Hillary Clinton et de Beyoncé !
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Christine de Pisan, femme de lettres franco-vénitienne de la fin du XIV°s pose les pierres de ce qui sera la fondation de sa cité littéraire et allégorique, La Cité des Dames. Christine est devant son écritoire, elle semble perdue. Apparaissent alors trois dames, Raison, Droiture et Justice qui la persuadent d'écrire et de créer une Cité par le biais de sa morale et de sa conscience féminine. Commence alors toute une série d'énumérations de personnages féminins, fictifs et réels, leurs défauts, leurs qualités, leurs actions et leur importance au sein de cette Cité qu'imaginera Christine. L'auteur met en avant la condition féminine et crée les signes avant-coureurs de ce que l'on appellera plus tard le féminisme, bien que le mot n'existe pas encore à la période médiévale!
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le XVe siècle marque une nouvelle connaissance du monde, entre Moyen Age et Renaissance.
Mais la condition féminine a encore devant elle de nombreux combats à mener.
Christine de Pizan avec intelligence, à la hauteur de son siècle, reçoit les enseignements des dames Raison, Justice et Droiture afin que ces trois entités féminines puissent lui délivrer les plans de la Cité des Dames qu'elle devra ériger et protéger.
Un récit étonnant, et très pertinent qu'il convient bien entendu de replacer dans le contexte historique de son temps, mais à travers lequel on perçoit très distinctement le courage, la pertinence, la détermination de son auteure.
Intemporelle.
Lecture qui m'incite à découvrir les écrits de Boccace. Que l'auteure en soit ici remerciée.

Astrid Shriqui Garain
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Fatiguée et abattue par dénigrement constants des hommes envers les femmes, Christine de Pizan décide de bâtir une Cité, allégorique bien sûr, uniquement dédiée aux femmes et construite par les femmes. Pour ce faire elle sera aidée de trois "muses" : la Droiture, la Justice et la Raison. Celles-ci vont l'aider, l'éclairer et répondre à tous les doutes qui la hante à propos de la condition féminine de son temps et de la méchanceté des hommes. Ça c'est le début du livre et c'est la partie qui m'a le plus plu. C'est une partie réfléchie, argumenté, générale, où les trois muses vont démonter un à un les pseudo arguments de ses contemporains hommes et rassurer Christine sur le bien fondé de sa colère.
Mais ensuite Christine de Pizan, afin de bâtir la structure de la Cité, utilise toutes les femmes les plus illustres des temps passés (réelles ou mythologique) et nous fait une description de chacune chapitre par chapitre. Malheureusement j'ai trouvé le résultat trop succinct et trop enchainé...on aborde beaucoup trop de personnages, beaucoup trop de références, beaucoup trop de périodes, ça m'a perdue. Donc j'ai parcouru ces nombreux chapitres en diagonale malheureusement...
J'ai préféré les parties plus générales et allégoriques que j'ai trouvé très fortes et très instructives.

Néanmoins, le travail de Christine de Pizan pour cette oeuvre a été, ça se voit, conséquent et le résultat est un incroyable plaidoyer pour les femmes et où, au travers de cette belle idée de Cité allégorique, elle donne aux femmes de son temps (et futures), une solide base pour être fortes, indépendantes et moralement armés. Alors oui on est au XVe siècle et les valeurs exaltés sont la vertu, la bonté, la discrétion... mais il serait très mal aisé de juger les valeurs d'un temps passé à l'aune des nôtres.

Bref c'est une oeuvre d'une grande modernité et d'une grande sagesse qui gagnerait à être bien plus connue.
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La Cité des Dames est sans doute le livre le plus connu de Christine de Pizan pour son étonnante prise de position sur les femmes. Bien qu'il soit exagéré d'en faire une féministe avant l'heure - après tout elle ne remet pas en cause la condition de la femme qui doit être humble, fidèle, servir son mari... -, elle est quand même de ses voix féminines qui cherchent à donner une existence légitime à la femme comme un être égal de l'homme.

Par un jeu de questions/réponses avec Raison, Droiture et Justice, l'auteure va aborder cette position à travers des exemples de saintes, de femmes appartenant à la haute société, de commerçantes, de veuves, de figures mythologiques ou encore antiques, cherchant ainsi à montrer aux esprits de son temps que la femme peut faire autant que les hommes, et se montrer aussi responsable, bonne, intelligente, droite, vertueuse, honnête que ces derniers. Sans jamais néanmoins chercher à écraser l'homme, puisqu'elle en reconnaît également les mérites. Même si les défauts des hommes, elle ne manque pas de les exposer.

Bien sûr, aujourd'hui certaines figures avancées ou histoires racontées dans ces pages, peuvent prêter à sourire. Après tout la science historique a évolué et les versions également. Mais même si l'on peut critiquer certaines choses avancées, il n'en demeure pas moins que le fond reste vrai. La femme et l'homme sont complémentaires et ont les mêmes qualités et défauts. Idée, ô combien innovante pour l'époque ! (Qui pourrait être encore innovante aujourd'hui, tant pour les islamistes, les machos que pour beaucoup de féministes enragées.)

Bref, j'ai apprécié ce livre pour le fond et les exemples désuets qui sont présents. Et même, je le redis, si Christine de Pizan ne cherche pas à bousculer l'ordre établi, à pousser les femmes à prendre leur envol, leur indépendance, à devenir libre, d'où le décalage avec notre époque (mais on ne lit pas un vieux livre avec nos idéologies actuelles), l'idée de fond de l'égalité des sexes et de leur complémentarité est à voir telle qu'elle est, impressionnante pour l'époque (et pour aujourd'hui).
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Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
7. « Enfin, vous toutes, mesdames, femmes de grande, de moyenne ou d'humble condition, avant toute chose restez sur vos gardes et soyez vigilantes pour vous défendre contre les ennemis de votre honneur et de votre vertu. Voyez, chères amies, comme de toutes parts ces hommes vous accusent des pires défauts ! Démasquez leur imposture par l'éclat de votre vertu ; en faisant le bien, convainquez de mensonge tous ceux qui vous calomnient. Ainsi pourriez-vous dire avec le Psalmiste : "L'iniquité du méchant retombera sur sa tête." Repoussez ces hypocrites enjôleurs qui cherchent à vous prendre par leurs beaux discours et par toutes les ruses imaginables votre bien le plus précieux, c'est-à-dire votre honneur et l'excellence de votre réputation ! Oh ! fuyez, mesdames, fuyez cette folle passion qu'ils exaltent auprès de vous ! Fuyez-la ! » (p. 277)
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« Il est vrai que certains l’ont blâmée — et ç’eût été à bon droit si elle eût été de notre foi — d’avoir pris pour époux le fils qu’elle avait eu de son mari Ninus. Ce fut certes là une grande faute, mais comme il n’y avait pas encore de lois écrites, on peut l’en excuser quelque peu ; les gens ne connaissaient en effet d’autres lois que celles de la Nature, et il était loisible à chacun de suivre son bon plaisir sans commettre de péché. »
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Tout homme qui prend plaisir à dire du mal des femmes a l'âme abjecte, car il agit contre Raison et contre Nature : contre Raison parce qu'il est ingrat et méconnaît les bienfaits que les femmes lui apportent, bienfaits qui sont si grands et si nombreux qu'on ne saurait les rendre et dont on éprouve sans cesse le besoin ; contre Nature, puisqu'il n'est bête ni oiseau qui ne recherche naturellement sa moitié, c'est-à-dire la femelle ; c'est donc chose bien dénaturée si un homme doué de raison fait le contraire.
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Ceux qui ont blâmé les femmes par jalousie sont des hommes indignes qui, ayant connu ou rencontré de nombreuses femmes de plus grande intelligence et de plus noble conduite que la leur, en ont conçu amertume et rancoeur.
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Vénérées, excellentes et honorables princesses de France et de tous pays, et vous dames, damoiselles, femmes de toute conditions, vous qui avez aimé, vous qui aimez et qui aimerez la vertu et la sagesse, vous qui êtes mortes, vous qui vivez et vous qui viendrez à venir, réjouissez vous toutes et soyez heureuses de notre nouvelle Cité (...) rendez grâce à Dieu qui m'a guidée tout au long de ce studieux labeur, moi qui voulais construire pour vous un refuge d'honneur aux murailles hautes et fortifiées, qui vous servira de citadelle jusqu'à la fin des temps.
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