AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de christinebeausson


Une récompense à Angoulême, meilleure série, un auteur danois que je ne connaissais pas, Halfdan Pisket, c'est ce qui m'a décidé à me lancer dans cette découverte.
L'album est paru en 2014 au Danemark, en 2017 en France.
Une couverture très stylisée qui intrigue ....
L'ouverture et la clôture du livre sont inquiétantes, un mur de têtes engagoulées, au début seule une tête est découverte, à la fin nous n'avons plus qu'un mur de sans visage mais où est celui qui osait être lui même ?
Les dessins durs, noirs, l'esquisse évoque le texte,
Des phrases brutes, puissantes qui laissent monter ... "le chagrin se change en cauchemar. le cauchemar se transforme en haine."
Arrive ce qui doit arriver ... "quand mon meilleur ami a été tué, l'homme que j'étais a disparu."
Des souvenirs de l'empire ottoman déchiré par des conflits internes (le génocide des Arméniens*) et l'engagement dans la première guerre mondiale ... apparaît alors, un individu qui fut pour le grand père, le modèle, celui qui a su redonner de la grandeur à la Turquie, Mustafa Kemal Pacha, Atatürk. (**).
Un livre qui secoue les tripes face à l'histoire d'un homme traumatisé par la mort des siens. Ce qui l'a poursuivi toute sa vie, ces disparitions successives le laissant seul, alors qu'il se sent incapable d'assurer la survie de sa propre famille enfin de ce qui semble si important pour lui, la survie du nom !
Traumatisé par cette maladie qui le laisse seul face au grand blanc qui efface tout ce qui l'entoure, et le laisse impuissant en prise avec ce qu'est devenue la société.
Les traits sont durs, très durs, le dessin traduit ce cauchemar et le noir et blanc grave la pierre de nos souvenirs ...
Lecture éprouvante mais néanmoins addictive car on ne peut rester insensible à la vision de ses sans visage.
Peut on accepter d'être un sans visage comme un autre ?
Accepter d'être un témoin de la mise à mort d'une civilisation, d'être un sans visage complice de tous ces meurtres contre l'humanité ?
Je vais reprendre un peu de force, admirer le soleil et la lumière, regarder les visages qui m'entourent et je me lancerais dans la deuxième partie Kakerlak ...cafard .

(*) le génocide des Arméniens a été perpétué d'avril 1915 à juillet 1916 voir 1923.
Les deux tiers des Arméniens qui vivaient sur le territoire actuel de la Turquie ont péri du fait de déportations, famines et massacres de grande ampleur. Tout a été planifié et exécuté par le parti au pouvoir de l'époque, connu sous le nom de "jeunes turcs". Un million deux cent mille arméniens d'Anatolie et d'Arménie occidentale ont péri.

(**) Mustafa Kemal Pacha, nommé à partir de 1934 Atatürk, né en 1881, homme d'état, fondateur et premier président de la République de Turquie de 1923 à 1938.
Après le première guerre mondiale et l'occupation alliée de l'empire ottoman, il refusa de voir son pays, l'Empire démembré par le traité de Sèvres.
Accompagné de partisans, il se révolte contre le gouvernement impérial et crée un deuxième pouvoir politique à Ankara. C'est de cette ville qu'il mène la résistance contre les occupants lors de la guerre d'indépendance turque.
Mustafa Kemal affirme également une volonté farouche de rupture avec le passé impérial ottoman et instaure des réformes radicales pour son pays : il inscrit la laïcité dans la constitution - séparation entre les pouvoirs politique (sultanat) et spirituel (califat), il donne le droit de vote aux femmes, il remplace l'alphabet arabe par l'alphabet latin. Il a été l'objet d'un culte de la personnalité certainement unique dans une démocratie, il a mis en place un système moderne pour les années 1930, mais qui s'est complètement figé par la suite en mémoire du « chef éternel ».
L'état kémaliste a mené un pays musulman de 70 millions d'habitants vers la démocratie et la stabilité.
Commenter  J’apprécie          60



Ont apprécié cette critique (6)voir plus




{* *}