Il était une fois la Nature, il était une deuxième fois une amitié.
Oui, Petit-Loup ressemblerait presque à un conte animalier du
Père Castor mais pour un public bien moins petit, un public qui est en âge de questionner et de réfléchir sur sa fin d'histoire idéale.
Nous parcourrons la nature sauvage sous plusieurs formes, la faune et la flore, libre, belle, vivifiante, des élans poussant malgré tout aux instincts primaires malgré tout.
Il était une troisième fois l'affaire improbable d'un petit loup camarade avec un écureuil.
La règle des prédateurs ne s'appliquera pas comme une cruauté savourée, pour se nourrir ils doivent tuer d'autres animaux.
Nous sourirons du trait d'esprit de l'auteur qui arrivera à nous lier ici la loi de la chaîne alimentaire animale et la courtoisie des gentlemen.
" Cher lapin, c'est avec la plus grande tristesse que je dois te manger..., "Oui, je te comprend parfaitement", je ne t'en veux pas. " .
Les illustrations de
Julia Woignier et l'application des
couleurs nous rappelleront la patte esthétiquement naïve et sylvestre des artistes illustrateurs belges tels que
Kitty Crowther.
Elles appliqueront à l'ordre des choses une tendresse ambiante, tandis que nous, lecteurs, cruels que sommes, nous rirons de ce petit théâtre de la vie ordinaire des animaux de la forêt. Oui, nous rirons. Pardonne nous lapin.
Le narrateur nous confiera le dilemme de Petit-Loup.
Si un renard ne pouvait se résoudre à résister aux courbes alléchantes d'un lapin
alors un loup et un écureuil...
Depuis l'histoire de " Marlaguette", nous savons qu'il est dur de faire changer un loup.
Tandis que Krok jouera de facéties pour les divertir, c'est " Petit-Loup" qui sera le personnage le plus tendre du duo exotique loup/écureuil et le plus affecté par la loi rigoureuse de la Nature.
Au fur et à mesure des années, les deux copains des bois vont se redécouvrir, changer, partager leurs expérience.
Nous penserons peut-être à un autre album, la " Promesse" de Jeanne Willis où un têtard et une chenille se promettent amitié éternelle et de ne jamais changer.
L'illustration de
Tony Ross adoptait un humour noir à portée des plus jeunes grâce à la dérision, un biais utile pour affronter la triste réalité.
Le ton choisi par Pittau sera nettement plus subtil.
Il ne sera nullement naïf car quand viendra l'hiver, même les petits devront s'y résoudre, la joie des terres enneigées cédera à la difficulté pour chacun de se nourrir quand tout sera recouvert de blanc.
Nous ne sentons pas d'instinct qui pousse Petit-Loup, juste les recommandations éducatives des parents qui le guident car sinon comment pourra t-il subvenir à ses propres besoins plus tard?
Francesco Pittau va tout de même imaginer l'impossible et privilégier la force des sentiments à l'attraction d'une nature sauvage profonde.
Nous attendrons de la petite histoire une troisième alternative possible.
Notre personnage Petit-Loup est attachant, nous rappelant les tourments d'un enfant qui doit lutter entre les règles raisonnables des adultes et l'insouciance des enfants.
Un suspens poignant pour le jeune lecteur s'installera, tandis que malgré tout nous profiterons du temps qui passe.
Contrairement à d'autres albums qui usent de la férocité des loups pour convaincre, Pittau laissera aux parents loups leur place de protecteurs rassurants et aimants, faisant leur devoir avec tact et patience.
Petit-Loup cédera t-il à sa nature ou finira t-il un jour par croquer son meilleur pote Kroc malgré lui?
C'est avec une émotion fine que nous aborderons le thème de grandir.
Est-ce facile de grandir lorsque le destin projette de faire de vous un grand "méchant" loup?
Un album étonnant, qui profitera d'un texte qui fera aimer les histoires.
On ne s'attendrait pas forcément à autant de profondeur avec cette première de couverture.