La connaissance au service du bien commun
Le titre à lui-seul me prédestinait à lire cette histoire. La
Noosphère, un thème passionnant rarement traité à la hauteur de son édifiante potentialité (que j'ai d'ailleurs pu évoquer dans le cycle Ascendance). Et cette illustration somptueuse alliant volutes de pensées et pastels oniriques, une véritable oeuvre d'art !
Autant dire que j'attendais de ce livre toutes les promesses suggérées par cette première de couverture enivrante.
Je vais me débarrasser des aspects qui ont fait naître une pointe de déception, comme ça après, on n'en parle plus.
Je m'attendais à trouver en
Noosphère une véritable oeuvre de science-fiction. Or, à mon sens, la SF n'en constitue qu'une petite partie, l'essentiel de l'intrigue obéissant davantage aux codes du thriller scientifique ou même géopolitique. Sur ce point-là, la description du livre est un chouilla trompeuse.
Aussi, j'ai trouvé la forme un peu scolaire. D'un bout à l'autre du livre, la répétition des mêmes schémas narratifs a rendu ma lecture un peu longue. le tout manque d'un soupçon de vocabulaire et de recherche linguistique pour que l'histoire déroule véritablement. Mais attention, le soin apporté à l'écriture n'en reste pas moins perceptible.
La
noosphère, qui aurait dû être l'élément central du roman, est à mon goût malheureusement survolée. Je suis donc resté sur ma faim en ce qui concerne ce registre SF que j'affectionne tant. J'aurais adoré pénétrer plus en profondeur les méandres de cette dimension intangible, et décortiquer ses mécanismes, ses origines. D'autant qu'
Audrey Pleynet dépeint cette dernière avec force originalité, parvenant à nous faire intégrer sa vision de la connaissance globale avec un naturel déconcertant. Ça tombe sous le sens, quoi. On se dit “Bah oui, évidemment que ça existe, où est-ce qu'on se branche ?” de plus, elle a su aborder ce thème pas évident sur un angle sensible, voire artistique, ce qui constitue selon moi une approche plutôt intelligente. Les descriptions qu'elle a choisi d'en faire sont belles, poétiques, et apportent même un certain relief à notre monde envahi par la matière.
L'idée est là, brillante, clairvoyante et originale, et il ne manque vraiment pas grand chose pour transformer l'essai.
L'intrigue principale, donc, est vraiment prenante, avec des oppositions liées à l'éthique, au progrès scientifique, aux ascendants économiques, politiques et, évidemment, à la notion du bien commun. Les différents groupes sont crédibles, les “méchants” ne sont pas lisses, mais sont eux aussi animés par des motivations valables – si ce n'est louables.
Aussi, l'auteure a fait l'effort de sortir du cliché des genres. C'est à dire qu'ici, c'est un personnage féminin qui va se charger de protéger un homme et sa précieuse anomalie. Merci aussi de ne pas laisser les foudres de l'amour s'abattre sur eux dès les prémices de leur rencontre. Non, leur relation se construit progressivement, ils s'apprivoisent, jusqu'à développer une complémentarité sans laquelle l'histoire n'aurait pas eu la même perspicacité. Un amour bien amené, tout sauf évident.
Enfin, l'on peut noter quelques passages inspirés, auxquels le livre entier pourrait bien se référer, et susceptibles de résonner dans de nombreux domaines de nos vies quotidiennes :
“Elle n'est pas comme un dictionnaire dans le ciel. Elle est information pure, certes, et somme d'expériences. Mais elle n'est pas somme de connaissances. le processus cognitif est encore à faire après avoir reçu la matière première de la
Noosphère. Une preuve est que les informations ne viennent pas dans une langue ou une autre. Chacun reçoit ou plutôt traduit les informations dans sa langue. Seules les expériences pures viennent. le symbole à utiliser, la langue si vous préférez, reste du domaine de l'individu.”
“Marx avait quelque part raison. Les moyens de production doivent appartenir aux travailleurs. C'est la seule façon d'être libre. Mais il oubliait qu'un des moyens de production, peut-être le plus important était l'esprit, l'intelligence, la connaissance. Maintenant, les personnes sont vraiment égales. Maintenant elles peuvent être libres.
– Grâce à la
Noosphère ?
– Oui. Aucun homme ne peut asservir un autre homme si les deux savent les mêmes choses. Il n'y a plus d'opium du peuple, que ce soit la religion ou la propagande politique. Il n'y a plus de spoliation de la vérité par un groupe sans scrupule. Il n'y a que l'égalité. Enfin l'égalité. Et le développement. L'ignorance est le terreau de la pauvreté.”
Merci pour cette histoire riche de sens.
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