Le Livre De Marco Polo

Et vous dis qu'en cette province, il est une coutume que je vais vous dire. C'est qu'ils ne tiennent pas à vilenie qu'un étranger ou un autre les déshonore avec leur femme ou leurs filles, ou leurs soeurs, ou aucune femme qu'ils ont en leur maison; mais ils trouvent très bien quand ils couchent avec elles, et ils disent qu'à cause de ça leurs dieux et leurs idoles leur veulent du bien et leur donnent des choses temporelles à foison. C'est pour cela qu'ils font si grand-largesse de leurs femmes aux étrangers et autres gens, comme je vais vous le dire. Car quand ils voient qu'un étranger veut se loger, chacun est désireux de le recevoir dans son hôtel. Et dès qu'il est logé, le maître de la maison sort aussitôt de son hôtel en commandant que la volonté de l'étranger soit faite complètement. Et quand il a dit et commandé cela, il s'en va à ses vignes ou à ses champs, et n'en revient pas avant que l'étranger s'en soit parti, lequel, parfois, demeure trois ou quatre jours dans la maison de ce malheureux, prenant son soulâs avec sa femme, ou sa fille ou sa soeur, ou avec telle qui lui donnera le meilleur déduit. Et tant qu'il demeure là, l'étranger pend à la fenêtre ou à la porte son chapeau ou quelque autre marque convenue, pour que le maître de maison sache qu'il est encore céans. Et tant qu'il verra la marque, il n'osera rentrer. Et ils ont cet usage dans tout le pays.