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Critique de coincescheznous


J'ai souvent entendu parler, ou souvent entendu cité PONTALIS en référence, sans ne jamais l'avoir vraiment approché. Pourtant, sur le papier, l'homme a tout pour m'attirer : philosophe, psychanalyste, écrivain… Mais voilà, il y a des auteurs que l'on approche tardivement, en temps et en heure.



Suite à une conversation lors d'un déjeuner familial, notamment avec ma soeur qui tentait de me faire pointer du doigt des commencements incessants dans ma vie, suivie par la suite d'une photo reçue sur mon smartphone avec la couverture du livre (on pourrait dire que ma soeur est têtue), j'ai décidé de lire ce fameux essai, en pensant trouver… Une description de l'amour des commencements.



En fait, il ne s'agit pas vraiment de cela, et je ne saurai même pas vraiment dire de quoi cet essai traite exactement, même s'il y a des passages diffus, éparpillés, que j'ai appréciés pour leur justesse.



L'amour des commencements est à la fois une forme d'autobiographie de Jean-Bertrand Pontalis qui a eu comme professeurs Sartre et Lacan (quand même les deux dans une même vie, mais quelle chance !), un récit de ces choses qui marquent durant l'enfance sans savoir encore que cela va laisser de trace, un ressenti sur ses premières approches de la maladie et de la mort, une description de sa plus grosse passion et chagrin qui s'en est suivi… avant que le soleil ne se remette à briller un matin. Un livre très étrange où la vie ne se présente effectivement que comme une succession de commencements divers et variés, certains très impliquants, d'autres non, sans pour autant qu'il y ait une continuité dans l'argumentation… On vient y picorer un peu ce qui retentit chez nous, sans vraiment comprendre au final le vrai message qui est inscrit dans cet essai, si tant est qu'il y en ait un, car après tout, pourquoi n'aurait-on pas le droit à un essai où les messages peuvent se lire différemment selon qui nous sommes ?



Un point quand même qu'il me semble avoir compris : l'importance – excessive, indéniable et indispendable – du langage, vu au travers de son regard de psychanalyste qui justement essaye de ne pas faire de la psychanalyse une toute-puissance (partie intéressante de l'essai d'ailleurs). Ce langage qui a la fois fige les visions de la réalité en réalités, mais qui est néanmoins indispensable pour nommer et dépasser des situations. Je ne sais pas encore quoi faire de cet apport mais j'ai compris qu'il y avait là une ambivalence existentielle à garder en tête.



Finalement plus qu'un résumé, je pense que cet essai peut davantage se transmettre en reprenant quelques citations de l'ouvrage, au risque bien évidemment de figer l'auteur dans sa pensée (qu'il me pardonne de là-haut):



Mais la psychanalyse m'assomme quand elle entre, sans y être invitée, en tout lieu, s'affirme comme interprétation de toutes les interprétations possibles. Je revendique pour tout un chacun non le refuge dans l'ininterprétable mais un territoire, aux frontières mouvantes, de l'ininterprété.
(L'amour des commencements, p.27, Folio)

[...] l'immobile a deux faces. Il y en a une qui rassure, comme le retour des saisons qui fait croire que le rythme de la vie humaine aussi échappe au temps qui passe, comme le café pris au comptoir avant d'aller travailler, comme le chien qui ne consent à dormir que sur ce coussin-là… Cette garantie de continuité m'est nécessaire. L'autre face, accablante, je la trouvais et je la trouve toujours quand, par exemple, au retour d'un voyage, le cendrier que j'ai oublié de vider avant le départ a gardé ses mégots, quand le manuscrit que j'ai cessé de lire, par fatigue ou ennui, est resté ouvert à la même page… Ah, ces restes de nos restes, cette perpétuation du déchet, cette retombée sans fin de ce qui fut vivant !
(L'amour des commencements, p.42, Folio)

[...] je n'ai jamais pu me faire à l'idée qu'on ne pense qu'avec sa tête !
(L'amour des commencements, p.57, Folio)

D'où nous vient l'amour des commencements sinon du commencement de l'amour ? de celui qui sera sans suite et peut-être par là sans fin.
(L'amour des commencements, p.70, Folio)

Je tiens pour suspecte une pensée qui, tout en s'en défendant, a réponse à tout et tient à l'écart sa propre incertitude.
(L'amour des commencements, p.101, Folio)

[...] je me représente [l'âme] comme une ellipse, peut-on imaginer une âme carrée, rectangulaire ?
(L'amour des commencements, p.103, Folio)

[...] vouloir se démarquer du troupeau, c'est encore subir la marque du berger.
(L'amour des commencements, p.142, Folio)

La conversation sans objet, quel luxe !
(L'amour des commencements, p.154, Folio)

Que ne perd-on pas quand le moment vient où on croit avoir acquis son identité, où on se félicite qu'elle ait cessé d'être flottante et de dériver au hasard des rencontres, au gré des jours et des nuits !
(L'amour des commencements, p.176, Folio)

Mais qu'est-ce qu'une vie si on ne se la raconte pas ? Et, nous le savons, pour une seule vie, il y a cent biographies possibles.
(L'amour des commencements, p.178, Folio)

[...] est venu un temps où, moins tourmenté de découvrir ce à quoi on tient vraiment, on se contente d'aimer ce qui vous tient : ceux auprès de qui on vit et qui paraissent trouver quelque plaisir à votre compagnie, le travail dont on ne se demande plus qu'elle est la raison d'être, l'assurance que chaque jour donne de quoi aimer.
(L'amour des commencements, p.183, Folio)

Ne plus rêver, c'est être à demi mort, c'est faire de la réalité sa seule loi.
(L'amour des commencements, p.207, Folio)

Et bien sur :

Tant qu'il y aura des livres, personne, jamais, n'aura le dernier mot.
(L'amour des commencements p.214, Folio)

Jo la Frite
Lien : http://coincescheznous.unblo..
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