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EAN : 9782911686337
123 pages
Maison des Ecrivains Etrangers et Traducteurs de Saint-Nazaire (08/09/2005)
5/5   1 notes
Résumé :
Traduits du roumain par Stefana et Ioan Pop-Curseu / Saint-Nazaire : Meet.
Le quatrième de couverture reprend le titre original: "Descoperirea ochiului". La version originale suit la traduction. À noter une préface signée de Patrick Deville, juin 2005.
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
La poésie de Ion Pop est traditionnelle et livresque. Cela peut paraître étonnant, car le poète est aussi un grand critique littéraire (auteur de nombreuses monographies sur Lucian Blaga, Ilarie Voronca, Gellu Naum ou Nichita Stanescu) spécialiste de l'avant-garde roumaine. On lui doit également des entretiens à l'attention des Roumains avec Francis Ponge, Roger Caillois, Roland Barthes, André Frénaud ou Paul Ricoeur.

La nature n'est cependant pas absente et :

« Ici, parmi les livres soigneusement rangés, –
oui, dira-t-on, c'était un type livresque,
quelqu'un murmure, quelqu'un pleure,
ma table est une citadelle aux ponts jetés
sur des fossés profonds où l'on inventera du sang.
La fenêtre est ouverte, elle voit tout et rien,
la pomme mûrit en silence, avancent
les mains, la mémoire, l'automne,
les feuilles tombent, les mots à imprimer
sont un peu amers comme les noyers de la vallée natale ».
(p.10)

Mais les « influences livresques » (p. 52-53) prédominent et Patrick Deville a raison de faire remarquer dans sa préface (juin 2005) que : « L'irruption de l'Histoire, brutale, dépose dans la rue une cervelle humaine [p. 33, le poème “Ici et maintenant” écrit le 22/12/1989]. C'est la fin de l'année 1989 et les troubles qui entourent la chute du Conducator roumain. de retour dans la pénombre de la bibliothèque, la musique de Mozart et de Bach [p.49], “dictateurs du chaos des cellules” tenteront à nouveau d'imposer leur géométrie aux viandes de Soutine ».

Une poésie assez sombre et sobre au final avec des « interférences des règnes », avec des fulgurances de couleurs : la fleur (blanche) de sureau, la pomme à la peau verte (cf. p.14), ce magasin de fruits et légumes, les eaux marines de la mémoire, les papillons (p. 66).

« Après une nouvelle lecture du poème “Plis” de Ion Barbu
j'ai enfin décidé
de tenter ma chance, moi aussi,
et de me géométriser.
J'ai cherché, n'est-ce pas
le triangle, le cercle, la sphère
ayant assez de toujours me regarder
sous les milliers de visages frêles,
multicolores, en désordre, apeurés ».
(p. 52)
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
FLEUR DE SUREAU

En parlant toujours de choses fondamentales
assourdi par le vacarme des essences,
j’allais oublier justement la fleur de sureau
qui m’envoie par la fenêtre ouverte,
généreuse, son humble parfum.
Et pourtant, c’est sur elle que je compte.
Quand ces pâles écritures deviendront
illisibles sur leur pierre,
quelque laborieux paléographe à venir,
pourra les lire sans peine, seulement en respirant.
Il les datera sans peine, guidé par leur parfum.
(p. 18)
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LA DÉCOUVERTE DE L'ŒIL

Dès que je l'ai dessiné, je me suis rendu compte
que la différence
entre le triangle et moi-même
est très grande.
Mais, quoi que dise le vieux maître,
en caressant sa moustache
de phoque géométrique
cette différence ne me trouble pas.
Il te faut quelquefois toute une vie
pour découvrir ton œil,
pour apprendre que
la Babylone que tu pleures
est bien la Babylone
que tu pleures.

(p. 22)
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UNE POMME

Ses pépins pareils à deux oreilles
avec l’ouïe ronde, grandie sous la peau verte
qui écoutent la pluie et le vent
et le temps.
Qu'y aurait-il dans l'esprit de la pomme ?
Elle nous regarde, peut-être avec humilité,
elle nous pense, peut-être,
avec un grand orgueil.

(p. 14)
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Brancusi a décidé

Comment cela est arrivé, je ne puis le savoir,
Brancusi m’est apparu et m’a dit
qu’il avait décidé d’intervenir
et de me ciseler.
Je te ferai comme Fondane, m’a-t-il dit –
il avait une crinière de cheveux flottants
sur son front trop ridé, mais moi,
je la lui ai effacée avec une gomme énorme –
il n’est resté de sa tête
qu’un ovale, l’Origine du Monde.
Je pense redessiner ta tête
et les yeux seront très vides, pour qu’on puisse y mettre
presque Tout. Et des mers, et des terres et des nuages.
D’autres
ne sont pas nécessaires. Puis, il s’est retiré.

Attention, Ion Pop, prends garde,
ce qui t’arrive maintenant n’est que la préparation, que l’attente polie du Maître.
Nombre de choses te quittent, tombent sous un ciseau invisible
de nouvelles eaux te lavent du vieux sang,
les fruits déjà mûrs tombent des fleurs qui viennent d’éclore,
la feuille de maintenant , la pierre d’aujourd’hui s’effritent,
au-dessus de spasmes et d’angoisses la lumière
essaie d’envelopper des visages blancs.
Tout ce qui pue en toi tout ce qui se gonfle
sera parfum et marbre.
Retiens cela, Ion Pop, maintenant et toujours –
c’est un grand, inespéré honneur
que Brancusi lui-même
ait décidé d’intervenir
et de te ciseler.

(p.42-43)
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EN PARLANT

En parlant de ma tête
toujours posée comme sur un plateau de Salomée,
toujours offerte à sa Majesté.
Ici, comme devant le mur,
en parlant de mon sang
sur le nouveau pont de la voie ferrée
qui se distingue –combien peu, hélas !–
de la rouge, brillante peinture,
des quelques balustrades en fer, sous la pluie.
Mais en me confessant à l'herbe,
en tombant à genoux, anachronique,
devant les ombres,
en gardant, anachronique,
dans le poème très moderne,
les toutes dernières étoiles.
J'ai vu les poubelles
et la rose qui respirait la puanteur
j'ai vu la différence spécifique
entre cailles et héros,
entre balle et chevrotine.
Un éloge au savon, au balai, à la gomme,
une louange à mes yeux, à la main hésitante,
à l'élégie en offensive.
(p. 9)
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