Les Lieux de Marguerite Duras

C'est la lecture de la récente publication de Michelle Porte "Lettres retrouvées" de Marguerite Duras commentées par la cinéaste qui m'a incitée à revoir son documentaire de 1976 "Les lieux de Marguerite Duras". Ce livre retranscrit les entretiens avec les photos des lieux évoqués. Il témoigne du lien privilégié qui unissait les deux femmes.
Dans un premier temps, elle parle de sa maison de Neauphle-le-Château dans laquelle il lui semble voir un foisonnement de femmes. Il faut dire que c'est là qu'elle a tourné plusieurs films, alors certaines femmes continuent à habiter ce lieu : Lol V. Stein, Anne-Marie Stretter, Isabelle Granger, Nathalie Granger...
Il faut dire que c'est la seule maison qu'elle a acheté et qu'elle est chargée de représentations symboliques multiples et ambivalentes. L'habiter est donc important pour Marguerite Duras en raison du rôle déterminant de son enfance en Indochine où sa mère était logée dans des maisons de poste. Cette maison de Neauphle-le-Château acheté en 1956 semble donc être une sorte de consolation, le lieu d'un investissement affectif et imaginaire.
Elle parle aussi de son appartement des Roches Noires à Trouville où elle a écrit "Le ravissement de Lol V. Stein", qui est devenu le lieu du livre. Elle a eu affaire à la mer très jeune dans sa vie d'où l'importance des lieux maritimes, de la plage, du sable dans ses textes.
Ces interviews de Michelle Porte sont précieuses parce que l'on rentre dans l'intimité de Marguerite Duras, elle se dévoile à travers ses lieux et c'est une belle façon de retrouver son oeuvre que personnellement j'apprécie beaucoup.


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Cet ouvrage est la version écrite de deux entretiens que Marguerite Duras et Michèle Porte ont réalisés ensemble pour deux émissions de télévision. Au sein de ces entretiens, on apprend plus à propos de Duras, par elle-même, car Porte ne dit presque rien, guide un peu seulement. le tout est accompagné de photographies des lieux qui sont discutés au sein des pages et du temps : elles accentuent le propos, il faut les apercevoir comme un parallèle intéressant. On découvre un peu mieux la maison de Neauphle, sa propre maison, son parc, les jardins, la forêt, l'eau… Il y a aussi Trouville, l'hôtel, la mer… Ce sont dans ces lieux que Duras fait tout, sa vie, ses livres, ses films. On retrouve toute l'âme qu'elle a inculqué dans son Oeuvre. Dans le premier entretien, réalisé à Neauphle, sur le tournage de Nathalie Granger, dans lequel il y a un enfermement qu'elle narre très bien à l'oral, très bien retranscrit. On entend même les enfants. Dans le second entretien, on parle de Lol, toujours elle. Elle est la figure de proue de la vie de Duras, elle est le livre le plus mystérieux qu'elle ait jamais écrit car elle-même ne figure toujours pas ce qu'il est. le Ravissement de Lol V. Stein et sa continuité, S. Tahla, tout est diffus. C'est à l'Hôtel des Roches Noires qu'elle a écrit ce livre, qu'elle a écrit et tourné La Femme du Gange, elle nous parle de tout ça, de la symbolique des mots, du silence, de la mort et de la mer. Lors de ces entretiens, il y a également mention de sa famille, complètement disloquée dans L'Amant, mais ici qui semble encore un petit peu unie, accompagnée de photographies des composants de la famille Donnadieu.

De bien beaux entretiens qui sont accompagnés de photographies, apportant un cachet nouveau aux anecdotes et histoires racontées. On parle de ses livres, de ses films, et d'elle, en fin de compte. C'est sous le signe de la localisation et du temps que l'on redécouvre Marguerite Duras. La proximité de l'auteure nous fait entrer dans une intimité touchante comme elle l'a assez rarement été. {17}
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D'abord, j'aimerais affirmer la supériorité du support filmique sur l'écrit (pour une fois !). En effet, l'entretien qui est retranscrit dans cet ouvrage a été filmé. Il est donc possible de se laisser envoûter par la diction et la voix de Duras en se procurant le DVD ! Les lieux de Duras c'est : l'appartement de la rue Saint Benoît dans le quartier de Saint-Germain-des-Prés, l'appartement des Roches Noires à Trouville et, surtout, sa demeure à Neauphle-le-Château. Dans « Nathalie Granger » (qu'elle écrit et réalise en 1972) cette grande maison est filmée en noire/blanc : le sol de dalles noires et blanches, les miroirs, le jardin et l'étang. C'est un lieu féminin pleinement investit par l'auteure, mystérieux comme elle. Michelle Porte qui guide l'interview la connaît bien et respecte les silences. C'est donc un moment fort, intime et envoûtant.