AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9791031205106
123 pages
Editions Ateliers Henry Dougier (25/08/2022)
3.81/5   8 notes
Résumé :
Mêlant récit romanesque et enquête historique, l'auteur raconte l'histoire d'un tableau célèbre.
L'inquiétante obscurité de ce tableau vous entraîne dans le monde des rêves éveillés et nocturnes de Henry Füssli, où se côtoient effroi et obsession dévorante. L'image d'Anna Landolt, la seule femme que l'artiste ait vraiment aimée, l'a poursuivi et hanté à tel point qu'il a réalisé au cours des années cinq versions de la même vision. Comme mû par une volonté d'e... >Voir plus
Que lire après Le fantôme d'une vie selon FüssliVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Henry Füssli n'a jamais été célèbre en France, voilà un doux euphémisme.
Mais il semblerait que les choses évoluent
Une exposition au Musée Jacquemart André, une publication dans la fabuleuse collection "le Roman d'un Chef d'oeuvre"

Il n'en fallait pas plus pour éveiller ma curiosité à la fois en tant que lecteur assidu de cette collection et amateur d'art.

On découvre dans ce livre celui que l'on appelle le précurseur du romantisme noir. Né en 1741, dans une famille d'artistes, d'un père peintre et historien, Johann Heinrich Füssli commence son entrée dans la vie active par une carrière ecclésiastique.
Il sera pasteur, et se dirigera vers la peinture que tardivement. C'est en se rendant à Londres et influencé par Sir Joshua Reynolds, président de la Royal Academy, qu'il se penche vers l'art.
Durant son voyage en Italie, qui dura 7 ans, il fut happé et fasciné par la manière de Michel-Ange : "Je la voyais apparaître petit à petit sur la toile vierge, j'étais devenu Michel-Ange exécutant sa Création d'Adam".
Puis à la fin des années 1770, il repart pour Londres où il s'installe.

Ses inspirations pour ses oeuvres proviennent de sources littéraires comme Shakespeare (Lady Macbeth somnambule, le Réveil de Titania, les 3 sorcières) ou Dante : "Cette même année, je fus à la fois admiré et censuré pour une peinture que j'avais faite d'après Dante, Conte Ugolino affamé avec ses quatre fils dans la tour, également connue sous le titre de la Tour de la faim (Torre della fame)." Mais aussi mythologiques : " Achille saisit l'ombre de Patrocle", "La mort de Didon", où "Tiresias prédit l'avenir à Ulysse"
Son imagination les revisite de façon surprenante. Son expression artistique évolue dans un langage chargé à la fois d'onirisme et de drame où sont présents le merveilleux et le fantastique.

Mais dans ce livre Fussli, qui nous revient tel Chateaubriand (les lecteurs comprendront cette allusion) pour nous parler de sa vie au travers de son oeuvre la plus connue "Le Cauchemar".

Pour cette toile point de référence mythologique, biblique, ou littéraire, mais une inspiration pour un amour impossible qui a tant tourmenté l'artiste, et c'est le moins que l'on puisse dire, car il en exécuta cinq versions différentes :

"C'est ainsi que commença la série de tableaux du Cauchemar. J'en ai exécuté cinq versions au cours de ma vie, et celle-ci fut la première. Je vous avoue là une vérité historique, oui, j'ai peint cinq versions d'Anna, environ une tous les huit ou dix ans. Certains vous diront que ces répliques proviennent d'effets de mode picturale, pour plaire au public… Mais la vraie raison est dans mon coeur. Personne ne peut comprendre mon obsession ni la cautionner. D'ailleurs, je n'ai jamais cherché à être compris par les gens. Je me moque bien de ce qu'ils pensent, et le coeur ne s'explique pas avec des mots."

L'accueil qui sera réservé au tableau explique aussi ce qui entourer à par la suite cet artiste :" le lendemain de l'exposition, les journaux vantaient les tableaux les plus marquants, et le Cauchemar en faisait partie. On pouvait lire : « une oeuvre dérangeante mais sublime », « une horreur délicieuse », « une scène à vous faire pâlir de peur », « une dormeuse sensuelle »… Cette peinture m'avait fait devenir célèbre, mais les gens ignoraient d'où l'inspiration m'était venue"

Et c'est là le coup de maître de l'auteur qui a cherché à connaître l'origine de cette obsession, de cette inspiration et en a découvert cette histoire d'amour avec une femme qui s'appelait Anna Landolt, rencontrée à Zürich à son retour d'Italie. le rapport entre cette femme et le Cauchemar a été clairement identifié Fussli avait fixé son portrait au verso du tableau :

"Si je vous dis que j'ai fixé par la suite le portrait réel d'Anna au dos même de cette peinture, penserez-vous que je suis fou ? Personne ne l'a su ni ne le sait encore. Je l'ai lentement déroulé et l'ai cloué au verso en prenant soin de le recouvrir d'une toile pour qu'il reste caché. Cette femme était à moi, et j'exprimai par cet acte un désir d'exorcisme ou de sortilège.Anna – joli palindrome, un prénom qui peut se lire dans les deux sens, tout comme cette toile qui la voit apparaître à la fois au recto et au verso"

C'est cet acte, qui inscrit la scène dans la vie intime et personnelle de Füssli, qui a poussé l'auteure à choisir la voix de l'artiste comme voix narratrice de son ouvrage. Lui seul pouvait nous expliquer sa folie, ses accès de folie, son obsession pour la seule femme qu'il avait réellement aimée. Et de lui donner la possibilité d'exprimer de façon aussi forte ses sentiments, la "destruction", "l'obsession" ou la passion inassouvie :
" Était-elle encore en vie ? Je n'en savais rien. Voilà peut-être en quoi consistait la beauté de cette histoire : la garder comme un objet d'art sans me préoccuper de la vraie Anna, ce qui impliquerait le risque d'être encore déçu et de retomber dans la réalité. Elle était maintenant une icône que mes yeux pouvaient contempler tous les jours."

Une très belle écriture au service d'une très belle découverte artistique.
"Pour ma part, j'aimais peindre l'obscurité et les ténèbres : c'était une manière d'exprimer la noirceur de l'âme et la terreur, ou le velours du désir érotique. Vous n'avez qu'à observer mes versions du Cauchemar, elles en sont toutes empreintes, et vous vous apercevez aussi que ces deux éléments ne sont pas contradictoires mais qu'ils cohabitent l'un avec l'autre ; tout dépend de ce que vous voulez y voir. J'avais poussé le clair-obscur à l'extrême dans ma quatrième version, mais Anna, elle, restait dans la lumière, elle était ma source de réconfort pernicieux vers laquelle je revenais sans cesse."

Et pour paraphraser l'objectif de cette collection
C'est un fragment de notre patrimoine universel, inconnu pour moi, que j'ai découvert, cette lecture a été une source inépuisable d'émerveillement et d'empathie.

Et encore une fois : « Face aux violences du monde, à nos peurs, à nos tentations de repli sur soi, la voix des artistes réconcilie, réveille et rassemble. Résonne alors en nous cette quête éperdue du beau. La beauté. Simplement. ». Que cette cette lecture fut belle....
Commenter  J’apprécie          42
Toujours aussi romanesque, les récits de cette collection.
Ici nous sommes happé par la folie d'un tableau. «  le cauchemar ». Réalisé après une rupture avec Anna, qui le laissa pour partir avec le beau-frère de son meilleur ami.
Füssli a peint plusieurs versions de son tableau. mais un seul sera toujours en lui. Hanté par une multitude de détails du tableau. Une femme allongée, la tête penchée dans le vide, un démon assis fixant de ses yeux ronds le spectateur, un seul démon ne suffit pas, alors sur le coté au pied de la belle endormie, gît une tête de cheval, toutefois aussi effrayante.
Ce fut également un moment de gloire à Londres pour la réalisation de ce chef-d'oeuvre. la reconnaissance et la possibilité d'ouvrir une galerie de dessin, de gravure et de peinture.
Toute une vie de rencontre avec des lettrés, des galeries, des remontrances et du rejet. il mourra vieux, sa femme brûlera tous les dessins erotiques de ses cartons. Lui veillera encore, tel un fantôme à la bonne organisation de la vie d'Anna.

Vu par ses contemporains, il sera le génie le plus original, son esprit est le vent de la tempête…
Un tableau magnifiquement analysé dans un contexte où la vie est d'un très grand classicisme

.
Commenter  J’apprécie          120
Ce livre est issu d'une collection que j'apprécie énormément, "Le roman d'un chef-d'oeuvre" chez les Ateliers Henry Dougier. le principe est juste génial. Chaque auteur raconte une histoire mêlant la réalité à la fiction avec comme postulat de départ un tableau d'un peintre célèbre. J'ai lu sur Klimt, Hopper, Géricault, et aujourd'hui j'ai découvert Füssli. le livre est déjà très beau. La toile est dessinée sur la couverture, est reprise en gros plan sur le rabat intérieur au début et à la fin du livre. Ainsi, on peut voir l'oeuvre en détail. 


J'ai donc découvert l'artiste qu'est Henry Füssli avec son oeuvre, "Le cauchemar". Lorsque je l'ai vue, j'ai tout de suite été intriguée par son dessin, par la noirceur de l'ensemble avec juste cette femme allongée, les bras et tête pendants. Est-elle endormie ou morte, la question se pose. Elle ressort de l'ensemble par la blancheur de sa robe, elle illumine la toile. Les autres personnages sont plutôt sombres avec ce démon assis sur la femme, son regard fixant le spectateur avec son air cynique, et avec le cheval en arrière plan avec un regard vers la belle tout aussi effrayant. Il faut apprendre à connaître le peintre pour comprendre cette oeuvre dont il a peint plusieurs versions. 

Henry Füssli est né en Suisse en 1741. Il deviendra tout d'abord pasteur et embrassera sa carrière artistique plus tardivement, en se rendant à Londres. Il vivra aussi en Italie où il découvrira Michel-Ange, pour finalement repartir à Londres où il s'installera définitivement. La femme de la toile "Le cauchemar" représente l'amour de sa vie dans la personne d'Anna, une jeune femme qu'il rencontrera jeune et dont il tombera fou amoureux. Malheureusement, le père de la jeune femme refusera leur union et Anna se mariera avec un autre, au grand désespoir de Füssli. Il restera obsédé toute sa vie par la jeune femme qu'il verra en hallucination. Il réalisera d'ailleurs son portrait qu'il attachera au dos de la toile du Cauchemar. Ce tableau remporte un succès inattendu, les critiques le trouvent sombre mais sublime. Il continuera sa vie d'artiste, inspiré par Shakespeare et Dante. Malgré son mariage avec Sophia, il restera hanté par Anna..

Nathalie Pourcel raconte très bien la vie de cet artiste que je ne connaissais pas vraiment. J'avais déjà vu cette toile mais je ne savais rien de plus. Et c'est ça que j'aime dans cette collection, c'est qu'on apprend plein de choses intéressantes avec un récit proche du romanesque. L'autrice s'est mise à la place de Füssli, est rentrée dans sa tête et nous dépeint très bien ce qu'il a dû vivre, les démons qu'il a dû affronter. Elle a fait le choix d'une narration à la première personne du singulier, que j'apprécie beaucoup. Ce "je" permet de ressentir encore plus les émotions de l'artiste, le temps d'une lecture, je me suis sentie à la place de cet homme torturé par un amour improbable. 

Nathalie Pourcel raconte avec beaucoup de simplicité, le vocabulaire est simple et facile d'accès. Tout le monde peut lire ce livre, et c'est tellement bien de rendre accessible l'art. L'autrice parle des autres oeuvres de Füssli et aussi de certains de ses collègues, j'aime beaucoup dans ce cas aller chercher sur internet l'image de la toile dépeinte, afin de mieux m'imprégner du moment. À la fin du livre, j'ai aimé découvrir des citations du peintre ou des avis d'autres personnes célèbres. Il y a aussi un repère chronologique qui permet d'avoir les principales dates de la vie du peintre. 

C'est un livre d'une centaine de pages qui se lit très bien et rapidement. Une fois commencé, je me suis vite retrouvé à vouloir connaître ce peintre et j'ai donc tourné les pages facilement. le style du récit et la plume très fluide de l'autrice facilite la lecture et la rend très addictive. 

Je me suis à nouveau régalée avec un livre de cette collection artistique. J'ai découvert un nouvel artiste, et j'ai très envie de continuer à le connaître grâce à d'autres livres sur lui. Il ne restera plus inconnu pour moi. Et c'est ce que j'aime aussi avec cette collection de livres, c'est qu'elle élargit notre culture, nous sort de nos voies, nous fait découvrir des oeuvres vers lesquelles nous ne serions peut-être pas allés. Je suis très contente d'avoir fait cette découverte. Et c'est pour cela que je vous recommande vivement ce livre sur Henry Füssli et le Cauchemar, et plus largement, la collection Roman d'un chef-d'oeuvre des Ateliers Henry Dougier.

Commenter  J’apprécie          10
Un récit écrit à la première personne, qui relate la vie artistique et amoureuse du peintre suisse émigré à Londres Heinrich Füssli, et la création de son célèbre ”Cauchemar”. Une vie romanesque et passionnée, teintée d'un mysticisme au bord de la folie, racontée avec allant et précision historique dans une jolie collection consacrée aux grandes oeuvres de l'histoire de l'art.
Un livre reçu dans le cadre de Masse Critique Babelio.
Commenter  J’apprécie          142
Johann Heinrich Füssli ou Henry Fuseli en sa terre d'adoption anglaise. Un penseur, théoricien, philologue et peintre d'origine suisse qui marqua son siècle entre néoclassicisme, gothique et romantisme. Un artiste plus remarquable par son esprit génial que par ses pinceaux. Shakespeare, Milton, Satan hantent ses tableaux, visions nocturnes inspirées par les rêves, les fantasmes, les fantômes et l'opium. Avec en point d'orgue, sa création la plus emblématique « le cauchemar ».
Il est grand temps de (re)découvrir un peu de la vie de ce poète. Mais le ton personnel des passages romancés peine à convaincre. L'aspect hybride de ce récit en « je », mêlant faits documentés et interprétations passionnelles, laisse un goût d'inachevé. Une fiction totalement assumée aurait été préférable. Il est également regrettable que toutes les oeuvres évoquées ne soient pas agrémentées d'illustrations.

Sous la forme d'un haïku :

Je t'ai dans la peau.
Âme soeur devenue fantôme.
Mon plus beau cauchemar.
Commenter  J’apprécie          30

Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Croyez-vous aux fantômes ? Moi, j’y crois. J’y crois depuis des années, depuis qu’Anna est entrée dans ma vie. Elle est arrivée sans prévenir, tel un chat noir au pas de velours, vous savez, ce fameux chat noir des superstitions populaires qui marque un mauvais présage. Mais Anna, elle, était un soleil qui illumina ma vie un court instant. Un soleil noir, si noir que je n’ai pas vu le fond de l’abîme dans lequel je suis tombé et d’où je ne suis pas encore remonté. J’ai eu beau m’occuper l’esprit et les mains, je suis toujours en proie à cette délicieuse obscurité qui, à la fois, me ravit et me bouleverse. J’ai plus de quatre-vingts ans et je n’ai pourtant pas trouvé la paix. J’ai passé ma vie dans le milieu artistique et intellectuel de Londres, où je reste le « Suisse fou » à l’accent germanique, l’excentrique qui osait prendre des risques picturaux et ne montrait aucune honte à dire à ses collègues artistes le fond de sa pensée.

(INCIPIT)
Commenter  J’apprécie          20
Quand on parle une langue étrangère, on devient quelqu’un d’autre ; on se glisse dans la peau d’un personnage dans lequel on se reconnaît, un personnage parfois plus proche de l’individu que l’on est réellement que de celui qu’on est en apparence.
Commenter  J’apprécie          30
La peinture est un langage visuel, fait de formes et de couleurs qui s'animent lorsqu'on y croit.
Commenter  J’apprécie          30

autres livres classés : rêvesVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus

Lecteurs (25) Voir plus



Quiz Voir plus

Les écrivains et le suicide

En 1941, cette immense écrivaine, pensant devenir folle, va se jeter dans une rivière les poches pleine de pierres. Avant de mourir, elle écrit à son mari une lettre où elle dit prendre la meilleure décision qui soit.

Virginia Woolf
Marguerite Duras
Sylvia Plath
Victoria Ocampo

8 questions
1710 lecteurs ont répondu
Thèmes : suicide , biographie , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..