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EAN : 9782213699134
144 pages
Fayard/Pauvert (05/09/2018)
3.66/5   146 notes
Résumé :
Dans une maternité, une femme épuisée, sous perfusion. Elle vient d’accoucher d’une fille, Adèle, et contemple le berceau, entre amour, colère et désespoir. Quelque chose la terrifie au point de la tenir éveillée, de s’interdire tout repos : la loi de la reproduction. De génération en génération, les femmes de sa lignée transportent la blessure de leur condition dans une chaîne désolidarisée, sans merci, où chacune paye l’ardoise de la précédente. Elle le sait, elle... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (39) Voir plus Ajouter une critique
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Au rayon nouveautés de ma bibliothèque, ce petit livre orange qui me faisait de l'oeil, un résumé aguicheur, allez zou, on embarque. Si les premières pages étaient plutôt bien parties, j'ai néanmoins poursuivi avec un sentiment de lourdeur qui n'a fait que de s'amplifier.

Roman aux allures autobiographiques, Maria Pourchet sent le besoin de raviver son enfance, l'histoire de la Mère alors qu'elle s'apprête à donner la vie à une fille, Adèle. Pour casser le cercle vicieux des femmes de sa famille, pour éviter le poids du fardeau généalogique sur sa fille, elle exorcise les démons de sa vie. Misère, que ce fut éprouvant et lourd! Un récit où j'ai dû m'accrocher tant il est acerbe, cérébral, pas toujours très clair, des mots qui font corps avec des maux pas très clairs non plus. Bref, une plaidoirie acerbe et méprisante sur sa mère, sur la femme en général, un ton accusateur tout le long, une plainte qui semble sans cesse s'excuser pour la petite Adèle.
Je termine ce roman avec un sacré mal de tête, pas pour moi ce genre de littérature. Next.
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Marie, 35 ans, vient juste d'accoucher d'une petite Adèle, et déjà elle la met en garde contre la malédiction qui semble frapper les femmes de sa lignée, toutes prénommées Marie et toutes rendues hargneuses à force de frustration. Et Marie de raconter son histoire, et notamment sa mère, qui l'a élevée à coups de remarques cinglantes : "Tu te crois maligne ?" ; " Ca t'apprendra !" ; "Tu la vois celle-là ?" ; "Qu'est ce que tu crois ?". Une mère qui oubliait de venir la rechercher, qui lui interdisait les flans colorés, les Barbies, les jeans, et qui passait pour une folle auprès des autres collégiens, mais qui l'emmenait au théâtre et lui faisait écouter du classique. Comment se remet-on de ça ? Marie se réfugiait dans la lecture et l'écriture, et désormais écrivain et mère, elle annonce : "Je suis une connasse occupée à tuer sa mère dans un livre." Ouch.

Donc, ça cogne fort, mais tout en délicatesse. Comme avec "Feu", j'ai été saisie à la gorge et aux tripes par le style de Maria Pourchet, ses phrases courtes truffées de bribes de conversation. C'est un long monologue d'une densité rare -il m'a fallu 4 jours pour venir à bout de ces 120 petites pages ciselées au burin, qui visent juste et font mal à chaque fois. Difficile, en effet, d'éviter ces mots malveillants qu'on ne voit pas venir, et de ne pas compatir à la violence (verbale) subie par Marie, de ne pas s'émouvoir de ses efforts dérisoires pour résister, exister, tenter d'être heureuse quand même.
Il est donc question de maltraitance entre femmes, que ce soit dans le cadre familial, professionnel -et même obstétrical ; la sororité est ici un concept inexistant. J'ai aimé la façon dont l'auteur exploite cette thématique inhabituelle, qui détonne dans le contexte féministe actuel. Mais Maria Pourchet aborde aussi la notion de transfuge de classe, qui torture sa narratrice quand elle s'adresse aux générations de femmes qui l'ont précédée dans sa famille : "A mesure que je parcours le vocabulaire émacié de votre langue, l'étendue de votre souffrance ne m'apparaît plus, tant elle est vaste. J'ai honte. Je voudrais vous épargner ce livre de petite conne bien lettrée, bien nourrie. Je ne peux plus." En cela, elle m'a fait penser à l'Annie Erneaux de "La place".

Pas franchement le genre de livre à emporter à la plage, donc, tant c'est un concentré d'amour-haine, de l'extrait de douleur. Mais surtout, il est traversé par une rage de survivre, de stopper la malédiction, qui emporte tout sur son passage, et ça, c'est incroyablement fort. La dernière Marie est une battante, alors on se lève et on applaudit.
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Elle vient d'accoucher, elle a mal, sa vie a pris soudain un virage en épingle à cheveux, elle n'a plus aucun repère. Tout est bouleversé par ce bébé qui hurle jour et nuit. La fatigue la terrasse, la douleur la ronge, elle a besoin de paroles douces, réconfortantes, d'entendre qu'elle y arrivera elle aussi, qu'il n'y a pas de raison. Infirmières et aides-soignantes entrent et sortent de sa chambre. Elle n'allaite pas ? Elle est sûre ? Elle ne veut pas essayer ? C'est pourtant tellement bon pour l'enfant ! Pourquoi n'a-t-elle pas de visites ? Elle a des amis, de la famille ? Est-ce qu'elle pense pouvoir tenir le coup ?
La narratrice n'a plus que l'écriture pour dire ce sentiment profond de solitude, d'abandon, cette absence de compassion, d'empathie entre femmes, entre celles qui auraient dû se serrer les coudes, s'entraider, se rassurer. Mais non, rien de tout cela. Au contraire.
Elle écrit pour prévenir sa fille, Adèle, pour la protéger de ce que la vie lui réserve. Pour la mettre en garde contre « la haine que les femmes vouent à leur genre. » Peut-être Adèle sera-t-elle ainsi mieux armée pour affronter le monde...
Il faut qu'elle sache, pense-t-elle, ce que les femmes sont capables de faire aux femmes : « Elles sont méchantes avec toutes les excuses de la Terre. Tu les entendras répéter les mêmes sentences, s'adressant à la défaite les unes après les autres, sans merci, sans relâche. »
Ici, ce sont les femmes de l'hôpital - même si la narratrice trouve tout de même quelque réconfort auprès de certaines - mais les plus dangereuses, ce sont celles de la famille, les mères, les grands-mères, les tantes.
« Regarde où tu mets les pieds, Ne réclame pas, Ne te fais pas remarquer, Tu la vois celle-là ?, Tu l'as pas volée, Ça t'apprendra… Qu'est-ce que tu crois ? » Ces phrases que sa mémoire n'a pas oubliées ont accompagné l'enfance de la narratrice. « Je suis depuis trop longtemps déjà la somme de leurs phrases» regrette amèrement celle qui se souvient encore des vêtements démodés, des moqueries de ses camarades, des garçons qu'il ne fallait pas fréquenter, des ami(e)s manqué(e)s, de l'adolescence gâchée.
Et depuis qu'Adèle est née, la jeune mère sait une chose : sa fille n'entendra pas ces mots, elle ne sera pas l'héritière de cette tradition violente et destructrice qui se transmet de génération en génération dans sa famille.
Ce texte, qu'écrit la narratrice, cette longue lettre qu'elle adresse à sa fille, est le rempart qui la protégera. Non, Adèle n'aura pas cette enfance ravagée par une mère froide, d'une exigence, certes louable sur certains aspects, mais dont on ne retient que la quasi-inhumanité.
Non, elle ne fera pas partie des pauvres femmes qui « sont penchées sur les éviers, la terre, les bites, les bassines, les mômes, les poules. »
« Une femme penchée sur un cahier, c'est un homme. C'est un homme et personne ne l'emmerde. Ainsi, depuis trop longtemps pour pouvoir désormais en guérir, je conçois ma vie dans une ahurissante limite qui, presque, m'interdit d'habiter ma propre chair. Mais toi, Adèle, mon enfant de la fin de l'hiver, tu sauras : une femme penchée sur son art, c'est naturel. » Elle ne sera pas soumise aux hommes, elle ne paiera pas pour les autres, elle ne vivra pas avec un sentiment de culpabilité permanent et un sens aigu du dévouement.
Comment ne pas transmettre ce que l'on a reçu ? Comment empêcher un héritage que l'on juge malsain, nuisible ? Comment ne pas reproduire, perpétuer ce que l'on hait? A-t-on cette liberté, ce choix ?
Ce texte puissant, incisif, tendu est un véritable cri du coeur : les mots sont crus, directs, violents. Ils dénoncent ce qu'au nom de la tradition, plus ou moins consciemment, les femmes subissent et font subir à leur tour à leurs filles - pensant même agir pour leur bien - dans un cercle horriblement vicieux. Or, la narratrice veut couper court à cela. Elle détruira, par les mots, cette chaîne infernale et fera don à sa fille d'un immense cadeau : la liberté.
Je viens de découvrir un grand auteur dont le propos très engagé, sans demi-mesure, servi par une écriture vive et nerveuse m'a profondément touchée.
Un indispensable !
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Un récit qui va à l'encontre des images d'Epinal sur l'émerveillement de la maternité.
Un récit choc, qui explore le choc de la rencontre entre la narratrice, Maria, et sa fille Adèle dont elle vient juste d'accoucher, un choc qui fait apparaitre non pas le bonheur béat mais la peur de reproduire un schéma de violence qui se transmet via la lignée maternelle.
Pour Maria, c'est la confrontation avec le non amour maternel de sa propre mère, la prise de conscience douloureuse de cette violence (car on peut parler de violence dans cette façon de ne pas aimer, de rabaisser, de railler... ) qu'elle a subie et dont elle pâtit encore par des séquelles psychologiques qui n'attendaient que ce choc hormonal pour tout bousculer.
Revivre cette relation, se la raconter et la raconter à sa fille c'est aussi pour elle une tentative de mieux comprendre, de briser là la malédiction et de se donner une chance d'accueillir ce nouveau maillon à la longue chaine des femmes de la famille dans une atmosphère où l'amour prend plus de place.

"Adèle, ne participe pas à ta propre oppression. Je ne t'apprendrai rien de plus entier. Et si un jour, l'oppression c'est moi, va-t'en. Je suis restée moi trop longtemps auprès des femmes faibles. Il me reste quoi. Un petit livre à leur envoyer à la gueule, au temps où la littérature n'a plus d'estomac."

Un livre courageux, qui ose parler du mal que se font les femmes entre elles, reproduisant inlassablement un schéma inscrit dans une sorte de patrimoine qui se trimbale de génération en génération. Une façon de briser un tabou autant que d'inverser la tendance dans sa propre lignée.
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Je referme ce livre un peu sonnée. Comme si j'avais reçu un uppercut. Si ce récit est autobiographique, j'aimerais bien que Maria Pourchet me contacte : nous avons vraisemblablement la même mère.
Difficile de s'épanouir quand on est une femme, née d'une autre femme qui ne voulait pas faire partie de cette condition. Une mère pleine de menaces : « T'as pas intérêt » et la suite fait partie des plaisirs, « T'aurais pu faire mieux », et autres « Tu me diras merci » ; qui regrette amèrement de ne pas avoir eu un fils pour briser le lien de la déception.
Certains passages m'ont coupé le souffle : trop proches de mon vécu ; je me suis sentie étouffer. Maria Pourchet a su mettre les mots sur certaines des douleurs que je traîne. Je la plains : « la honte d'être soi, par ma mère », je ne sais que trop ce que cela fait.
L'écriture haletante met le lecteur en apnée. Odeurs médicamenteuses, suintements des sabots : l'environnement d'Adèle, « nouvelle »né est palpable. Sa mère lui décrit son enfance de fille de lignée de femmes revêches en guise de discours de bienvenue.

Dieu merci : j'ai eu un fils.
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critiques presse (2)
Liberation
22 octobre 2018
Ce livre saisissant, intime et universel, signe une conversion. Et une triple naissance : d’une enfant, de sa mère, et d’une affranchie. Adèle, regarde où tu mets les pieds et casse la danse, nous donne-t-elle pour tout viatique. Et la puissance des mots.
Lire la critique sur le site : Liberation
LeMonde
31 août 2018
C’est un livre sauvage, au tempo tenace, bien décidé, et ce littéralement, à en découdre. A rompre un fil dont il restitue, implacablement mais sans aigreur, toute la tension, porté par une écriture elle-même en tension, à la fois blessée et coriace, crue et sagace, qui laisse béer les plaies pour que brille, enfin affranchi, un sang nouveau.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (34) Voir plus Ajouter une citation
Être mère, je l’apprendrai avec les semaines, c’est trouver des endroits sur Terre, des coins dans les maisons et pouvoir en puissance aller très loin. Je chercherai un lieu frais pour veiller ton sommeil en été. Un lieu pour te regarder marcher. Je chercherai encore un lieu sûr pour te laisser, quand il s’agira pour moi de disparaître ou de guérir. Je chercherai les lieux sans bruit pour te parler, nous cacher.
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Des filles qui montrent leurs genoux, elle dit qu’elle sont vulgaires, nous sommes en 1996. Des jolies, des soignées, qu’elles singent leur mère. Le féminin est condamné. Une porte après l’autre. Je ne sais plus par où passer. Tout est interdit, tout est porno. Elle m’arrache des mains le Journal d’une femme de chambre, sur la liste des lectures du collège, porno. Elle éteint la radio, porno. Des filles qui s’épilent les mollets elle dit aguicheuses et les bronzées sont des folles.
Moi je te protège. Tu me diras merci.
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Je crois, j’ignore où je l’ai pris, qu’une condition élève à jamais : écrire. Les pauvres femmes sont penchées sur les éviers, la terre, les bites, les bassines, les mômes, les poules. Une femme penchée sur un cahier, c’est un homme. C’est un homme et personne ne l’emmerde. Ainsi, depuis trop longtemps pour pouvoir désormais en guérir, je conçois ma vie dans une ahurissante limite qui, presque, m’interdit d’habiter ma propre chair. Mais toi, Adèle, mon enfant de la fin de l’hiver, tu sauras : une femme penchée sur son art, c’est naturel.
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Ma mère vient de raccrocher, je l'ai appelée avant tout le monde sans quoi ça me retombait dessus. J'ai pas eu de nouvelles. Je suis qui ? Une étrangère ? Tu parles, des nouvelles, elle pourrait tenir deux ans sans en prendre. Personne ne t'oublie comme elle, ne t'obsède comme elle. Elle ne viendra pas à la maternité, elle ne veut pas. La route, la météo, les autres, les cochonneries qui traînent à l'hôpital et surtout la vérité : tu la vieillis, elle voudra t'ignorer.

Je lui raconte l'accouchement. Raconter c'est toute ma vie, mais là je n'en rajoute pas. Un malaise, un déclenchement, dix heures, un échec, rebelote, encore huit heures, la douleur, une hémorragie, la syncope mais enfin tu es là. Immobile et loin au téléphone, les mots depuis toujours agissant à sa place, elle a dit :

J'en étais sûre. Tu as raté ça. Tu n'avais pas préparé ?
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Adèle, ne participe pas à ta propre oppression. Je ne t'apprendrai rien de plus entier. Et si un jour, l'oppression c'est moi, va-t'en. Je suis restée moi trop longtemps auprès des femmes faibles. Il me reste quoi. Un petit livre à leur envoyer à la gueule, au temps où la littérature n'a plus d'estomac.
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Videos de Maria Pourchet (35) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Maria Pourchet
Maria Pourchet vous présente son ouvrage "Western" aux éditions Stock. Entretien avec Sylvie Hazebroucq.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2885309/maria-pourchet-western
Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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