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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Mesdames et messieurs, chapeaux bas devant un monument. Il y eut un avant et un après ‘Gaspard des montagnes'. Avant, la littérature française était essentiellement une affaire parisienne. Les salons, les libraires, les éditeurs, les jeunes écrivains ténébreux avec une mèche dans les yeux, les vieilles gloires aux ventres rebondies et à l'ironie mordante, les cocottes et les courtisanes, tout cela on ne le trouvait qu'à Paris. Pour être publié, on venait à Paris. Les petits provinciaux qui avaient le culot de prétendre écrire depuis leur hameau de Lyon ou Bergères-les-Vertus, au mieux, ils amusaient. Puis, depuis Ambert (oui, là où on fait la fourme) un dénommé Henri Pourrat publia ‘Gaspard des montagnes', et rafla des prix par douzaines.

Très novatrice, l'oeuvre se place au coeur de la paysannerie auvergnate du début du XIXème siècle. Les Granges, une famille de paysans en cours d'embourgeoisement, reçoivent des nouvelles bizarres de leur oncle installé aux Antilles. Parallèlement, on constate d'étranges allées et venues de particuliers peu recommandables un peu partout dans la région. Un soir, les parents sont obligés de laisser seule à la maison leur fille ainée, Anne-Marie. Seule dans la grande maison vide, la jeune fille n'est guère rassurée. Elle finit par aller se coucher, mais ne trouve pas le sommeil. Au beau milieu de la nuit, un craquement, des frôlements. de sous un lit où il était caché, un homme sort…

L'histoire, qui s'étale sur une décennie environ, retrace la lutte de la famille Grange contre une alliance de grand bourgeois et de petits voyous décidés à les dépouiller. Pour les assister, ils font appel à leur cousin Gaspard de Surmontagne, dit Gaspard des montagnes. Bien bâti, courageux, plein de ressources, il prend les choses en main… Mais de façon très intéressante, le livre adopte peu son point de vue, mais en majorité celui d'Anne-Marie. Depuis sa nuit terrible, elle vit dans la peur. Et elle ne sait même pas ce qui se passe. Tout ce qu'elle sait, c'est que de temps en temps Gaspard prend quelques amis aussi solides que lui, qu'ils disparaissent des jours entiers dans la montagne, et reviennent harassés et couverts de plaies et de bosses…

Gaspard, on le suit essentiellement quand il est avec Anne-Marie, ou qu'il pense à Anne-Marie. Mais de toute façon, les guerres napoléoniennes font rage. Conscrits, lui et ses camarades partent pour l'armée, laissant là la terre qui les a vu naitre, leurs belles amies, et les malheurs des Granges… Ils n'en reviendront que bien plus tard (en années et en chapitres). Sans perte, par extraordinaire, mais non sans casse en eux-mêmes. Et quant à ce qu'ils retrouvent… On part se battre pendant des années, quand on revient, c'est pour trouver ses parents au cimetière, le toit de sa maison effondré, et sa fiancée mariée à un autre. Mais ce n'est rien en comparaison de ce qui entre temps est arrivé aux Granges…

L'oeuvre est une fabuleuse et incroyable plongée dans la vie paysanne du XIXème siècle. En la lisant, vous découvrirez comment ont vécu vos ancêtres, ce qu'ils mangeaient, comment ils travaillaient, mais aussi ce qu'ils pensaient et ce qui les inquiétait. La fidélité historique est incroyable – à tel point que beaucoup de mots ne nous sont plus intelligibles, soit qu'un autre les ait remplacés, soit que ce qu'ils désignaient (parmi les objets de la vie quotidienne notamment) ait disparu. C'est une peinture rigoureuse, sans parti pris ou passéisme.

Elle est particulièrement intéressante pour la condition féminine, à travers la pauvre Anne-Marie. On découvre les multiples responsabilités d'une maitresse de domaine (le maitre gère tous les biens en dehors des murs ; son épouse, ou sa fille s'il est veuf, en les murs) ; son exposition permanente au qu'en-dira-t-on, ses moindres faites et gestes étant scrutés par les commères du bourg ; et le peu de pouvoir et de considération qu'elle reçoit en échange : en ce qui concerne le mariage ‘'une fille consent en disant non'', estime son père.

Un livre magistral, fruit d'un gigantesque travail, qui mérite de ne pas sombrer dans l'oubli.
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Il s'agit d'un "grand" livre: une oeuvre majeure d'Henri Pourrat. Loin d'être une bluette inscrite opportunément dans un terroir régional, Gaspard des Montagnes est un livre doté à la fois d'une intrigue très forte, qui nous tiendra en haleine jusqu'aux dernières pages, et effectivement d'un ancrage régional, au sud du pays d'Ambert, à la limite du Puy de Dôme et de la Haute Loire, et qui a donné à l'auteur l'occasion d'exprimer tout son talent d'écrivain. Son vocabulaire, ses formules, ses descriptions des choses, des situations, de la nature et des gens, sont d'une richesse inouïe - à tel point que parfois le lecteur aura un peu de mal à comprendre et devra au minimum, reprendre sa lecture -. Ce pavé de plus de 700 pages (écrites petit) est la somme de 4 tomes. La seule possibilité est de tout lire, dans l'ordre. Et alors, quel plaisir, et ceci malgré un fond finalement très sombre. A noter que si Gaspard est un vrai héros (qui sait tout faire, qui voit clair en tout, à qui tout réussit,.....), le personnage principal est Anne-Marie Grange, fille mariée trop vite par un père trop pressé et intéressé. De ce mariage suivra une série de drames: il est impossible d'en parler sans les dévoiler. Il faut donc, tout simplement, conseiller cette lecture, qui sera, pour celui qui s'y consacrera - avec un certain effort, et pourquoi pas ? - l'occasion de parcourir une histoire formidable, de se trouver immergé dans l'Auvergne du début du XIX° siècle, décrite avec un réalisme prodigieux - , et de redécouvrir cet auteur exceptionnel.
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En 1965, Claude Santelli (un des grands créateurs de la télévision, et une des icônes de la jeunesse des années 60, grâce au « Petit Théâtre de la jeunesse ») adaptait et produisait un chef-d'oeuvre du petit écran : « Gaspard des montagnes », réalisé par Jean-Pierre Decourt, avec dans les rôles principaux Bernard Noël, Francine Bergé et Jean Topart. le roman original qui servait de base à ce merveilleux téléfilm était signé Henri Pourrat.
Avant de commencer la chronique, il faut vous prévenir, aimables lecteurs et délicieuses lectrices, que ce livre, « Gaspard des montagnes », est une sorte d'ovni de la littérature, difficilement classable dans une catégorie, puisque, d'une certaine façon, il procède un peu de toutes.
Quelques mots sur Henri Pourrat, parce que, comme on dit dans une entreprise qui est au parfum, « il le vaut bien ». Henri Pourrat (1887-1959) est un des grands noms de la littérature auvergnate, avec Alexandre Vialatte, et quelques autres, dont Jean Anglade. Inlassable collecteur de contes, légendes, anecdotes concernant l'histoire et le folklore de son pays, il est l'auteur d'une oeuvre immense : contes (réunis en treize volumes sous le titre « Trésors des contes ») romans (dont « Vent de mars » - prix Goncourt 1941), recueils de contes et légendes, essais sur sa région, et une imposante correspondance (1900 correspondants, 20000 lettres reçues et autant envoyées) …
« Gaspard des montagnes » dont le titre complet est « Les Vaillances, Farces et Aventures de Gaspard des montagnes » est paru en quatre épisodes en 1922, 1925, 1930 et 1931.
L'appellation générale est « roman » et personne ne niera le caractère hautement romanesque de cette histoire : romanesque, romantique, réaliste, historique, épique, picaresque, comique, tragique, poétique… L'originalité ne tient pas seulement à la multiplicité des genres, mais également à la construction singulière du roman : les quatre épisodes recouvrent chacun sept veillées, elles-mêmes composées de six pauses chacune. L'histoire centrale, celle d'Anne-Marie et de Gaspard est constamment entrelacée avec la relation de contes et légendes en rapport plus ou moins direct avec l'action, ce qui tend à prouver le grand art de l'auteur, ce don de mêler sans effort, et même avec un grand bonheur, le réel et l'imaginaire.
Nous sommes au début du XIXème siècle, à l'époque napoléonienne et aux premiers temps de la Restauration (il s'agit donc aussi d'un roman historique) dans l'Auvergne profonde (région de Doranges, pas très éloignée d'Ambert et Issoire, les cités arvernes victimes des « Copains » de Jules Romains).
Anne-Marie Grange est un soir agressée par un inconnu à qui, en se défendant, elle sectionne deux doigts. le roman tout entier tournera autour de la vengeance de cet inconnu, et de la résistance acharnée de Anne-Marie et de son cousin, le valeureux Gaspard.
Parce qu'il décrit très finement le décor, le folklore, la mentalité des habitants, les coutumes locales et tout le légendaire s'y rapportant, on a très vite catalogué Henri Pourrat parmi les écrivains régionalistes. C'est vérité tant son amour pour sa terre natale affleure dans cette reconstitution multiple (sensuelle autant qu'intellectuelle) mais ce serait trahir son oeuvre que s'arrêter à cet aspect des choses : nous avons vu que ce roman correspondait à plusieurs genres : il faut ajouter que, par les valeurs qu'il véhicule, il tend à prendre une valeur universelle, dans sa défense du Bien contre le mal, et dans la primauté de l'amour sur la haine.
« Gaspard des montagnes » se lit comme un roman-feuilleton : ardente et joyeuse chronique paysanne, c'est une belle aventure pétrie de vaillance doublée d'une belle histoire d'amour.
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voilà un livre que j'ai longtemps cherché adolescente après avoir lu dans un livre de collège un extrait (l'épisode de la main coupée) et le résumé de ce livre
une histoire tragique, machiavélique, plus qu'un roman de terroir une épopée, de spersonnages qui se débattent pour échapper à une fatalité et un avenir sombre et malfaisant
les descriptions des paysages sont magnifiques on sent l'amour qui lit l'auteur à sa terre d'Auvergne
je retiens encore une scène dans les marais magistrale
un classique maintenant.
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Une historienne auvergnate m'a offert « Gaspard des montagnes » de Henri Pourrat l'été dernier, à Ambert, en me dressant le portrait d'une époque, de personnages, de moeurs, d'un mobilier ancrés dans la mémoire d'un pays, l'Auvergne. Ce que j'ai d'abord découvert, c'est une langue, une passion des mots et de la nature où le vent charrie les images et vous permet de découvrir un monde « amèrement vert », d'odeurs, de prés retournés, de nappes de brouillard et de cris d'oiseaux.
Ce qui m'a le plus surprise c'est le goût et l'habileté de l'auteur pour dresser des ambiances effrayantes parmi ces forêts de sapins obscurs. Il n'a rien à envier à un Stephen King… Au-delà de son talent pour le mystère, c'est toute une époque qui revit, dont on découvre souvent les aspects, les outils, les métiers et les mots. Une époque où la religion serre comme un corset les moeurs, notamment les heures des femmes (qui a un moment de libre égrène son chapelet).
Et surtout, traversant tout l'ouvrage comme des éclats de lumière, il y a cet humour caustique vis-à-vis de nombreux personnages, un peu à la Brassens, qui fait rire mais toujours bienveillant. On sent beaucoup d'observation et de finesse dans le tableau que l'auteur dresse.
Enfin, l'espace, le vent et la poésie traversent tout l'ouvrage et ce qui se dégage, au-delà du drame de l'histoire ce sont une vitalité et une joie débordante incarnées par Gaspard que l'on a tellement envie de rencontrer.
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Une intrigue haletante des personnages authentiques et des décors à couper le souffle : lecture recommandée
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Le livre sur l' Auvergne pour ceux qui aime ses puys ,ses landes ,ses lacs ,ses forêts profondes de sapins et les gens que raconte si bien Henri Pourrat..
Des histoires de galipotes, de fades et tout un folklore disparu , des vieux contes et des veillées de nos campagnes.
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