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Critique de RChris


Cet ouvrage illustré à vocation autobiographique est la réédition augmentée des conversations avec Dominique Petitfaux de 1991 qui est animé par “le désir d'être utile” à la connaissance de l'artiste et de l'homme.
Ce dernier nous dit qu'il a été libre de mener ses interviews, Hugo Pratt n'imposant que le titre qui ne se comprend que le livre lu.

Ses voyages et ses aventures ont forgé la personnalité originale de Pratt. *
Il dispose également d'une culture livresque riche, qui lui fait dire à la fin de sa vie : “J'habite dans une bibliothèque” et “35 000 livres en font le principal obstacle à mon déménagement.”

Tout du long du récit de sa vie, nous nous remémorons les personnages qu'il a rencontrés et qu'il nous présente dans ses bandes dessinées.

Les femmes sont omniprésentes : Clara, Erika, Marizka, Leonora, Marie-France, Gucky, Anne, Gisela, Patricia… belles, aventureuses, dangereuses…

S'agissant d'entretiens, j'ai choisi de faire parler Pratt ici (et dans les trois citations) : “Dans ma vie, j'aurais dû mourir trois fois : pour ce que j'ai mangé, pour ce que j'ai bu et pour toutes les femmes que j'ai connues.”
En 1948,"l'époque avait beau être marquée idéologiquement, pour moi les jolies filles passaient avant la politique. J'étais le mercenaire de mes plaisirs.”
“Pour moi, en ce qui concerne les femmes, le désir, le plaisir, il n'y a rien eu de mieux que l'Argentine. Elle a été ma sainte patronne, une grande pute catholique et pleine de sacrements.”

La question de l'assimilation de Corto à Pratt, et réciproquement, n'est pas posée tant elle est évidente ou exaspère l'auteur.
Les voyages les mèneront tous les deux à Venise, en Abyssinie, en Argentine, à Londres, à Sao Paulo, en Irlande, en Suisse…pour confronter leurs aventures à l'ésotérisme, aux champignons hallucinogènes, au culte vaudou, à la franc-maçonnerie, à la sorcellerie…

Transversale, la deuxième partie du livre est construite sur sept thèmes, chacun illustré par une case caractéristique de ses bandes dessinées : “Le voyage du pèlerin, cultures et cultures, une éducation ésotérique, mythes et métaphysique, un monde féminin, héros et guerriers, le désir d'être inutile”, qui ouvrent les portes pour entrer dans le monde intérieur de Pratt. C'est probablement la partie biographique la plus intéressante.

Le chapitre sur l'ésotérisme montre l'enrichissement irrationnel de l'homme qui rend attachant l'auteur et son oeuvre.

Parfois les questions sont directes : "Qu'est ce qui aura été le plus important dans votre vie, les femmes ou l'oeuvre ? ” Devinez la réponse ou lisez ce livre.

Les illustrations de sa main sont un contrepoint appréciable à ses paroles.
De son dessin, on soulignera la qualité des contrastes entre noir et blanc. Ils sont conçus comme des signes, des traces de jais noir sur un papier blanc.

Ce livre est essentiel pour comprendre un aventurier du vingtième siècle.
Critiqué : “Je me suis vu condamné par tous ces pseudo-intellectuels. Pour eux mon travail était inutile, mes références étaient infantiles”, il nous propose cependant un séduisant héros viril, Corto Maltese, inspiré de Henry de Vere Stacpoole et en arrière plan d'Homère, de Stevenson, de Conrad, de Melville, de London…

Hugo Pratt connaît treize façons de raconter sa vie, il a choisi la septième, celle du chat pour s'entretenir dans la partie autobiographique de ce livre.
Or, “Le jour de sa mort, de nombreux chats qui rôdaient sans cesse autour de sa maison sont entrés pour la première fois, en firent le tour et s'en allèrent pour ne jamais revenir.”

Son épitaphe est représentative de sa vie : “Ô mon âme n'aspire pas à la vie immortelle mais épuise le champ du possible.”

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