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Critique de Malaura


En ces périodes de fêtes qui approchent comment ne pas parler du « Journal de Frankie Pratt », le ravissant livre de l'américaine Caroline Preston! Sa beauté, son originalité, son raffinement, la dextérité et le soin avec lesquels il a été conçu en font un livre que l'on a envie de partager, d'offrir, de feuilleter encore et encore !

Qu'avons-nous entre les mains ? Eh bien nous avons un superbe roman graphique sous forme de scrapbook, ces albums photos illustrés, agrémentés de toutes sortes de détails et d'éléments découpés, agencés et collés. Certains sont si richement embellis, si parfaitement confectionnés qu'ils ne sont plus simplement des cahiers-souvenirs mais de véritables compositions artistiques.
C'est le cas de ce « Journal de Frankie Pratt », dont l'esthétisme, le stylisme raffiné, le design rétro en font en premier lieu un très bel objet-livre.
Plus de 600 pièces chinées chez les brocanteurs, les antiquaires, sur Internet ou dans les vieilles affaires de famille, ont été nécessaires à Caroline Preston pour élaborer cet ouvrage impeccablement apprêté, qui nous propulse, au côté de sa jeune et attachante héroïne Frankie Pratt, dans le tourbillon des années folles.

Il est bien agréable de plonger dans le tumulte de ces années 1920 en découvrant au fil des pages toutes une collection d'objets d'époque : des photos, des cartes postales et des cartes de jeux, des vieux billets de banque, des itinéraires de chemin de fer, des plans et des extraits de guides de villes, des tickets de métro, des réclames, des bibelots, des programmes de théâtre et de cinéma…
Art, littérature, musique, mode, décoration, règles de vie…Le temps d'avant s'anime et défile sous nos yeux en un vaste et réjouissant catalogue : la mode des chapeaux cloches et des coupes au carré, les bracelets en bakélite qu'on superpose sur le poignet, les robes de Chanel et de Patou, le gramophone Victrola, le savon Palmolive, le dentifrice Pebeco, le jambon Devil Ham, les cigarettes Chesterfield ou Fatima…un répertoire ahurissant des produits en usage révélant le mode de vie de ces années-là, avec ses nouveautés, ses tendances, ses objets à la mode, ses évolutions et ses orientations.
Avec ceci, les personnalités et les évènements de l'époque sont également recensés avec grande attention : Joyce alors en pleine écriture de son « Ulysse », Maurice Chevalier en chanteur de charme, Joséphine Baker en star des Folies-Bergères, les débuts chaotiques du journal The New-Yorker, l'exploit de la traversée de l'Atlantique par l'aviateur Charles Lindberg, les débuts du cinéma parlant ou encore Fitzgerald, Hemingway, Willa Cather, Gloria Swanson, la liste est longue de tous les petits détails et clins d'oeil parsemant ce luxuriant album qui fait montre d'un bien beau sentiment de prodigalité.

Mais au-delà de la reconstitution minutieuse d'une époque, l'originalité du « Journal de Frankie Pratt » est de se servir du support du scrapbook pour raconter une histoire, celle de Frances Pratt, surnommée Frankie, une jeune fille enjouée, indépendante, dynamique, qui rêve de devenir écrivain. Jeune américaine issue d'une famille modeste du New Hampshire, son histoire va débuter le jour où sa mère lui offre un journal intime pour fêter l'obtention de son diplôme d'études secondaires et où elle déniche, dans la cave de la ferme familiale, la vieille machine à écrire Corona de son père décédé.
Dès lors Frankie, avec l'enthousiasme de sa jeunesse, va consigner sur près de dix ans l'aventure de sa vie, de la jeune fille de 18 ans rêveuse et candide quittant le cocon familial pour rejoindre l'université de Vassar, à ses années new-Yorkaises aux rythmes des nuits endiablées de Greenwich Village, de son départ pour la France à bord du paquebot Mauretania à son séjour parisien avec les autres « Expats » du quartier Montparnasse…Frankie se raconte, grandit, apprend, relate ses expériences de travail dans les magazines en vogue de l'époque, partage ses coups et ses peines de coeur…La jeune fille devient femme ; une jeune femme libre, pleine d'esprit, autonome, en parfait accord avec l'esprit de son temps qui voit la gent féminine s'émanciper de plus en plus.

Bien-sûr la qualité littéraire n'est ici pas forcément de mise, l'histoire de Frankie se déroulant au gré des petites notes qu'elle écrit sur sa vieille machine Corona et qu'elle épingle sur les feuillets de son journal au même titre que les rubriques, les photos et les cartes disséminées le long des pages.
Néanmoins l'on participe à un vrai destin romanesque et l'on éprouve un plaisir entier à compulser ce bel ouvrage dans lequel l'on sent tout le coeur et l'ardeur qu'a mis son auteur à le confectionner.
Pour les amoureux d'Art Nouveau, les amateurs d'illustrations d'époque, les esprits collectionneurs, les aficionados d'albums photos, les nostalgiques et les curieux, ou tout simplement pour les adeptes de belles choses, voici un joli cadeau à offrir, « 100% vintage » et 100% original, divertissant et très rafraîchissant et aussi très…féminin.

Et pour un petit aperçu du scrapbook de Frankie n'hésitez pas à aller faire un tour ici :
www.youtube.com/watch?v=¤££¤46De Greenwich Village51¤££¤74
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