AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782850350191
496 pages
l'Atelier contemporain (12/06/2020)
5/5   1 notes
Résumé :
« Peinture comme poésie » : tel est donc le mot d’ordre que le lecteur trouvera richement décliné au fil de ces quelques cinquante textes écrits entre 1974 et aujourd’hui. Issues de diverses revues et réparties en plusieurs sections, ces analyses critiques concernent tantôt les peintres de Supports/Surfaces (Dezeuze, Viallat, Arnal, Boutibonnes…), tantôt des phénomènes de la peinture ancienne revus par l’œil moderne (anamorphoses, motifs non figuratifs du Livre de K... >Voir plus
Que lire après La peinture me regardeVoir plus
Citations et extraits (34) Voir plus Ajouter une citation
La peinture est convoquée pour «disposer l’écart». Cela pourrait-il expliquer vos préférences
picturales? Par exemple pour Matisse, soulignant l’arbitraire (et les limites) de ses couleurs en ne
cessant de changer celles choisies pour telle première esquisse de tel tableau ? Par exemple pour Dezeuze,
dont vous dites, dans Ils affinent notre optique1
, que son œuvre «ne propos [e] rien d’autre que des essais d’enregistrement de cette différence», une «différence non logique» entre «le réel» et «les
langues»?
«Différence non logique » est une définition que Georges Bataille donne de
la «matière ». Il désigne, je suppose, ce qu’à la suite de Lacan, j’appelle volontiers
« réel », soit: « ce qui commence là où le sens s’arrête ». L’impulsion à faire art
(poésie aussi bien que peinture) surgit là: au lieu où les significations défaillent
et où l’organisation symbolique elle-même rencontre ce qui lui reste radicalement
irréductible. Cette impulsion relève le défi d’avoir à « enregistrer » les traces de cette
«matière », ou « réel » (jadis on a pu dire aussi « nature » – dans le même sens, je
crois). Sans la suggestion qu’existent ces traces, il n’y aurait rien, de l’impulsion que
je dis. Pourtant ça n’est jamais rien d’autre que pure suggestion: innommable suggestion. Peut-être est-ce cela qu’on a jadis appelé inspiration (mais on lui supposait une
origine, le souffle d’un dieu – et je n’y souscris évidemment pas). Jamais en tout cas
il ne s’agit de quelque chose comme d’un «monde » posé a priori et simplement
« représentable » par le vecteur maîtrisé d’une langue et d’un style.
Pour autant cela ne veut pas dire que cette matière (cette différence) serait une
sorte de donné sauvage (un en-soi extrinsèque au fait symbolique). L’idée même
qu’il y a de l’innommable ne se pense que dans la logique de la nomination et
l’intuition de l’irreprésentable est un effet du pouvoir de représenter. Nommant,
on ne nomme pas seulement le nommé. On ne nomme pas non plus (d’évidence)
l’innommable. Mais on ouvre au fond du nommé le vide de l’innommable et on
nomme cette ouverture. Cette idée et cette intuition sont au principe de l’élocution
poétique comme de la passion de peindre.
De même que le sujet de la poésie n’est rien d’autre que la poésie (la question de la poésie), de même la peinture n’a pas d’autre sujet qu’elle-même (ce que Flaubert notait quand il disait: « j’aime, dans la peinture, la peinture »). Les
peintres que j’aime, ceux qui me retiennent, sont ceux dont il est le plus évident
qu’ils n’ont pas souffert qu’un autre sujet les occupe: ceux qui cherchent, dans la
peinture, la peinture. Ceux, donc, qui peignent pour traquer les raisons mêmes
qui font qu’ils peignent. Il se trouve que ce sont les mêmes qui font alors fulgurer
dans leurs tableaux quelque chose comme l’éclat même du pouvoir de représenter
(la gloire du fait symbolique lui-même, arc-bouté sur l’irreprésentable « différence
non logique » qu’à la fois il tente d’incarner et maintient, pour tenir, comme différence irréductible). C’est peut-être un paradoxe. Il y a là, en tout cas, quelque
chose comme une « grâce » – dont je serais bien en peine de préciser la source et
les moyens d’action, mais sur laquelle la question de la représentation du Divin
(du Verbe) telle que la pose la peinture chrétienne a sans doute bien des choses à
nous dire.
Commenter  J’apprécie          20
Les descriptions de tableaux que vous proposez dérivent le plus souvent vers d’autres récits, et
les cumulent, même. Ils peuvent raconter l’histoire de tel ou tel détail du tableau. Ces pages descriptives correspondant alors strictement à ce que la rhétorique antique appelait ekphrasis. «Matisse
en famille» en est un exemple. En effet, très vite l’évocation visuelle de l’homme «en pyjama bleu à
rayures verticalement dans des noirs un peu grattés de peluche» est oubliée. Vous enchaînez par: «je
le devine même radieux, il vient d’ingérer, avec son café retour de lycée et le bout de sieste, tartine de
coulommiers. Il aime bien le coulommiers». Ce récit tire la description du tableau (censé proposer
une simultanéité optique) vers le monde de la temporalité discursive et des suppositions logiques. Le
fait que vous accumuliez de tels récits devient alors éminemment suspect. Faut-il lire dans ce cumul
plus ou moins hors sujet par rapport au compte-rendu visuel de la toile, une façon, parmi d’autres,
qu’a l’écrivain (vous) de rappeler qu’il reste écrivain, quand bien même il cherche à se faire peintre? et
même qu’il ne se fait peintre que pour mieux montrer combien il est un écrivain selon votre idéal? Cet
idéal est suggéré au début du «Matisse en famille»: «Comment franchir ce mur de couleurs toutes
prêtes pour les colères? Comment seulement même le blanchir, pour poser crottilles de coulis à soi sur
le paysage et y mettre paix ?»
Dans un tableau, comme dans un livre, on entre, vous le savez bien, comme
on le faisait dans ces cafés d’autrefois où on pouvait « apporter son manger ». Le
manger qu’on y apporte c’est sa culture, son petit bagage de codes de lecture, son
désir, son imaginaire, la capacité que chacun à en soi de produire d’une part de
l’interprétation, de l’autre de la fable: de légender les œuvres qu’il contemple. Ce
pourquoi, si l’enjeu n’est pas d’ordre scientifique (la critique d’art, l’iconographie),
il n’y a rien qui puisse a priori être « hors sujet » quand on se « raconte » une œuvre
(l’effet sensoriel qu’elle vous a fait, l’effervescence de pensée qu’elle a suscitée en
vous); et rien qui, dans ce récit, ne soit « oubli » de l’œuvre, puisque celle-ci fut la force d’entraînement sans quoi, de récit, il n’y aurait pas eu. L’entrée en scène du monsieur qui aime le coulommiers (le père du narrateur) est commandée, comme
j’ai déjà dit, par son identification à la figure matissienne de l’homme en pyjama
(Matisse ironiquement autoportraituré) dans une scène où le narrateur à la fois
feuillette des livres d’art dans l’humidité sombre du bureau de son père, à la fois
regarde, au dehors, l’éclat du jardin sensuellement avivé par la chaleur d’été. La
trivialité du pyjama rayé porté par l’homme (peut-être le premier pyjama, peut-être
même le seul, dans l’histoire de la peinture?) n’est pas pour rien dans l’identification dont je parlais parce qu’elle connecte avec les éléments carnavalesques (la
bouffonnerie) de ma fiction. Mais pas plus que l’inversion matissienne des perspectives (le fond sauvagement coloré – le jardin – faisant appel d’air sensuel en
revenant vers les grisailles du devant, là où sont les figures humaines, lourdement
familiales). La fiction, à sa façon, décrivant le tableau (ekphrasis, oui), rejoue ce renversement: elle fait monter du fond entraperçu (dans l’espace du tableau comme
dans le temps réel qu’évoque la scène racontée) les visions sensuelles (les couleurs,
la nature, les corps féminins imaginés…), au travers du mur de la « réalité » : les
interdictions (morales), le confinement (l’espace familial où vit « en vrai » le narrateur) et les représentations déréalisantes (la langue d’usage courant, l’idéologie
implicite qui soude la famille à son espace et à son temps). Mais alors il ne s’agit
plus d’un simple dépliement temporalisé des composantes scéniques du tableau. Il
s’agit plutôt de construire une sorte d’allégorie: les données (esthétiques, méthodiques, techniques – et anecdotiques) du tableau sont recyclées dans le mouvement
général du récit (les démêlés du narrateur et de sa grand-mère); mais le tableau
tout entier (ce pourquoi j’ai tenu à en reproduire, dans le livre même, un relevé graphique) reste là, comme filigrane structurant ou comme surimpression spectrale:
parce qu’à ce moment-là de la fiction c’est lui qui lui donne son sens symbolique; c’est en lui (dans la cohérence de l’image qu’il est) que se trouvent ramassés les
effets de sens que le récit, à cet endroit, tente de développer. Ainsi il devient l’emblème de ce sur quoi la fiction réfléchit et à quoi elle s’active: tenter de faire surgir
un jardin de langue libre, vivante, sensuelle – au travers du mur à la fois décrépi
et trivialement bariolé des représentations qu’on (l’assentiment socialisé) voudrait
nous faire prendre pour la réalité.
Commenter  J’apprécie          00
Dans vos entretiens avec Hervé Castanet2
, vous dites : «peindre, c’est croire voir et toucher un
peu ». Vous faites référence, dans cette phrase, à votre passé de peintre, lorsque vous preniez plaisir
à copier des maîtres, comme Van Gogh, Gauguin, Modigliani, etc. Un chapitre de Grand-mère
Quéquette, intitulé «Une carrière brisée», le raconte sur un mode humoristique. Cette expérience
de jeunesse semble avoir profondément in-formé votre façon d’écrire. Pourriez-vous expliquer un peu
plus comment vous «croyez voir» dans vos textes littéraires, ou plutôt, puisque la poésie n’est qu’un
«comme si» ne faisant que figurer un geste de peintre plus ancien, comment vous produisez l’illusion
du «croire voir» du peintre? Autrement dit quelles qualités propres à l’optique influencent votre
matériau verbal?
Le pas encore écrivain que j’étais alors et qui barbouillait vaguement quelques
toiles, peut-être qu’il tentait, naïvement, de toucher un peu plus de matière de monde
que ne donne à en toucher le fait de s’escrimer avec les mots. Le toucher dont je parle
a ce sens-là, d’abord, grossier. Car, au moins, peindre vous fait triturer et caresser
de la matière (ça dégouline, s’empâte, sèche, fige, rutile, pue). Mais la pommade
qui sort des tubes de couleurs n’est pas un simple échantillon de la catégorie matière.
Et toucher à la peinture (en tâter, comme on dit) fait aussi lever, devant les yeux
avides de ces corps et de ces « natures » dont la vie banale les frustre, des images
impérieuses dont on peut se dire que, les ayant vues, on a vu, de la vie, autre chose
– voire, d’elle, du plus vrai. Par exemple (salut à Gauguin !) des corps de femmes
nues, des textures de peau, des soleils exotiques, des couleurs de ciels comme on
n’en voit pas. Sauf que ce ne sont toujours que des images. De la vie vraie, les images,
puisque rien qu’images, nous disent aussi bien l’absence. Ça ne fait rien : avoir cru
voir nous aura au moins fait approcher (ou toucher: voilà un deuxième sens, un peu plus subtil) cette énigme: que le vrai de la vie ne se livre que dans ces tableaux ou
ces poèmes assez frais, assez forts, assez violents pour dépasser les réalités qu’on
nous assure être la vie à quoi nous serions voués. On s’avisera alors que cette énigme
s’appelle « art ». Et on en conclura que c’est dans l’expérience de ces fictions d’art
qu’on peut dépasser la fiction (la fiction idéologique, par exemple) qu’on veut nous
faire prendre pour la réalité. On devra cependant admettre que c’est au prix d’une
relégation de ladite « vraie vie », impeccablement intouchable, derrière les représentations sans lesquelles nous n’aurions même pas l’idée qu’elle est et nous appelle à
elle. C’est ainsi, je crois, qu’enfant, adolescent, les cieux de la peinture ont « affiné
mon optique », comme dit magnifiquement Rimbaud.
Une fois grandi, on brode là-dessus. On comprend que les parlants sont irrémédiablement posés à distance du monde, qu’il n’y a pas pour eux d’autre rapport
au monde que médiatisé. Que les conditions de cette médiatisation sont d’une part
le fait même de la parole, d’autre part la saisie optique des choses (qui est aussi bien
mise à distance des choses). On comprend un peu mieux aussi pourquoi parler, du
coup, et sans doute plus encore écrire, comme par une inversion mécanique du sensible, tient d’un désir de séduire, c’est-à-dire de paradoxalement détourner la parole
de sa fatalité séparatrice pour lui demander un peu de monde, un peu de réel dont,
entre autres, une chance de toucher: toucher les pensées (par le partage intellectuel),
les cœurs (par l’émotion), les corps (par la sensualité érotisée). Et on comprend
encore peu à peu ceci : qu’il n’y a pas de regard pur, miraculeusement lavé de ce qui
fait des hommes des hommes: qu’ils parlent. On en vient alors à saisir que, pour
la créature parlante, le regard (je cite Francis Ponge, un écrivain que nous aimons
beaucoup tous les deux), c’est toujours « le regard tel qu’on le parle ».
Commenter  J’apprécie          00
On peut, cependant, à vous entendre, imaginer que vous intégrez, au-delà de la simple déclaration
théorique, les partis-pris critiques des artistes que vous évoquez. Vous parliez de Viallat. Pourrait-on
retrouver, dans vos textes, un équivalent verbal de ce «module» obsessionnel, ambigu dans sa forme
(un osselet ou une palette?), par lequel, selon vous3
, ce peintre troue ses constructions picturales et figure
optiquement, dans sa peinture, le vide où s’échappe «l’Immense» qui nous est constitutif ? Pourrait-on
en voir une transposition, quoique éloignée, dans la répétition obsessionnelle du mot «poussière» (au
contenu sémantique infime mais équivoque) qui troue semblablement la fin du «douzième matin» de
votre roman Commencement?
Si « j’intègre » quoi que ce soit qui me vient de mon intérêt pour la peinture,
c’est à la façon que je viens de dire: pas d’une manière calculée et transposée point
par point. Mais sous l’impulsion, plutôt, d’une sorte d’imprégnation des effets
qu’ont pu faire sur moi ces œuvres et les réflexions qu’elles ont suscitées. Et avec
la conscience croissante que plus on écrit sous l’effet de cette imprégnation, plus,
d’une certaine façon, on s’éloigne aussi de la peinture: plus on désigne, parce qu’on
les mobilise entièrement, les moyens spécifiques au champ littéraire en tant que tel
et ce qui les différencie radicalement de ceux de la peinture.
Parmi les œuvres de la peinture, les toiles de Claude Viallat ont en effet beaucoup retenu mon attention. C’est sans doute parce que le «module » qui les ponctue est exemplaire d’un certain type de résistance à la « figure » identifiable – une
résistance qui ferait de la figure la figure de cette résistance en tant que telle. Le fait que
l’on ne parvienne pas, si on tente de nommer ce module, à éviter une interminable
hésitation (osselet, éponge, haricot, palette, etc.) en est le premier signe: il n’y a pas
de nom pour ce module et, en même temps, il sollicite invinciblement la nomination,
il passe toujours à la limite de quelque chose de nommable (d’un objet du monde
répertorié en langue). Ce passage à la limite (de la fixation nommée) fait trembler les
noms et s’ouvrir sous eux une épaisseur et un dynamisme qui sont la condition de
leur vitalité et de leur puissance de séduction inarraisonnable. Ainsi des mots, dans
l’opération poétique: tous (et pas seulement les noms, les verbes, les adjectifs – mais
aussi les déterminants, les articulations grammaticales, etc.) sont à la fois, évidemment, le signe de ce qu’ils désignent dans la langue de l’échange courant; mais tous
tremblent sur leur base sémantique sous les coups de leur liaison calculée (paronomastique et isochronique…) aux autres mots avec lesquels ils entrent en résonance
dans la fabrique stylistique (dans un poème sérieux, une rime n’est pas seulement
un écho phonétique: les mots qu’elle lie déteignent l’un sur l’autre et contaminent
réciproquement leurs significations). De même, parce que l’écrit tel que je l’entends
essaie de travailler la profondeur immémoriale de la langue aussi bien que la pluralité
de ses niveaux (savant, argotique, etc.), les mots s’ouvrent, par en dessous sur leur
mémoire étymologique, par les côtés sur leur polysémie, infiniment potentielle. Un
espace poétique vit, je crois, de ce tremblement et de ces équivoques.
Commenter  J’apprécie          00
Faudrait-il rapporter à cette volonté de lucidité esthétique (autant qu’épistémologique) votre façon
de souligner constamment l’écart entre les choses et leurs images (qu’elles soient picturales ou discursives)? Je songe encore à l’incipit de Grand-mère Quéquette où les premiers substantifs qui surgissent après les points d’exclamation et d’interrogation présentent d’abord le minimum de justification
par rapport au thème du tableau (un soleil levant). Tout se passe comme si le maximum d’étrangeté
formelle et thématique était cultivé pour renvoyer dos-à-dos les mots et les images picturales, loin des
choses réelles, loin de la matière aléatoire qui nous constitue…
Encore une fois il s’agit moins d’un écart entre les choses et les images que
du fossé qui s’ouvre entre cette coagulation de représentations que nous appelons
« réalité » (le monde tel qu’à telle ou telle époque nous nous le représentons) et les
façons, irréductibles à ces représentations, par lesquelles le monde effectivement
affecte nos vies. Ces « façons » ne relèvent guère d’une discursivité pacifiée. Elles ne
se résorbent ni dans des récits ordonnés, ni dans des constructions rationnelles, ni
dans une imagerie sertie en figures repérées. C’est à peine si elles font « sens ». Elles
nous viennent bien plutôt comme chaos, obscurité, confusion insensée, flux d’affects
ingouvernables. Je crois que ce qui fait écrire, c’est la conscience à la fois douloureuse et jouissive de cette « différence » entre la polyphonie inarraisonnable de l’expérience
et le monologue positivé et médiatisé, que j’appelais ci-dessus « réalité ». Le défi
qu’une « écriture » poétique doit alors relever est celui-ci : comment donner forme à
la pression informe de cette « différence » non logique? quelle adéquation symbolique (quelle langue juste) former à partir de ce qui n’est que la trace d’une inadéquation irrémédiable et ne tire son élan que d’être appelé par le fait de l’inadéquation ?
On ne saurait relever ce défi sans que les formes qui y répondent aient une allure un
peu « étrange », puisqu’il leur faut affirmer leur familiarité (à l’expérience singulière)
comme une étrangeté (au lieu commun). Mais l’étrangeté n’est pas recherchée – ni rien
qui relèverait d’un hermétisme ésotérique. Il n’y a pas de secret dans le poème (pas
de sens caché quelque part). C’est le poème tout entier qui forme l’idée qu’il y a du
secret (qui pointe l’innommable). Ce qui est recherché, c’est tout ce qui peut approcher d’une mise en scène juste de la différence dont je parlais: de cet écart tragique
et comique à la fois, saturé de voix inoriginées et de sensations chaotiques, qui fait
consister du vivant dans la langue contractuelle morte. «Ouvrir » des tableaux (les
prendre comme des sortes de réservoirs de figures, de sensations, de scènes… – et
recomposer de la fiction carnavalisée avec des bribes de ce matériau), c’est un des
moyens dont il m’arrive de me servir pour disposer l’écart.
Commenter  J’apprécie          00

Videos de Christian Prigent (51) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Christian Prigent
Lecture de Arlette Farge : une création originale inspirée d'un livre sur les châtiments donnés aux enfants dans les collèges de Jésuites*.
Une série de créations littéraires originales inspirées par les collections de la BIS. Ce cycle est proposé par la Maison des écrivains et de la littérature (Mel) en partenariat avec la BIS. Un mois avant la restitution, l'écrivain est invité à choisir un élément dans les fonds de la BIS. Lors de la rencontre publique, « le livre en question » est dévoilé.
Saison 1 : Pierre Bergounioux (21 février 2017), Marianne Alphant (14 mars 2017), Arlette Farge (25 avril 2017), Eugène Durif (9 mai 2017).
Chaque saison donne lieu à la publication d'un livre aux éditions de la Sorbonne "Des écrivains à la bibliothèque de la Sorbonne": * saison 1 : Pierre Bergounioux, Marianne Alphant, Arlette Farge et Eugène Durif paru en septembre 2018. * saison 2 : Jacques Rebotier, Marie Cosnay, Claudine Galea et Fanny Taillandier, paru en septembre 2019. * saison 3 : Hubert Haddad, Line Amselem, Christian Prigent, Mona Ozouf, Laure Murat, publication prévue en septembre 2020
* Mémoires historiques sur l'orbilianisme et les correcteurs des Jésuites, avec la relation d'un meurtre tout à fait singulier, commis depuis peu dans un des collèges de Paris et quelques autres anecdotes etc.
+ Lire la suite
autres livres classés : peintureVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus


Lecteurs (3) Voir plus



Quiz Voir plus

Arts et littérature ...

Quelle romancière publie "Les Hauts de Hurle-vent" en 1847 ?

Charlotte Brontë
Anne Brontë
Emily Brontë

16 questions
1084 lecteurs ont répondu
Thèmes : culture générale , littérature , art , musique , peinture , cinemaCréer un quiz sur ce livre

{* *}