Voici un premier roman qui ne laissera pas indifférent. Certains seront peut-être choqués par le thème puisqu'il s'agit du récit d'une jeune femme détruite par des relations sadomasochistes avec un homme pervers de 60 ans, ami de sa mère.
Tout a fait logiquement, le récit peut parfois déstabiliser mais sans violence ni malaise.
Après une tentative de suicide, Rachel/ Lucie est internée dans un hôpital psychiatrique. Elle écrit ses analyses, elle tente de redéfinir ses exigences auprès du psychiatre, spécialiste en thérapie cognito-comportementale, se confie à Lena, une douce infirmière.
Son discours est lucide et franc. Si les soignants la déculpabilisent, elle comprend sa part de responsabilité. Elle est à la fois Rachel, fille de Gabrielle et Lucie, celle qui voulait plaire à Maxence, cet artiste pervers qui la pousse au pire.
« Je ferai le pire devant toi et je serai pure à tes yeux. »
» Rachel, je crois qu'elle a voulu tuer la partie pourrie d'elle-même. »
» J'avais peut-être cherché un père en Maxence, mais j'avais aussi cherché un bourreau, quelqu'un qui me conduise à l'abattoir, et cela n'avait rien d'une mise en scène. »
Maxence prend aussi la parole en alternance de chapitre. Sa personnalité est beaucoup plus complexe. Il parle de son père atteint de la maladie d'Alzheimer puis victime d'un AVC. Certes, cette déchéance lui fait prendre conscience de son âge. L'étau se resserre autour de lui avec la haine que lui voue désormais son amie Gabrielle, mère de Rachel, et les reproches timides de sa femme, le rejet de sa fille. Et pourtant, il semble garder en lui cette confiance, cette assurance d'artiste qui lui fait croire qu'il a agi pour le bien de Rachel sans jamais la contraindre.
C'est un premier roman très fort, violent et sensible à la fois. Malgré ses failles, Lucie est une personne attachante qui tente de retrouver sa personnalité dans cette enveloppe corporelle salie, meurtrie, devenue vide.
Son passé l'a conduite à rechercher le mal pour se punir, se détruire.
« J'appelais la mort de toutes mes forces et j'ai fini par aller la chercher lorsque j'ai réalisé que je finissais toujours par ressortir des caves et des souterrains, meurtrie, épuisée mais vivante. »
Mais le soutien de ses proches, l'aide médicale et surtout l'écriture de son journal l'aideront à comprendre son comportement.
Nancy Huston soutient cette jeune auteur lilloise qui, effectivement s'approche du domaine de la grande auteure américaine. C'est une belle récompense amplement méritée pour
Olivia Profizi
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