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Anne Damour (Traducteur)
EAN : 9782246699217
94 pages
Grasset (04/01/2006)
3.82/5   383 notes
Résumé :
Brokeback Mountain : un bout de terre sauvage, hors du temps, dans les plaines du Wyoming.
Ennis del Mar et Jack Twist, cow-boys, nomades du désert américain, saisonniers des ranchs, n'ont pas vingt ans. Ils se croisent le temps d'un été. La rencontre est fulgurante. Ni le temps, ni l'espace, ni les non-dits, ni la société n'auront raison de cet amour - que seule brisera la mort. Le récit déchirant d'une passion, au cœur des grands espaces américains, ces som... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (80) Voir plus Ajouter une critique
3,82

sur 383 notes
Un jour dans un cadre professionnel , je lisais un recueil sur les cas chroniques , véritablement récurrents de dissuasions violentes , mortelles et très scénarisées contre des personnes sociologiquement variées pour le panel , tentant de vivre leur identité gays dans le Wyoming , ceci après avoir examiné les modes de vie clandestins de minorités plus ou moins clandestines, au travers des âges , mais également celle de communautés très contemporaines, ceci , dans le cadre d'une formation professionnelle. Je tombe ensuite sur ce bouquin après avoir vu le film et ce fut pour moi, une émouvante leçon sur l'identité et la mémoire.
C'est avant tout un récit de qualité ( qui se passe au début des années 70) avec de bons exemples variés et de toutes natures . Un récit assez bref mais définitivement émouvant et éloquent , sur les affects des personnages et sur leur univers aussi splendide que potentiellement tragique. le lecteur est sans cesse balloté et il va sans arrêt de la beauté des paysages à de celle des sentiments avec la beauté émouvante de certains souvenirs , à quelque chose de mortifère et de pathétique du passé ou du présent situé dans la vie de ces mêmes personnages .Une vie de naufrage nuancée et marquée par un souvenir de persécution redoutable et traumatique mais fondateur qui s'égrène et génère du réel au fil du temps qui passe , sur une base de souvenirs éblouissants et flamboyants ,aussi nourrissants que les haricots en sauce sur les feux des camp en forêt bivouac de bergers ou de campeurs nostalgiques.
Le malheur prend sa source dans le passé comme le présent et le passé alimentent le futur . C'est selon moi le sujet universel sous-jacent de ce court roman flamboyant d'affects scintillants au soleil du printemps et du dégel du ciel immense du Wyoming , un cycle saisonnier cyclique où s'enracine une mémoire où le temps est linéaire tourné vers le futur et où le passé est donc perdu ou révolu , du moins le croit-on , par erreur et illusion d'optique !
Ce texte est dans la thématique de la clandestinité et de la survivance de l'être , de même que sur la vie dans isolement absolu et sclérosant, du replis total et impérieux sur soi ,de même que sur la force de la mémoire et des souvenirs , qui sont aussi une nourriture créatrice inépuisable.
Ne rien laisser paraitre et la rigidité rigoureuse exigeante avec la rigueur ontologique qui l'anime , est un ressort principale qui bande l'être clandestin . Il y a une réplique dans le livre où dans le film je ne sais plus , un souvenir d'une phrase forte pour moi mais indéterminée , qui perdure entre le livre et le film , que je citerais ici comme je le fais régulièrement ailleurs : « quand t-y peut rien ,faut-y faire « , se dit un des deux personnages principaux devant les concrètes reliques / tangibles de sa mémoire encore ,vive , vivace et à vif . Malgré tout le temps qui passe , celui-ci n'apaise rien , mais il régule néanmoins et fait donc une oeuvre élaboratrice de mémoire incarnée dans le tangible .
Peut-on contrarier l'amour sans brimer et déformer profondément l'être qui l'anime ? Pour moi la réponse est non et elle se tient dans la nature qui nous environne , regardez les arbres tordus par le vent , dans l'observation de leurs formes variées se tient la réponse . En même temps c'est un processus naturel et nos expériences sont le souffle qui nous façonnent et qui génèrent aussi de l'identité individuelle et culturelle ainsi que des lois secrètes qui perdurent en héritage, au travers de la clandestinité codée , ritualisée souvent et de processus initiatiques variés et structurés enracinés dans une mémoire aussi inviolable que agissante . Ce court roman est au coeur de tous ces processus et de toutes ces problématiques des identités contrariées et minoritaires façonnées par le danger et les ruses. Il est également, aussi riche que émouvant , percutant et éloquent tout en dressant les codes qui autorisent la perpétuation de l'identité homosexuelle, dans l'ouest américain impitoyable et pour ceux qui existent sans être visibles. .
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Cette nouvelle est une claque magistrale, bouleversante.
Est-ce sous la plume cinglante et rêche d'Annie Proulx , ou parce que le cadre grandiose et hostile des montagnes du Wyoming donne une emphase tragique à l'histoire ? Toujours est-il que je n'avais encore jamais ressenti dans un livre avec une telle force la souffrance d'un amour contrarié.
Brodeback Mountain, c'est l'histoire d'une passion brute et désespérée, belle à pleurer, entre deux jeunes gars du grand Ouest, qui s'enflamment comme des torches l'un pour l'autre à l'aube de leurs vingt ans, se rentrant dans la peau l'un de l'autre sans rien y pouvoir, et ne se reverront qu'à peine au cours de leurs vies au pays des cow-boys, passées à brûler de douleur et du désir de l'un de l'autre.

Cette histoire pire que l'enfer m'a fait un mal de chien. Une nouvelle magnifique, plus forte que le film.
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Annie Proulx nous offre un texte très court. Elle va droit à l'essentiel, ses personnages sont peu bavards, l'histoire une succession d'ellipses qui renforcent les non-dits. Nous oblige à lire entre les lignes. le texte est brut, à l'image de ces deux hommes rustres qui se sont rencontrés durant un été à Brokeback Mountain, vont se revoir de loin en loin et ne jamais cesser de s'aimer. Rien de romantique ici. Mais les histoires d'amour le sont-elles toujours. Comment s'aimer lorsqu'on est deux hommes dans l'Amérique puritaine de l'Ouest, et que tout pousse à se conformer rapidement aux normes en usage si l'on ne veut pas finir assassiné à coups de démonte-pneu. Une grande histoire d'amour bouleversante.


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Les challenges me mènent pour la deuxième fois vers le western, alors que mes inclinations ne m'y poussent pas naturellement. J'avais choisi True Grit la première fois, western "classique" et reconnu même si assez moderne. C'est vers un autre livre adapté au cinéma que je me suis dirigé, pour un livre beaucoup moins classique dans le genre, la romance entre deux cow-boys.

Au delà de la provocation qui consiste à jouer d'un symbole ultime de virilité comme le cow-boy et en y instillant l'homosexualité, le choix de l'auteure est particulièrement judicieux. Comment mieux rendre la difficulté de vivre une identité que dans des Etats où assumer ses penchants, c'est risquer tout simplement sa vie ? Annie Proulx parvient parfaitement à rendre l'élan premier de l'attirance, rapide, fugace, qui se poursuit ensuite par des longues périodes d'éloignement car cet amour ne peut pas être vécu pleinement. Et pourtant, comme deux aimants aux pôles opposés, les deux héros ne peuvent lutter contre ce qui les soude, au point de prendre certains risques inconsidérés.

Cette romance contrariée est touchante dans ses maladresses, dans un effet "Romeo et Juliette" de l'amour impossible à vivre à cause du contexte sociétal. La forme raccourcie de la nouvelle est forcément un peu frustrante quand on en a vu l'adaptation en long métrage, mais l'auteure parvient à tirer partie de la brièveté du récit en ne s'embarrassant pas d'atermoiements de romantismes, ce qui permet de mieux rendre cette homosexualité virile qui refuse de se dire tel le premier dialogue d'après l'étreinte entre les deux costauds " - Suis pas pédé - Moi non plus. C'est parti comme un boulet. Regarde personne que nous."

On ne peut se détacher des incarnations d'Heath Ledger et Jake Gyllenhall mais cette lecture est au moins un rappel nostalgique agréable de ce film touchant et utile pour faire avancer les mentalités dans une Amérique refusant trop facilement de voir certaines réalités.
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Après avoir revu "le secret de Brokeback Mountain", j'ai eu envie de relire la nouvelle qui a inspiré Ang Lee.
Et j'ai été sidérée par le style sec et direct d'Annie Proulx, son extrême dénuement qui extrait de façon brutale l'essence pure de l'amour et du désir qui animent ces deux ranchers. J'ai beaucoup aimé l'absence de circonvolutions autour de cette passion ; inutile de perdre du temps en noyant cette histoire sous la chantilly et la guimauve.
Car on est dans un contexte aride, en plein Wyoming rural et conservateur, où il vaut mieux garder secret ce type de liaison -d'ailleurs, "ça regarde personne que nous" dit Jack, et il a bien raison. Ce que j'ai adoré, c'est la façon dont ces deux hommes acceptent ce qu'ils ressentent l'un envers l'autre : pas de tergiversations, ni d'états d'âme. Leur passion s'impose à eux, alors autant l'accueillir en eux. Reste la douleur des rencontres sporadiques et finalement frustrantes, entre obligations familiales et professionnelles, et les rêves de fuite avortés -car où aller quand on est un cow-boy fauché, un plouc qui n'a jamais quitté son coin perdu ?
Annie Proulx dresse le portrait incisif de deux rednecks auxquels l'existence n'a pas fait de cadeaux, hormis cette passion magnifique et démesurée qu'ils peinent à vivre au Pays de la Liberté. Et ça m'émeut fortement.
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Citations et extraits (39) Voir plus Ajouter une citation
"Bon", fit Jack, et ils se serrèrent la main, se tapèrent sur l'épaule, puis il y eut dix mètres de distance entre eux et rien d'autre à faire que de rouler chacun dans des directions opposées. Au bout d'un mile, Ennis eut l'impression que quelqu'un lui extirpait les boyaux avec la main, mètre par mètre. Il s'arrêta sur le bas-côté de la route et , dans les soudains tourbillons de neige, essaya de vomir mais rien ne vint. Il ne s'était jamais senti aussi mal et dut attendre longtemps avant que la sensation ne se dissipât.
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La chemise lui parut lourde et il découvrit qu'il y en avait une autre à l'intérieur, les manches soigneusement enfilée dans celles de Jack. C'était sa propre chemise à carreaux, perdue depuis longtemps, avait-il cru, dans une putain de blanchisserie, sa chemise sale, la poche arrachée, les boutons en moins, volée et dissimulée par Jack à l'intérieur de sa propre chemise, comme deux peaux, l'une à l'intérieur de l'autre, deux en une.
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Ennis se réveilla dans le rougeoiement de l’aube, avec son pantalon aux genoux, une migraine carabinée, et Jack coincé contre lui ; sans rien dire, ils savaient tous les deux comment se déroulerait le reste de l’été, et que les moutons aillent se faire foutre.
Et il en fut ainsi. Ils ne parlaient jamais de sexe, le laissaient s’accomplir, d’abord seulement sous la tente la nuit, puis en plein jour quand le soleil tapait dur, et le soir à la lueur du feu, rapide, brutal, avec des rires et des grognements, une abondance de bruits, mais sans jamais prononcer un mot, sauf une fois où Ennis dit : « Suis pas pédé », et Jack enchaîna : « Moi non plus. C’est parti comme un boulet. Regarde personne que nous. » Il n’y avait qu’eux deux dans la montagne, à planer dans l’air mordant et euphorique, contemplant d’en haut le dos du faucon et les lumières des voitures qui rampaient au fond de la plaine, flottant au-dessus des affaires courantes, loin des chiens de ferme et de leurs aboiements nocturnes. Ils se croyaient invisibles, ignoraient que Jœ Aguirre les avait observés un jour pendant dix minutes à travers ses jumelles, attendant qu’ils aient reboutonné leurs jeans, attendant qu’Ennis soit remonté près des moutons, avant d’apporter un message de la famille de Jack le prévenant que son oncle Harold était à l’hôpital avec une pneumonie et avait peu de chances de s’en tirer. Il s’en tira pourtant, et Aguirre revint l’annoncer, regarda Jack droit dans les yeux, sans prendre la peine de descendre de cheval.
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La chemise lui parut lourde et il découvrit qu'il y en avait une autre à l'intérieur, les manches soigneusement enfilées dans celles de Jack. C'était sa propre chemise à carreaux, perdue depuis longtemps, avait-il cru, dans une putain de blanchisserie, sa chemise sale, la poche arrachée, les boutons en moins, volée, dissimulée par Jack à l'intérieur de sa propre chemise, comme deux peaux, l'une à l'intérieur de l'autre, deux en une. Il enfouit son visage dans l'étoffe et respira lentement par le nez et la bouche, espérant y trouver la légère odeur de fumée et de sauge, le goût salé de la sueur de Jack, mais il n'y avait rien à sentir, seulement son souvenir, le pouvoir imaginaire de Brokeback Mountain dont il ne demeurait rien sinon ce qu'il tenait dans ses mains.
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Ils ne parlaient jamais de sexe, le laissaient s'accomplir, d'abord seulement sous la tente la nuit, puis en plein jour quand le soleil tapait dur, et le soir à la lueur du feu, rapide, brutal, avec des rires et des grognements, une abondance de bruits, mais sans jamais prononcer un mot, sauf une fois où Ennis dit : "Suis pas pédé" et Jack enchaîna : "Moi non plus."
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