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EAN : 9782890528741
238 pages
Boréal (30/09/1998)
3.81/5   74 notes
Résumé :
Monique Proulx a publié plusieurs romans - dont Le Sexe des étoiles (1987) et Homme invisible à la fenêtre (1993) - et écrit de nombreux scénarios qui tous ont été reçus avec chaleur par le public et la critique. Ici, en vingt-sept nouvelles décrivant implacablement une réalité " nordique " que la banalité rend encore plus tragique, elle raconte Montréal, les différents destins de jeunes, d'immigrés, de femmes et hommes de milieux et d'origines diverses que la ville... >Voir plus
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Un jour, j'ai demandé à une amie dont c'était le sujet d'étude : "Écoute, je ne connais rien en littérature québécoise... Chaque fois que j'ai essayé d'en lire, ça m'a emmerdé. Si je veux faire un peu de rattrapage, par où est-ce que je devrais commencer?"

Elle m'a recommandé les Aurores Montréales de Monique Proulx, et cette lecture m'a réconcilié avec mon coin de pays littéraire.

On n'est pas ici dans le roman du terroir d'avant les années 60, qui cherche à nous rappeler notre identité catholique en vantant la culture de la terre comme seul mode de vie acceptable. On n'est pas non plus dans ces bouquins des années référendaires, se concentrant sur la question nationale d'une façon qui ne concerne pas tellement le lecteur d'aujourd'hui. Enfin, on évite aussi l'écueil contraire de ces auteurs qui, en quête d'universalisme, expurgent complètement de leur texte toute référence à leur vécu, leur contexte et leur culture.

Bref, Les Aurores Montréales est un recueil de nouvelles québécois, montréalais, francophone des années 90. On y retrouve le ton sombre, cynique et subversif des American Psycho, Fight Club et compagnie. le fait que les points de vue soient féminins rend par contre la chose plus originale que ces anti-héros qui ont fini par devenir des archétypes maintenant surutilisés.

On y aborde donc des sujets "ordinaires" comme la recherche d'emploi dans une économie déclinante, les passages à vide existentiels en finissant le collège, l'absurdité d'un premier amour dont l'on sait pertinemment qu'il ne sera pas le dernier, etc. Chaque nouvelle nous laisse sur un sentiment glacial mais prégnant de vanité.
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27 histoires assez courtes s'enchaînent dans ce recueil de nouvelles mettant en vedette Montréal et ses habitants. Ces derniers sont scrutés par l'oeil acéré de Monique Proulx à qui rien n'échappe. de fait, une psychologie très fine des rapports humains s'ébauche sous nos yeux, avec la question du rapport à l'autre au centre des réflexions, que ce soit dans un rapport familial, amoureux, professionnel. Les êtres se frôlent et s'épaulent, mais ils se quittent également victimes des difficultés de communication ou de compréhension inhérentes aux rapports humains... le couple est le catalyseur de ces tensions, les hommes et les femmes étant bien souvent aux antipodes les uns des autres :

"Il serait agréable de vivre avec les femmes, elle sont la douceur, la beauté totale du monde, mais voilà, elles aiment l'inquiétude, elles la chérissent tant qu'elles lui inventent sans cesse des raisons d'exister. L'inquiétude attire les reproches qui éloignent l'amour, l'inquiétude fronce de rides les passions les plus jeunes. M'aimes-tu encore, à quoi tu penses, pourquoi tu ne téléphones pas, les pauvres questions de l'inquiétude créent, à partir de rien, des monstres qui deviennent réels.

Entre toutes les voltiges possibles, toutes les voies aériennes, les femmes choisissent fatidiquement la pesanteur." ("Jouer avec un chat")

Dans "Léa et Paul par exemple" deux époques sont mises en parallèle : celle des temps heureux, de l'amour fou puis celle de l'après, avec la rupture et la douleur qu'elle engendre :

"Ils sont là, au milieu de tout ça, le feu qui danse sur la grève, la lune, le lac engourdi par la nuit, le chant du huard, leurs doigts se trouvent sans se chercher, ils ont envie de crier tellement cet amour est un état de grâce qui ne peut pas ne pas durer toujours."

"Tout cela ne tient donc qu'à un fil, la beauté, l'ordonnance harmonieuse de nos visages et de nos corps que nous offrons aux autres comme des bouquets d'éternité, tant de soins et de maquillages pour un masque si précaire. (...) Oui, la légèreté est votre meilleure monture, la plus susceptible de vous emporter sans heurt où il faut aller, c'est la légèreté qui nous manque le plus dans cette vie de plomb où nous n'apprenons qu'à peupler de nos anxiétés l'univers merveilleux, merveilleusement vide." ("Blanc")

Monique Proulx s'interroge également sur la place des individus dans la société, elle mentionne les immigrants, les sans-abris, des êtres déracinés qui peinent à se mouvoir dans leur nouvelle vie. Dans ce contexte, il est difficile de rester soi-même, de "demeurer un être humain." comme le dit un jeune indien sans abri dans "Rouge et blanc". La double ou triple appartenance ethnique de ces montréalais provoque des difficultés prégnantes d'adaptation.

L'altérité est vécue à la fois comme une chance et une difficulté, si bien qu'une tristesse latente s'échappe de ces nouvelles portées par un style lyrique précis.
Lien : http://www.lecturissime.com/..
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Recueil de nouvelles sur cette ville que je visite en ce mois de juin 2011. Les textes sont à l'image de la ville, à moins que ce ne soit la ville qui soit à l'image des textes…On y trouve cette mixité culturelle caractéristique de Montréal et certaines des nouvelles ont comme narrateur un immigré fraîchement débarqué qui raconte son adaptation à sa nouvelle vie, les surprenantes découvertes qui en découlent mais aussi les regrets d'avoir quitté les siens. C'est sans doute le cas de beaucoup de ces Nouveaux Montréalais venus pour mieux vivre, essentiellement. En outre, il se dégage des Aurores Montréales un certain nombre de particularités propres à la ville merveilleusement retranscrites à travers ces différents textes qui même s'ils sont autant d'anecdotes à raconter, à conserver, forgent l'identité de cette intéressante ville du monde.
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Encore une déception d'une auteure pourtant bien reconnue au Québec. Et pourtant sa facilité d'écriture de l'auteure est d'emblée assez séduisante ... mais finalement agaçante. On se demande en effet pourquoi elle utilise si mal son talent. Chaque début de nouvelle m'est apparu assez prometteur et a créé chez moi des attentes mais finalement, je retiens peu de cette écriture imagée, des personnages un peu creux et de leur vécu. Dans l'ensemble, elles m'ont paru présenter peu d'intérêt ; à peine sortir du lot de ces nouvelles qu'on trouve parfois dans ces revues qu'on lit distraitement dans le salon d'attente du cabinet du dentiste... J'ai dû entrecouper ma lecture par d'autres auteurs pour tromper l'ennui qui me gagnait et ainsi finir par finir ce livre... en me demandant si ce n'était pas le genre de la nouvelle qui ne m'attirait pas. Cependant, d'autres lectures récentes de ce genre que j'ai grandement appréciées m'ont plutôt indiqué que c'était l'auteure avec laquelle je ne faisais pas bon ménage... J'attribue donc une note moyenne: trois étoiles, ce qui signifie dans ma propre échelle toute subjective des valeurs: ni bon, ni mauvais.
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J'ai adoré ces nouvelles qui se déroulent toutes à Montréal et qui mettent en jeu des gens comme vous et moi aux prises avec la vie et ses aléas. Monique Proulx a, je trouve, énormément de talent et de charme pour mettre en scène ses personnages et arrive à faire passer beaucoup de "choses" (le mot est plat je m'en excuse) à travers les gestes, les mots ou les pensées qu'elle leur prête. J'ai découvert là un vrai écrivain (ou une vraie écrivaine, je ne sais ce qu'elle préférerait) et ce n'est pas si fréquent.
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
RUE SAINTE-CATHERINE

Le meilleur endroit pour quêter, rue Sainte-Catherine, c'est sous la grosse sculpture à côté du complexe Desjardins, qui ressemble à un cheval volant ou à une chauve-souris à deux têtes selon la quantité de gin blanc avalée. Là, il y a de l'espace, de l'intimité et de la visibilité en même temps, et surtout un toit pour se protéger de la pluie ou du soleil, même si le soleil est rarement un problème à Montréal. De belles phrases sont gravées sur les parois (""La société de demain appartiendra tout entière à ceux qui savent s'unir","L'union pour la vie plutôt que la lutte pour la vie", "S'unir pour servir"), ronronnantes comme des sentences de mononcles dans des partys de familles qui tu n'as jamais eues. C'est une vraie bonne sculpture aussi confortable qu'un début de maison, et si je rencontrais l'artiste qui l'a faite, ça ne me gênerait pas du tout de lui serrer la main.

C'est mon abri à moi, tout le monde le sait, même le sournois de Pou qui vient de me le piquer.

Ce Pou-là a tout de la méchante vermine, la petite face fouineuse, la façon de se trémousser comme s'il avait le ver solitaire, l'hypocrisie, surtout. Ce n'est même pas un vrai itinérant, je le vois presque sous les jours sortir de l'UQUAM et se braquer au coin de la rue, arrogant comme un fils de riche. Il tire une flûte de son sac d'école, il se trémousse pour faire oublier qu'il joue comme un pied, et fouille-moi pourquoi, les clients se ruent dans sa direction. Il doit apprendre ça à l'université, comment manipuler le monde et détourner les vingt-cinq cents, maintenant qu'il n'y a pas plus de jobs ils donnent peut-être des cours sur la manière la plus ratoureuse de quêter.

Quand j'ai vu le Pou insolemment installé à ma place, il y a quelqu'un en dedans de moi qui s'est mis à rugir. Quelqu'un en dedans de moi l'a accroché par le collet, l'a secoué jusqu'à ce que tous les plombages lui tombent des dents et l'a propulsé au nord de Bleury en vol plané sur les fausses notes de sa flûte. Je le connais bien, ce quelqu'un-là, c'est le même qui marque autant de buts à l'université que sur une patinoire de hockey, c'est celui qui arrache de la musique non pas à une flûte d'enfant d'école, mais à un sax de grand dieu nègre, et il joue si bien quand il joue du sax, il joue jusqu'à ce que les passants s'arrêtent et lui versent en guise d'argent l'or de leurs larmes. Je le connais bien, ce quelqu'un-là. Il est mou comme un fantôme, il s'évanouit juste au moment où tu crois l'apercevoir, et même le meilleur des gins blancs ne parvient pas à le faire sortir d'en dedans.
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[...] il pense aux femmes, à quelques unes des femmes dont il s'est approché. Il serait agréable de vivre avec les femmes, elles ont la douceur, la beauté totale du monde, mais voilà, elles aiment l'inquiétude, elles la chérissent tant qu'elles lui inventent sans cesse des raisons d'exister. L'inquiétude attire les reproches qui éloignent l'amour, l'inquiétude fronce de rides les passions les plus jeunes. M'aimes-tu encore, à quoi tu penses, pourquoi tu ne téléphones pas, les pauvres questions de l'inquiétude créent, à partir de rien, des monstres qui deviennent réels.
Entre toutes les voltiges possibles, toutes les voies aériennes, les femmes choisissent fatidique ment la pesanteur.
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La chatte, bien sûr, est celle qui séduit, puisque depuis toujours c'est l'affaire des chats d'apprivoiser les hommes. Et de les retenir, faisant alterner stratégiquement les avances brûlantes et les retraits de glace. Cela fonctionne, cela s'appelle l'art de l'amour et de la guerre, que les chats pratiquent avec plus de virtuosité que les femmes. D'ailleurs, depuis treize ans, Pierrot a changé plusieurs fois de femmes, mais n'a jamais changé son chat.
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C'est l'histoire d'une femme qui rencontre un homme sans le rencontrer vraiment. Il y a beaucoup d'histoires de femmes qui rencontrent des hommes sans les rencontrer vraiment, beaucoup trop je sais bien. Encore une autre, allons, une dernière pour la route.
C'est l'histoire aussi d'un petit pays confus encastré dans un grand pays mou. Le petit pays n'a pas de papiers officiels attestant qu'il est bien un pays. Il a toutes les autres choses qui font un pays, mais les papiers, ça il n'a pas. Parfois il s'assoupit paisiblement dans le lit du grand pays mou en rêvant qu'il est chez lui. Parfois il rêve que le grand pays mou l'enserre et l'engloutit dans ses draps marécageux, et il se réveille avant de disparaître.
La femme de l'histoire habite ce petit pays. Elle s'appelle Eliane.
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[...] l'Homo postnicotinus, le plus glorieux maillon de cette ère quaternaire, soigne sa forme et ses RÉER, fait du jogging sur le Mont-Royal, descend le moins possible en bas, rue du Parc, parmi la racaille où se fomentent les cancers du poumon et où pullulent les bactéries.
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Videos de Monique Proulx (7) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Monique Proulx
L’autrice Monique Proulx s’entretient avec l’animatrice Mélissa Verreault (Maison de la Littérature, vidéo postée le 21/12/23)
Monique Proulx est née à Québec et vit à Montréal et dans les Laurentides. Elle a obtenu un diplôme universitaire en littérature et en théâtre, et a travaillé trois ans pour l’Université du Québec avant de se consacrer entièrement à l’écriture. Elle est scénariste, nouvelliste et romancière. Dans ces trois domaines, son travail a été acclamé par la critique et le public, et a obtenu de nombreux prix. Outre plusieurs nouvelles dans des recueils collectifs et des revues, au Québec, au Canada et à l’étranger, elle a publié huit livres, traduits en anglais pour la plupart chez Douglas & McIntyre (Toronto et Vancouver). Elle a écrit de nombreux scénarios de long-métrage, dont deux adaptations de ses propres romans : le film Le Sexe des étoiles, tiré du roman du même nom, a entre autres honneurs représenté le Canada dans la course aux Oscars.
Elle a travaillé entre autres avec Jean Beaudin, Charles Binamé, Paule Baillargeon, Denis Chouinard. Elle a été écrivain en résidence à l’Université du Québec à Montréal, à l’Université de Montréal, à la Maison Gabrielle-Roy, et a obtenu plusieurs bourses d’écriture. Elle a agi comme tuteure pendant dix ans (de 2010 à 2020) pour les jeunes scénaristes de l’école de cinéma montréalaise l’Inis. On requiert fréquemment ses services comme consultante en scénarisation et en littérature.
Son livre de nouvelles Les Aurores montréales, traduit en anglais et en espagnol, a été vendu à plus de 50 000 exemplaires, et continue d’être lu et étudié à travers le monde. Son roman, Champagne, publié aux éditions Boréal, traduit en anglais et en roumain, a été finaliste pour le prix des Collégiens, le grand prix de la ville de Montréal, le prix du Gouverneur général. Son roman Ce qu'il reste de moi, a été finaliste pour le prix des Collégiens et aussi traduit en roumain. Son dernier livre, Enlève la nuit, publié en avril 2022, est finaliste pour le prix Cinq Continents de la Francophonie.
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