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Anne Damour (Traducteur)
EAN : 9782246692010
466 pages
Grasset (01/09/2005)
4.07/5   165 notes
Résumé :
Quoyle est un journaleux malchanceux et désespéré qui vit et travaille près de New York. Après la mort de sa femme, une jolie garce qui n'a cessé de le tromper, il met le cap sur Terre-Neuve, le pays de ses ancêtres. Avec ses deux filles assez perturbées et une vieille tante à la remorque, Quoyle se retrouve au bout du monde, journaliste pour un canard local dans un univers dur, où tout semble ballotté par les vagues et secoué par le vent. Noeuds et dénouement est u... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (30) Voir plus Ajouter une critique
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Dans la vie il y a des nœuds et des dénouements .
Au fil des nœuds qui étranglent son bonheur, Quoyle, balourd au grand cœur, vogue sur la vie balloté par les flots. Sa barque prend souvent l'eau, sa maison arrimée au rocher de Terre-Neuve, tout comme les souvenirs de ses ancêtres, s'accroche contre vents et marées.

Et puis un jour, ce journaliste du hasard, papa poule à la dérive, s'accroche à une bouée, celle du bonheur simple.

Un voyage à Terre-Neuve à la rencontre des pêcheurs qui perdent parfois le nord mais savent récolter dans leurs filets l'essentiel de la vie. On déguste les homards et la morue, on se serre les coudes, on passe du rire aux larmes, comme du soleil à la tempête de neige. Les hommes et les femmes de là-bas sont bruts et entiers, ils parlent la poésie de la mer ; salée, sauvage, grise, lumineuse, imprévisible et farceuse.

Une lecture qui fait parfois sourire, pleine de tendresse et de poésie. Des mots comme de jolis galets, des dentelles de nuages et de vagues qui nous font prendre le large.
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Attablé au bar du Gros Temps, j'ai commandé une salade de homard en guise de dîner. La serveuse, une fille qui n'a vu de ses yeux gris que l'horizon proposé du rivage de Terre-Neuve, m'amène ma bière, bien fraîche. Les portes claquent, les volets cognent, la lumière s'affaiblit par instant, une énième tempête. Je n'ose même pas proposé mon regard à la vitre, je sais que je n'y verrais rien. Que de la brume sur cette terre abandonnée où autrefois vécurent des vikings et des inuits. Une brume de lait. Alors autant regarder le fond de mon verre, et ainsi ne plus penser à la vie. Putain de blizzard qui se lève aux aurores et qui semble jamais ne se fatiguer sur cette lande entre terre et mer. Dans le temps, les voyageurs pouvaient s'émerveiller de voir une baleine au loin, un soupir de désespoir ou d'exaspération qui s'élève de l'océan, ou un phoque allongé sur un morceau de glace qui dérive lentement, le long de l'horizon, une virgule noire sur un banc blanc. Je feuillette le journal local, L'Eider Cancaneur, savourant ainsi ces cancans éloignés.

A la une, les accidents de voiture. le rédac' en chef semble avoir un point d'honneur à mettre à l'honneur les accidents de la route, photos à l'appui. A défaut les accidents de bateaux, ou de motos-neige. Difficile à supporter, j'ai envie de tourner la page rapidement, mes doigts fébriles devant l'horreur d'une carcasse en feu tentent d'attraper mon verre de bière, sans en renverser la moindre goutte. Mission accomplie. J'ose tourner la page, d'autres carcasses en photos, des phoques chassés, des baleines échouées. C'est la vie et la mort en territoire hostile. Bien sûr, des tas d'annonces, signe d'un journal en pleine expansion, alors que la vie semble s'éteindre à petits feux ici. En dernière page le bulletin météorologique. Primordial, pour les pécheurs, ou simplement pour aller au boulot. Savoir si l'on prend la route ou la mer, ou si l'on reste calfeutré chez soi, avec sa bouteille de rhum, pendant que les vents remuent terre et cieux. Puis le mouvements des bateaux, ceux qui sont arrivés dans la baie, ceux qui en partent, ceux qui échouent, avaries matérielles, comme moi ici.

Le Bar du Gros temps ferme ses portes, ses volets, ses lumières. Il est donc l'heure de rentrer chez soi, mais où est-ce chez moi, dans quelle cabane je vis, oublié par les bières de Terre-Neuve mon refuge. J'erre sur cette terre, de blanc glacée, une dernière danse dans le ciel semblent chanter albatros et lagopèdes à queue blanche. Guidée par la lune d'un bleu immaculée, j'échoue sur le rivage comme une grosse baleine en mal d'amour, ou un ivrogne en mal de caniveaux. En quelques pages, j'ai senti que cette terre était pour moi, belle et silencieuse, comme je les aime. Une ode à Terre-Neuve, brumeuse et enneigée. Des récifs sous l'eau ridée, une terre pour s'y abandonner.
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C'est peut-être à cause de son menton proéminent que Quoyle a du mal à entrer dans sa vie. Bringuebalé de petits boulots en petits boulots, père de deux fillettes turbulentes, cocufié plus que de raison par une femme pour le moins frivole, Quoyle a l'allure du anti-héros parfait. Mais un accident de voiture va accélérer les choses. Sa femme y succombe avec son amant du jour, et voilà Quoyle sur les pas de sa tante, de retour sur les terres tempétueuses de leurs ancêtres à Terre-Neuve. Une baie surnommée la « baie du Balourd » par les autochtones y porte même son nom. Bienvenue chez lui.
Petit à petit, notre anti-héros va cependant prendre de l'épaisseur, et naître enfin à la vie.

Il flotte dans ce roman un air d'optimisme et de possible, agrémenté de drôlerie. L'écriture minimaliste d'Annie Proulx m'a accroché sans en avoir l'air, pour ne plus me lâcher. L'ambiance tumultueuse de Terre-Neuve y est décrite à merveille, les personnages (surtout ceux de l'Eider cancaneur », journal local où Quoyle travaille) sont truculents. C'est le sourire aux lèvres et les yeux rougis par la fatigue que j'ai quitté ce petit monde page 482, la dernière.

(prix pullitzer 94)
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Terre-Neuve, un lieu de pêche depuis le temps des Vikings, un roman de dépaysement, mais surtout un roman très humain.

C'est l'histoire d'un antihéros, Quoyle, un gros homme pas très beau, qui s'est laissé manipuler par le grand amour de sa vie qui est morte avec son amant en lui laissant deux filles. Quoyle quitte la Nouvelle-Angleterre pour Terre-Neuve d'où proviennent ses ancêtres. Il y gagnera sa vie en écrivant dans le journal local et il apprendra tout sur les bateaux, la pêche traditionnelle et un peu de l'histoire de l'île.

Terre-Neuve, c'est une très grande île, au large du Labrador, une terre de roche, aride, battue par les vents. C'est un lieu aussi peu paradisiaque qu'il peut l'être, mais où des gens se sont accrochés, des pêcheurs têtus qui ont survécu malgré tout, mais dont le mode de vie est menacé.

Écrit en 1993 par une Américaine aux racines francophones, ce livre a gagné le Prix Pulitzer et le National Book Award. Il a aussi été adapté au cinéma.

Pour moi, un bon roman, c'est un récit qui m'emporte ailleurs et là, lorsque j'ai levé les yeux de mon livre, j'ai été désorientée, surprise de ne pas voir la mer et ses embruns glacés.

Une bien belle lecture!
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Des noeuds, encore des noeuds, et des dénouements. C'est bien de cela dont il s'agit dans ce roman qui déroule la vie de Quoyle, un colosse malhabile et peu doué pour la vie que l'on rencontre noué de partout – ligoté dans son corps prison, son infirmité sociale, sa douleur d'amant abandonné – et qui peu à peu se délie, se défait des liens qui doucement, à chaque petit événement positif de sa nouvelle vie à Terre-Neuve, se desserrent et tombent un à un.
Voilà un de ces romans qui, bien qu'on l'aborde la gorge serrée tant les premières pages baignent dans un désespoir glauque, donne envie de changer de vie. Ou à tout le moins redonne le sourire et l'espoir que tout est possible pour redémarrer une vie nouvelle après et malgré l'adversité.
Cette sensation lumineuse et paisible est pourtant en contraste avec l'environnement hostile de Tette-Neuve où Quoyle, poussé par sa tante, vient s'établir, l'histoire lourde et violente du lieu (avec en point d'orgue l'épisode vrai et terrible des petits orphelins anglais envoyés en esclavage dans les fermes canadiennes), la déliquescence économique avec les destructions de l'industrie pétrolière comme seul horizon.
Mais c'est tout le talent magique de l'auteure que de montrer qu'à mesure que Quoyle prend vie et se raffermit, l'hostilité du lieu disparait au profit de paysages impétueux et vivifiants, de visages amis attablés devant un «calamburger » dans un rade un peu cradingue mais chaleureux, celui enfin d'une femme qui peut-être, pourrait…
Une petite merveille que ce livre, fragile comme un roc et brûlante comme un iceberg, doublement couronnée du Pulitzer et du National Book Award, à déguster un soir d'hiver pour retrouver la lumière.

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Citations et extraits (43) Voir plus Ajouter une citation
Bunny courut jusqu'à la maison, le pouce et l'index serrés l'un contre l'autre.
"Tante, le ciel est la plus grande chose du monde. Devine quelle est la plus petite ?
- Je ne sais pas, mon petit chou. Qu'est-ce que c'est ?
- Ça." Et elle tendit son doigt pour montrer un minuscule grain de sable.
- Je veux voir." Sunshine se précipita et la particule de sable s'envola dans un souffle.
"Non, non, non, dit la tante, arrêtant le poing fermé de Bunny. Il y en a des milliers d'autres. Il y a du sable pour tout le monde."
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Comme toujours, nous eûmes une de nos tempêtes d'hiver. Par malchance, elle surprit le Polar Grinder. A environ deux cents milles au sud-est de St. John's. Une tempête de février, aussi violente qu'à l'accoutumée. Le froid, des creux de douze mètres, un vent soufflant en ouragan, rugissant à cinquante nœuds. Vous êtes-vous déjà trouvé en mer au beau milieu d'une tempête, monsieur Quoyle ?
- Non, répondit Quoyle. Et ça ne me tente pas.
- C'est quelque chose qu'on n'oublie jamais. Vous n'entendez plus jamais le vent par la suite sans vous souvenir de ces plaintes de sorcière, de ces montagnes d'eau, des crêtes frangées d'écume, du pauvre navire qui gémit. C'est toujours terrible, mais encore plus au cœur de l'hiver, avec le froid atroce, la glace qui se forme sur les rambardes et dans le gréement jusqu'à alourdir le bateau de centaines de tonnes. A terre, la neige tombait si dru qu'il n'y avait plus qu'une cataracte blanche derrière les fenêtres. Impossible de voir la rue en contrebas. La façade nord-ouest des maisons était recouverte d'une couche de trente centimètre de neige dure comme de l'acier.
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Finalement le bout du monde, sauvage, posé au bord de l'abîme. Aucune trace humaine, rien, ni navire, ni avion, ni animal, ni oiseau, pas un flotteur de casier bouchonnant sur l'eau, pas une bouée. L'impression d'être seul sur la planète. L'immensité du ciel se rua vers lui et instinctivement il leva les mains pour s'en protéger. Des déferlantes diaphanes, murailles vert sombre de dix mètres de haut, venaient s'écraser sur la roche, répandant un lac bouillonnant de lait crémeux. Même à trente mètres au-dessus de la mer, le sel des embruns lui piquait les yeux et perlait son visage et son blouson de fines gouttelettes.
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[...] ... Combien étaient venus ici, appuyés comme elle au bastingage ? Contemplant ce rocher au milieu de la mer. Vikings, Basques, Français, Anglais, Espagnols, Portugais. Attirés par la morue, depuis les jours lointains où les multitudes de poissons ralentissaient les navires dans leur course vers les îles aux Epices, dans leur quête des cités de l'or. La vigie rêvait de pingouin rôti ou de baies sucrées dans des corbeilles d'herbes tressées, sans rien voir d'autre que le bouillonnement des vagues, les lumières clignotant le long des rambardes. Les seules villes étaient de glace, icebergs au coeur d'aigue-marine, pierres bleues enfouies au creux de gemmes immaculées dont certains disaient qu'elles exhalaient un parfum d'amande. Enfant, elle en avait senti l'amertume.

Les éclaireurs partis à terre revenaient à bord couverts de piqûres d'insectes. De l'eau, rien que de l'eau, disaient-ils, des tourbières, des marécages, des rivières, des chapelets d'étangs peuplés de criaillements d'oiseaux. Les bateaux poursuivaient leur route, raclant le fond au détour des caps. Et les vigies distinguaient des caribous qui s'enfonçaient dans la brume. ... [...]
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Une salade de homard n'est pas mal non plus, mais peut-être un peu légère pour le diner. Tu sais, il y avait une préparation que nous aimions particulièrement, Warren et moi, à la Fair Weather Inn à Long Island. La chair de la queue marinée dans du saké puis cuite avec des pousses de bambou et des châtaignes d'eau et le mélange passé au four dans les carapaces. Avec une sauce piquante inoubliable. Naturellement, si nous avions des crevettes, des coquilles Saint-Jacques et du crabe je pourrais cuisiner des queues de homard farcies - le même principe, mais avec du vin blanc et du parmesan. À la condition d'avoir du vin blanc et du parmesan.
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