Quelques oeuvres de jeunesse de
Proust, en partie extraites du recueil de nouvelles
Les Plaisirs et les Jours. Les thèmes (voir ci-dessous) sont assez communs et largement exploité dans la littérature de cette époque et antérieure, mais
Proust sait les revivifier par son style absolument magnifique: j'ai surtout aimé dans celui-ci la synesthésie qu'il déploie dans la plupart des nouvelles, ne délaissant aucune sensation. Les personnages traversant plusieurs nouvelles (en tant que personnages secondaires, puis principaux, ou inversement) créent une cohérence et une unité d'ensemble.
- La Confession d'une jeune fille (4 étoiles) : terrible confession. le thème est assez banal et usé (la perversion d'une jeune fille innocente), mais
Proust l'a admirablement bien traité. le récit commence lui-même de manière particulièrement forte, par un désespoir immense explicité dans la suite sous la forme de souvenirs. La chute y apparaît d'autant violente que l'innocence de cette jeune fille était présentée comme particulièrement pure et touchante. Ce qui contribue à cette impression et qui m'a particulièrement plu est la synesthésie des sensations :
Proust crée une véritable ambiance autour de ses personnages, tout en laissant le lecteur assez libre d'imaginer, sans l'assommer de détails.
- Un dîner en ville (3 étoiles) : récit d'un dîner mondain dont les participants, formant un ensemble assez éclectique, se méprisent, s'admirent ou se détestent, mais où tous font bonne figure et sourient, hypocrites. le narrateur déjoue tous ces faux-semblants et les révèlent au lecteur dans le premier chapitre. Dans le second, à la sortie du dîner, un des invités, seul dans les rues, exprime son bonheur, teinté d'une certaine mélancolie.
Une nouvelle qui révèle, selon moi, l'hypocrisie et la mélancolie d'une certaine société mondaine où transparaissent néanmoins quelques élans d'authenticité. le style de
Proust est toujours aussi agréable à lire, mais le thème m'a moins plu que dans la première nouvelle.
- La Fin de la jalousie (2,5 étoiles) : la nouvelle que j'ai le moins appréciée. le personnage principal est rongé par la jalousie. Celle-ci est causée par les paroles injustes d'un de ses amis ignorant de sa relation avec la jeune fille accusée. Ce sentiment finira par prendre fin, comme l'annonce le titre, lors d'une scène finale un peu trop morale à mon goût.
Proust exprime assez bien les tourments de ce jeune homme, après en avoir exposé le bonheur, mais je n'ai pas su me laisser attendrir ou toucher.
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L'indifférent (3,5 étoiles) : à nouveau une nouvelle assez mondaine, mais moins générale que Un dîner en ville: elle relate cette fois l'amour d'une femme et l'indifférence de l'intéressé (la raison en est révélée à la fin). J'ai beaucoup aimé imaginer cette femme qui, si elle eut été un homme, aurait été considérée comme un dandy par son amour des fleurs et son élégance. L'évolution de son amour était aussi assez intéressante à observer.
- Avant la nuit (4 étoiles) : l'héroïne, la même que dans la première nouvelle, sait décidément me toucher et m'émouvoir, qu'importe son récit. Celui-ci ménageait plus de suspense et de mystère que le premier: même si je m'attendais à une révélation plus scandaleuse que celle qui est finalement faite à l'ami confident, je n'ai pas été déçue par le final de cette nouvelle. Les métaphores et le style de
Proust en général m'ont particulièrement plu et ont joué un grand rôle dans l'attention que j'ai prêté à ce récit, encore une fois, assez classique.