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Pierre Clarac (Éditeur scientifique)Yves Sandre (Éditeur scientifique)
EAN : 9782070106509
1136 pages
Gallimard (29/09/1971)
4.09/5   32 notes
Résumé :
[…] plus de mille pages manuscrites retrouvées dans un garde-meuble, "oubliées" en quelque sorte par Proust et exhumées en 1952.

Parce que ce roman de jeunesse - Proust a entre vingt-cinq et vingt-huit ans quand il l'écrit - reste inachevé, dans l'ombre écrasante d'À la recherche du temps perdu, il est rarement lu par les proustiens eux-mêmes.

Pour nous, qui sommes aujourd'hui de plus en plus sensibles à la liberté et à la force des e... >Voir plus
Que lire après Jean Santeuil (précédé de) Les Plaisirs et les JoursVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Les Plaisirs et les jours à peine publiés Proust s'était lancé entre 1896 et 1900 dans l'écriture de Jean Santeuil. Mille pages inachevées, abandonnées et mises à l'écart avant de se plonger dans Ruskin, comme le rappelle André Maurois (préface), et qui ont été révélées au public, grâce aux travaux de thèse de Bernard de Fallois, trente ans après la mort de leur auteur, longtemps après La Recherche du temps perdu ; elles ont fait l'objet d'une édition cartonnée originale en trois volumes (Nrf, 1952) aimée des bibliophiles et chineurs dont celui-ci est le premier. Jean Santeuil puise à des sources et a des accents bien plus directement autobiographiques que La Recherche malgré le dispositif initial de mise en abyme un peu surfait chargé de le faire oublier. Dans une longue introduction l'auteur se dissimule derrière le regard d'un hypothétique narrateur évoquant un séjour breton avec un ami pour mettre en scène sa rencontre avec un énigmatique écrivain nommé C. dont il aurait fait publier l'oeuvre, Jean Santeuil. Un séjour breton de Proust et de Reynaldo Hahn dans une ferme auberge au temps de leur amour est en effet contemporain des débuts de la rédaction de Jean Santeuil comme le rappelle Lorenza Foschini dans un essai récent (Plaisirs d'amour, jours d'amitié de Marcel Proust et Reynaldo Hahn, 2019, p. 146), quant aux trois parties du tome 1 de la vie de Jean Santeuil elles renvoient spontanément, avec quelques filtres de bienséance mais point trop de complaisance pour lui-même, aux années de prime enfance et de lycée de celui qui contient en germe l'éminent créateur qu'il est devenu quelques années plus tard. « Ce livre n'a jamais été fait, il a été récolté », prévient Proust en exergue. Jolie formule qui incite à le lire comme tel. Au-delà de l'ébauche ou des prémisses de la Recherche que certains veulent y voir à tout prix Jean Santeuil m'a semblé un « réservoir » où les personnages ne sont pas encore les créations hybrides du grand oeuvre et m'a surtout questionnée sur les liens mystérieux que psychisme et création artistique ont inexorablement tissé pour produire un écrivain hors du commun.

Monsieur et madame Santeuil rêvent de donner une “éducation virile” à leur fils Jean. Son père le verrait bien un jour dans les ambassades ou la haute administration sa mère sans être hostile à ce projet lui donne le goût de la lecture et de la poésie. En attendant Jean montre une extrême sensibilité en tout. Ainsi le moment du coucher peut virer à la grande tragédie comme le soir où ses parents reçoivent le professeur Surlande : une séance d'après dîner, en ouverture, qui fait fortement écho à une autre bien connue des lecteurs de la Recherche. Cette disposition de “Monsieur Jean”, comme l'appelle le très professionnel Augustin au service de la famille, à “faire échec aux plus impératives nécessités mondaines” (p. 69) ne l'empêchera pas ultérieurement de les rechercher avec frénésie. L'histoire du baiser refusé occasionnant un chagrin d'origine obscure ne le quittant plus prend corps ici : ”De sa tristesse, d'ailleurs, il ne connut guère plus tard que les causes secondaires, car pour la cause première elle lui sembla toujours si inséparable de lui-même qu'il ne put jamais renoncer à elle qu'en renonçant à soi”. (p.73). L'empire exercé précocement sur sa mère qu'il déçoit ensuite par ses médiocres résultats scolaires se doublant de la culpabilité de la faire souffrir est documenté presque cliniquement et, entre agitation et tendresse, souci de plaire et agressivité, les pages racontent le jeune Proust plus authentiquement que tous ses biographes réunis. Entre les fraîches vacances de Pâques ou les chaudes soirées d'été à Etreuilles de la deuxième partie, à l'occasion d'un séjour marin à Dieppe et dans les frimas parisiens Jean dessine l'exceptionnelle cartographie de ses émois enfantins dont les moindres contours épousent les méandres d'une phrase déjà reconnaissable entre toutes, « flonflons » et fioritures stylistiques comprises. Emois reconduits peu après sous une autre forme en direction de la jeune Marie Kossicheff sa compagne de jeux aux Champs Elysées de laquelle ses parents l'éloignent et qu'il oublie aussi vite pour explorer les territoires de l'amitié à particule avec Henri de Réveillon sous la houlette de leur professeur de philosophie monsieur Beulier. Déplaisant, Jean sait l'être, criseux et possessif en famille dans la dernière partie, moqué par ses congénères du lycée pour ses envolées lyriques ou emphatiques, vaniteux. Qu'importe, la curiosité et le désir de le suivre dans tous ses états d'âme au fil de deux tomes supplémentaires n'en sortent en rien entamés.
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Comme ces paysages qu'on découvre seulement des sommets, des hauteurs du pardon apparaît dans sa valeur véritable celle qui était plus que morte pour nous après avoir été notre vie elle-même. Nous savions seulement qu'elle ne nous rendait pas notre amour, nous comprenons maintenant qu'elle avait pour nous une véritable amitié. (Les plaisirs et les jours, p. 133)
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Plus que tout autre de ses écrits Les plaisirs et les Jours, son sa personne
Jean-Santeuil : "si vous êtes proustiens vous devez avoir lu Jean Santeuil" Cette citation n'est pas de moi et malheureuse je ne sais plus : Morand, Maurois ?

Mais , Marcel est plus proche de Jean que du narrateur de la Recherche


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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
La vie et surtout la vie politique n'est-elle pas une lutte, et puisque les méchants sont armés de toutes les manières il est du devoir des justes de l'être aussi, quand ce ne serait que pour ne pas laisser périr la justice. On pourrait peut-être dire que malgré le courant de cette figure la justice n'est pas une personne, et que sa manière toute particulière de périr c'est précisément d'être armée, sans s'occuper de quelle manière. Mais on vous répondra que si les grands révolutionnaires y avaient tant regardé, jamais la justice n'eût remporté de victoire.


(dans "Jean Santeuil")
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À chacun Mme Sureau répondait :" Ne m'en parlez pas, je n'ai jamais vu un printemps pareil. On ne sait plus où on vit." Elle était de ceux qui trouvant un plaisir physique à dire de tout ce qui se passe autour d'eux que c'est extraordinaire, en arrivent à le trouver, que ce soit les événements de la politique, les drames de la société, les changements de température et les variations de la saison, ces événements de la vie à la campagne. [...] De plus, depuis qu'un maire radical qui ne saluait pas le curé avait été élu à Etreuilles, elle avait adopté en présence de tous les événements un ton chagrin qui les faisait considérer comme des malheurs, et en présence de tous les malheurs une absence d'étonnement qui montrait qu'elle ne les avait que trop prévus. "Dans le temps où nous vivons, il ne faut s'étonner de rien", disait-elle. Et elle rendait les écoles laïques indistinctement responsables du ralentissement du commerce et de l'humidité de la saison. (Jean Santeuil tome 1, nrf Gallimard, 1952, p. 170)
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Il n'y avait que pour les livres absolument courants qu'il s'était mis avec elle sur un pied plus simple. C'est ainsi qu'il disait toujours "Mariette, le Novum Organum ; Mariette, la Critique de la Raison pure" et si, pendant qu'à genoux devant les bûches elle soufflait le feu, elle entendait un élève matinal, demandant à M. Beulier des explications pendant qu'il finissait son café, prononcer le nom auguste mais familier pour elle de Spinoza, sans se relever mais déposant son soufflet elle demandait à M. Beulier : "Est-ce que Monsieur veut l'Éthique ?" (p. 329)
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Cette année-là La Gandara exposa au Champs-de-Mars un portrait de Jean Santeuil. Ses anciens camarades d'Henri-IV [du lycée Henry-IV] n'auraient certainement pas reconnu l'écolier désordonné, toujours mal mis, dépeigné, couvert de taches, l'attitude fiévreuse ou abattue, le geste plus expressif que noble, le regard exalté s'il était seul, timide et honteux s'il était devant du monde, […] dans le brillant jeune homme qui semblait encore poser devant tout Paris, sans timidité comme sans bravade, le regardant de ses beaux yeux allongés et blancs comme une amande fraîche, des yeux plus capables de contenir une pensée qu'en ayant pour le moment aucune, comme un bassin profond mais vide, les joues pleines et d'un rose blanc qui rougissait à peine aux oreilles que venaient caresser les dernières boucles d'une chevelure noire et douce, brillante et coulante, s'échappant en ondes comme au sortir de l'eau. Une rose coupée au coin de son veston de cheviote vert, une cravate d'une légère étoffe indienne qui imitait les ocellures du paon, venaient témoigner à la vérité de sa mine lumineuse et fraîche comme un matin de printemps, de sa beauté, non pas pensante mais peut-être doucement pensive, de la délicatesse heureuse de sa vie.

(Jean Santeuil)
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Chopin

Chopin, mer de soupirs, de larmes, de sanglots
Qu’un vol de papillons sans se poser traverse

Jouant sur la tristesse ou dansant sur les flots.
Rêve, aime, souffre, crie, apaise, charme ou berce,
Toujours tu fais courir entre chaque douleur

L’oubli vertigineux et doux de ton caprice
Comme les papillons volent de fleur en fleur ;

De ton chagrin alors ta joie est la complice :

L’ardeur du tourbillon accroît la soif des pleurs.
De la lune et des eaux pâle et doux camarade,

Prince du désespoir ou grand seigneur trahi,

Tu t’exaltes encore, plus beau d’être pâli,

Du soleil inondant ta chambre de malade

Qui pleure à lui sourire et souffre de le voir…

Sourire du regret et larmes de l’Espoir !
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MARCEL PROUST / DU CÔTÉ DE CHEZ SWANN / LA P'TITE LIBRAIRIE
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