Citations sur À la croisée des mondes, tome 2 : La tour des anges (84)
Il remit l'argent dans sa caisse et ouvrit sa bouteille avec le décapsuleur fixé sur le comptoir ; après quoi, il ressortit du café et marcha dans la rue, en tournant le dos au boulevard. De petites épiceries et boulangeries alternaient avec les bijouteries, les fleuristes et les portes masquées par des rideaux de perles qui s'ouvraient sur des maisons dont les balcons en fer forgé, chargées de fleurs, dominaient les trottoirs étroits. Le silence, ainsi enfermé, semblait encore plus profond.
Il trouva une boîte de Coca qu'il lui tendit, avant de sortir une boîte d'œufs. La fille coinça le soda glacé dans ses mains avec délice.
- Vas-y, bois, dit Will.
Elle regarda la boîte en fronçant les sourcils. Apparemment, elle ne savait pas comment l'ouvrir. Will souleva la petite languette métallique et la boisson jaillit en moussant. La fille lécha la mousse avec méfiance, puis ses yeux s'écarquillèrent.
- On peut le boire ? demanda-t-elle d'une voix où l'espoir se mêlait à l'appréhension.
- Oui. Visiblement, ils connaissent le Coca ici aussi. Tiens, regarde, je vais en boire pour te prouver que ce n'est pas du poison.
Il ouvrit une autre boîte. L'ayant vu boire l'étrange breuvage, elle l'imita. De toute évidence, elle mourait de soif. Elle but si vite que les bulles lui remontèrent dans le nez ; elle s'étrangla, rota bruyamment et fronça les sourcils quand Will la regarda.
— Mes sœurs, dit Ruta Skadi, laissez-moi vous raconter ce qui est en train de se passer, et vous expliquer qui sont nos ennemis dans cette affaire. Car une guerre se prépare. J'ignore encore qui seront nos alliés, mais je sais qui nous devons combattre. Il s'agit du Magisterium, de l'Église. Depuis qu'elle existe, c'est-à-dire très peu de temps à nos yeux, mais très très longtemps d'après les critères des mortels, l'Église a toujours cherché à supprimer et à contrôler toutes les pulsions naturelles. Et quand elle ne peut pas les contrôler, elle les détruit. Certaines d'entre vous ont vu ce qu'ils faisaient à Bolvangar. C'était épouvantable, mais ce n'est malheureusement pas le seul endroit, ni la seule pratique de ce genre. Mes sœurs, vous ne connaissez que le Nord ; moi, j'ai voyagé dans les contrées du Sud. Il y a là-bas des Églises qui mutilent les enfants elles aussi, comme les gens de Bolvangar, pas de la même façon, mais de manière tout aussi horrible. Ils leur coupent les organes sexuels, oui parfaitement, aux garçons comme aux filles ; ils les tranchent avec des couteaux. Voilà ce que fait l'Église, et toutes les églises ont le même objectif : contrôler, détruire, anéantir tous les bons sentiments.
N'existait-il qu'un seul monde finalement, qui passait son temps à rêver à d'autres mondes ?
- Qui es-tu ? demanda-t-il.
- Lyra Parle-d'Or.
- Tu vis ici ?
- Non, répondit-elle avec véhémence.
- On est où ici ? C'est quoi cette ville ?
- J'en sais rien.
- Tu viens d'où ?
- D'un autre monde. Il est rattaché à celui-ci. Où est ton daemon ?
Will ouvrit de grands yeux. C'est alors qu'il assista à un phénomène extraordinaire : le chat bondit dans les bras de la fille et se métamorphosa !
Elle avait demandé : « Qui est ce garçon ? Un ami ou un ennemi ? »
L’aléthiomètre répondit : « C’est un meurtrier. »
Lyra se sentit immédiatement soulagée. Il savait où trouver à manger, il lui montrerait comment rejoindre Oxford, autant de qualités fort utiles ; ce qui ne l’aurait pas empêché d’être un froussard, un garçon à qui on ne peut pas faire confiance. Un meurtrier, en revanche, faisait un excellent compagnon. Avec lui, elle se sentait aussi protégée qu’elle l’avait été aux côtés de Iorek Byrnison, l’ours en armure.
"Un jour, lui avait-elle dit, tu suivras les traces de ton père. Tu seras un grand homme, toi aussi. Tu reprendras son flambeau..."
(...)
ça valait le coup de mener une existence difficile, quand on avait devant soi un but aussi formidable.
Les Tartares supplièrent alors Ruta Skadi de leur accorder le droit de l'idolâtrer, mais elle rejeta leurs suppliques avec mépris. A quoi lui servirait leur adoration ?
Peut-être il est pas mort, peut-être il est. Peut-être il est pas mort et il est pas vivant.
"Sang ! Obéis-moi ! Rebrousse chemin,
Deviens un lac et ne te fais plus rivière.
Arrivé à l'air libre,
arrête-toi ! Et dresse un mur de caillots,
assez solide pour contenir le flot.
Sang, ton ciel est le sommet du crâne ;
ton soleil est l’œil ouvert ;
ton vent, le souffle dans les poumons ;
sang, ton monde est clos. Restes-y !"