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EAN : 9782757851623
472 pages
Points (12/02/2015)
3.44/5   126 notes
Résumé :
Los Angeles, 1970. Doc Sportello est un détective privé d’un genre particulier : il vit sur une des plages de la ville, est un adepte du joint bien roulé, et, à l’occasion, du trip intersidéral à l’acide. Avec son meilleur ennemi, le flic Bigfoot, il enquête sur l’étrange disparition du milliardaire et homme d’affaires Mickey Wolfmann. Tous deux ont de bonnes raisons de tirer au clair cette intrigue, d’en avoir peur, de se perdre en route pour mieux rebondir à grand... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (19) Voir plus Ajouter une critique
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La force tranquille d'un génie, décidant cette fois-ci de nous pondre un pot-pourri.
Des références à la pelle, issues du cinéma et des séries noires ; du « Big Lebowski » à James Ellroy, dans le Los Angeles de 1970, époque charnière de la Contre-Culture, début d'un certain morcellement idéologique, lent reflux de cette vague brisée depuis 65, sommet probable d'une culture occidentale à la recherche de limites, un nouveau monde cherchant à se débarrasser de l'ancien, le collectif pas encore vaincu par l'individu.

C'est sur ce fond de « Flower Power » en voie de flétrissure que Pynchon installe son intrigue, la suivant pour une fois sans réelles digressions ( autres que ses habituelles chansons ), se limitant à une centaine de personnages, toujours aussi divinement nommés, plein de sens cachés, usant de la botanique comme variation des possibles.
Cultivant avec une plus grande précision ces thèmes complotistes qui traversent toute son oeuvre, il se sert avec gourmandise de cette paranoïa que donnerait la consommation d'herbe et de buvards, enfumant cette histoire d'un brouillard psychédélique paradoxal : ne s'en servant jamais comme alibi à des faiblesses abstractives ou scénaristiques — laissant loin derrière le presque célèbre « Point Lynch-Marley » * — la drogue y servant de glaise primordiale, de base culturelle et cultuelle, autant que le rock ou le surf, essentielle au déroulement de l'histoire, comme à la formation d'une génération.

La singularité de ce livre, réputé à juste titre comme le plus accessible de notre géant, vient du fait qu'il nous raconte une histoire comme une véritable enquête, tel un authentique roman policier, réclamant ainsi une attention davantage « premier degré » que son habituelle nébulosité explosive, si complexe qu'elle autoriserait une lecture reptilienne, l'inconscient débrouillant l'affaire beaucoup mieux que la volonté de s'y retrouver.
Ici, chaque personnage a « réellement » sa place, le désormais indispensable www.pynchonwiki.com comme séduisante bouée de sauvetage, bien qu'encore une fois, rien ne soit imposé.

Là où le génie opère : la consistance de l'ensemble ; à mille lieux d'une simple impression de « sampling » **, défaut inhérent à une certaine musique de ce début de millénaire ( souvenez-vous, par exemple, du « Peuple de l'herbe »… ), Pynchon agrège en donnant un caractère statuaire et définitif à l'ensemble, cataloguant-compressant en finalement peu de pages féminisme et libération sexuelle, cause raciale et interrogation de la violence, bourgeoisie haineuse et contre-culture hésitante, livrant à la génération millenium un document possiblement historique, à qui voudrait bien lire, comme d'habitude, entre les lignes, telle une forme sophistiquée de « rétro-prophétisme ».
Oui, oui, rien que ça… ( ne pas oublier qu'on allait lui donner le prix Pulitzer en 74 pour « L'Arc-en-ciel de la Gravité », avant que quelques rabougris pudibonds ne s'y opposent… et ne parlons pas du Nobel… ) Jamais oublier à qui vous avez affaire…

Un véritable trip, porte d'entrée (et de la perception) possible dans l'une des plus grandes oeuvres littéraires qu'il soit, héraut de cette Contre-Culture sans en avoir réellement fait partie… ce grand inconnu que l'on appelle Thomas Pynchon, toujours menaçant le monde de l'une de ses monumentales créations…

* Point « Lynch-Marley » :
tel son cousin le point Goodwin pour ce qui est de son occurence, le point « Lynch-Marley », ( nommé d'après ces deux grands artistes incompris que sont David Lynch et Bob Marley ) désigne tout discours appelant à l'univers supposé du premier, ou bien se référant à ce que fumait le second, soulignant ainsi la faiblesse d'abstraction de l'individu l'employant.
(voir ma critique de « Mantra » par R. Fresan pour une meilleure contextualisation, à travers la préface fumeuse du romancier argentin Alan Pauls )

** le sampling (ou échantillonnage en français) est une technique qui consiste à utiliser une source sonore (beat, voix, etc.) préalablement enregistrée et de l'intégrer dans un autre contexte musical.
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Attention ce roman contient du LSD et de grosses doses de fumettes !

Concentrez-vous, Concentrez-vous !
Voilà un roman qui requiert toute votre concentration. Un roman qui ne se lit pas à la va vite sur une plage (j'ai essayé pourtant) et ne cède pas a la facilité. Il faut aller vers lui, le conquérir car on peut vite s'y perdre tant Thomas Pynchon digresse. Ce qui fait tout le sel du bouquin.
On est dans ce qui ressemble à un polar mais personne ne s'intéresse vraiment à l'enquête, ni l'auteur ni le lecteur et ce n'est pas ça l'essentiel.
D'ailleurs, il serait vain et difficile d'essayer de catégoriser ce livre.

Ancré dans le début des 70's, un vent de liberté et d'insouciance souffle encore sur les personnages même si on sent bien que cette frivolité se désagrège et annonce un changement d'époque.

Lawrence "Doc" Sportello est un sacré personnage, c'est le privé le plus branleur et le plus défoncé que vous rencontrerez jamais. Capable de s'endormir partout même pendant ses investigations sous l'effet de narcotiques que la loi réprouve mais qu'il adore. Doc passe son temps à avoir des visions certainement causés par cette injection continue de substances illicites.
Obsédé du braquemart, ce garçon est toujours en rut dès qu'il se trouve en présence d'une représentante de la gent féminine.

Un privé atypique et haut en couleurs que l'écriture serrée et évaporée de Thomas Pynchon sert à merveille.

Vous pouvez fumer ce roman, page à page. Des effluves psychédéliques sortant de l'encre et imprégnant vos doigts, vous êtes prêts pour le trip définitif. Embarquez ! 4/5
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Et sinon, ce livre, il parle de quoi ?
Question récurrente concernant l'oeuvre de Thomas Pynchon, mais soyons honnêtes, ici pour le coup, la trame est plutôt limpide. Mais attention hein, la trame seulement : Doc Sportello, hippie californien quelque peu sur le retour tourne détective privé à ses heures perdues, alors quand son ex copine dont il aimerait bien en faire son avenir vient lui parler d'un gros bonnet de l'immobilier qui serait sur le point de se faire enlever puis interner en hôpital psychiatrique par sa femme et l'amant de celle-ci afin de toucher au grisbi, ça éveille vaguement sa curiosité au départ et puis finalement toute son attention quand son ex-potentielle-future-chérie disparait et qu'il se retrouve (je vous passe les détails un chouïa alambiqués) impliqué dans l'affaire plus qu'il ne l'aurait souhaité.
Aux prises avec des flics limite ripoux d'un côté à qui il doit prouver son innocence et une organisation qui dépasse tout ce qu'il aurait pu imaginer de fraudes et de meurtres à l'international de l'autre, Doc a bien du mal à trouver le temps de s'organiser des petites sessions fumettes (mais qu'on se rassure, il y arrive toujours)
Trame assez claire donc...

Ce sont les à-côtés, par contre, qui semblent avoir été trempés dans de la bonne pas trafiquée. Ça part dans tous les sens, des personnages qui parfois ne font que passer mais qui n'oublient pas de se radiner avec leur lot de dingueries en tout genre, ceux qui sont plus réguliers mais dont la santé mentale n'est pas plus à envier et enfin Doc himself, obsédé par la gent féminine, toujours un braquemart d'avance, et tout ce qui porte jupon a droit à, au minimum, un petit coup d'oeil libidineux et, si c'est un jour faste, une bonne vieille séance de dedans-dehors. Obsédé donc, drogué sans conteste, mais malgré tout du bon côté, un bon fond, un personnage ubuesque haut en couleur qui sous le péta... la plume de Thomas Pynchon nous devient très vite attachant.

Parlons-en un peu de sa plume d'ailleurs, la facilité qu'il a de se colleter avec de délirantes phrases à rallonge et à en sortir gagnant à tous les coups laisse entrevoir le génie de l'écriture dont il n'a pas usurpé le titre. Il a beau nous balader à droite, à gauche, nous perdre régulièrement dans des délires aux chanvreuses frontières du compréhensible, pour un peu qu'on accepte de s'accrocher un minimum et de se prêter au jeu, on se retrouve devant un très bon moment de lecture et un coup de coeur assuré.
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Il y a chez Pynchon une dextérité qui laisse pantois. Un tact absolu. Ce don de la bonne distance si chère à Nietzsche. Qu'il concocte un récit époustouflant et rhizomique retraçant comment la modernité est née le jour où de Broglie eut l'intuition de lier le destin des ondes à celui de la matière, ou bien qu'il suive les zigzags d'un privé perpétuellement stone dans le Los Angeles des années 70, il parvient toujours à trouver l'endroit exact d'où tout doit être regardé, le ton juste pour raconter cette éternelle histoire faite de bruit et de fureur et qui ne signifie rien : la rencontre improbable de l'Homme et du Monde.

Ici, petit malin qui écrit comme un enfant regarderait un accident de la circulation en léchant sa glace à la fraise, Pynchon se lance dans une irrésistible relecture des codes du polar. Une enquête que personne ne comprend, un privé hard-boiled, des dizaines de personnages croisés le temps d'interrogatoires déjantés, de belles pépées vénéneuses, d'horribles brutes à croix gammées, des arrières salles enfumées, tout y est. Mais c'est un peu comme si Proust était en train d'écrire "Fais-pas ta rosière" : l'enjeu de la recherche de Doc Sportello au pays des hippies versus yuppies, c'est bien le temps perdu à se dire que la vie est ailleurs. Car le roman a beau être mené sur un rythme effréné façon Dick Dale & the Dale-Tones, derrière l'humour loufoque se tapit, en filigrane, un constat doux-amer. Finalement, tout le monde erre dans un brouillard impénétrable, en se cognant ou en se ratant. Oh, ce n'est pas que la Vie est mal faite, c'est juste qu'elle n'est pas faite pour nous. Ou nous pour elle. le vrai vice caché de nos existences, le voilà !
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Pynchon aborde le polar et comme d'habitude ne fait rien comme tout le monde ...
Cette histoire semble avoir était élaborée pour être lu dans un état second , à l'instar des autres oeuvres de Pynchon .
Il est quand même vrai qu'il s'agit ici du roman le plus accessible de l'auteur .
Avec un peu d'attention on accroche les bons rails et on se régale avec une histoire qui une fois encore pars dans tout les sens avec jubilation .
Un livre de Pynchon même dans un genre très codifié comme le polar , cela ne ressemble à rien de connu .
Pynchon avance en roue libre dans son imagination , quitte parfois à décontenancer un peu le lecteur néophyte qui tente vaille que vaille de suivre , et qui il est vrai peu se retrouver parfois sur la borne d'arrêt d'urgence .
Mais qu'il est bon de voir un auteur ne pas suivre les codes et partir dans un sens que lui seul connait !
Jubilatoire , comme tout les Pynchon !
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Citations et extraits (29) Voir plus Ajouter une citation
Revenu à nouveau chez lui, Doc s'en roula un gros, mit un film de deuxième partie de soirée, trouva un vieux tee-shirt, s'assit, et le déchira en courtes bandes d'un peu plus d'un centimètre de large jusqu'à en avoir entassé une centaine, puis alla sous la douche un moment et, les cheveux encore mouillés, prit de petites mèches qu'il enroula chacune individuellement autour d'une bande de tee-shirt, les faisant tenir grâce à un noeud d'arrêt, réitéra l'opération façon plantation du Sud sur toute sa tête, puis, après peut-être une demi-heure au sèche-cheveux, durant laquelle il s'endormit peut-être, ou peut-être pas, il défit les noeuds et, la tête en bas, brossa de la racine aux extrémités pour obtenir ce qui lui parut une coupe afro de Blanc relativement présentable, d'une cinquantaine de centimètres de diamètre.
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La dernière fois que quelqu'un se rappelait avoir vu un automobiliste noir à Gordita Beach, par exemple, des appels inquiets avaient été lancés sur toutes les fréquences des forces de l'ordre, un petit détachement spécial de véhicules policiers avait été constitué, et des barrages routiers installés tout le long de Pacific Coast Highway. Vieux réflexe de Gordita, datant de juste après la Seconde Guerre mondiale, à l'époque où une famille noire avait réellement essayé d'emménager en ville et où les citoyens, sur les conseils avisés du Ku Klux Klan, avaient mis le feu à la maison jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien et puis, comme si quelque ancienne malédiction avait pris effet, refusé d’autoriser qu'une autre maison soit jamais construite sur ce site. Le terrain demeura vide jusqu'à ce que la ville finisse par le confisquer et en fasse un parc, où la jeunesse de Gordita Beach, en vertu des lois de l'ajustement karmique, ne tarda pas à se retrouver le soir pour la picole, la dope et la baise, déprimant leurs parents, mais pas particulièrement la valeur du terrain.
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Myrna, une terrier à poil dur qui, plus âgée et un peu dure d'oreille, pouvait rester patiemment allongée pendant tous types d'émissions, attendant les publicités de pâtées pour chiens, dont elle était avertie, grâce à d'étranges perceptions extrasensorielles canines, une minute avant leur diffusion effective à l'écran. Quand c'était fini, elle tournait la tête vers n'importe quel humain à proximité et opinait avec emphase. Les gens crurent tout d'abord que cela signifiait qu'elle voulait sa pâtée, ou du moins grignoter, mais il semblait qu’il s'agissait davantage d'un acte de connivence, comme pour dire : « C'est quelque chose, hein ? »
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Ils sont en train de détruire la planète [...] La bonne nouvelle c'est que, comme toute créature vivante, la terre possède également un système immunitaire, et que tôt ou tard elle se mettra à rejeter les agents porteurs de maladie, telle l'industrie pétrolière. Et avant, espérons-le, qu'on finisse comme l'Atlantide et la Lémurie. 
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— L'or est pratiquement inactif au plan chimique, comme tu l'aurais appris à l'école si tu n'avais pas systématiquement séché les cours pour aller choper de la dope. 
[...]
— Les dents en or ne sont jamais en or massif, les dentistes aiment l'allier à du cuivre… Si tu n'avais pas séché les cours de science médico-légale pour aller planquer des enjoliveurs chez d'innocents hippies en vue de les coincer, tu saurais peut-être ça.
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Vidéo de Thomas Pynchon
À l'occasion de l'annonce du Grand prix de littérature américaine et des élections de mi-mandat aux Etats-Unis, le Book Club s'intéresse aux livres qui nous aident à comprendre l'Amérique d'aujourd'hui. Pour en parler, nous recevons Francis Geffard, éditeur chez Albin Michel et créateur du Grand prix de littérature américaine ainsi que Nicolas Richard, auteur et traducteur. Il a notamment traduit Hunter S. Thompson, Thomas Pynchon, Woody Allen, James Crumley, Stephen Dixon ou encore Quentin Tarantino.
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