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Critique de raton-liseur


Ce n'est pas que j'ai particulièrement aimé le premier tome, mais bon, le deuxième tome était dans le même volume, et puis j'avais le cerveau en compote, alors je me suis laissée tenter par le deuxième tome. Ça ne pouvait pas être pire de toute façon, et j'étais curieuse de voir ce que donnerait une romance écrite du point de vue de l'homme, puisqu'effectivement, le principe de cette série est que chacun des huit tomes est consacré à l'histoire d'amour d'un des enfants de la grande famille Bridgerton, nommés par ordre alphabétique, c'est plus commode pour s'y retrouver… le premier volume était consacré à Daphné, quatrième enfant donc mais première fille de la fratrie, et je suspecte que les autres tomes n'étaient pas tout à fait prévus, puisqu'on retourne ici à l'aîné (et surtout que les quatre derniers enfants sont assez absents ici, même s'ils auront droit à leur livre bien à eux plus tard. On peut me rétorquer que ce sont les différences d'âge qui font cela, fort bien, mais je ne peux m'enlever de la tête que cette série est le fruit d'un succès éditorial plus qu'une volonté d'auteur…). Ce second tome, donc, est consacré à Anthony, héritier du titre. Mais la narration ne change pas, le ton est toujours le même, et c'est toujours la femme qui est le centre de la narration.
Mais si les similitudes s'arrêtaient là, cela irait encore. Mais non, j'ai vraiment eu l'impression de lire deux fois le même livre, et là je risque de dévoiler quelques moments clefs de l'intrigue, donc futurs lecteurs s'abstenir… Dans les deux livres, les femmes sont saines et équilibrées (souvent belles mais pas selon les canons, et surtout plus intelligentes que les autres. Elles se plient aux conventions, mais elles ne sont pas dupes, elles, et elles sauront bien tirer leur épingle du jeu) et les hommes sont mauvais garçons mais attirants en diable et ils cachent une part d'ombre (un problème somme toute assez bénin, mais dont ils se font une montagne et qui semble guider leur vie au-delà de toute proportion). Voilà pour la psychologie des personnages. Pour l'intrigue, c'est pareil. Même mariage inévitable pour éviter une désapprobation sociale inévitable, même scène, ô combien burlesque, de l'explication des devoirs de l'épouse par la mère à la veille du mariage, même mise en scène de la première nuit d'amour (avec exactement les mêmes gestes de la part de l'homme. Je me suis demandé comment un tel mimétisme s'était opéré entre ces deux hommes qui par ailleurs ont fait les quatre cents coups ensemble)…
Impressionnant de voir à quel point l'autrice manque d'imagination, ou bien à quel point les standards du genre sont sclérosés. Je passe sur l'idée d'amour unique et éternel, c'est une obligation dans ce genre de livre. Mais c'est aussi la demoiselle forte mais qui au fond aime bien se soumettre à la force d'un homme et sentir sa propre vulnérabilité. C'est aussi un curieux mélange entre désir et amour : les femmes ressentent une curieuse chaleur qui les envahit, les hommes comprennent très vite qu'ils sont sexuellement attirés mais pensent que cela n'ira pas plus loin que le simple attrait physique. Enfin, une fois que tout est dit et tout est consommé, il y a l'injonction à l'obligation de copuler (car il semble que les personnages, en particulier les hommes, ne soient pas dotés de beaucoup de qualités oratoires lorsque l'on en vient à parler de sentiments. Il n'y a donc qu'au lit que l'on peut exprimer son amour, que l'on soit un homme ou une femme) et à la jouissance, toujours et encore, sont atterrantes. On parle beaucoup des injonctions des magasines et autres média qui nous donnent une vision un brin irréaliste de ce qu'est une vie sexuelle épanouie (tout simplement parce que cet épanouissement n'est pas le même pour tous…), et je m'aperçois que ce type de roman participe au problème. Si ces jeunes filles si pures s'épanouissent tellement dans le sexe, tout le monde doit s'y épanouir, n'est-ce pas.
Bref, j'arrête ici mon analyse à trois francs six sous, qui n'a d'original que le fait qu'elle montre à quel point j'ignorais tout de ce genre et de ses standards. Je suis atterrée, je crois que c'est le meilleur mot. Mais le pire, c'est que j'étais atterrée au moment où j'ai refermé le livre et que pourtant, je n'avais qu'une envie, c'était de lire le troisième tome. Qu'est-ce que cela dit de moi ?
Je n'avais pas le troisième tome sous la main et je ne pouvais pas me précipiter à la bibliothèque municipale, si bien que je me suis mise à lire de vrais romans et que cette envie m'est (fort heureusement) passée. Il ne me restera de ces deux premiers tomes de cette saga que la sensation de découvrir un genre qui m'était étranger, bourré de stéréotypes et de valeurs rétrogrades. Au moins, cette expérience m'aura appris quelque chose, mais ce que j'ai découvert, dans ma grande naïveté, ne me donne pas envie d'aller plus loin, et j'espère que les lecteurs de ce genre de livres lisent d'autres choses ou regardent d'autres films ou séries, pour ne pas se laisser emberlificoter dans toutes ces dangereuses niaiseries.
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