Voilà un roman qui nous balade à différentes époques et dans des lieux qui, pour être proches, n'en sont pas moins incroyablement éloignés…
Misérables ! de
Michel Quint vivent aujourd'hui à Calais, bien que l'auteur nous fasse faire quelques incursions dans d'autres lieux. Il nous fera revivre les années 80, le formidable espoir suscité par l'élection de Mitterrand, la désillusion qui s'ensuivit, mais aussi, plus loin dans le temps, la lente, douloureuse et inéluctable décrépitude de l'industrie de la dentelle à Calais et de l'industrie dans le Nord tout entier, avant de nous entraîner dans la Jungle. C'est Laurent Leprêtre, le personnage principal, qui va nous guider dans ces lieux. Il vient de trouver un nouveau boulot à Lille : dans une compagnie d'assurances, il est chargé des « dossiers en souffrance ». Depuis 2016 (seulement !), les compagnies d'assurances sont tenues de rechercher les bénéficiaires qui n'ont pas réclamé le capital auquel ils avaient droit. Les enquêtes, Laurent connaît bien : jusqu'à maintenant, il était flic, mais ce travail le minait ; il voyait trop de misère, de désespoir, d'iniquité, il éprouvait trop d'empathie pour annoncer à une famille le décès d'un proche. Bref, premier dossier en souffrance à traiter : Laurent doit retrouver Freddy Delersnyder à qui, en 1981, une vieille dame riche a légué la valeur de six lingots d'or quelques jours seulement avant de mourir. Pourquoi Freddy n'est-il pas venu réclamer ce legs ? ignorait-il que madame Henriette Benson lui destinait cet argent ? est-il mort ? Laurent va devoir répondre à ces questions. Il commence donc son enquête pour retrouver Freddy. Ses recherches vont l'entraîner à fréquenter des milieux sociaux très différents, du plus déshérité au très favorisé, et vont l'amener au coeur de la Jungle, parmi les bénévoles dévoués, les réfugiés désespérés et les passeurs cruels, indifférents ou corrompus, ou les trois à la fois.
Il y a beaucoup d'éléments qui m'ont plu dans ce roman de
Michel Quint, et j'ai aimé la trame globale de l'histoire. En revanche, si l'enquête proprement dite, une sorte de « cold case » menée par un ancien policier, m'a intéressée, je n'ai pas réussi à croire vraiment aux péripéties que Laurent imagine et fait vivre aux personnages qu'il a inventés pour leur donner corps puisqu'il ne les rencontre pas. Je ne sais trop pourquoi je ne l'ai pas suivi, peut-être parce que j'ai trouvé que cette fiction dans la fiction manquait trop de naturel... Je le regrette parce que j'ai bien aimé le style de
Michel Quint : beaucoup de phrases elliptiques, parfois proches de l'oral, parfois sans ponctuation, des passages au style direct au sein d'un récit, un vocabulaire qui exploite tous les registres de langues, mais sans condescendance. Sans compter l'amour de la littérature et une vraie passion pour différents auteurs qui traversent tout le roman. Je lirai d'autres livres de
Michel Quint !