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Critique de kuroineko


Découverte - et quelle découverte! - de l'écrivain belge Bernard Quiriny avec son Affaire Mayerling, tout récemment paru aux éditions Rivages poche. La quatrième promet un drôle de bazar dans la résidence Mayerling, nouvellement construite. Promesse tenue et au-delà.

Tout commence à Rouvières, 250.000 habitants, avec la discussion entre le narrateur et M. Braque, un homme de sa connaissance. Lui-même se régale d'observer attentivement les publicités immobilières et convertit son ami à cette lubie. Au détour d'ironiques (et si vrais) constats sur les sociétés immobilières, les promoteurs et le béton envahissant en général, les deux compères abordent l'affaire dite Mayerling. D'emblée on sait que tout s'est déjà passé. Et surtout que ça s'est mal passé.

Alors que la résidence promettait monts et merveille avec appartements de standing, calme, tranquillité, bel espace vert arboré tout autour, la réalité s'avère un cruel désenchantement pour les couples, familles ou célibataires qui y ont investi. Malfaçons à foison, atmosphère délétère qui pousse les plus amoureux à s'entre-déchirer, un espace vert... version étendue bourbeuse malsaine où rien ne croît, apparitions, tapage infernal et autres nuisances sonores, ... Bref, le calvaire de la vie en immeuble collectif, fût-il de prestige, d'exception, d'excellence ou de ce que tout les promoteurs inventent pour dorer la pilule.

Bernard Quiriny part de situations presque banales du secteur immobilier et du quotidien en appartements (on peut aisément se reconnaître dans certains cas...) et amplifie son sujet jusqu'à montrer le Mayerling lui-même, allégorie de toutes ces constructions de béton montées rapidement, dans un souci d'économie au détriment de la qualité et qui finissent par gagner l'ensemble de la planète, consciemment déterminé à pourrir l'existence de ses occupants. En moins horrifique et plus horripilant, le bâtiment m'a fait penser à l'hôtel Overlook du Shining de Stephen King.

C'est acide, féroce et ironique. C'est construit avec brio pour qu'on ne lâche pas le livre une fois commencé, avec de courts chapitres dynamiques et d'intéressantes digressions sur les oeuvres littéraires traitant d'immobilier (et ça donne envie de lire James Ballard et son I.G.H. ou Topor) ou sur le trafic de sable marin pour fournir toujours plus de béton. Bernard Quiriny peint ici une satire contemporaine où architectes, urbanistes, promoteurs et agents immobiliers en prennent pour leur matricule. Il critique sous cette forme d'humour noir la bétonnification galopante des villes, avec son cortège de laideur et toutes les conséquences que ça entraîne en cas de fortes pluies, et les méfaits des empilements humains comme dans des boîtes ajustées au plus près.

À la fois drôle et noir, j'ai plongé avec plaisir dans ce roman jubilatoire. J'ai vu que Bernard Quiriny écrivait également beaucoup de nouvelles, je compte donc lire ses recueils dès que possible. Après Barbara Abel et Armel Job, je poursuis ma découverte de la littérature belge et n'entends pas m'arrêter de sitôt.
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