Le plus spectaculaire se produisait chaque matin, lors de la messe, au moment précis de la communion. Soudain, drapé dans sa pèlerine noire lui descendant au bas des jambes, Frère Iréné quittait sa place, remontait lentement l’allée du centre de la chapelle, le pied glissant au ras du sol, jusqu’à se poser pour permettre à l’autre de le dépasser et se poser à son tour. Il paraissait monté sur coussin d’air. Quand il arrivait face à la table de communion, il opérait un virage à gauche qui déployait, dans un élégant mouvement arrondi, les plis de sa cape. C’était le moment attendu de l’office et les pensionnaires, qui en règle générale somnolaient, n’auraient pour rien au monde manqué cet instant magique. Mais ce qui distinguait vraiment Frère Iréné, c’est que depuis des années, jamais un élève n’avait pu se vanter de l’avoir entendu parler une autre langue que l’anglais dans une salle de cours.
Premier ouvrage d’un triptyque sur l’enfermement et les milieux clos, Le Pentin nous entraîne dans le monde aujourd’hui disparu des pensionnats catholiques au sein desquels, si la discipline n’était pas remise en cause, la rigueur et la qualité de l’enseignement n’en demeuraient pas moins au plus haut niveau.
Nous allons assister à la rentrée des classes de septembre 1962 tout en pénétrant dans l’univers du cirque dont le directeur n’est autre que le père de notre héros. Peu enclin aux études, Philippe n’aura de cesse de perturber le bon fonctionnement de l’Institution Saint-Jérôme. Tenant un journal intime lui permettant de s’échapper du quotidien, il relatera ses premiers émois amoureux en prenant des leçons d’équitation auprès d’une fascinante écuyère...