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J'ai énormément aimé cette tragédie racinienne, au point d'apprendre par coeur plusieurs tirades d'Esther.

Cette pièce occupe une place toute particulière dans l'oeuvre du grand dramaturge puisqu'elle fut commandée par Mme de Maintenon (que Louis XIV avait fini par épouser secrètement) pour ses demoiselles de Saint-Cyr, (élèves de la Maison Royale de Saint-Louis, cette école pour jeunes aristocrates désargentées créée notamment dans le souci de combler le vide poignant creusé en elle par l'absence d'enfant de son sang).

De ce fait, le thème biblique choisi par le tragédien convient à tous : à la commanditaire de l'oeuvre qui met un point d'honneur à en faire un exercice pédagogique et à l'auteur pétri de jansénisme et devenu historiographe du roi. Ce dernier viendra d'ailleurs honorer de sa majestueuse personne plusieurs répétitions et patronnera la première représentation donnée par les demoiselles au sein de leur école. "Esther" a la particularité de joindre au jeu des acteurs des scènes chantées.

Le thème de cette tragédie sacrée est issu de l'Ancien Testament. L'histoire de la Juive Esther est touchante, c'est l'incarnation de l'abnégation et du sacrifice pour sauver son peuple. A la beauté et la poésie de la langue (cette tragédie est versifiée bien-sûr) devait se mêler en parfaite harmonie la musique de Jean-Baptiste Moreau, hélas aujourd'hui introuvable.
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Le style de Racine est plus émouvant, plus flamboyant et plus évocateur que jamais, dans ses deux dernières pièces, dont Esther fait partie. J'ai souvent pensé en lisant cette pièce à la poésie de Hugo, à son style imagé, à ses élans lyriques, tellement, tellement évocateur. le style d'Andromaque n'était qu'exceptionnel ; celui d'Esther est inégalable. La fin est un peu classique, et Athalie est plus réussi. Et cependant, comment être insensible à ce torrent de vers, à ces scènes qui s'enchaînent, comme un torrent et qui émeuvent tant ? Comment être insensible à ce génie de Racine, bouillonnant d'images, de visions, de pensées ? Comment peut-on ne pas sentir la résonance de ces vers, qui sont comme une tempête, et qui emportent tout, et qui nous font partager les émotions de tous les personnages ? Comment peut-on ne pas être ému, plus qu'ému, bouleversé, à ce torrent de vers, si beaux, si grands ?
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Je poursuis la (re)découverte de l'oeuvre de Racine grâce au superbe cycle de lectures mis en place par France Culture et La Comédie Française. L'audio est d'une qualité remarquable. le texte est taillé pour l'opéra. Il est donc par définition condensé, ramassé sur un propos plus concis. La densité et la complexité typique de Racine est ici moins forte. Cela permet de rentrer davantage dans l'intrigue et les contradictions des personnages face à ces situations. La question juive est au coeur du propos, nous rappelant les origines de la haine, de l'absurdité de l'aveuglement et des tragiques dénouements que ce sentiment ne peut qu'entraîner. le personnage d'Esther est très touchant, poignant, fort et contrasté. Encore une belle plongée dans les tiraillements humains, bercée par une langue à la maîtrise parfaite et au propos qui nous rappellent que nos maux d'aujourd'hui viennent aussi d'hier.
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Esther est mariée au roi Assuérus, qui règne sur la Perse. Sur le conseil de l'ambitieux Aman, le roi a ordonné l'exécution des Juifs, ignorant que son épouse est elle-même juive.

Cette pièce assez courte (seulement 3 actes) tire son intrigue d'un épisode de la Bible, son sujet est donc essentiellement religieux, pour correspondre à la piété (bigoterie?) croissante de Louis XIV et son entourage. Attendez-vous donc à beaucoup de prières et de déclarations de foi de la part du choeur de jeunes filles juives qui tient une grande place dans la pièce, mais aussi de quelques autres personnages.

Je n'ai pas spécialement apprécié cette lecture, j'ai trouvé que le propos manquait de profondeur et était seulement prétexte à mettre en scène un épisode biblique sans en tirer autre chose. Il y a les gentils et les méchants, et un roi influençable, cruel par bêtise, qu'il est relativement facile de ramener dans le bon chemin. Pas de dilemme religieux ou moral, le roi écoute le dernier qui a parlé. le reste consiste en déclarations haineuses d'un côté et en lamentations et prières de l'autre.

Le seul point que j'ai trouvé intéressant est que les arguments avancés pour réclamer l'extermination des Juifs sont similaires à ceux qu'on a entendu régulièrement depuis. On constate à quel point on n'a pas évolué sur le sujet et c'est franchement choquant.

Comme toujours avec l'auteur, ça se lit plutôt facilement, bien que ce soit en vers et que certaines parties soient censées être chantées. Certaines répliques sont même assez inspirées. Mais j'ai quand même eu l'impression qu'avec cette pièce, Racine assurait juste le minimum syndical et ne s'était pas beaucoup creusé la cervelle pour étoffer l'intrigue ou creuser un peu les thèmes abordés.

En bref, une lecture plutôt oubliable, on est loin du meilleur de la production de Racine.
Lien : https://bienvenueducotedeche..
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"Esther" et "Athalie" sont les deux dernières pièces de Jean Racine, des coups de coeur, d'une perfection rare. Elles sont très différentes de l'ensemble des tragédies qui les ont précédées, plus simple, plus sobre, moins complexe, plus épique, aussi. Si elles peuvent sembler moins élaborées que d'autres pour cette raison, elles me semblent, pour ma part, figurer parmi les meilleures pièces du Maître ; certes, elles sont moins élaborées, moins complexes dans leur conception dramaturgique, mais cela leur donne une épuration et laisse la place au vers, au vers divin de Jean Racine, à ce vers dans Esther et dans Athalie plus parfait que jamais, ce vers épique, ce vers tragique, ce vers sensible, qui m'emporte, qui me transporte. Mais quel souffle !!! Quel souffle épique ce vers sait nous transmettre ! Ce vers, tout simple, fuse, il m'emporte, il m'émeut, il me transporte, il me transcende ; c'est un vers qui sait tout exprimer, un vers au plus haut degré de perfection, qui sait m'emporter dans des aventures épiques, me faire ressentir les malheurs intimes, la courage, la détresse, l'infâmie des personnages ; et, que dire de ce vers, sinon qu'il est beau et qu'il m'atteint au coeur ?
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Quand Racine écrit Esther, en 1689, il est plus courtisan que dramaturge, officiellement historiographe du roi depuis déjà quelques années. Il revient au théâtre pour plaire à Mme de Maintenon et écrit pour les pensionnaires de Saint-Cyr des tragédies où il réintroduit les choeurs lyriques.

Esther est une pièce d'inspiration biblique. L'action se situe à Suse, à une époque où les Juifs ont été réduits en esclavage. Aman, favori du roi Assuérus de Perse, les poursuit d'une haine féroce. Il a convaincu le roi de les exterminer parce que leur chef, Mardochée, a refusé de s'incliner devant lui.
Or, Assuérus vient d'épouser Esther, sans savoir qu'elle est la nièce de Mardochée.
La jeune reine intercède auprès du roi, lui apprend que son favori n'a cessé de calomnier son peuple, lui rappelle l'action de Mardochée qui a déjoué un complot contre Assuérus et ajoute qu'elle-même est juive…

Une intrigue réduite au minimum, en seulement trois actes, dont l'originalité pour les spectateurs et lecteurs d'aujourd'hui vient des évolutions et des chants du choeur qui marquaient, dans les tragédies sacrées de la fin de la carrière de Racine, une sorte de renouveau. Ainsi, des personnages issus du peuple participent aussi à l'action intime ou familiale en suivant les péripéties et en y réagissant de manière ponctuelle.
Ces passages chantés sont purement poétiques, lyriques, mystiques, opératiques… le premier est une lamentation en forme de prière, le second traduit l'anxiété du peuple puis célèbre le vrai Dieu et la félicité du juste opposée à l'attitude du mauvais ; enfin, le troisième est un Te Deum, un chant d'allégresse puisque la pièce finit bien.

Esther ne figure pas parmi mes pièces préférées de Racine.
C'est une pièce commandée qu'il est cependant utile de connaître. Mme de Maintenon souhaitait « quelque sujet de piété et de morale, une espèce de poème où le chant fût mêlé avec le récit ». Cette tragédie, inspirée de la Bible et du Livre d'Esther a dû la combler.

Pour les curieux, lien vers une excellent baladodiffusion sur France Culture :
https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/fictions-theatre-et-cie/esther-de-racine-9206890
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Pour apprécier "Esther", il faut connaître son contexte de création.

Madame de Maintenon avait connue une enfance difficile faite de privations. Une fois arrivée au sommet de l'État (elle reste tout de même la seule favorite à avoir été épousée par son roi !), elle encourage Louis XIV à ouvrir une institution pour jeunes filles, afin de prendre en charge puis instruire ces enfants délaissées de la noblesse pauvre. Il accède à sa demande, ce projet étant le parfait pendant des Invalides, édifié pour prendre soin des vétérans blessés et nécessiteux. La Maison Royale d'Éducation de Saint-Louis s'installe à Saint-Cyr et ouvre ses portes à 250 jeunes filles en 1686.

Le projet de Mme de Maintenon était d'établir un programme éducatif aussi poussé que ceux en vigueur dans les collèges masculins, offrant ainsi à "ses filles" une instruction plus complète que celle dispensée dans les couvents. En plus des rudiments, de nouvelles matières sont ajoutées, notamment le théâtre. Aussi, quand en 1688 le collège Louis-le-Grand s'illustre par la tragédie latine "Saül", la marquise caresse le secret espoir de les concurrencer. Elle aura recours à un dramaturge de renom pour la création de cette pièce, spécialement écrite pour Saint-Cyr : Jean Racine. L'auteur insistera dans sa préface sur le fait que son "Esther" est "une espèce de Poème" basé sur un sujet de piété, destiné à l'instruction. Il ne s'agit donc pas d'une véritable "tragédie". C'est pour cela qu'elle ne ressemble en rien à celles qu'il avait écrites précédemment.

Comme la pièce suit fidèlement le récit biblique, il n'y a pas de suspense. Esther, jeune Juive devenue reine de Perse, a le devoir de parler au roi pour sauver la vie de son peuple. Et ce au péril de la sienne, car quiconque se présente sans avoir été appelé par le souverain encoure la peine de mort.

Les vers de Racine sont toujours très beaux. Il ne manque que la musique pour entièrement les apprécier, car cette pièce a été conçue dans l'esprit des anciennes tragédies grecques. C'est-à-dire en mêlant les choeurs aux comédiens. Certains passages ont donc été spécialement conçus par Racine pour être chantés.

Autre bémol : le texte est truffé d' allégories au régime louisquatorzien et à ses guerres, à la bienfaitrice Mme de Maintenon, etc. Si on n'est pas parfait connaisseur de la période, certains vers peuvent paraître étranges et en décalage avec l'histoire présentée. le prologue de la Piété en est un exemple. Il s'agit en réalité d'un éloge dédié à Louis XIV. Racine redevient alors l'historiographe du roi et le courtisan.

C'est intéressant de découvrir cette pièce à thème religieux, peut-être plus pour son aspect "historique" (l'oeuvre de Mme de Maintenon, les filles de Saint-Cyr, la cour et le régime de Louis XIV) que pour son côté "tragédie". L'édition que j'ai lue contient les explications enrichissantes de Georges Forestier.
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Le prologue d'Esther fait déjà un tri parmi les spectateurs :

"Et vous, qui vous plaisez aux folles passions
Qu'allument dans vos coeurs les vaines fictions,
Profanes amateurs de spectacles frivoles,
Dont l'oreille s'ennuie au son de mes paroles,
Fuyez de mes plaisirs la sainte austérité :
Tout respire ici Dieu, la paix, la vérité."

Autant dire qu'ils seront bien déçus, les amoureux fous de la tragédie racinienne profane -dont je suis- avec son cortège de monstres et de pervers narcissiques acharnés sur de tristes victimes qui n'ont plus que leurs yeux pour pleurer...

Tout dans "Esther" baigne dans la religiosité, le sacré: chantez choeur des Hébreux, résonnez trompettes du Temple... Assuérus roi des Perses est l'arbitre brusquement touché par la grâce, Mardochée figure une sorte de prophète du peuple élu, Aman, un avatar satanique et Esther, vierge et presque martyre,est l 'héroïne qui sauve son peuple, la médiatrice entre le Dieu biblique et le peuple du Livre..

La structure en trois actes a elle aussi de quoi surprendre chez ce classique: retour aux normes aristotéliciennes comme on retourne, pour le sujet, aux sources bibliques d'un christianisme dont louis XIV vieillissant et secrètement marié à cette bigote de Mme de Maintenon,( née...Françoise d'Aubigné !) a fait le fer de lance de sa politique, après la Révocation de l'Edit de Nantes.

D'ailleurs, si Racine cède aux sirènes de la propagande royale et aux pressions de l'influente Françoise, il ose glisser une discrète protestation contre cette Révocation: les Juifs d'Esther épargnés par Assuérus semblent inciter Louis XIV à se montrer un roi plus tolérant...

Le vers racinien est toujours aussi mélodieux, inspiré, vibrant...mais j'avoue humblement être plus sensible aux divinités solaires, chtoniennes, ou marines du paganisme qu'aux pompes christiano-bibliques , et donnerais dix Esther pour une Phèdre ou une Hermione......Mais comme dirait Séraphin Lampion, c'est mon avis et je le partage...
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Tragédie de Racine dans laquelle il est déjà question du peuple juif en tant que fléau de Dieu, et ce, deux siècles avant l'arrivée d'Hitler au pouvoir. Je savais que le peuple juif avait toujours était considéré en tant que tel mais, à part dans certains écrits religieux, c'est la première fois que j'en entend parler dans une oeuvre littéraire aussi vieille que celle-ci.

Esther et Mardochée , son père adoptif, arrivent à déjouer un complot visant le roi Assuerus et lui sauvent la vie. Esther devient donc rapidement la préférée du roi qui lui accorde toutes ses grâces. Cependant, ayant appris que, sous les conseils de son favori Aman, le roi s'apprêtait à exterminer le peuple juif, persuadé que celui-ci complote contre lui. C'est alors que se produit un magnifique renversement de situation dû à Esther qui invite chez elle Aman ainsi que le roi afin de dévoiler à ce dernier que son père adoptif et elle- même sont juifs et que leur peuple n'a nullement l'intention de se retourner contre lui. Etant convaincu de la véracité de ses dires puisqu'elle et Mardochée lui ont sauvé la vie, le roi comprend alors qu'Aman a voulu se jouer de lui par seul but de vengeance personnelle et décide de la faire exécuter.

Bien qu'il s'agisse d'une pièce de commande de la part de Louis XIV et de Madame de Maintenon-cette dernière ayant ouverte une maison pour les jeunes filles nobles, elle entend bien à veiller sur leur éducation- Racine ne s'est pourtant pas trahi en respectant les consignes qui lui avaient été faites puisqu'il a été fidèle à lui-même qinsi qu'à ses aspirations religieuses. A découvrir !
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Le chant du cygne de Racine .Pour complaire à la toute puissante et bigote épouse morganatique du roi-soleil (couchant) Racine revient au théâtre qu'il avait abjuré par bouffée janséniste . Mais pour atténuer le péché il va puiser son inspiration dans la Bible.Bien que peu enclin aux bondieuseries et trouvant le sujet d'un manichéisme absolu,je reconnais la magnificence du vers racinien qui en rend la lecture plaisante.
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