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EAN : 9782870034415
Couleur Livres (01/05/2008)
1/5   1 notes
Résumé :
"Voilà onze ans, j'ai commencé à travailler dans une usine. J'emballe depuis des piles de papier. Le produit sort de la machine, je vérifie sa conformité. Je pose dessus un plastique. Puis un "top" en bois compressé. Je scotche les quatre coins. Colle une étiquette avec un code-barre. La mets sur la zone d'emballage avec un transpalette. Puis j'attends la suivante. J'en ai emballé cent mille. Huit heures pour apprendre mon métier et seize mille huit cents à gamberge... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
En une bonne quarantaine de brefs chapitres thématiques, d'une écriture à la fois tendue et sobre, rageuse et pourtant intériorisée, un homme nous parle de ce son travail. Ou de ce qui devrait être son travail mais n'est plus que son calvaire. Un acte répétitif, machinal, déshumanisé, dont celui qui le fait ne voit ni le sens ni le but.
On n'en est certes plus à « Daens » ou « Misère au Pays noir ». Mais l'usine tue toujours. Des travailleurs, par accident, parce que trop d'investissements de sécurité grèveraient les bénéfices. Mais aussi, et surtout pour l'auteur, les rêves, la sensibilité de ceux que ses entrailles engloutissent chaque jour. La part de vie qu'elle leur ravit excède de plus en plus le temps qu'ils y passent. Ils rapportent chez eux la fatigue, l'abrutissement par le bruit, l'énervement des cadences abusives, la révolte, l'autodévalorisation. Ils perdent la force de profiter de ce pour quoi, en fin de compte, ils aliènent une part de leur vie, le bonheur en famille, les amis, la nature, la maison, le jardin.
Alors, pour tenir le coup, Vincent de Raeve analyse.
Les technocrates que l'on paie grassement pour masquer de leur novlangue une « rationalisation du travail », terme jocrisse pour dire l'accélération des cadences. Les petits chefs qui jouent les cabots afin de garder leur poste. Les manipulations pour entretenir la peur et la division du personnel, comme le recours aux intérimaires sous-payés qu'on mène par la carotte d'un improbable contrat définitif.
Certes, il y a la « rage au ventre », mais il faut honorer les traites, la maison, la voiture. Alors, on bricole ses petits trucs pour tenir, la somatisation, parfois un certificat d'interruption de travail pour ne pas craquer mais surtout pas trop. Cacher un livre et vite lire quelques lignes entre deux palettes. Jusqu'au refus d'aller chercher la boîte de chocolats jetée en pâture à Noël, question de dignité. Et, bien sûr, l'activité syndicale, aussi critique soit-on envers ses capitulations.
Vincent de Raeve n'est pas dupe. La plupart sont complices de leur aliénation. Et les modes de vie que la plupart adoptent, poussés par leurs instincts grégaires, assurent la pérennité du système : « Je vois des gens qui vont chercher des enfants à l'école (…) Leurs gosses sont habillés comme à la télé (…) déjà vaincus, façonnés par la pub. Les papas ont des jantes alu, des lecteurs dvd dans leurs voitures ».
Et Vincent de Raeve d'aspirer à « un travail qui remplisse mon vide, un travail avec et pour des êtres humains, un travail d'ouvreur de portes, qui m'en ouvre également. » Un travail pour lequel on pressent que l'auteur finira par s'arracher à l'usine.
Des paroles à méditer chaque fois que nous posons dans notre caddy un article sorti de ces chaînes briseuses de rêves.
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