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« La conscience de l'anarchie »

Contre toutes les oppressions, la vie de Fred Barthélémy traverse le XXe siècle et son histoire comme une étoile filante.
Véritable viatique de l'utopie en marche et du mouvement libertaire, le livre de Michel Ragon est une fresque sociale passionnelle qui balaie l'histoire du regard des laissés-pour-compte. Pour ne pas oublier et espérer.

« Il suffit de quelques uns pour que la mémoire des vaincus ne sombre pas dans le néant. »
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Magnifique fresque qui nous permet de découvrir de l'intérieur la Grande Histoire.

Grâce à un personnage fictif, anarchiste et libertaire, l'auteur nous fait vivre et rencontrer des personnes bien réelles qui ont participé à écrire les grands faits du XXème siècle.

Depuis la Commune de Paris en passant par la Première Guerre, la Révolution Russe, le Front Populaire en France, la Guerre d'Espagne, la Seconde Guerre Mondiale jusqu'à mai 68, vous découvrirez, à travers le parcours de cet homme, L Histoire en marche en étant au plus près des évènements.

Je n'en dirai pas plus et préfère, si vous voulez en savoir plus, vous renvoyer vers la magnifique critique faite par Hardiviller sur cet ouvrage et qui m'avait incité à le lire.

Ce livre me renvoie juste à Robert Margerit qui sur le même principe d'un personnage inventé, nous fait découvrir et participer à la Révolution Française, n'hésitant pas comme dans ce présent ouvrage, à nous faire asseoir à la table de personnages illustres.

Si vous aimez L Histoire, la petite et la grande, alors....



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C'est avec beaucoup de respect et avec beaucoup d'empathie que Michel Ragon a ecrit cette biographie romancee d'un homme (fictif? avatar de quelqu'un qui a reellement existe et dont il cache le vrai nom?) qu'il nomme Fred Barthelemy et qui represente a lui tout seul la trajectoire des anarchistes au XXe siècle. Et il a reussi a m'inoculer cette empathie.

C'est une histoire de luttes populaires, de reves et d'ideaux qui ont marque la realite europeenne et occidentale pendant pres d'un siècle. Des bombes de la Bande a Bonnot jusqu'a l'apres Mai 68, en passant par la revolution russe d'Octobre, la guerre civile espagnole, les emprisonnements et deportations de la deuxieme guerre mondiale, et les efforts pour publier une presse libertaire tout le long du siècle.

C'est la memoire de gens qui ont lutte pour une meilleure societe et qui ont ete vaincus par l'histoire. Vaincus? Ceux qui luttent, qui n'arretent pas de lutter, peuvent-ils etre jamais vaincus? Pas vraiment, ils renaissent a chaque fois de leurs cendres, comme le phenix. Et ces vaincus continuent peut-etre leur lutte par l'entremise du livre de Ragon: la lutte pour une memoire non diabolisee. La memoire de societes revees, de revolutions qui ne purent jamais etre menees a terme mais a chaque tentative conquerant de nouveaux esprits, de nouveaux lutteurs.

Autour de ce Fred Barthelemy fictif Ragon fait vivre nombre de personnages historiques reels. Des libertaires francais oublies comme Paul Delessalle, Rene Valet, Louis Lecoin (je les cite pour que leurs noms soient ecrits encore une fois, ils meritent bien ca) et des figures comme Lenine, Trotsky, Victor Serge, la feministe avant l'heure que fut Alexandra Kollontai, le meneur de paysans ukrainiens Makhno ou l'espagnol Durruti. Il raconte l'acharnement des communistes contre les libertaires, acharnement que nous comprenons aujourdh'ui quand nous savons que ce qui se targait d'etre une dictature du proletariat n'etait que la dictature d'un parti.

Ragon a ecrit un beau livre. Je me repete: il a reussi a me faire partager son empathie pour son (en fait ses) heros. Dans cet etat d'esprit je clos ce billet avec des mots de Leo Ferre:
Les anarchistes
Ils ont un drapeau noir
En berne sur l'espoir
Et la melancolie
Pour trainer dans la vie
Des couteaux pour trancher
Le pain de l'Amitie
Et des armes rouillees
Pour ne pas oublier
Qu'y'en a pas un sur cent et qu' pourtant ils existent
Et qu'ils se tiennent bien bras dessus bras dessous
Joyeux et c'est pour ça qu'ils sont toujours debout.

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"Le pouvoir est maudit, c'est pourquoi je suis anarchiste"
Louise Michel


Récit de la vie d'un homme et de ses idées, "La mémoire des vaincus" oscille entre la fresque historique et la biographie romancée, pour mener le lecteur dans les méandres de l'Histoire et vers des piles de livres à lire, s'il se trouve captivé par le propos.

Cela tombe bien, Fred - Gavroche des années 1910, rencontre un jour les livres chez le libraire libertaire Paul Delesalle et ce sont ces livres, les publications de tous ordres que l'adolescent va avidement faire siens, dans la librairie de cet homme, qui vont déterminer sa vie. Tout autant que les rencontres fortuites quand il faut trouver un endroit où passer la nuit, un endroit où se mettre à l'abri avec Flora, petite fille évadée d'une vie trop dure et dont il se sent responsable.

Des Tranchées de la Grande Guerre à la Révolution Russe, des balbutiements du communisme russe au Front Populaire en traversant la Guerre d'Espagne, c'est l'honnêteté d'un homme épris d'une idéologie qui est contée : des erreurs, il en fera, qu'il ne contestera pas, trop innocent, trop naïf, trop pressé de voir la vie quotidienne changer, devenir plus équitable mais l'égalité masque la liberté et en perdant la primordialité de cette notion précieuse de liberté, il se laisse emprisonner dans un régime politique dont il s'aperçoit vite qu'il n'est qu'une prison autre pour l'homme simple qui n'aspire qu'à vivre de son travail.


Passionnant récit qui nous fait rencontrer les grands hommes de l'époque, qui nous fait croiser les meneurs d'idées. Captivant propos qui nous présente de nombreuses pistes pour lire davantage L Histoire avec autant de lampes éclairantes qu'il y a d'interprétations sans ne garder que celle des manuels et celle de ceux qui la déguisent pour s'en arranger.

A ceux qui pensent qu'"Anarchie veut dire Terrorisme", donnez le livre.
A ceux qui pensent que "les idées libertaires sont dépassées", donnez le livre.
A ceux qui pensent que l'égalité est le fondement, parlez leur de la liberté comme emblème premier.

Alors oui, c'est un récit de l'Histoire teinté d'idées libertaires, oui, c'est une histoire de l'Anarchie au vingtième siècle, mais quelle gifle, quel bonheur de penser que l'utopie pourrait se réaliser. Ce livre donne le droit de rêver à une autre vie. Quel espoir de se dire que la vie sans gouvernants, sans pouvoir, sans jalousie pourrait être, que le vivre-ensemble pourrait être une réalité, que le mot solidarité pourrait prendre toute sa puissance.
Il suffirait de quelques hommes de bonne volonté et de quitter ce mode de pensée qui fait que l'homme désire toujours, jalouse toujours, est avide et jamais résigné de son bonheur.


Fred a traversé les chaos de l'Histoire, il nous reste de sa "mémoire", à méditer les possibilités de ses idées... "Vaincu", il ne l'est pas puisqu'il a su me convaincre, mais peut-être l'étais-je déjà, persuadée qu'un mode de vie autre existe et qu'il serait urgent d'y attacher nos regards.


« Des prétendus morts nous accompagnent, vivent avec nous, en nous, plus que tant de vivants que l'on côtoie chaque jour avec indifférence. »
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"Y en a pas un sur cent, et pourtant ils existent, la plupart fils de rien ou bien fils de si peu, qu'on ne les voit jamais que lorsqu'on a peur d'eux -les anarchistes !" chantait Ferré, et c'est ce qu'illustre cette épopée de l'anarchisme en France, de la bande à Bonnot à Mai 68.
Ce roman est une biographie de Fred Barthélémy (personnage fictif), gamin de Paris qui va traverser l'Europe et le XXe siècle au gré des révolutions. Fervent anarchiste, il va croiser les grands noms de l'Histoire, de Moscou à Barcelone, mais également les écrivains et peintres de l'entre-deux-guerres.
J'ai adoré ce roman, qui fourmille d'informations sur le mouvement anarchiste, son idéologie et ses principaux représentants, et propose une interprétation libertaire de l'Histoire. Et même si cette interprétation diverge parfois de la mienne, j'ai apprécié l'enrichissement qu'elle m'offre.
Mais ce roman décrit également la France ouvrière de la première moitié du XXe siècle, entre l'usine, les bals, les dimanches en famille, et pose la question du militantisme quand on n'est pas un professionnel de la politique, mais que l'on rêve d'autogestion et de liberté.
Nul besoin d'avoir des connaissances approfondies en Histoire pour plonger dans ce livre, tant l'écriture de Michel Ragon est didactique sans jamais être pesante : on apprend à chaque page. Et difficile de lâcher ce récit qui, bien que sobre, vibre de sincérité, et nous place du côté des perdants de l'Histoire -pourtant initiateurs de quelques uns plus grands événements du XXe siècle, mais promptement effacés de la mémoire collective. L'auteur rend donc un hommage passionné et passionnant à tous ces anars qui "ont tout ramassé, des beignes et des pavés, (qui) ont gueulé si fort qu'ils peuvent gueuler encore, (qui) ont le coeur devant et leurs rêves au mitan, et puis l'âme toute rongée par des foutues idées" (Léo Ferré).
Un roman hautement recommandable, pour qui souhaite s'ouvrir un peu plus l'esprit, et préserver et transmettre cette mémoire des si beaux vaincus.
Salut et fraternité.

Et très grand merci à Hulot pour m'avoir fait découvrir ce livre.
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En cette période électorale, il est amusant que je lise un livre qui met en scène un homme qualifié de libertaire et qui revendique son appartenance à l'anarchie.
Pour être honnête, j'avais une vison assez étriquée de ce qu'étais pour moi un anarchiste : pour moi cela se résumait à poseur de bombe ou assassin de personnes célèbres. Oui, la réalité est un peu plus compliquée que cela.
Michel Ragon nous entraine dans une sacrée page d'histoire en nous faisant découvrir un personnage assez incroyable et terriblement vivant : Fred Barthélemy. Ce dernier, jeune parisien , va côtoyer toute une brochette de personnages ayant fait l'histoire avec un grand H. de certains membres de la bande à Bonnot jusqu'à son séjour dans la toute jeune république soviétique où il rencontrera Lénine, Trotsky et bien d'autres, Fred est sur tous les fronts ( ou presque ) où souffle un vent de liberté ( quoique, quelquefois, ce n'est pas vraiment le cas, son séjour chez les soviets le prouvera parfaitement ) . Il continuera toute sa vie à défendre ses idées et ses convictions, même en risquant sa vie, son passage en Espagne pendant la guerre civile en est un bel exemple.
Homme entier, Fred est un personnage attachant qui traverse le vingtième siècle sans perdre son intégrité morale . Difficile pour moi de ne pas penser à nos politicards de tous bords qui sont eux aussi sur tous les fronts mais pas pour les mêmes raisons.....

Challenge ABC 2016/2017
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Avec Michel Ragon , les " vaincus " de l'histoire ont trouvé leur mémoire ( la formule n'est pas de moi ) . Le terme de vaincu me défrise ( " les trahis " est certes moins accrocheur mais " les perdants magnifiques " me conviendrait ) , il n'en reste pas moins que le texte nous met devant l'évidence qu'un parcours libertaire ne se résume pas comme le dit Crazinath à " poseur de bombe ou assassin de personnalités " .
La devise républicaine " liberté , égalité , fraternité " ainsi que le souligne paulotlet contient des idées qui ne sont pas contradictoires : peut-il y avoir liberté sans égalité , et sans fraternité , l'égalité et la liberté n'ont-elles pas de limites ?
Bien sur le personnage de Fred Barthélemy est une fiction mais non sans chair réelle ..... il se dit sur la toile en cherchant bien qu'il serait une sorte de mélange entre Henry Poulaille et surtout Marcel Body ( avec le B et le Y de Barthélemy ) .
Pas forcément objectif , le rédacteur de ces quelques lignes , vu les opinions affichées sur son profil , j'en conviens , mais ni Ragon , ni les libertaires ( en général ) , ne font de prosélytisme , ne cherchent à convertir à une doxa , ne se réclament de la perfection . Ragon le dit ainsi , dans ( La voie libertaire ) : la voie libertaire n'est pas confortable . Elle est , puisque minoritaire , la voie de la solitude et du doute ...... dés lors pourquoi aiguiller les autres sur ce chemin inconfortable ? Il est mieux de suivre sa voie et si d'autres ont de l'empathie avec votre démarche , accompagnons-les fraternellement en les laissant libres de se tromper en prenant les raccourcis ou les chemins buissonniers de leur choix . C'est un peu dans cette optique que Ragon nous relate la vision des " vaincus " ( décidément , j'ai du mal avec ce terme ) .
En début de livre Fred par sa faim de lecture copine avec un vieux bouquiniste , ce n'est pas à vous , babéliotes , qu'il faut expliquer ce que cela représente de chance et de bonheur ! ..... sur ses vieux jours Fred devient libraire , il transmet à ceux qui le fréquentent , ce que les livres lui ont donné .... un bon parcours d'autodidacte convaincu de l'acquisition des connaissances par ce biais .
Ayant moyennement apprécié " Un si bel espoir " de Ragon , c'est babélio qui m'a mis sur la piste de " La mémoire ... " , comme un juste retour des choses , je me trouve doucement contraint de vous inciter à lire ce livre et s'il vous convient , d'en faire autant . La lecture des 12 pages du prologue vous diront à peu de peine si le livre , entre vos mains , vaudra la peine que vous en poursuiviez la lecture . La première de couverture ( illustrée avec le tableau " il quarto stato " de Guiseppe Pelizza da Volpedo , s'il vous attire l’œil attisera votre appétence . Enfin , si le goût de l'histoire , la véritable , pas celle des " vainqueurs " vous tente , l'affaire est dite .
La citation de Péguy : " L'idéal c'est quand on peut mourir pour ses idées , la politique , c'est quand on peut en vivre " , illustre clairement l'engagement libertaire et donne raison à la critique de Crazynath . Il est tout de même , convenons-en , préférable de survivre à ses idées ..... ne serait-ce parce que se réalisera sans doute , l'utopie ou une de ses heureuses variantes , rêvons-en pour nous ou souhaitons-le pour les prochaines générations ..... " Nous aurons tout dans dix mille ans " disait dans un excès de pessimisme Ferré la mauvaise graine .
Les meilleurs livres ont quelques fois des imperfections et celles qui me viennent à l'esprit sont le peu de mots , voire les silences à propos de certains contemporains de l'histoire , tels qu'Emma Goldman , Louis Lecoin , et d'autres figures de l'anarchisme et de trop nombreuses lignes consacrées à des vauriens tels que Doriot et autres traîtres à la cause du communisme-libertaire ; Traîtres est le juste mot car si se tromper est permis , tromper les autres est moins glorieux . Ragon , relativise cela , il montre mais sans condamner , nous laissant juges de le faire ou pas et à l'instar d'Ivo Andric semble avoir semblable pitié envers ceux qui font le mal comme envers ceux qui le subissent .
Veuillez me pardonner d'une si longue critique ( dont je ne suis pas coutumier ) et si vous n'aimiez pas ce livre , je reçois volontiers les griefs , donc ne vous en privez-pas .
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Employer le vocabulaire " coup de coeur"pour ce roman historique est désuet...et pourtant c'en est un énorme ! Mon ami Hardiviller m'avait donné le désir de le le lire à travers sa très belle Critique et mon fils me l'a mis sur mon chemin,nous étions donc faits pour nous rencontrer !
Fred Barthélémy le personnage central du roman est , à priori,un personnage fictif mais à en croire certaines rumeurs, il ne serait pas totalement dénué de réalité. Quoiqu'il en soit,ce Fred m'a permis un voyage dans le temps et surtout dans l'histoire du mouvement anarchiste et de l'utopie libertaire de 1917 à notre époque. Fred n'est qu'un gavroche quand nous faisons connaissance avec lui. Déjà il tombe amoureux de Flora,fillette à l'odeur de poisson qui fuit la tyrannie de ses parents qui restera l'Amour de sa vie, mais aussi de la Liberté qu'il cherira jusqu'à son dernier souffle. Dès lors le long chemin de Fred n'aura d'autre motivation que la quête de la liberté, conjuguée au singulier mais surtout au collectif ! Aidé par le libraire Delsalle qui deviendra son père spirituel,il découvre la lecture à travers Les Misérables... propulsé quelques années plus tard sans le vouloir au coeur de la révolution Russe il va vivre pendant six ans le rêve révolutionnaire mais surtout la mise à mort de l'idéal révolutionnaire. Ils côtoie les plus grands comme le peuple,participe comme il le peut à promouvoir les idées anarchistes mais assiste à l'installation de l'hyper burocratie, aux luttes sanglantes pour le pouvoir qui font passer des plus beaux espoirs au pire de ce que peut créer l'Etat. Ainsi il voit abolir la peine de mort mais vit aussi les exécutions de la Tcheka, prône l'antimilitarisme et constate la militarisation de la classe ouvrière, applaudit les soviets et les voit remplacés par la dictature dite prolétarienne...une mutation terrible dont les anarchistes de tous pays n'auront de cesse de combattre.
Le roman est constitué de deux grosses parties. La première par ces six ans en Russie et la seconde par le retour de Fred en France. Après avoir tenté l'anonymat et une vie rangée par le mariage,la vie d'ouvrier chez Renault,il reprend la lutte car il ne peut tolérer que la mémoire de tous ceux qui sont mort pour la liberté ne soit bafouée. Surtout, il croit encore à la possibilité d'un autre monde et il veut contribuer à relier tous les partisants de cette cause. Il sera pris dans les remous et trahison du front populaire, embringué auprès des anarchistes Espagnol pour lutter contre Franco et la montée du nazisme puis continuera,autant que possible de porter le message de la liberté . Dans cette splendide fresque historique j'ai rencontré les personnages les plus influents,Lénine, Trotsky,Blum et tous les hommes politiques de cette période ,mais aussi les peintres,cinéastes,écrivains,penseurs. J'ai déchanté de bien de mes illusions sur beaucoup d'entre eux mais j'ai aussi découvert des personnages magnifiques, Makhno, Durruti... j'ai même retrouvé mon amoureux de la bd Les travailleurs de la nuit,Marius Jacob. Les femmes ne sont pas oubliées et j'ai aussi fait connaissance avec une des plus grandes féministes qui soient, Alexandra Kollontai...il y aurait tant à dire tant ce roman est riche sur tous les registres! Mais je me rends à l'évidence,je n'arriverai jamais à transmettre vraiment ce que j'aimerais . Si c'était une fiction,mes étiquettes seraient: trahison,complot,manipulations politiques,mais aussi : aventure,amour, solidarité,humanisme,et Liberté...
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Un anarchiste, aujourd'hui, est un type certainement marginal, vaguement dangereux, et sans doute tenté par un attentat à la bombe. Triste destinée pour un mouvement assez riche sur le plan philosophique, et qui a marqué de son empreinte le XXe siècle – même s'il a eu le mauvais goût de perdre toutes les batailles qu'il a menées.

À travers le personnage (fictif) de Fred Barthelemy, anarchiste convaincu, Michel Ragon nous fait parcourir tous les événements qui ont marqué le siècle : la révolution russe, qui a enfanté des mouvements anarchistes importants (Makhno en Ukraine notamment) et a compté des anarchistes dans les rangs bolcheviques, avant d'en être purgés une fois les guerres extérieures réglées ; et la guerre civile espagnole, pendant laquelle un mouvement anarchiste a émergé pendant plusieurs années, avant d'être écrasé.

On vit tous ces grands événements historiques de l'intérieur, avec un Fred Barthelemy qui fait partie d'une manière ou d'une autre des comités dirigeants. Cependant, on parle finalement assez peu des théories anarchistes proprement dites : Fred attire la sympathie par son enfance bohème, ses convictions intactes et son refus de la compromission même au coeur du pouvoir, et sa capacité à « prévoir » toutes les catastrophes qui vont arriver. Mais s'il est très utile pour souligner les erreurs et les inconsistances des autres, on en saura bien peu sur les dogmes qu'il est censé défendre.

Vivre la Grande Histoire en compagnie d'un personnage attachant, au coeur de toutes les intrigues était un vrai régal. Je recommande tout de même d'avoir un minimum d'intérêt pour la période : le livre est dense, et l'accumulation de toutes ces révolutions « poussiéreuses » aura un effet repoussoir sur beaucoup de lecteurs. Par contre, si vous avez déjà crié « Ni dieu ni maître » ou « No pasarán » une fois dans votre vie, plongez sur ce roman, vous ne le regretterez pas.
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J'ai lu, il y quelques décennies, ‘'Les mouchoirs rouges de Cholet'' et en ai gardé un excellent souvenir. L'auteur est mort en février dernier ; en parlant avec une amie, celle-ci m'a dit : ‘' tu dois absolument lire ‘'La mémoire des vaincus'' et m'a prêté le livre.
A noter : alors qu'on lui demandait, au cours d'un interview, quel était le livre dont il était le plus fier, Michel Ragon a répondu : « La Mémoire des vaincus, sans aucun doute. »

Le prologue m'a emballée et je n'avais qu'une hâte : lire la suite… car ce roman a pour trame la vie d'amis de l'auteur, esprits libertaires et anarchistes dans l'âme, hommes ‘'d'un autre temps''. Michel Ragon, « petit prolo, ayant commencé à travailler à l'âge de 14 ans », est un membre du mouvement libertaire : « Je me suis dit que j'étais le dépositaire d'une mémoire, ayant connu tous les militants anars quand j'étais tout jeune, et après (…) Je voulais faire un grand roman dans la tradition des grands romans populaires du XIXe siècle et par là même, y intégrer des personnages et des idées. (…) Fred est devenu un personnage extrêmement vivant, si vivant même que quantité de lecteurs ont pensé qu'il avait vraiment existé. Mais en réalité, il est le mélange de trois personnages.» (interview)

L'anarchisme, porté au pinacle par les uns, honni par d'autres… Lisez ‘'La mémoire des vaincus'' pour avoir une excellente idée de ce que cela implique à travers l'histoire d'un homme, fourmi invisible de cette partie de la grande histoire… idéaux et trahisons, réussites et échecs, espoirs et déceptions, condition ouvrière vs bourgeoisie, engagement militant vs vie sentimentale et vie de famille. S'y mêlent certains grands évènements côtoyés par ce mouvement, voire auxquels il a collaborés ou qu'il a rejetés : révolution bolchévique, front populaire, guerre civile espagnole, etc…

Un bémol, à mes yeux… « Je serais certainement devenu historien si j'avais fait des études » a dit l'auteur dans un interview ; cette vocation ratée fait souvent tomber le roman dans le livre d'histoire… ce que reconnaît l'auteur : « cela peut décontenancer le grand lectorat. »

L'union libertaire communiste a baptisé ce roman ‘'classique de la subversion'' : « Presque un siècle de la vie politique mondiale vue du côté des vaincus, des oubliés et des proscrits ». Je n'irais pas aussi loin et le définirais plutôt comme roman historique très instructif sur un mouvement dont on parle beaucoup sans le connaître vraiment …
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