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Critique de Sofiert


Pour poursuivre ma plongée en sorcellerie, j'ai choisi d'orienter ma chronique de ce roman en adoptant ce point de vue, alors même qu'il ne s'agit pas d'un livre de sorcière.
Dans un contexte de littérature fantastique, il s'agit davantage de suivre l'évolution d'une créature féminine aux prises avec son entourage et sa nature même. Ada est une creature composée de terre, de graines et de branchages , créée par son père qui avait besoin d'aide pour ses tâches de guérisseur.
Sue Rainsford a déclaré avoir beaucoup lu Simone de Beauvoir. On peut imaginer qu'elle a souhaiter créer une une femme qui n'est pas née femme mais a choisi de le devenir. En effet, si son père lui a assigné un genre en lui donnant un prénom féminin, elle n'est pas censée éprouver des sentiments ou des désirs humains. Et un obstacle, physiologique celui-là, l'empêche d'expérimenter sa féminité dans son corps.
" La première fois que j'ai voulu coucher avec un garçon, je ne savais pas du tout ce que je faisais. J'étais par terre, il s'est allongé sur moi et je l'ai serré très fort dans mes bras. Il a voulu la mettre en moi, mais il n'y avait nulle part où aller, il a eu peur et il m'a mordue. (...). Mais je ressentais une sorte de manque languissant – ce que les cures appellent, je le sais maintenant, le désir, ou la lubricité.
Enfin, je me suis créé une ouverture, à laquelle j'ai ensuite donné une bonne douzaine de noms différents, et j'ai pu accueillir Samson en moi. Il fallait pour cela que le désir soit assez fort, et quand ç'a été le cas, il est apparu ".

Ada crée elle-même son corps de femme, non seulement en ouvrant une fente dans sa chair mais en la nommant de différentes manières pour l'ancrer dans une réalité concrète. C'est par son désir et par sa détermination qu'elle valide une identité qui n'était que surface.
Cette opération de magie, conforme à la réputation de magicienne - guérisseuse - sorcière d'Ada, augmentée par une sensualité affirmée et par une sexualité toute neuve, a pour conséquence de la faire basculer dans la catégorie sorcière.
" Personne n'était au courant, pour Samson et moi. Nous avions tous les deux été très prudents, parce que nous savions que notre relation pourrait fâcher certaines cures.
Il y en avait qui voudraient me faire monter sur un bûcher, si elles venaient à l'apprendre. Il y en avait qui seraient jalouses, qui affirmeraient que je lui avais forcément donné un philtre pour l'obliger à coucher avec moi – ou que je lui offrais une forme de guérison plus puissante, plus efficace."

Sue Rainsford habille ses femmes de métaphores. Elle parle de la construction d'une identité de femme, du corps, de la chair, du désir et du sexe. Mais aussi, lorsqu'elle ouvre les corps des femmes-cures, de subir le fait d'être une femme dans la grossesse ou dans la ménopause. le corps des femmes suit un cycle de vie naturel, avec des fluides, des sécrétions et une maturation qui ne devraient pas être connotés négativement.
En toute connaissance de cause, Ada choisit d'être une sorcière, de vivre son désir sans complexes, même si elle doit pour cela commettre l'irréparable.


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