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EAN : 9782803671694
80 pages
Le Lombard (27/04/2018)
3.13/5   26 notes
Résumé :
Mars 1968. Tandis que partout dans le monde, la jeunesse manifeste pour la liberté et contre la guerre, « Le Monde » titre: « Quand la France s'ennuie »...
Mai 1968. Le Quartier latin s'embrase, mettant le feu à la France.
Pris dans le tumulte de cette révolution de tous les possibles, cinq jeunes gens issus d'horizons divers voient leurs sentiments les plus profonds jaillir dans le magma de cette éruption mythique.
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Critiques, Analyses et Avis (14) Voir plus Ajouter une critique
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Séduisante BD aux couleurs chatoyantes dont l'action se déroule en mai 68, en France. Focalisée sur les changements socio-culturels qui portent et amèneront ensuite ces événements.

Écrit à quatre mains, Éric Warnauts écrit le texte, Guy Raives s'occupe des couleurs, le reste étant réalisé en commun, cet album nous plonge directement dans l'action et les revendications porteuses de liberté de ces Journées de mai.

À travers le destin de cinq personnages dont les désirs et les espoirs vont illustrer cette période de notre histoire.
Sans doute trop caricaturale, pas assez incarnée, cette bande dessinée donne une certaine idée du 68, non pas de son souffle révolutionnaire, mais du besoin de changer le monde et des espoirs de liberté d'une jeunesse française corsetée.
Une chronologie mondiale et culturelle entérine le propos à la fin de l'ouvrage.
À lire, même si elle laissera peu de souvenirs...

Lu en mai 2018.
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Ce tome comprend une histoire complète indépendante de toute autre. Il est paru en avril 2018. le scénario est écrit par Éric Warnauts, les couleurs sont réalisés par Guy Servais (surnommé Raives), et les dessins sont le fruit d'une collaboration entre ces 2 créateurs. Raives & Warnauts ont collaboré sur de nombreux albums et sur plusieurs séries comme L'Orfèvre, Les suites vénitiennes, ou celle immédiatement antérieure à commencer par Les temps nouveaux, tome 1 : le retour.

Le 03 mai 1968 à Paris, un haut fonctionnaire appelle le ministre de l'Intérieur pour faire un point sur la situation à la Sorbonne. Il explique que des militants d'extrême droite sont en train de remonter le boulevard Saint-Michel, pour aller casser du gauchiste dans la cour de la Sorbonne. le ministre donne l'ordre au préfet de police de faire évacuer la Sorbonne, par les forces de l'ordre. Il s'en suit une intervention violente et des échauffourées. le 19 juin 1968, Jay Ferguson (ressortissant américain de 23 ans) est interrogé par le commandant de police Coutelis, à la direction de la police judiciaire. Il lui montre des photographies prises par Ferguson pendant les échauffourées. Retour au 18 mars 1968, Didier saint-Georges rend visite à Jay et remarque les nombreuses photographies d'une même jeune femme. Il propose à Jay de la retrouver en se allant à la fac de Nanterre, où il se rend directement dans le bureau de Bénédicte Dupont, la responsable du département étudiants. Ils trouvent le nom et l'adresse de la jeune femme : Françoise Bonhivers, habitant dans le septième arrondissement de Paris.

Dans l'appartement de Françoise, Sarah Tanenbaum, nue sur le lit, asticote Armand Dussard (médecin, propriétaire d'une clinique) avec qui elle vient de faire l'amour, sur la brièveté de l'acte. Il part un peu pensif, vaguement culpabilisé. Françoise revient après avoir fait les courses. Les 2 femmes évoquent la situation à la fac de Nanterre. Elles sortent dans une fête, le soir même et elles rencontrent Jay Ferguson et Didier Saint Georges. le 09 avril 1968, sur le quai de Montebello, les 5 amis se rencontrent : Jay Ferguson, Didier Saint Georges, Sarah Tanenbaum, Gilles Dussard (étudiant en médecine, fils d'Armand Dussard) et Françoise Bonhivers. le 06 mai se produisent des échauffourées dans le Quartier Latin, avec des rues dépavées, des barricades, et des affrontements contre les CRS. Françoise et Jay qui se trouvaient sur place ont réussi à se mettre à l'abri pendant la charge des CRS. le lendemain, ils prennent un café dans le septième arrondissement ; ils sont rejoints par Gilles. Ensuite Françoise et Jay se rendent à la fac de Nanterre, en se confiant sur leur histoire personnelle respective.

Quelle gageure que d'évoquer les événements de mai 1968 en 72 pages de bande dessinée ! Non seulement le mouvement a été documenté profusément, mais en plus sous des angles différents montrant son caractère protéiforme et complexe, ne serait-ce que les plans politique, social, culturel, idéologique, économique. Éric Warnauts & Raives ne se contentent pas d'aligner des lieux communs sur mai 1968, pour en brosser une image d'Épinal. Ils ont choisi de raconter les événements à l'échelle de 5 individus, en se focalisant un peu plus sur la relation entre 2 d'entre eux (Françoise et Jay), en montrant les événements par leurs yeux. Néanmoins leur narration ne se limite pas à une suite de scènes de rue ou de discussion, où les personnages se retrouvent au milieu des manifestations et des barricades. Comme dans leur trilogie précédente, ils utilisent également des inserts d'émissions radiophoniques sous la forme de cartouche de texte de la largeur de la page de manière sporadique (à 4 reprises), et les personnages échangent des informations sur les événements et les commentent, avec une conscience politique plus ou moins développée. Ils discutent également avec d'autres personnes venant apporter une opinion avec un point de vue différent et complémentaire. L'ensemble s'avère très dense en information, tout en donnant l'impression d'être léger à la lecture du fait de l'histoire personnelle des protagonistes. Les auteurs ont choisi un déroulement chronologique, en indiquant les dates de chaque scène, avec le dispositif narratif de l'interrogatoire de Jay Ferguson qui se déroule a postériori, mais sans pour autant introduire un jugement de valeur avec le recul que procure la connaissance du déroulement des événements.

De fait le lecteur se plonge dans une bande dessinée d'excellente qualité, à commencer par la narration visuelle. La reconstitution historique est impeccable qu'il s'agisse des modèles de voiture, de la mode vestimentaire, ou des différents accessoires. Raives & Warnauts détourent leurs personnages et les autres éléments de décors d'un trait un peu lâche, apportant une forme de spontanéité rendant les cases plus vivantes. Raives complète les informations visuelles ainsi encrées, par une mise en couleurs très riche, effectuée à l'aquarelle. Cette méthode lui permet de rendre compte de manière organique du relief des surfaces détourées, de l'ambiance lumineuse et des ombres fonçant certaines zones, des irrégularités de certains supports, ou encore des éclairages très particuliers, comme les couleurs psychédéliques dans une boîte. Il est indéniable qu'un des attraits visuels supplémentaires de cette bande dessinée réside dans sa dimension touristique. Les pages proposent une promenade dans le Quartier Latin, avec des façades haussmanniennes reconnaissables, un urbanisme parisien authentique, des alignements arbres bien respectés, etc. le lecteur peut constater que les artistes ont bien fait leur travail de référence, à la fois avec des documents d'époque, mais aussi avec une observation des artères concernées. Ils ont su combiner les 2 pour que leur narration ne donne pas une sensation de dessins figés par une reproduction trop appliquée de photographies d'époque, ni une reconstitution prenant trop de libertés.

Dès la deuxième page le lecteur peut apprécier la qualité de la narration visuelle des auteurs, avec une séquence de 3 pages muettes montrant les manifestants se rapprochant de la Sorbonne, puis la charge des CRS. Les artistes savent montrer des individus normaux avançant calmement d'un pas décidé, mais aussi l'efficacité des forces de l'ordre, sinistres dans leur uniforme noir. le lecteur se délecte d'autres pages muettes, lors d'une nuit d'émeutes avec incendie de voitures (pages 36 & 37), pour un début de soirée plus calme passée en solitaire par Françoise (page 42), pour une soirée d'étudiants (page 52), pour l'état d'un immeuble après le passage des CRS (en page 61, mais complété par 2 bandes de texte). le lecteur apprécie également la direction d'acteurs, de type naturaliste, sans exagération dramatique, lui donnant le sentiment de côtoyer de vrais individus. Au fil des séquences, il apprécie de découvrir une image inattendue, qu'elle soit ordinaire (comme le bureau de la responsable du département des étudiants), ou plus spectaculaire (comme un magnifique coucher de soleil sur la Tour Eiffel).

Au travers de cette bande dessinée, le lecteur revit une partie des événements de mai 1968, dans une reconstitution documentée et intelligente, rendue plus vivante par les croisements et les interactions des 5 personnages principaux. En fin de volume, il découvre 2 pages texte de consacrées à la chronologie des événements de l'année 1968, du premier janvier au 31 décembre. Cela le conforte dans le fait que les auteurs savaient qu'ils ne pouvaient pas tout condenser en 72 pages. Là encore dans cette frise chronologique, ils ont fait des choix. À la lecture, il apparaît qu'ils ont souhaité donner une ouverture sur d'autres pays : États-Unis, Tchécoslovaquie, Espagne, Vietnam, Allemagne, etc. Il y figure également des événements qu'ils n'ont pas intégrés dans leur bande dessinée, comme la marche de trente mille étudiants jusqu'à la tombe du Soldat Inconnu en chantant l'Internationale, le 07 mai 1968. Ils intègrent également d'autres éléments majeurs non liés à mai 68, comme la deuxième greffe de coeur réalisée par le professeur Bernard au Cap (02/01/68), les dixièmes Jeux Olympiques d'hiver (février 68), la victoire d'Eddy Merckx au Paris-Roubaix (05/04/68), la deuxième partie de la frise se concentrant sur les faits majeurs de la résolution de la crise de mai 1968 et les faits majeurs internationaux.

Arrivé à la fin du tome, le lecteur est en droit de se poser la question de ce qu'il a vraiment lu. Il s'agit donc par la force des choses d'une reconstitution partielle et partiale des événements de mai 1968. En premier lieu, il se demande à quoi sert vraiment le dispositif narratif de l'interrogatoire se déroulant après les événements principaux. Finalement les auteurs ne s'en servent pas vraiment comme d'un outil pour introduire un recul et donc un éclairage a posteriori avec la connaissance de ce qui s'est passé. Ils l'utilisent une fois ou deux pour montrer le décalage entre la déposition de Jay Ferguson et ce qui s'est vraiment passé, mais sans effet comique ou accusateur, ni pour Ferguson, ni pour le rôle de la police. Ayant refermé la BD, le lecteur se dit qu'ils l'ont utilisé pour lui montrer ce qu'il reste des faits au travers de ladite déposition : des événements dépassionnés, privés de ressenti, de l'exaltation qui a donné une partie de son sens à l'implication des uns et des autres.

À plusieurs reprises, le lecteur observe que les auteurs insistent sur la violence des forces de l'ordre, envers la jeunesse qui manifeste. Les 2 premières pages muettes condamnent sans appel cette violence. En page 38, une jeune femme explique qu'elle a vu un CRS la viser, un autre explique comment les habitants leur versaient de l'eau dessus pour atténuer les effets des gaz lacrymogènes. Mais en page 48, un adulte (le père dans une famille bourgeoise) explique que les médias font en sorte de ne jamais parler des violences commises par les manifestants, en particulier contre les CRS. Dans le contexte du récit, cette phrase devient ambivalente car elle est prononcée par un individu incarnant l'ordre établi, une forme d'autorité paternaliste. En fonction de sa sensibilité, le lecteur peut partager le point de vue clairement affiché des auteurs, ou s'en tenir au fait que pour beaucoup d'étudiants ce fut un premier contact avec une violence relevant d'une situation de combat qu'ils avaient pour partie provoquée. Au cours de la lecture, le thème de la lutte des classes ressort également à plusieurs reprises, en particulier au travers de la possibilité du rapprochement du mouvement étudiant, avec les revendications des ouvriers et la grève générale. La chronologie en fin de volume permet de se faire une idée plus nuancée de ce rapprochement potentiel. Par ailleurs les auteurs développent également le thème de l'émancipation de sa classe sociale avec un avis tranché : toute tentative est vouée à l'échec, que ce soit pour Françoise dont les valeurs sont incompatibles avec celles de la classe de la grande bourgeoisie, ou pour Gilles qui ne peut pas renoncer aux plaisirs matériels que lui procure l'argent.

Avec cette bande dessinée, les auteurs réussissent le pari un peu fou de présenter leur vision de mai 68, sans sacrifier à ses différentes dimensions et sans s'éparpiller. le lecteur en ressort avec la sensation d'un récit très cohérent, bien nourri, sans volonté de faire croire qu'il couvre tous les aspects de ce mouvement. Il a passé un moment de lecture très agréable grâce aux planches magnifiques des artistes, prenant le temps de la lecture pour mieux la savourer. Il en ressort un peu dépité quant au bilan que dressent les auteurs, bilan formulé par Bouba en page 46, indiquant que la classe ouvrière n'est plus une classe révolutionnaire et que les étudiants ne sont que l'avant-garde d'eux-mêmes. Dans le même temps, il constate également que les personnages ont tous été transformés par cette expérience, la majeure partie en mieux, et que même si les auteurs ne mettent pas ce point en avant, les étudiants ont pu faire entendre leur voix, ce qui a donné lieu à des transformations durable en profondeur, vers une société moins paternaliste et plus participative.
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Eric Warnauts et Guy Raives sont deux auteurs belges de bande dessinée, nés dans les années 60. C'est en se rencontrant en 1985, que le duo se lance dans l'écriture de récits historiques, mais pas que, puisque la force de leur écriture se trouve également dans l'aspect social des femmes et des hommes qui arpentent notre monde. Depuis trente ans, la paire de main de chacun ne forme plus qu'une pour nous faire voyager à différentes époques et dans différents pays. de l'Allemagne nazie avec Après guerre (2014) ou encore L'Innocente (2015), au Congo belge, en passant par la Venise libertine du 18ème siècle avec Les suites vénitiennes sans oublier l'Amérique de Barack Obama, les deux hommes tentent de retranscrire l'atmosphère des lieux, des événements, mais aussi la société humaine au gré de leur collaboration. En parallèle, Raives réalise des livres pour enfants aux éditions Mijade et met en couleurs les albums de divers auteurs (Jean-Claude Servais, Marc-Renier, Charles Masson). de son côté, Warnauts enseigne la bande dessinée à l'ESA Saint-Luc de Liège. En ce début 2018, ils nous reviennent avec Sous les pavés aux éditions Le Lombard, remémorant l'histoire marquante de mai 68 en France, qui fête son cinquantième anniversaire cette année.

Le scénario débute le 8 mai 1968 à Paris, les autorités et le gouvernement font face à une anarchie totale à la Sorbonne, où les différents mouvements montent au créneau. L'heure est grave dans la capitale française, et les choses ne vont pas aller en s'amenuisant, bien au contraire. La tension entre les travailleurs et manifestants d'un côté et de l'autre les CRS est à son paroxysme. Les coups pleuvent, les blessés tombent, les arrestations se multiplient. Parmi eux un ex-cowboy américain, Jay Fergusson, étudiant aux Beaux-Arts de Paris, avec son arme fétiche à la main : son appareil photo. Un mois plus tard, le voilà en plein interrogatoire au poste de police pour comprendre sa présence ce jour-là dans le quartier latin.

De ce point de départ, Warnauts et Raives nous raconte le parcours de cinq jeunes issus de milieux différents : Gilles Dussart étudiant en médecine destiné à suivre les traces de son père, Didier Saint-Georges originaire de la Guadeloupe et fils de député, Sarah Tenenbaum bourgeoise rebelle et libertine, et Françoise Bonhivers anarchiste révolutionnaire et fille de paysans. Si en ouvrant cette bande dessinée on pourrait s'attendre à lire un récit uniquement basé sur la politique et les engagements de chacun, il n'en est rien. Au fil des cases, l'histoire que nous narre Jay nous emmène non seulement explorer les rues de la capitale sombrant peu à peu dans un chaos et les enjeux politiques, mais aussi l'ivresse de la jeunesse, la liberté sexuelle assumée, les peines de coeur et les doutes liés au futur.

En ne se concentrant que sur ce petit groupe de personnes devenus amis, Warnauts et Raives prennent le temps de mettre en lumière les engagements politiques et motivations différentes de chacun. Les bulles bavardes viendront réimplanter le contexte de l'époque (Vietnam, etc), conférant ainsi une lisibilité historique que peut-être les plus jeunes ne connaissent pas. L'alternance entre passé et présent casse parfois le rythme, perdant quelque peu le lecteur dans la ligne temporelle des événements.

Si chaque personnage possède sa force de narration, le lecteur aura tendance à se sentir plus investi dans l'histoire personnelle de Jay ou celle de Françoise, mais aussi sur la relation qui les lie. de leurs mains liées, les deux étudiants se rapprocheront, nous berçant de leur découverte mutuelle mais aussi de leurs peurs. le passé trouble de l'américain viendra faire de l'ombre a la romance naissante, tout en mettant en avant un personnage fort et attachant. Arrivé en fin de tome, le tandem Warnauts et Raives laisse le soin au lecteur de se faire sa propre suite, tout en nous laissant peut-être espérer revoir Jay ou Françoise dans une future aventure… peut-être donc ? Mais, cela révélerait du mensonge de dire que les trois autres ne possèdent pas une quête personnelle se mêlant au récit.

Les dessins se veulent aussi réalistes que rêveurs. Entre la douceur du trait de Warnauts et les couleurs à l'aquarelle de Raives, le duo charme de par l'osmose qu'ils incarnent dans ce récit. Les rues de Paris ne nous sont jamais apparues aussi vivantes, torturées, belles et sales à la fois. le soin apporté aux détails propres aux années 60 trahit du travail de documentation fait par le duo en amont. La colorisation met bien en valeur toute la diversité que pouvaient être les années 60. Des couleurs flashy « peace & love », au gris des ruelles pavées de Paris, en passant par cette atmosphère de vie de bohème, tout y est. La représentation des corps dénudés est sensuelle et sans tabous aucun. Même si le découpage s'avère quelque peu classique, il sied bien au rythme de narration. On mentionnera également l'impact des planches « muettes » où seuls les scènes parlent au lecteur de l'intensité des actions.

Petit mot sur l'édition par Le Lombard qui signe ici un ajout de premier choix à sa collection « Signé », comprenant déjà les autres récits du duo, mais aussi ceux de divers autres bien connus comme Andreas, Hermann, Dubois, etc. le format est plus grand qu'une bande dessinée classique, soit du 241×318 contre du 225×298. Mais au vue du travail effectué il était plus que nécessaire de faire appel à ce format « prestige ». La qualité d'impression est irréprochable et rend vraiment justice aux graphismes de l'histoire. La couverture est tellement belle que l'on pourrait l'admirer pendant bien une heure durant. On remerciera aussi la chronologie historique en fin d'ouvrage nous permettant de situer les événements de 1968.

En conclusion, avec Sous les pavés le binôme belge montre toute l'étendue de sa capacité à revenir sur un moment percutant de notre Histoire, tout en révélant des personnages empreints de doutes, de forces et de faiblesses. Des rencontres humaines aux répercussions différentes mais complémentaires d'une génération emplie de rêves et d'espoir. Un témoignage percutant et sensible où les pavés des rues ne sont pas les seuls à voler en éclat.
Lien : https://lireenbulles.wordpre..
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Quand la France perdait son Latin

La France cultive inlassablement la radicalité et le romantisme révolutionnaire. A ce titre, la Commune et Mai 68 dans sa version étudiante, font l'objet d'une mythification assez inexplicable. A bien y regarder, il s'agit (contrairement à la Révolution française, l'autre panneau du triptyque déposé au pied de l'autel de la Gauche), de deux évènements parisiano-parisiens (1) qui n'ont pourtant guère ému le reste de la France, sans parler du monde.

Car si la Commune avait le mérite d'une originalité qui suscita l'intérêt d'un certain Karl M, c'est loin d'être le cas pour la « révolte étudiante » de 68 en France. Dès le début de l'année, des manifestations étudiantes fleurissaient un peu partout et notamment en Italie, à Prague évidemment, mais aussi en Pologne, au Mexique…

Cette BD a le mérite de bien mettre en lumière ce mélange d'exaltation puérile, d'aveuglement idéologique, mais aussi de soif de liberté, ce rejet du consumérisme, de la censure, des souvenirs du colonialisme, cette peur de basculer bientôt dans le « système »… dans ce carcan de la France gaullienne qui s'ennuyait.
Elle montre aussi le désarroi et l'incompréhension d'une classe politique issue des années de guerre, la violence policière d'un autre âge, l'illusion d'une possible convergence des luttes…Et fin mai, la fin de la re-création est sifflée avec l'immense manifestation de soutien au Général et les accords de Grenelle.

Depuis, la Gauche se persuade que la Révolution mondiale aurait pu prendre naissance à la Sorbonne (2), et la Droite, que Mai 68 a entraîné la décadence de l'Occident.

La construction de ce récit s'articule autour d'un interrogatoire de police qui permet de revisiter les évènements et de les reconstituer. Nous suivons l'itinéraire de cinq personnages porteurs chacun d'un bout de la vérité du mouvement. Eric Warnauts et Guy Raives déroulent un scénario éclairant et intelligent…à une exception près. Page 56, ils font dire à une caricature de bourgeois : « C'est comme dans une gare, tu croises des gens qui ont réussi et d'autres qui ne sont rien ». Cette référence sur laquelle il y aurait beaucoup à dire, est un anachronisme grossier et plutôt maladroit.

En dépit de cette réserve, le scénario est solide et la vision élargie de cet évènement totémique permet de le restituer et de le contextuer de manière assez équilibrée.

Quel dommage que le dessin, plutôt faible ne soit pas à la hauteur…La mise en couleurs et la composition sont pourtant soignées, mais les traits sont trop imprécis pour ne pas troubler par moments la lecture.


(1) Nougaro l'a bien illustré : "Mai, Mai, Mai, Paris Mai, Mai, Mai, Mai Paris". (Paris Mai)
(2) Renaud : "Ils se souviennent, au mois de Mai, d'un sang qui coula rouge et noir, d'une révolution manquée qui faillit renverser l'histoire. " (Hexagone)
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Mai 68 raconté de façon trop stéréotypée avec Des amalgames et des poncifs proches de la caricature.
Ce qu'on peut retirer de cette lecture, c'est que 55ans plus tard on rejoue la même partition, seuls les participants et leurs revendications ont quelque peu mutés.
Les émeutes m'avaient marqué du haut de mes trois ans et demi, habitant République, le feu était sous nos fenêtres et de notre balcon en me retournant j'avais déclaré " c'est le santier" ( comprendre chantier)avec mon cheveu sur la langue que j'ai heureusement perdu depuis.
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critiques presse (2)
BDZoom
07 mai 2018
On retrouve dans « Sous les pavés » tout ce qui fait le talent narratif (et graphique : quel bonheur de se replonger à leurs cotés dans le Paris de la fin des années 1960, tant les décors et costumes sont criants de véracité !) du duo Éric Warnauts & Guy Raives.
Lire la critique sur le site : BDZoom
BDGest
23 avril 2018
Les chroniqueurs ont du métier, ils ont signé une soixantaine d’albums, pratiquement tous ont pour cadre un passé plus ou moins lointain. Ils ne réinventent certes pas le langage du neuvième Art, mais ils savent raconter une anecdote en dosant savamment les ingrédients.
Lire la critique sur le site : BDGest
Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
Je veux exister pleinement dans mon corps, l’assumer dans sa totalité ! S’ils bavent dessus, c’est leur problème. Ça doit m’empêcher de rien...
Je dois pouvoir en disposer comme je l’entends... Il faut en finir avec cette société machiste !!!

Page 44, Le Lombard, 2018.
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"Laisse venir, laisse !" ne cessais-tu de me dire tandis que nous dansions ce mois de mai à une cadence folle, libérés des pas imposés... Je sais maintenant grâce à toi qu’il faut rêver pour s’éveiller et s’ouvrir réellement à la vie, que l’on n’y arrive pas les yeux fermés...

Page 75, Le Lombard, 2018.
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En les lançant à l’assaut des barricades, le pouvoir a révélé sa nature autoritaire. Mais ce soir la jonction s’est faite avec la classe ouvrière prête à s’opposer à lui. Tu as entendu l’Internationale couvrir les explosions des grenades ?

Page 39, Le Lombard, 2018.
Commenter  J’apprécie          460
Quand on critique radicalement quelque chose, on construit.

Page 70, Le Lombard, 2018.
Commenter  J’apprécie          551
L'anarchie est totale ! Il régnait une vraie psychose de guerre au sein des groupuscules gauchistes unifiés dans ce qu'ils appellent le mouvement du 22 mars le doyen Grappin, totalement dépassé, a fait fermer les facultés Sine die reportant de ce faut le problème sur la Sorbonne. Ici la rumeur court que les militants du mouvement d'extrême droite Occident remontent le boulevard Saint Michel pour venir défier les gauchistes qui occupent la cour centrale.
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