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EAN : 9782367320809
161 pages
Editions Chandeigne (22/05/2014)
4.18/5   19 notes
Résumé :
Dans Vies arides, aujourd'hui réédité dans une nouvelle traduction, Graciliano Ramos dépeint la situation sociale d'un Brésil nordestin où "convergent la dureté des rapports sociaux, la rudesse de ses habitants et la déshérence d'une région oubliée du reste du pays", mais c'est bien sûr la destinée de tous les hommes qui luttent pour survivre. Treize chapitres conçues comme des nouvelles, écrits dans un style réaliste et dépouillé, nous donnent tour à tour le point ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Merci à Masse critique de babélio et aux Editions Chandeigne pour cet ouvrage.
À travers ce récit, on suit la vie misérable d'une famille de fermiers du Sertao nordestin. Ils ne possèdent rien, ils n'ont aucune instruction. Rien ne pourra modifier leur destin car ils ne sont même pas capables de révolte. Leurs rêves sont limités, ils se contentent de survivre. Leur absence d'instruction les condamne à subir l'oppression du propriétaire, du soldat jaune, du juge.
Ils ne peuvent pas se défendre car ils ne peuvent pas exprimer leurs sentiments, ils ne peuvent pas non plus prouver qu'ils sont volés par le propriétaire. Ils n'iront jamais au bout de leurs rêves ni de leur révolte, car ils sont emmurés dans leur destin.
J'ai aimé l'écriture simple, avec des phrases courtes , ce qui traduisait bien l'état d'esprit de la famille. Ce livre nous parle aussi du Brésil d'hier et d'aujourd'hui, de la pauvreté qui règne toujours dans certaines régions les plus pauvres du Brésil.

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Ce livre fait partie des classiques de la littérature brésilienne. Je l'ai lu il y a très très longtemps, en portugais, ma langue maternelle.

Ce livre décrit la situation des petits employés (si on peut le dire comme ça) des petites fermes dans la région Nord Est du Brésil, dans les années 30, et la souffrance de la sécheresse qui fait souffrir la population, problème qui commence à être réglé, s'il n'y avait pas la corruption toujours présente dans le pays.

La description des personnages montrent le côté inhumain de leur situation : les parents, Fabiano et Sinha Vitoria (sont ils mariés ou juste en couple ?), les enfants qui n'ont pas de nom, la chienne Baleinne, qui elle a un nom. Un chapitre est dédié à la chienne et ses pensées, quand Fabiano la tue à cause de sa maladie.

La famille, comme tous les petits employés (si on peut utiliser ce nom), vit des cycles liés à la sécheresse. En temps de sécheresse, ils émigrent, à pied bien sûr, à la recherche d'un nouvel endroit, une maison ou fermette abandonnée au milieu de la caatinga. Ils portent juste quelques affaires dans leurs balluchons - soif et faim. Dans le premier voyage ils décident de tuer le perroquet, qui ne parlait pas, pour satisfaire la faim.

Ils retrouvent une petite ferme abandonnée... Des supposés propriétaires arrivent et les obligent à travailler pour un salaire qui suffit presque assez pour survivre. Fabiano s'occupe de quelques maigres vaches et chèvres. Il s'endette auprès de ses patrons qui font exprès de ne pas assez payer pour l'asservir.

Fabiano n'a jamais mis les pieds dans une école, ne sait pas compter et possède un vocabulaire très limité. Sinha Vitoria n'a qu'un rêve : avoir un lit en cuir au lieu du lit improvisé avec des rondins de bois.

A Noël ils vont à une fête foraine. Les enfants observent les objets en vente dans les baraques et se demandent si ces objets ont un nom et s'ils sont fabriqués par des humains.

Au bout d'un an, une nouvelle sécheresse et un nouveau départ... continuer leur vie de misère ailleurs.

Malgré leur ignorance, ils montrent une grande humanité, y compris la chienne, peut-être même plus que les enfants.

A la fin du livre il y a un glossaire... pas courant pour ce style littéraire. En fait, il n'est quasiment possible de traduire ce type de livre, à cause d'un "portugais rustique" qui n'est parlé que dans cette région du Brésil, mais aussi par la culture et mode de vie de la région. C'est commun à plusieurs romans et chansons de certaines régions du Brésil. Ça existe aussi en France et il ne faut pas aller très loin : certaines BDs de Astérix, par exemple.

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La littérature sud-américaine se détache de toute autre. Et quand on lit le mexicain Juan Rulfo ou le brésilien Graciliano Ramos, on touche les étoiles en même temps qu'on s'enfonce dans la terre nourricière et cruelle.

Il y a une poésie et un réalisme tout à la fois, qui chantent la misère et l'espoir : l'homme, la femme et le chien, cheminent dans le sertao, à la recherche d'un abri provisoire chez un propriétaire ou un autre, et touchent aux racines de la vie : la mort et les charognards les suivent dans leur longue marche vers l'eau, le travail et la nourriture. A peine s'installent-ils que la sècheresse exterminatrice les chasse vers un autre lieu tandis que l'enfant demande à se mère ce que signifie le mot "enfer" et que le propriétaire, le "blanc", n'oublie pas d'exiger les intérêts de l'emprunt qu'ils ont sollicité.

Tous les personnages sont attachants, c'est tellement simple et beau qu'on est ému comme devant quelque chose d'éternel, et ce qui est éternel, c'est le cheminement, entre joie et désespoir : oui, la vie est une fuite entre un néant et un autre, mais tout le monde n'a pas les mêmes cartes en main pour la durée du voyage.

Bien sûr la prise de conscience politique affleure chez le paysan pauvre. Les mots lui manquent encore, et son raisonnement défaille, mais il sait que son émancipation passera par eux.
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Avant de parler du contenu du livre, je souhaiterais m'attarder sur le "contenant". Je ne connaissais pas les éditions Chandeigne et j'avoue être sensible au livre en tant qu'objet. Cette maison d'éditions est une belle découverte: la couverture est sobre mais j'aime surtout la qualité du papier. J'ai pris plaisir à lire ce livre car le support était agréable et l'histoire intéressante.

Pour en venir au vif du sujet, nous voici donc plongés en plein coeur du Brésil dans un lieu aride. Cette sécheresse nous pèse à nous lecteurs et nous souffrons terriblement avec les personnages.
Tout est accablant: le paysage, la chaleur mais aussi et principalement les conditions de vie de cette famille qui survit à peine. le rêve de sinha Vitoria se résume à dormir dans un lit digne de ce nom et non sur de simples rondins de bois.
Le plus dur est la prise de conscience de Fabiano: " Mais est-ce qu'on ne voyait pas qu'il était fait de chair et de sang? Il était obligé de travailler pour les autres, bien sûr, il savait où était sa place. Bien. C'était son destin, il était né comme ça, personne n'est coupable d'être né avec un mauvais destin. Quoi faire? Est-ce qu'il pouvait changer son destin? [...]
Il était un malheureux, il était comme un chien, on ne lui jetait que les os. Pourquoi est-ce que les riches lui prenaient encore une partie des os?"
Cette fatalité est présente tout au long du livre et le lecteur ne peut que s'identifier au personnage.

Ce qui m'a beaucoup plu dans ce livre, c'est tout le vocabulaire de la faune et la flore qui nous fait voyager dans ce sertão: les préas, les mandacarus, les buissons de macambira, la caatinga, etc. Cela nous transporte immédiatement dans ce paysage aride.

L'écriture est simple et nous sommes plongés très rapidement au coeur de l'action. Une belle découverte faite grâce à masse critique et aux éditions Chandeigne (merci pour le marque-page!).
N'hésitez-pas à venir voyager dans ce coin du Brésil, vous découvrirez une famille certes en souffrance mais très unie, attachante, et qui poursuit son chemin, sans relâche, en quête d'une vie meilleure...
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Treize courts récits écrits fin des années 1930 forment ce roman aride et poignant, tournant autour d'une famille, le père, la mère et les deux jeunes fils, fuyant la sécheresse d'une région du Brésil inhospitalière et désertique. Se réfugiant dans une ferme abandonnée, ils vont tenter de se reconstruire mais, exploités par un patron dénué d'humanité, l'espoir d'un avenir meilleur paraît bien compromis.
Tour à tour, l'auteur nous livre le point de vue intérieur de chacun des personnages, ainsi que celui du chien, Baleine, lien central de la famille.
Pas question ici de déclaration d'amour ni de sentiments, la communication se limite à des grognements, des jurons, des coups, à la limite de la bestialité.
A la rudesse du pays, se reflète la rudesse de ses habitants, la difficulté d'exprimer ses pensées et même le refus d'avoir des pensées.
Dans un réalisme total, les personnages sont tous soumis à la domination et leur sentiment d'infériorité et de culpabilité les empêchent constamment de s'élever ou de se rebeller. Mais malgré la grande détresse dont ils sont l'objet, alors qu'ils sont prêts à tout abandonner, prêts à tuer, prêts à sombrer, une étincelle les fait rebondir et entrevoir une petite lueur d'espoir, la lumière semble au bout du tunnel.

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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
Mais est-ce qu'on ne voyait pas qu'il était fait de chair et de sang? Il était obligé de travailler pour les autres, bien sûr, il savait où était sa place. Bien. C'était son destin, il était né comme ça, personne n'est coupable d'être né avec un mauvais destin. Quoi faire? Est-ce qu'il pouvait changer son destin? [...]
Il était un malheureux, il était comme un chien, on ne lui jetait que les os. Pourquoi est-ce que les riches lui prenaient encore une partie des os?
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Sans leurs noms les choses demeuraient distantes, mystérieuses. Elles n’avaient pas été faites par des gens. Et ceux qui les manipulaient commettaient une imprudence. Vues de loin, elles étaient belles. Émerveillés et craintifs, ils parlaient bas pour ne pas réveiller les forces étranges qu’elles tenaient peut-être enfermées
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- Fabiano, tu es un homme, s'exclama-t-il à voix haute.
Il se retint, remarquant que les enfants n'étaient pas loin, sans doute allaient-ils s'étonner de l'entendre parler seul. Et, à bien réfléchir, il n'était pas un homme : il n'était qu'un pauvre bougre occupé à veiller sur le bien d'un autre. Rouge, tanné, il avait les yeux bleus, la barbe et les cheveux roux ; mais comme il vivait sur une terre qui n'était pas la sienne, soignait des bêtes qui n'étaient pas les siennes, il se découvrait, s'effaçait en présence des blancs et se considérait comme un pauvre bougre.
Il regarda autour de lui, inquiet que la phrase imprudent eût pu être entendue par d'autres que ses enfants. Il se repris en murmurant :
- Tu es une bête, Fabiano.
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(p. 28-29)
Il fit claquer ses doigts. La chienne Baleine accourut lécher ses mains grosses et velues. Fabiano reçut la caresse, s'attendrit :
- Tu est une bête, Baleine.
Il vivait loin des hommes, il ne s'entendait qu'avec les animaux. Ses pieds durs brisaient les épines et ne ressentaient pas la brûlure du sol. À cheval, il se collait à sa monture, ne faisant qu'un avec elle. Il parlait une langue chantée, monosyllabique et gutturale, que son compagnon comprenait. À pied, il était maladroit. Il penchait d'un côté et de l'autre, les jambes arquées, laid et tordu. Il s'adressait parfois aux gens dans la même langue qu'il adoptait avec les bêtes - exclamations, onomatopées. En réalité il parlait peu. Il admirait les mots longs et compliquées que les gens de la ville employaient, il essayait d'en reproduire certains, sans succès, mais il savait qu'ils étaient inutiles et peut-être dangereux.
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Immobile, patiente, Baleine regardait les braises et attendait que la famille aille se coucher. Le bruit que faisait Fabiano l’importunait. Dans la caatinga, lorsqu’il poursuivait un bœuf, il s’époumonait. C’était normal. Mais là, à côté du feu, pourquoi tant crier ? Fabiano se fatiguait inutilement. Baleine en avait assez, elle s’assoupissait sans pouvoir dormir. Il fallait que sinha Vitoria enlève les charbons et la cendre, balaye le sol et aille se coucher avec Fabiano sur le lit de rondins. Les enfants se coucheraient sur la natte, sous l’étagère, dans la salle. Elle avait envie d’être tranquille. Elle passait toute la journée à guetter le moindre de leurs gestes, essayant de deviner des choses incompréhensibles. Maintenant elle avait besoin de dormir, de se débarrasser de ses puces et de cet état d’alerte auquel on l’avait habituée. Quand le sol aurait été balayé, elle se faufilerait entre les pierres, se roulerait en boule et s’endormirait bien au chaud, dans l’odeur des chèvres mouillées et au milieu des bruits inconnus, comme le clapotis des gouttières, le chant des crapauds, la rumeur de la crue. Des petites bêtes libres, indomptées, viendraient lui rendre visite.
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Video de Graciliano Ramos (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Graciliano Ramos
Mathieu Dosse traducteur de "Mon oncle le jaguar & autres histoires", de "À Lisbonne j'ai pensé à toi" nous parle d'une autre de ses traductions : "Vies arides" de Graciliano Ramos. Il évoque également, "Les récits de la Kolyma" de Varlam Chalamov.
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