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Critique de MarcelineBodier


Pour moi, « Juju », de « la bibliothèque de Juju », est un chroniqueur qui a deux caractéristiques : il a un style très reconnaissable, à base de phrases courtes et simples, séparées en paragraphes aérés qui rendent ses chroniques toujours très agréables à lire, même quand on se doute qu'on n'aimera pas le livre dont il parle ; et il se centre toujours sur l'émotion qu'a suscité sa lecture, et cette émotion est généralement intense. Je n'ai relu aucune de ses chroniques avant de rédiger la mienne, pour me remémorer au plus juste l'impression générale que je me suis faite au fil des mois avant de lire son premier roman : j'étais préparée à l'expression d'une sensibilité exacerbée, à des émotions exacerbées, à un mélange de rires et de larmes.

Il y a tout cela dans Grandir un peu.

Mais je me suis aussi demandé si une de ses chroniques en particulier m'avait marquée, et c'est le cas : c'est celle de Point cardinal de Leonor de Recondo. C'est un livre qui peut recevoir deux lectures opposées : soit on le lit comme un livre sur le transsexualisme, auquel cas il n'est peut-être pas le meilleur livre sur le sujet, ne serait-ce que parce qu'il ne correspond pas à l'expérience personnelle de l'auteure ; et celles et ceux qui le reçoivent comme ça ne l'aiment pas forcément. Soit on le lit comme un livre sur le désir d'être reconnu pour ce qu'on est vraiment, auquel cas il devient un livre universel qui grossit à la loupe ce désir que nous avons tous ; et celles et ceux qui le lisent comme ça peuvent aller jusqu'au coup de foudre. Quand j'ai ressenti ce coup de foudre, je me suis rendu compte que d'autres l'avaient eu aussi, et que « Juju » en faisait partie.

Or, Grandir un peu est au carrefour de plusieurs histoires qui sont toutes des histoires d'affirmation de soi : « grandir un peu », c'est ça, c'est passer de l'état d'enfance où on se laisse dominer, que ce soit par gentillesse, par peur, par culpabilité, ou encore par faiblesse, à un état où on ose dire tout haut ce qu'on a envie d'être. Chacun.e trouvera le personnage qui lui correspond le mieux. Pour ma part, j'ai trouvé le livre particulièrement réussi lorsqu'il relate l'expérience de Lucas, un jeune homme homosexuel, qui ne vit pas son homosexualité comme un problème et qui ne trouve pas qu'elle soit impossible à affirmer, mais qui ne rencontre quand même pas que de la bienveillance autour de lui, même de la part des personnes qui comptent le plus. Lucas n'est pas le seul personnage qui traverse le livre en « grandissant un peu », mais c'est celui auquel il m'a été le plus facile de m'identifier.

Pourtant, je ne suis ni homme, ni homosexuelle. Mais j'ai ressenti quelque chose de proche de ce que j'avais ressenti à la lecture de Point cardinal : l'identification au personnage ne se fait pas sur ses caractéristiques physiques visibles, mais sur cette expérience de l'affirmation de soi. Lucas doit grandir sans guide évident, dans une vie ponctuée d'abandons, en s'appuyant sur des adultes qui, même s'ils ont l'air solides, comme sa grand-mère, doivent se débrouiller avec leur propre charge de culpabilité cachée.

Mais il s'affirme, et en disant cela, je ne spoile rien puisque c'est ce que le titre du livre annonce. L'histoire est donc à la fois dans le style du chroniqueur qui distille bienveillance et émotion dans toutes ses chroniques, et dans le style du lecteur qui a reconnu en Point cardinal un sommet de la littérature de l'affirmation de soi. Un livre qui m'a prise par surprise, et qui s'est avéré être une belle surprise.

Et ci-dessous, pour celles et ceux qui aiment le style très rythmé des chroniques publiées sur le site de 20 minutes, le lien vers ma chronique !
Lien : https://www.20minutes.fr/art..
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