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EAN : 978B001BTW3FE
Grasset (30/11/-1)
3.67/5   9 notes
Résumé :
Fin juillet 1918, un colporteur biblique nommé Caille, va de fermes en maisons de village, en passant aussi par les champs, le lac et l'usine. Il rencontre ainsi tous les habitants, enfants, ménagères, ouvriers, vignerons, pêcheurs et paysans, à qui il essaie de transmettre le message de l'Apocalypse de Jean : " Les Signes sont parmi nous ". Certains l'écoutent, d'autres le rejettent, mais tous l'entendent et l'interprètent à leur manière. Puis tout à coup, les élém... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Voici une oeuvre totalement "expérimentale" de notre cher C.F. Ramuz (1878-1947)...

Nous sommes le 31 juillet 1918 dans un endroit réputé "de Paix" : orages lointains des dernières semaines de la "Grande Guerre" (mais on ne le sait pas encore)... Dernières convulsions mortelles d'une épidémie de grippe dite "espagnole"... Ombres rougies, sans cesse renaissantes, de la Grande Révolution de 1917 en terre tsariste... Un orage de grêle qui s'annonce sur les coteaux du bord du Lac...

Unité de lieu, unité de Temps... De l'aube à la nuit tombée... Vingt-quatre heures d'une (fausse) Tragédie en XV chapitres et l'une des 21 oeuvres dites "romanesques" les plus courtes du prosateur-poète suisse & universel...

Caille, le colporteur évangéliste, en sera le principal protagoniste, le fauteur de troubles (mais aussi le f...teur de m...e, en un sens !). Sauf que cela lui sera - au final - lui sera fatal, d'annoncer ainsi - perpétuellement, d'atelier en atelier, et de maison en maison - que "Les Temps" (de l'Apocalypse) sont Enfin Venus ! Qu'il "faut se préparer", etc. (...) Que les Cieux s'entrouvriront...

Cette petite bourgade au bord du Lac (ce Lac Léman, que nous reconnaissons, bien sûr !) va-t-elle résister à tout ce qui lui tombe du ciel ? Les canons à grêle que l'on tire (car la Guerre n'est-elle pas déclarée par les viticulteurs contre les forces de la Nature ?) sauront-ils calmer les fulgurances et la noirceur diabolique du grand ciel ? Jusqu'aux ouvriers de la Verrerie qui se mettent en grève, avec leurs cannes à souffler le verre sur l'épaule - tenus comme des crosses de fusil... Hypnotisés par les nouveaux Temps, dirait-on... et dangereux ! Ils se mettent à tout casser (jusqu'au piano désaccordé) dans la salle-à-boire du café jouxtant leur usine ...

C'est qu'ils ne sont pas si pacifiques, eux, dans leur hypnose idéologique collective, contrairement aux ouvriers verriers bavarois mis en scène que dans le très beau, très secret et encore tout flamboyant "Herz aus Glas" ("Coeur de Verre", 1976) de Werner HERZOG...

Souvenons-nous de son argument : " En Basse-Bavière, au XVIIIe siècle, un maître verrier, Mühlbeck meurt en emportant le secret de la fabrication du Verre-Rubis. Le berger Hias, qui possède un don de voyance, prédit dans le même temps la destruction du village et l’Apocalypse. Le maître de la verrerie se lance corps et âme dans la recherche de la formule du Verre-Rubis, sa quête tournant bientôt à l’obsession. Il entraîne avec lui les villageois qui, bientôt, accomplissent les prédictions de Hias…"

Pour ces "Signes parmi nous" de RAMUZ, nous pouvons dire qu'il s'agit d'un récit impressionnant mais que sa construction (hésitante ou chaotique) est parfois déroutante. Expérimentation, oui... Recherche visible d'une nouvelle forme de récit.

RAMUZ cherchait donc, une fois de plus, à "changer de forme", changer de peau... et cela se sent souvent à son style parfois tâtonnant, beaucoup moins maîtrisé - car volontiers redondant malgré les multiples réécritures de son "récit"... et un perfectionnisme qui va ici jusqu'à une certaine "souffrance" perceptible dans l'écriture (néanmoins toujours très poétique).

Les personnages - bien que crédibles - ont du mal à s'imposer à notre conscience.

Ceci dit - et entre nous - cette oeuvre de 1919 sera à mes yeux toujours plus crédible que, cent ans après ces "Signes", le septième opus de l'insignifiante Grand'Oeuvre houellebecquesque, qu'on nous présente depuis quelques semaines comme "L'Evénement Littéraire" [???] de ce début d'année... (On peut, en effet, s'étonner d'un très curieux unanimisme critique devant l'indigence et l'insignifiance de cette habituelle "apocalypse" stylistique et artistique dont le contenu narcissique frise l'anecdote).

"Les Signes parmi nous" viendra juste après les flamboyants romans-poèmes que demeurent "Le Règne de l'esprit malin" (1917) et "La guérison des maladies" (1918).

L'exigeant RAMUZ se relèvera (à nos yeux) dans les années qui suivront "Les Signes parmi nous" en publiant un exceptionnel nouveau chef d'oeuvre en 1921 : "Terre du Ciel" (ré-édité sous le titre "Joie dans le Ciel" en 1925 par Bernard Grasset)... un ouvrage que nous venons également de critiquer. :-)
Lien : http://fleuvlitterature.cana..
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Voilà un drôle de livre, qui tient du récit métaphorique autant que du conte mythique. Et qui résonne étrangement dans l'actualité de ces derniers jours…

Les Signes parmi nous, de Charles-Ferdinand Ramuz, nous place dans les pas de Caille, colporteur qui parcourt la campagne vaudoise alors que résonnent au loin les derniers sons des combats de la Première guerre mondiale. Vendeur de la Bible en porte à porte et plus précisément annonciateur de l'Apocalypse, il arrive dans un village où les signes s'accumulent.

Car ici, la maladie frappe et commence à décimer les habitants ; la révolte gronde dans les usines ; les esprits s'échauffent dans le café ; l'orage gronde et se rapproche ; l'avenir apparaît difficile. À l'invitation de Caille, certains y voient le moment tant annoncé et redouté tandis que d'autres s'imaginent qu'en repoussant l'annonciateur, ils éloignent l'inéluctable.

Les Signes parmi nous est un exercice de style qui m'a à la fois intrigué et parfois perdu. L'écriture et simple, mais la construction subtile. Peut-être trop pour moi ? Reste une morale générale qui dit bien comment chacun, face aux mêmes événements, réussit à en tirer des conséquences radicalement différentes. Une lecture plus que jamais d'actualité…
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"Et je vis un cheval pâle, et celui qui le montait s'appelait la mort, et l'enfer le suivait."

Après La Guérison des maladies et sa demoiselle thaumaturge, Ramuz explore cette fois la force de la superstition à travers Caille, un colporteur biblique et prophète de malheur, qui traverse un hameau en y annonçant la fin du monde. Chacun s'y inquiète alors de signes avant-coureur d'une apocalypse redoutée : l'inflation galope, les nouvelles du front sont mauvaises (nous sommes en 1918), des hommes meurent soudainement (de la grippe espagnole ?) et le ciel vire au noir le plus sombre.

Avec ce remarquable récit eschatologique, Ramuz suit son génie de styliste incomparable. D'une intrigue grelette sur fond d'apocalypse, le romancier trame un pur chef d'oeuvre : chacun de ses chapitres est une marqueterie de sensations, de phrases captées sur le vif, de discours intérieurs et de notations sensibles. Les citations et allusions bibliques métastasent la narration et intensifient son étrangeté.

Ramuz radicalise ses partis-pris habituels ; il enserre son lopin de terre vaudoise sous mille variations de couleurs et de sons et, au-delà de cette sublime kaléidoscopie, il transfigure de sa prose lustrale notre regard sur le monde. Pliant et dépliant ses phrases, il se joue des dimensions et origamise chaque tableau en vers libres. Il épure, distille, décante jusqu'à l'obtention de la vision parfaite. Qu'il décrive le trot d'un cheval, la surface d'un lac, la colère des éléments ou l'obscurité douillette d'un fenil, il renouvelle notre provision d'images et de métaphores. N'irait-il pas jusqu'à jouter de perfection avec Proust dont on retrouve, mais comme torréfiée, la beauté des clochers de Martinville ou des carafes de la Vivonne ?

Vous l'aurez compris, il s'agit d'un chef d'oeuvre presque inconnu, un mystère encore à révéler.
Lien : http://lavieerrante.over-blo..
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Les "Signes parmi nous" a été écrit par C.-F. Ramuz et publié pour la première fois en 1919. L'édition Zoé Poche no 94 reprend le texte original avec ses quelque 170 pages et ses chapitres assez courts.
Dans la région de Bière, sur la Côte vaudoise, l'auteur raconte le parcours de Caille, un colporteur biblique, qui apporte le message que Dieu lui a transmis et parcourt un chemin semé d'embuches. Il avance au rythme des signes qui se manifestent et qui semblent annoncer l'apocalypse.
C.-F. Ramuz exprime son style particulier en adaptant le point de vue narratif comme bon lui semble. Ce livre donne un défi au lecteur grâce à ses phrases complexes.
L'écrivain parvient à garder le lecteur accroché dans sa lecture, car les chapitres son courts et il faut lire la fin de chaque chapitre pour en comprendre le début.
L'orientation du tableau est faite sur le parcours d'un seul personnage principal, Caille, et les autres personnages demeurent éphémères.
L'histoire met en scène la mort, due à la guerre et à la maladie, tout autant que l'amour.
Le lecteur familier avec cette époque sera peut-être dérouté par le style atypique des "Signes parmi nous" ; il est par exemple étonnant de constater qu'un Stefan Zweig, à l'écriture plus linéaire, écrivait à quelques mois près et dans le même décor sa nouvelle "Épisode au bord du lac Léman".
La situation actuelle (pandémie du coronavirus) est un motif suffisant pour lire ou relire cette oeuvre quelque peu oubliée du répertoire de Ramuz, puisqu'elle relate le contexte lié à la Grippe espagnole de 1918.
Critique rédigée par des élèves de maturité professionnelle.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Caille, le colporteur biblique, a suivi encore un moment la route qui longe le lac ; puis s'est engagé dans un chemin de traverse. Au bout de ce chemin, il y avait une maison. C'était une grande maison fraîchement repeinte en blanc, avec des contrevents verts ; à côté de la porte, sur un banc de même couleur, une femme déjà assez vieille était assise.

[C.F. RAMUZ, "Les signes parmi nous", 1919, chapitre I - incipit]
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Est-ce qu’il nous faudra nous sauver tout nus, comme on a lu qu’on faisait dans les pays où on se bat ; est-ce qu’il nous faudra mourir de faim, quand même on a été précautionneux et prévoyants ?
Si rien ne tient plus ! Si on ne peut compter sur rien ! Mais quel mal a-t-on fait pour qu’on soit traité de la sorte ?
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- J'ai peur.
- Peur de quoi ?
- Crois-tu que c'est la fin du monde ?
Mais il rit et il dit :
- C'est le recommencement du monde.

[C.F. RAMUZ, "Les Signes parmi nous", 1919, chapitre XII]
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Résumé : Un généreux Robin des bois, roi de l'évasion, porté par la plume de C. F. Ramuz.
Farinet, c'est un fameux faux-monnayeur, roi de l'évasion et Robin des bois qui vécut entre Val d'Aoste, Savoie et Valais au XIXe siècle. Arrêté pour avoir fabriqué de fausses pièces qu'il distribuait généreusement dans les villages de montagne, il s'évade à de nombreuses reprises. Ce héros populaire à la vie romanesque et rocambolesque meurt à 35 ans, en 1880. Cinquante ans plus tard, Ramuz s'empare du personnage et en fait le héros d'un récit classique, haletant comme un roman d'aventure, mais porté par son style unique : irruption du présent au milieu d'une phrase, mélange des temps qui rend le présent dense et incandescent, langue vaudoise aux accents paysans transfigurée par une écriture singulière, moderniste, au confluent des révolutions artistiques du XXe siècle (il est passionné par Cézanne et Stravinsky). Farinet se serait caché un temps au fond de la vallée de Chamonix, dans une grotte au-dessus de Vallorcine. Un petit mémorial y est installé. Ce roman est paru pour la première fois en 1932.
Bio de l'auteur :
Ed Douglas, journaliste et écrivain passionné par l'Himalaya, a publié une douzaine de livres, dont plusieurs ont reçu des prix. Deux ont été traduits en français : de l'autre côté du miroir (Éditions du Mont-Blanc, 2018), Himalaya, une histoire humaine (Nevicata, 2022). Il publie des articles de référence dans The Observer et The Guardian. Il est rédacteur en chef de l'Alpine Journal et vit à Sheffield, en Angleterre.

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