Ces étincelles de lumière dans l’obscure matière
ne portent aucune voix aucun murmure,
comme la myrrhe s’écoule d’un flacon épuré. Douces de parfum et sereines
elles forment dans l’obscur une fontaine
de beauté et de grâce.
L’espoir du poète
extrait 2
L’espoir du poète
Et si la somnolence vous prend ne la chassez pas,
ne méprisez pas le goût du miel et du beurre.
Ne faites rien
pour en extraire des poèmes et de la poésie.
Et si vous avez le cœur en liesse,
cachez-la de nombreux jours
que personne ne la voie.
Car pourquoi avoir peur, mon ami,
de prendre par les cornes le poème insaisissable
et de le piquer entre les côtes
comme le jeune Bédouin aiguillonne
son âne hésitant ?
Après tout, le bien qui en sortira,
le meilleur de tous les mondes possibles,
c’est une tombe, qu’on vous creusera,
après intervention du maire,
dans le cimetière de la rue Trumpeldor,
à soixante mètres
de la tombe de Bialik.
L'OCCIDENT BLEU
Le temps pris dans un filet
À nouveau j'étais l'une de ces petites filles
aux ongles noirs de peine
creusant des tunnels dans le sable.
Partout on œil se posait sur des rubans de pourpre.
De nombreux yeux brillaient comme des perles d'argent.
Je redevenais l'une de ces petites filles,
qui font le tour du monde en une nuit
pour arriver en Chine
ou Madagascar,
de celles qui brisent assiettes et tasses
de trop d'amour,
de trop d'amour,
de tant d'amour.
p.22
L'OCCIDENT BLEU
Amour
Deux poissons fendirent les vagues
pour descendre au fond de la mer
se dire l'un à l'autre
la profondeur de leur amour.
Deux poissons plongèrent
s'installèrent au fond de la mer
puis ils allèrent loin
plus grand était leur amour.
p.17
Autre tentative
Extrait 2
S’il était possible de t’avoir pour toutes ces années
si tant est possible en toutes ces années de t’avoir,
comment est-il possible d’allonger un seul bras
comme celui d’un fleuve africain
comme on voit dans un rêve la baie des Tempêtes,
voit-on dans un rêve un bateau qui coule,
de même qu’on imagine une couche de nuages,
imagine-t-on des roses de nuages comme le lit d’un corps,
malgré toi, ils ne te porteront pas,
ne crois pas qu’ils le puissent.
…
/ Traduction de Michel Eckhard Elial
Bruno Doucey choisit les mots bleus de trois poètes : Yvon le Men ("Le poids d'un nuage"), Dahlia Ravikovitch ("Même pour des milliers d'années") et Évelyne Trouillot ("Par la fissure de mes mots").