![]() | karamzin 02 avril 2022
... J'aime l'Être immatériel ... (Aux trois Idoles Hindoues / A celui qui les sert) J'aime l'Être immatériel / Cristallisé dans un paysage de jade / La fluidité de ses gestes / L'orbe musical de son sourire / L'eau de ses yeux où se reflète le silence / Son parfum d'ambre endormi dans la mer / Le son voilé des cloches nocturnes de sa voix / Son visage lunaire / Où battent les fougères magiques de son sang / Son cœur aux sept épines de cristal / D'où ruissellent des fleuves de lumière / L'amande de son corps / Enfouie au plus profond de la Terre / Ses mains fermées, anémones de glace / Qui gardent le mystère / Où brûle le dragon solaire de mon cœur. — G.Réal, 29 ans / Poèmes de jeunesse, p.29 ... Cantique de la délivrance Lundi le huit juillet Signe de l'infini / A huit heures du matin je descends dans l'arène / Après cent quarante jours de jeûne et de silence / Après cent quarante nuits de solitude / J'ai désappris le soleil la parole et la confiance / Je suis livrée aux lois comme l'os devant les chiens / Je suis seule devant l’œil et la multitude / Je ne sais ni sourire ni mordre ni pleurer / La lune et les étoiles ont gelé / Dans l'aube morte des paysages intérieurs / J'ai apporté ici pour ma défense / Un Ange un Démon une Reine et un Enfant / Que nulle force humaine ne pourra écraser Mon angoisse est portée par les ailes de l'Ange / A travers les brisures translucides des larmes / Au-delà de la boue constellée de la honte / Il lève cristallisé sur une de ses mains / L'espoir comme une colombe / Ses ailes flamboient comme des épées / Sa robe rouge a subi le baptême de sang / Sur son visage fraternel / D'anciens tourments s'allient au parfum du sourire / Son geste appelle la paix / Ses pieds libèrent le monde / De la peur, du mensonge et de la servitude Le Démon se déplie sur un brouillard de cendres / Sa force déchire l'espace / Le long de son corps montent / Les bêtes mystérieuses du ventre de la terre / Blessées par vos sarcasmes / Les épines des ailes / Coupent comme des couteaux à l'heure de la justice / Il a les griffes d'un tigre les cornes d'un taureau / Et la puissance occulte des mages de la nuit / Il brûle et carbonise / Tout ce qui ternit l'eau magique du regard / Il hait l'hypocrisie / Aucune des restrictions que vous faites à la vie / N'a grâce devant lui. Assise sur son trône droite comme un lys noir / La Reine est prisonnière du silence des nuits / Les étoiles de plume la frôlent de leurs ailes / Et l'oiseau de son rêve / Pétrifié dans son vol alourdi de diamants / Tombé sur ses genoux s’incruste dans sa robe / LE RÊVE EST INTERDIT au seuil de la mémoire / Et comme un fruit cueilli par la main du sommeil / Retombe et se détruit / Le temps bleuit l'espace / Et les remous glacés de l'oubli s'amplifient / Et meurent sur les rives / Du Néant sans limites / Où les soleils brisés plongent leurs rayons rouges / Les serpents-arbres aux longs corps ondoyants / Chargés de fruits, d'épines, de fleurs et de feuillages / Au son des flûtes protègent la Reine et l'Enfant / Du fond des âges monte l'enchantement / Qui donne au songe la couleur de la vie / La peur est périssable / Et les lois sont fragiles / Jugez et condamnez vous ne saurez détruire / La puissance des plantes / Et la violence du sang / Qui pousse dans les tiges et crie dans les feuilles / Jugez et condamnez / La magie de la terre est plus grande que l'homme / Le secret de sa force est l’œuvre du Soleil. — G.Réal, 34 ans / Poèmes de prison, p.99 ... Bleu Le crépuscule est blond au front des arbres noirs / Filigrane mouvant dans la clarté du soir Méduse abandonnée sur un lit d'hôpital / Le ressac de ma vie se brise dans ma gorge Les nuages vautours vont dévorer l'espace / Où je ne serai plus qu'un flocon de sommeil Je vais donc m'effacer dans la beauté des feuilles / Dans la férocité de l'été cannibale Dans le varech spongieux du ventre de la terre / Pourriture broyée dans la dernière forge Un océan de fleurs jaillira de mes cendres / Ballet nacré des lys au parfum onirique Hortensias au sang bleu, roses échevelées / Chardons porteurs d'épines aux lames meurtrières Dahlias pourpres, œillets blancs, giroflées d'or brûlé / Tournesols lourds de graines défiant le soleil Qu'on laisse sur ma tombe une vasque de pierre / Où les oiseaux viendront boire dans la lumière Une eau si pure qu'elle aura le bleu du ciel. — G.Réal, 73 ans / Poèmes de la fin, p.185 + Lire la suite |