Lorsque Rousseau décide de faire le portrait du poète, il lui fait savoir qu'il prendra pour fond un coin des jardins du Luxembourg... Il veut faire un vrai portrait et ne se contente pas de regarder et de dessiner. Apollinaire raconte que le Douanier lui mesura le nez, la bouche, les oreilles, le front, les mains, le corps en rapportant soigneusement les différentes mesures sur la toile. Quant à la muse, c'est-à-dire le peintre Marie Laurencin, le Douanier écrit : "J'ai beaucoup travaillé le costume de votre dame. La pensée est presque terminée, peplum violet ; j'ai travaillé le fond aussi, tout va bien."
La muse inspirant le poète 1909, Moscou, Musée Pouchkine
S'il est un peintre qui ne sache se servir de subterfuges, de fignolage ou même de la simple maîtrise technique pour embellir ou parer sa vision limitée et décharnée de la réalité, s'il est un peintre qui ne sache pas, en un mot, peindre d'une manière académique, comme le conçoit la plus grande partie de la critique et du public, c'est sans doute Rousseau.
En 187, il entre à l'octroi de la préfecture de la Seine, (d'où son surnom de "Douanier"); il y restera jusqu'au 1er décembre 1893, Il prend alors sa retraite avec un émolument de 1019 francs par mois, un somme assez modeste qui l'oblige souvent à s'endetter, mais lui permet, grâce à de petits travaux et à l'aide de ses amis, de se consacrer entièrement à l'art.