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EAN : SIE162635_122
10-18 (30/11/-1)
3.95/5   19 notes
Résumé :
Un grand homme de science nous parle de la sexualité, et non pas seulement des dérivés et symboles de la libido. Reich, découvrant le caractère social des névroses, développe la critique sociale implicite dans les premiers écrits de Freud. L'idéologie sociale et la forme patriarcale et monogamique de notre famille ont pour conséquence la répression sexuelle, conséquence qui est en même temps condition et but de cette famille.
Le caractère fondateur de la psyc... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
La question que se pose le bouquin est la suivante : « Comment éliminer l'anxiété de plaisir orgastique des individus à l'échelle collective ? »


Reich considère que l'homme instinctuel est bon. Rien à foutre de la théorie de la culture de Freud, comme quoi il aurait fallu mettre de côté l'envie de tuer, de violer, et le reste. Reich relève au contraire une contradiction majeure dans la théorie de Freud : «: d'un côté, l'enfant doit refouler ses pulsions pour devenir capable d'adaptation culturelle ; d'un autre côté, il acquiert, par ce processus même, une névrose qui le rend derechef incapable de développement culturel et d'adaptation, et finalement antisocial. »


Selon Reich, la vie serait très simple si on n'empêchait pas la vitalité naturelle de chacun de se déployer. Mais pourquoi cela ne se passe-t-il jamais ainsi ? pourquoi qu'on jette le bébé (la vitalité) avec l'eau du bain (ses débordements) ? Parce que la morale se transmet de génération en génération : elle brime les nouveaux venus, les maintient dans la peur, dans la rigidité fonctionnelle et dans l'insatisfaction, et cette structure, intégrée dans le plus jeune âge et rendue inconsciente, se reproduit sans cesse, parce que les frustrés ne s'autorisent plus que ce seul plaisir de la morale. Des sadiques quoi. Ouais, Pour Wilhelm, ce serait très simple si on laissait les instincts naturels s'exprimer sans jugement :


« L'individu sain n'a pratiquement plus de moralité en lui, car il n'a pas de pulsions qui appellent l'inhibition morale. […] le rapport avec une prostituée devient impossible ; les fantaisies sadiques disparaissent, attendre l'amour comme un droit ou même violer le partenaire devient inconcevable, ainsi que l'idée de séduire des enfants ; les perversions anales, exhibitionnistes ou autres disparaissent, et avec elles l'anxiété sociale et les sentiments de culpabilité qui les accompagnent ; la fixation incestueuse aux parents, frères et soeurs perd son intérêt, ce qui libère l'énergie liée dans ces fixations ».


On retrouve l'idée nietzschéenne de vertu positive, à distinguer de la vertu négative qui découle quant à elle d'une ignorance non-surmontée de l'ombre : « Et il en est d'autres qui appellent vertu la paresse de leur vice ». Mais que deviendront-ils ceux-là, si leur vice se réveille un jour parce que les digues qu'ils se sont construites ne les retiennent plus ? Pour Reich, cela se produit de toute façon. Cela s'appelle : adhésion à une idéologie autoritaire ou à un dogme religieux.


C'est pour cela qu'aucune véritable révolution ne pourra avoir lieu tant que la constitution même de l'individu n'aura pas été restructurée. A ce point de la théorie de Reich, il n'y a que deux alternatives possibles : être d'accord avec lui, ou ne pas l'être, car c'est un acte de foi de croire qu'une restructuration de la psyché pour l'exercice d'une sexualité saine permettra à chacun de devenir capable de vie sociale et de travail sans autorité et pression morale, parce qu'une réelle indépendance et une discipline volontaire auront été acquises de l'intérieur. « Une liberté extérieure n'est pas encore le bonheur sexuel. Ce dernier présuppose, avant tout, la capacité psychologique de de le créer et de l'éprouver ».


Dans ce but, Wilhelm nous dit qu'il faut détruire la famille. Ah, ah, faut pas flipper : « Ce livre ne discute pas des relations familiales naturelles, mais critique les formes coercitives de la famille autoritaire, qui sont maintenues par une législation stricte, par la structure caractérielle réactionnaire de l'homme et par une opinion publique irrationnelle ». A la limite, Wilhelm s'en fout des formes de réunion naturelles. Mais la famille patriarcale serait en revanche le lieu de la reproduction structurale et idéologique de tout ordre social construit sur des principes autoritaires. En outre, elle est fondée sur l'institution du mariage qui, dans les années 1930 plus qu'aujourd'hui, était considérée par Reich comme une aberration servant surtout au maintien de l'ordre social et de la structure sociétale, mais diffusant la misère sexuelle en aval (méconnaissance sexuelle du partenaire avant l'engagement) et en amont (insatisfaction due à l'ancrage des fixations infantiles et des schèmes culpabilisants, ce qui entraînerait un phénomène accru d'adultère et le recours à la prostitution dans un état mental négatif). « Plus les individus sont continents avant le mariage, plus ils sont fidèles dans le mariage. Mais cette sorte de fidélité n'est due qu'à l'atrophie de la sexualité par la continence pré-conjugale ». La famille patriarcale briserait l'élan spontané de l'impulsion sexuelle infantile qui s'exprime dans un témoignage d'amour sensuel comportant « infiniment plus de moralité, de naturel, de force et de joie de vivre que dans des milliers de thèses et d'analyses ennuyeuses ». On retrouve ici une idée de Sandor Ferenczi selon qui chaque enfant subit un traumatisme précoce résultant du langage de passion des adultes face aux demandes de tendresse et de vérité des enfants. Incapables de reconnaître ce fait, les adultes réagiraient en disqualifiant l'affect de l'enfant, entraînant une entrave dans son autonomie de penser et une introjection du sentiment inconscient de culpabilité de l'adulte. On rejoint ainsi le besoin de souscrire à une idéologie et l'incapacité d'éprouver des sentiments d'amour purs.


Les dérives consécutives à l'application pratique des idées de Wilhelm Reich ont fait beaucoup causer. Je n'ai pas creusé le sujet et je n'en parlerai pas ici. Je constate simplement que ses idées sont bonnes et que si elles étaient vraies et reconnues comme telles à l'égard de la majorité, ça pourrait pas être pire que maintenant. Y a juste un truc qui n'a pas trop été abordé c'est ce préjugé de Reich selon lequel tout le monde serait équivalent face à cette fameuse « vitalité naturelle » qu'il pose comme principe de l'homme non contraint par la société : et si ce n'était qu'un fantasme ? Alors, que ferait-on de ceux qui ont vraiment trop de vitalité, et de ceux qui n'en ont jamais assez ? On sait pas trop. Tant pis.

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Citations et extraits (79) Voir plus Ajouter une citation
Voici quelques types de réactions anormales : mourir de faim face à l'abondance ; rester exposé au froid, à la pluie et à la neige, en présence de charbon, de matériel de construction et de place pour bâtir ; croire qu'une puissance divine à longue barbe blanche régit toutes choses et que l'on est à la merci de cette puissance pour le bien comme pour le mal ; massacrer d'innocentes personnes avec enthousiasme, et croire que l'on doit conquérir une région dont on n'avait jamais entendu parler auparavant ; marcher en haillons et se considérer en même temps comme le représentant de la "grandeur de la nation" ; oublier ce qu'un politicien avait promis avant de devenir chef de l'Etat ; déléguer à quelque individu que ce soit, fussent-ils hommes d'Etat, un pouvoir quasi absolu sur sa propre vie et son propre destin ; être incapable de comprendre que les soi-disant grands timoniers de l'Etat doivent eux aussi dormir, manger, répondre à l'appel de la nature, qu'eux aussi sont gouvernés par des pulsions affectives inconscientes et incontrôlables, et souffrent de dérangements sexuels comme tout autre mortel ; considérer comme évident qu'il faut battre les enfants dans l'intérêt de la "culture" ; refuser aux adolescents, qui sont dans la fleur de l'âge, le bonheur de l'union sexuelle ; et l'on peut multiplier les exemples à l'infini. (p. 29-30, Préface de la deuxième édition)
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La liaison sexuelle permanente contient de nombreux germes de conflit, non moins que toute autre type de relation durable. Ce qui nous occupe ce ne sont pas les difficultés humaines générales, mais les difficultés spécifiquement sexuelles qui s'y ajoutent. La plus importante de celles-ci, c'est le conflit entre l'amortissement (temporaire ou définitif) du désir sensuel et l'accroissement de la tendresse pour le partenaire.
Dans toute relation sexuelle en effet, tôt ou tard, souvent ou rarement, apparaissent des périodes de faible attraction sensuelle, ou même d'absence complète de désir. C'est un fait d'expérience sur lequel aucun argument moral n'a de prise ; l'intérêt sexuel ne se commande pas. Mieux les partenaires seront assortis sous le rapport de la sensualité et de la tendresse, moins fréquents et irréversibles seront ces épisodes. Néanmoins toute relation sexuelle est exposée à cet amortissement. Ce fait n'aurait guère d'importance s'il ne s'y ajoutait que :
1. L'affaiblissement peut se produire chez un seul partenaire.
2. La plupart des liaisons sexuelles sont actuellement compliquées de liens économiques (dépendance de la femme et des enfants).
3. Indépendamment de ces difficultés extérieures, il existe une difficulté interne qui rend compliquée la seule solution logique : la séparation et la recherche d'un autre partenaire. (p. 195-196)
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En ce qui concerne l'idéologie sexuelle, il y a coïncidence entre l'idéologie conjugale de la famille petite-bourgeoise et l'idée de famille en général, c'est-à-dire l'union monogamique définitive. Si misérables et désespérées, douloureuses et insupportables que soient la situation conjugale et la constellation familiale, les membres de la famille sont condamnés à les justifier, à l'intérieur de la famille et vis-à-vis de l'extérieur. La nécessité sociale de cette attitude conduit à masquer la misère et à idéaliser la famille et le mariage ; elle engendre également la diffusion du sentimentalisme familial, avec ses clichés de "bonheur familial", de "foyer protecteur", du "havre de paix et de bonheur" que la famille est censée représenter pour les enfants. Le fait que dans notre société la situation est encore plus lamentable en dehors du mariage et de la famille, où la vie sexuelle perd absolument tout appui matériel, légal ou moral, est interprété à tort comme signifiant que l'institution familiale est naturelle, biologique. La méprise sur le véritable état des choses, ainsi que les slogans sentimentaux qui contribuent à créer l'atmosphère idéologique, sont psychologiquement indispensables, car ils permettent au psychisme de supporter l'intolérable situation familiale. C'est pourquoi le traitement des névroses, balayant les illusions et mettant à nu la vérité des situations, est susceptible de détruire les liens conjugaux et familiaux. (p. 134)
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En somme, la fonction politique de la famille est double :
1. Elle se reproduit elle-même en mutilant sexuellement les individus. En se perpétuant, la famille patriarcale perpétue la répression sexuelle et tout ce qui en dérive : troubles sexuels, névroses, démences et crimes sexuels.
2. Elle rend l'individu apeuré par la vie et craintif devant l'autorité, et renouvelle donc sans cesse la possibilité de soumettre des populations entières à la férule d'une poignée de dirigeants.
C'est pourquoi la famille revêt pour le conservateur cette signification privilégiée de rempart de l'ordre social auquel il croit. On s'explique aussi pourquoi la sexologie conservatrice défend si opiniâtrement l'institution familiale. C'est qu'elle "garantit la stabilité de l'Etat et de la Société", au sens conservateur, réactionnaire, de ces notions. La valeur attribuée à la famille devient donc la clé de l'appréciation générale de chaque type d'ordre social. (p. 141)
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La misère la plus abjecte que puisse souffrir la jeunesse provient du commérage sournois des vieilles filles et des insatisfaits des deux sexes qui sévit dans les petites villes et à la campagne, et qui met les jeunes gens dans l’impossibilité d’établir des relations sexuelles, même s’ils en sont psychologiquement capables. L’immense ennui des individus engendre une curiosité lascive et une méchanceté inouïes qui provoquent de nombreux suicides.
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