La misère la plus abjecte que puisse souffrir la jeunesse provient du commérage sournois des vieilles filles et des insatisfaits des deux sexes qui sévit dans les petites villes et à la campagne, et qui met les jeunes gens dans l’impossibilité d’établir des relations sexuelles, même s’ils en sont psychologiquement capables. L’immense ennui des individus engendre une curiosité lascive et une méchanceté inouïes qui provoquent de nombreux suicides.
Il n’existe pas de processus socio-économique de quelque importance historique qui ne soit ancré dans la structure psychique des masses et qui ne s’exprime dans le comportement des masses. Il n’y a rien de l’ordre d’un « développement des forces productives per se » ; il n’existe qu’un développement de l’inhibition dans la structure psychique humaine, dans la pensée et le sentiment, sur la base de processus socio-économiques.
Le noyau du bonheur dans la vie est le bonheur sexuel. Aucune personnalité de quelque importance politique n’a osé faire remarquer ceci ; on a affirmé, en revanche, que la sexualité était une affaire privée qui n’avait rien à voir avec la politique.
Deux faits sont en opposition : d’un côté, l’enfant doit refouler ses pulsions pour devenir capable d’adaptation culturelle ; d’un autre côté, il acquiert, par ce processus même, une névrose qui le rend derechef incapable de développement culturel et d’adaptation, et finalement antisocial.
90% des romans de tous ordres, et 99% des films ou œuvres théâtrales reposent sur un appel aux besoins sexuels insatisfaits.
Le devoir conjugal et l’autorité familiale est la moralité d’individus peureux et impuissants qui sont incapables d’expérimenter par l’effet d’une capacité d’amour naturelle ce qu’ils essayent en vain d’obtenir grâce à l’aide de la police et des lois du mariage.
Les réactionnaires ne comprendront jamais que la misère sexuelle fait partie intégrante de l’ordre social qu’ils défendent.
[L]es individus sexuellement perturbés sont plus aptes à se soumettre aux exigences d’une monogamie à vie. Leur fidélité, cependant, ne repose pas sur la satisfaction sexuelle, mais sur un système d’inhibitions morales.
La liaison sexuelle satisfaisante présuppose que les deux partenaires aient harmonisé leurs rythmes sexuels, qu’ils aient appris à connaître leurs besoins sexuels spéciaux, rarement conscients, mais néanmoins importants : c’est ainsi seulement que la vie sexuelle peut être saine quant à l’économie sexuelle. Contracter un mariage sans avoir fait sexuelle connaissance est de peu d’hygiène et ordinairement catastrophique.
Il n’est pas douteux que la conduite irrationnelle collective ne peut être comprise que sur la base des observations faites chez l’individu névrosé.