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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Cette Terre Promise tient fidèlement les promesses des deux voix qui m'ont incitée à la lire.

L'une s'est tue depuis quelques mois, mais sa sagacité et sa profondeur continuent  de nous éclairer , ici, à  Babelio, et je ne lis , ne relis jamais  une seule critique de ClaireG sans admirer la justesse de ses analyses, la générosité de ses jugements, l'élégance  classique de ses phrases.  Elle nous manque beaucoup et pourtant, elle est toujours là, et continue de nous parler depuis le lointain pays qui nous attend aussi.

La seconde voix, vous ne la connaissez pas, elle est menacée de se taire bientôt  et je l'écoute  tous les jours, espérant vainement retarder le plus longtemps possible le moment où nous ne pourrons plus parler de livres, de sculpture et d'amitié.  Elle m'a fait lire Cette terre promise, qu'elle m'a offerte.

 Comme un legs.

Désolée pour cette entrée en matière un peu grave et funèbre, mais le livre s'y prête.

C'est un livre sur l'exil, sur l'impossibilité de vivre une histoire nouvelle tant le poids de la précédente vous plombe comme un boulet, un livre sur la difficulté de replanter ses racines dans une terre qui vous accueille dans la suspicion,  parce que la marque infâmante que vous avez voulu fuir en demandant asile,  vous frappe injustement , vous qui  étiez des victimes et en qui  vos hôtes ne voient que des bourreaux.

Erich Maria Remarque raconte l'exil allemand aux USA , à la fin de la deuxième guerre. Des antinazis et des juifs, tous Allemands, donc à priori suspects d'être des espions  infiltrés d'Hitler dans cette terre promise dont l'avant-poste d'Ellis Island n'a pourtant rien de particulièrement accueillant...

Petits boulots, petites combines, petits trafics, grosses déceptions, cruelles déconvenues , sombres nouvelles : le microcosme des réfugiés allemands se replie frileusement  sur lui-même dans un New York brillant, trépidant, déjà lancé dans l'ère moderne de l'argent facile,  des relations mondaines et du succès.

Eux, les réfugiés, vivotent ou se débattent comme de beaux diables pour vivre ,  comme Ludwig Sommer, le narrateur. Chambres d'hôtels précaires, fiestas tristes dans une loge de concierge ou un appartement en gardiennage:  whisky U.S.  pour oublier les suicides de ceux que cette terre promise a cruellement mis au rencart , ou qui ne supportent décidément pas d'avoir survécu,   vodka russe pour noyer les humiliations de celles qui se prostituent pour un rôle, champagne à  la cantonade pour tous ceux qui bradent leurs talents pour un morceau de pain,  ceux que leur connaissance de l'art force à  jouer les escrocs.

Plein de mélancolie, mais jamais languissant, le roman fourmille de péripéties, de silhouettes cocasses ou pathétiques dont on suit partiellement la trajectoire hésitante sur le grand échiquier  des destins croisés.

Interrompu, en 1970, par la mort de son auteur,  inachevé donc, - mais pouvait-il finir, ce roman de l'exil et d'une résilience toujours différée, toujours remise en jeu, toujours fragile?- , ce roman qui mêle habilement fiction et  autobiographie, résonne comme un avertissement, une sorte de testament moral: les exilés d'un pays maudit, d'une nation marquée par le sceau d'infamie,  ne trouveront de repos nulle part.

Comme une mise en garde, comme un legs.

Ces antinazis allemands en terre américaine sont moins bien traités que ne le seront bientôt des von Braun. Ils annoncent le sort des Syriens, des Irakiens d'aujourd'hui, sommés de faire la preuve de leur persécution,  sous peine d'être assimilés  au terrorisme qu'ils fuient..

Un livre beau, grave- mais jamais pesant : plein d'un humour élégant et amer, comme un noeud pap' dans la débine.

 Ce dernier roman d'Erich Maria Remarque est précieux et inoubliable.

Comme un legs, vraiment.

Merci ,  Claire, merci ,   A...
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