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The Scumbag tome 1 sur 3

LAROSA Lewis (Autre)POWELL Eric (Autre)Craig Wes (Autre)Robinson Andrew (Autre)BOSCHI Roland (Autre)
EAN : 9791026828501
160 pages
Urban Comics Editions (13/05/2022)
3.62/5   24 notes
Résumé :
Être un motard analphabète, toxicomane, et possédant un QI équivalent à celui d'un enfant de primaire ne semble pas être les prérequis attendus pour sauver le monde. Et pourtant, malgré un CV peu reluisant, Ernie Ray Clementine est la seule chose qui nous sépare de l'Apocalypse. En ayant reçu accidentellement un sérum de surhomme, il est devenu l'espion le plus puissant du monde, et il semble impossible de s'en sortir sans son aide...
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
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Ce tome est le premier d'une série indépendante de toute autre. Il regroupe les épisodes 1 à 5, initialement parus en 2020/2021, tous écrits par Rick Remender, et mis en couleurs par Moreno Dinisio. L'épisode 1 a été dessiné et encré par Lewis Larosa, le 2 par Andrew Robinson, le 3 par Eric Powell, le 4 par Roland Boschi, et le 5 par Wes Craig. Les couvertures ont été réalisées par Nic Klein.

Charles Bukowski a dit que le problème dans le monde est que les gens intelligents sont pleins de doutes, alors que les gens stupides sont pleins de certitudes. Aucun ne prouve cette théorie aussi bien qu'Ernie Ray Clementine. C'est une relique d'une ère révolue, l'esprit suffoqué du sexe, des drogues et du rock'n'roll. C'est un homme avec l'éducation d'un élève d'école élémentaire, illettré, mauvais garçon et accro aux drogues. Au temps présent, il vient d'entrer dans le bar malfamé de Simon. Il passe derrière une serveuse et lui colle une main aux fesses. Il est à la recherche de son dealer Larry l'Espagnol. En se frayant un passage, il se fait rabrouer par les prostituées, par les joueurs de billard. En réalité, Larry n'est pas son ami, il déteste Ernie, et dans quelques heures il sera passé à la haine. S'il existait un record pour se rendre haïssable auprès des autres en le moins de temps possible, Ernie le détiendrait. Ernie continue de se frayer un passage, en pelotant une ou deux prostituées au passage, en raflant une bière sur le comptoir quand personne ne le voit. Dans sa veste à patchs sans manche, avec son bandana sur la tête et ses lunettes de soleil, il finit par arriver devant Larry qui est au comptoir. Il lui agite un billet sous le nez, comme un acompte pour la dose qu'il lui demande. Larry lui répond que les avances, c'est fini.

Avec un terrible mal de ventre, Ernie s'en va un peu plus loin et parvient à s'abaisser encore plus : il pique le pot servant à déposer des pièces de monnaie pour l'Armée du Salut. Il revient devant Larry et le paye avec son billet et les pièces de monnaie. Il prend le sachet que lui tend Larry et se rend devant la porte des toilettes, mais elle est condamnée par des rubans jaunes. Il finit à quatre pattes par terre, le pantalon baissé sur les chevilles, le slip également, avec le produit dans une petite cuillère tenue bien droite de la main gauche, et le briquet allumé en dessous avec la main droite. Puis il plonge l'aiguille dans le produit ainsi chauffé, alors qu'il excrète une déjection liquide. Il se rend compte que des gens sont en train de crier, de le montrer du doigt. Il finit par prendre conscience qu'il est à quatre pattes sur le trottoir, à l'extérieur du bar Simon. Il en lâche la seringue qui commence à rouler sur le trottoir en prenant de la vitesse. Il se lance pathétiquement à sa poursuite, toujours à quatre pattes, toujours les fesses à l'air. Percutant un obstacle, la seringue tourne et poursuit sa course dans une allée où une jeune femme est train de se battre dans un combat d'arts martiaux, contre un individu chauve avec une veste blanche, se faisant appeler Père Temps.

Les règles de la politesse ne permettent pas de traduire littéralement le titre de la série en français (indice : ça commence par Sal, et ça finit par Aud), mais ça personnifie bien Ernie Ray Clementine. Il ne vit que pour la fête, sans travailler, en vivant de menus larcins, en ne respectant personne, même plus lui. C'est un individu sans foi ni loi, qui n'a jamais éprouvé d'empathie pour son prochain. Après la scène à quatre pattes, le lecteur n'entretient plus aucun doute sur son estime de soi, et par la suite il le voit se comporter en parfait sal…, égoïste, n'hésitant pas à trahir soeur Mary qui représente l'organisation Autorité Centrale.

Ernie finit par mettre la main sur la seringue qu'il a laissé échapper, mais par un concours de circonstances, il s'injecte autre chose dans les veines : des nanites lui conférant des pouvoirs extraordinaires, sous réserve qu'il ait l'intention de s'en servir de manière altruiste, pour une noble cause. le lecteur sent bien que Rick Remender a jubilé en imaginant ce point de départ, et en pensant à toutes les situations qu'il allait pouvoir en tirer. Effectivement, il raconte une histoire avec des composantes adultes, que ce soit l'immoralité du comportement d'Ernie, la consommation très régulière de produits psychotropes, y compris des mélanges, et même une partouze de grande ampleur avec plusieurs dizaines de participants qui se retrouvent eux aussi défoncés, grâce, ou à a cause, de l'intervention d'Ernie. Pour mettre en images ces aventures, le créateur a opté pour un choix inhabituel : confier chaque épisode à un dessinateur différent. Ce tome s'ouvre avec Lewis Larosa qui a travaillé avec Ed Brubaker, avec Matt Fraction, avec Garth Ennis (sur la série Punisher MAX). Dès la première page, le lecteur détaille des cases très riches en informations visuelles. Il se rend compte que la mise en couleurs y fait beaucoup : elle donne la sensation d'une technique de couleur directe. le lecteur n'arrive pas à déterminer quel est le degré de finition des dessins, tellement la couleur apporte d'éléments visuels. Par exemple, il peut voir la peau tavelée d'Ernie, sans savoir si Remender ou Larosa ont donné des indications en ce sens, ou si c'est l'initiative et l'oeuvre de Dinisio.

Quoi qu'il en soit, l'artiste donne à voir un monde concret et palpable, allant parfois au-delà de ce que pourrait souhaiter le lecteur le plus exigeant. Ce dernier n'est pas près d'oublier ce dessin en double page avec Ernie à quatre pattes dans une position humiliante et dégradante, perdant le contrôle de sa fonction d'excrétion, avec le regard horrifié des passantes, ce lui choqué des passants dont un qui ne perd pas le nord et prend une photographie, ou encore celui amusé d'un enfant. Larosa donne une identité visuelle incroyable à la série, que ce soit l'allure de d'Ernie, ses expressions de visage, le magnifique combat d'arts martiaux en pleine rue, l'aiguille de la seringue s'enfonçant dans le bras, ou les effets spéciaux de l'hologramme de mère Terre, très bien matérialisés par le coloriste. Il passe donc au second épisode en s'attendant à un décalage dans la partie graphique, et il se retrouve à aller vérifier trois fois qu'il ne s'agit pas du même dessinateur. Bien sûr, le fait que le coloriste soit le même joue beaucoup dans la sensation de continuité visuelle. Il faut donc un peu de temps pour que le lecteur relève la saveur particulière des dessins d'Andrew Robinson : plus de cases de la largeur de la page, des cases un peu moins denses, une ambiance lumineuse un peu plus claire, un rendu plus proche de formes détourées avec un trait encré fin. La sensation globale reste la même : une narration énergique, un sens de l'exagération bien dosé qui ne verse pas dans la farce, permettant de continuer à apprécier ces aventures au premier degré, sans oublier le caractère exagéré d'Ernie.

Le lecteur s'attend à ce que la personnalité graphique d'Eric Powell ressorte avec évidence, en particulier sa capacité à se montrer visuellement sarcastique. de prime abord, il n'en est rien : il se coule lui aussi dans le moule de l'ambiance visuelle de série. La narration visuelle est toujours aussi colorée, toujours orientée action, avec une discrète saveur de dérision quant aux hauts faits très relatifs d'Ernie, et son comportement irrémédiablement égocentré. le lecteur constate qu'il est tout autant pris par l'aventure et les péripéties, qu'en train de sourire légèrement au comportement immature du personnage principal. La transition avec Roland Boschi se fait également sans solution de continuité, la narration visuelle étant toujours aussi agréable, enjouée, professionnelle et divertissante. S'il est familier de la série Deadly Class de Rick Remender, le lecteur peut voir que Wes Craig imprime un peu plus sa personnalité dans la narration, à la fois avec un nombre de cases plus élevé par page, un sens du mouvement saisissant, et un humour tout aussi sarcastique.

Avec les premières pages, le lecteur se dit qu'il a plongé dans une oeuvre divertissante, une farce bien grasse pour se détendre : un quadragénaire, rebelle sur le retour, ne pensant en fait qu'à lui, et qu'à se mettre la tête à l'envers, sans aucune considération pour autrui. Il n'hésite pas à piquer les pièces jaunes d'une oeuvre de charité. Il est resté bloqué sur le hard rock macho des années 1980, en particulier l'album Screaming for Vengeance (1982) de Judas Priest. Il s'envoie tous les psychotropes qu'il peut trouver, avec une consommation en mélange. Il ne considère la gent féminine que comme une source de plaisir. Bref, un mâle blanc égocentré, bloqué en mode adolescent idiot et hédoniste, ne pensant qu'à court terme (jusqu'à la prochaine dose), avec un corps qui commence à accuser le coup des excès cumulés, et l'intelligence d'un enfant attardé. Ce récit assume tout à fait cette dimension, sans s'y limiter. C'est aussi une aventure d'anticipation dans laquelle une entreprise a mis la main sur un mode de production d'une énergie verte et bon marché, inféodée à une idéologie particulièrement réactionnaire : une intrigue captivante au premier degré. C'est aussi la confrontation de l'égoïsme et de l'idéal du héros altruiste, bien sûr en défaveur du premier, mais pas systématiquement. C'est également un regard sans illusion sur des thèmes sociétaux : les discours démagogiques (Tous ceux qui te disent exactement ce que tu veux entendre se font de l'agent sur ton dos.), Batman comme incarnation du privilège blanc, la libéralisation des marchés pour un système capitaliste avec zéro régulation et un marché totalement libre, la réalité d'une personne incarnant véritablement la défense de toutes les libertés (indice : il s'agit d'Ernie), la réalité de l'oppression économique (Les riches manipulateurs ont rendu la population si désespérée qu'elle est entièrement contrôlable avec la simple promesse d'un espoir de richesse.), le luxe de l'intégrité (Quand vous donnez si peu à la population, vous les laissez sans autre choix que de renoncer à toute intégrité). Sans avoir l'air d'y toucher, dans le registre d'une farce graveleuse, le scénariste livre sa vision peu optimiste de la réalité socio-économique.

Un titre de série qui annonce un personnage principal méprisable, une succession de dessinateur à raison d'un par épisode, une scène d'ouverture dans l'exagération graveleuse : tout laisse supposer que Rick Remender se détend entre deux séries plus ambitieuses. Très vite, le lecteur se rend compte que l'alternance d'artistes n'obère en rien la qualité et la cohérence de la narration visuelle, à la fois grâce au coloriste, à la fois parce qu'ils font tous la démarche de respecter le même esprit narratif. Il se rend compte que l'intrigue n'a pas été sacrifiée à l'humour, que celui-ci est politiquement incorrect et drôle, et que l'auteur n'a rien sacrifié de son ambition littéraire pour exprimer sa vision pénétrante de certaines facettes de la société.
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Ce tome est le premier d'une série indépendante de toute autre. Il regroupe les épisodes 1 à 5, initialement parus en 2020/2021, tous écrits par Rick Remender, et mis en couleurs par Moreno Dinisio. L'épisode 1 a été dessiné et encré par Lewis Larosa, le 2 par Andrew Robinson, le 3 par Eric Powell, le 4 par Roland Boschi, et le 5 par Wes Craig. Les couvertures ont été réalisées par Nic Klein. Ce tome comprend également les couvertures variantes réalisées par Andrew Robinson, Tula Lotay, Yanick Paquette, Jerome Opeña, Jorge Corona, Joëlle Jones, David Go.

Charles Bukowski a dit que le problème dans le monde est que les gens intelligents sont pleins de doutes, alors que les gens stupides sont pleins de certitudes. Aucun ne prouve cette théorie aussi bien qu'Ernie Ray Clementine. C'est une relique d'une ère révolue, l'esprit suffoqué du sexe, des drogues et du rock'n'roll. C'est un homme avec l'éducation d'un élève d'école élémentaire, illettré, mauvais garçon et accro aux drogues. Au temps présent, il vient d'entrer dans le bar malfamé de Simon. Il passe derrière une serveuse et lui colle une main aux fesses. Il est à la recherche de son dealer Larry l'Espagnol. En se frayant un passage, il se fait rabrouer par les prostituées, par les joueurs de billard. En réalité, Larry n'est pas son ami, il déteste Ernie, et dans quelques heures il sera passé à la haine. S'il existait un record pour se rendre haïssable auprès des autres en le moins de temps possible, Ernie le détiendrait. Ernie continue de se frayer un passage, en pelotant une ou deux prostituées au passage, en raflant une bière sur le comptoir quand personne ne le voit. Dans sa veste à patchs sans manche, avec son bandana sur la tête et ses lunettes de soleil, il finit par arriver devant Larry qui est au comptoir. Il lui agite un billet sous le nez, comme un acompte pour la dose qu'il lui demande. Larry lui répond que les avances, c'est fini.

Avec un terrible mal de ventre, Ernie s'en va un peu plus loin et parvient à s'abaisser encore plus : il pique le pot servant à déposer des pièces de monnaie pour l'Armée du Salut. Il revient devant Larry et le paye avec son billet et les pièces de monnaie. Il prend le sachet que lui tend Larry et se rend devant la porte des toilettes, mais elle est condamnée par des rubans jaunes. Il finit à quatre pattes par terre, le pantalon baissé sur les chevilles, le slip également, avec le produit dans une petite cuillère tenue bien droite de la main gauche, et le briquet allumé en dessous avec la main droite. Puis il plonge l'aiguille dans le produit ainsi chauffé, alors qu'il excrète une déjection liquide. Il se rend compte que des gens sont en train de crier, de le montrer du doigt. Il finit par prendre conscience qu'il est à quatre pattes sur le trottoir, à l'extérieur du bar Simon. Il en lâche la seringue qui commence à rouler sur le trottoir en prenant de la vitesse. Il se lance pathétiquement à sa poursuite, toujours à quatre pattes, toujours les fesses à l'air. Percutant un obstacle, la seringue tourne et poursuit sa course dans une allée où une jeune femme est train de se battre dans un combat d'arts martiaux, contre un individu chauve avec une veste blanche, se faisant appeler Père Temps.

Les règles de la politesse ne permettent pas de traduire littéralement le titre de la série en français (indice : ça commence par Sal, et ça finit par Aud), mais ça personnifie bien Ernie Ray Clementine. Il ne vit que pour la fête, sans travailler, en vivant de menus larcins, en ne respectant personne, même plus lui. C'est un individu sans foi ni loi, qui n'a jamais éprouvé d'empathie pour son prochain. Après la scène à quatre pattes, le lecteur n'entretient plus aucun doute sur son estime de soi, et par la suite il le voit se comporter en parfait sal…, égoïste, n'hésitant pas à trahir soeur Mary qui représente l'organisation Autorité Centrale.

Ernie finit par mettre la main sur la seringue qu'il a laissé échapper, mais par un concours de circonstances, il s'injecte autre chose dans les veines : des nanites lui conférant des pouvoirs extraordinaires, sous réserve qu'il ait l'intention de s'en servir de manière altruiste, pour une noble cause. le lecteur sent bien que Rick Remender a jubilé en imaginant ce point de départ, et en pensant à toutes les situations qu'il allait pouvoir en tirer. Effectivement, il raconte une histoire avec des composantes adultes, que ce soit l'immoralité du comportement d'Ernie, la consommation très régulière de produits psychotropes, y compris des mélanges, et même une partouze de grande ampleur avec plusieurs dizaines de participants qui se retrouvent eux aussi défoncés, grâce, ou à a cause, de l'intervention d'Ernie. Pour mettre en images ces aventures, le créateur a opté pour un choix inhabituel : confier chaque épisode à un dessinateur différent. Ce tome s'ouvre avec Lewis Larosa qui a travaillé avec Ed Brubaker, avec Matt Fraction, avec Garth Ennis (sur la série Punisher MAX). Dès la première page, le lecteur détaille des cases très riches en informations visuelles. Il se rend compte que la mise en couleurs y fait beaucoup : elle donne la sensation d'une technique de couleur directe. le lecteur n'arrive pas à déterminer quel est le degré de finition des dessins, tellement la couleur apporte d'éléments visuels. Par exemple, il peut voir la peau tavelée d'Ernie, sans savoir si Remender ou Larosa ont donné des indications en ce sens, ou si c'est l'initiative et l'oeuvre de Dinisio.

Quoi qu'il en soit, l'artiste donne à voir un monde concret et palpable, allant parfois au-delà de ce que pourrait souhaiter le lecteur le plus exigeant. Ce dernier n'est pas près d'oublier ce dessin en double page avec Ernie à quatre pattes dans une position humiliante et dégradante, perdant le contrôle de sa fonction d'excrétion, avec le regard horrifié des passantes, ce lui choqué des passants dont un qui ne perd pas le nord et prend une photographie, ou encore celui amusé d'un enfant. Larosa donne une identité visuelle incroyable à la série, que ce soit l'allure de d'Ernie, ses expressions de visage, le magnifique combat d'arts martiaux en pleine rue, l'aiguille de la seringue s'enfonçant dans le bras, ou les effets spéciaux de l'hologramme de mère Terre, très bien matérialisés par le coloriste. Il passe donc au second épisode en s'attendant à un décalage dans la partie graphique, et il se retrouve à aller vérifier trois fois qu'il ne s'agit pas du même dessinateur. Bien sûr, le fait que le coloriste soit le même joue beaucoup dans la sensation de continuité visuelle. Il faut donc un peu de temps pour que le lecteur relève la saveur particulière des dessins d'Andrew Robinson : plus de cases de la largeur de la page, des cases un peu moins denses, une ambiance lumineuse un peu plus claire, un rendu plus proche de formes détourées avec un trait encré fin. La sensation globale reste la même : une narration énergique, un sens de l'exagération bien dosé qui ne verse pas dans la farce, permettant de continuer à apprécier ces aventures au premier degré, sans oublier le caractère exagéré d'Ernie.

Le lecteur s'attend à ce que la personnalité graphique d'Eric Powell ressorte avec évidence, en particulier sa capacité à se montrer visuellement sarcastique. de prime abord, il n'en est rien : il se coule lui aussi dans le moule de l'ambiance visuelle de série. La narration visuelle est toujours aussi colorée, toujours orientée action, avec une discrète saveur de dérision quant aux hauts faits très relatifs d'Ernie, et son comportement irrémédiablement égocentré. le lecteur constate qu'il est tout autant pris par l'aventure et les péripéties, qu'en train de sourire légèrement au comportement immature du personnage principal. La transition avec Roland Boschi se fait également sans solution de continuité, la narration visuelle étant toujours aussi agréable, enjouée, professionnelle et divertissante. S'il est familier de la série Deadly Class de Rick Remender, le lecteur peut voir que Wes Craig imprime un peu plus sa personnalité dans la narration, à la fois avec un nombre de cases plus élevé par page, un sens du mouvement saisissant, et un humour tout aussi sarcastique.

Avec les premières pages, le lecteur se dit qu'il a plongé dans une oeuvre divertissante, une farce bien grasse pour se détendre : un quadragénaire, rebelle sur le retour, ne pensant en fait qu'à lui, et qu'à se mettre la tête à l'envers, sans aucune considération pour autrui. Il n'hésite pas à piquer les pièces jaunes d'une oeuvre de charité. Il est resté bloqué sur le hard rock macho des années 1980, en particulier l'album Screaming for Vengeance (1982) de Judas Priest. Il s'envoie tous les psychotropes qu'il peut trouver, avec une consommation en mélange. Il ne considère la gent féminine que comme une source de plaisir. Bref, un mâle blanc égocentré, bloqué en mode adolescent idiot et hédoniste, ne pensant qu'à court terme (jusqu'à la prochaine dose), avec un corps qui commence à accuser le coup des excès cumulés, et l'intelligence d'un enfant attardé. Ce récit assume tout à fait cette dimension, sans s'y limiter. C'est aussi une aventure d'anticipation dans laquelle une entreprise a mis la main sur un mode de production d'une énergie verte et bon marché, inféodée à une idéologie particulièrement réactionnaire : une intrigue captivante au premier degré. C'est aussi la confrontation de l'égoïsme et de l'idéal du héros altruiste, bien sûr en défaveur du premier, mais pas systématiquement. C'est également un regard sans illusion sur des thèmes sociétaux : les discours démagogiques (Tous ceux qui te disent exactement ce que tu veux entendre se font de l'agent sur ton dos.), Batman comme incarnation du privilège blanc, la libéralisation des marchés pour un système capitaliste avec zéro régulation et un marché totalement libre, la réalité d'une personne incarnant véritablement la défense de toutes les libertés (indice : il s'agit d'Ernie), la réalité de l'oppression économique (Les riches manipulateurs ont rendu la population si désespérée qu'elle est entièrement contrôlable avec la simple promesse d'un espoir de richesse.), le luxe de l'intégrité (Quand vous donnez si peu à la population, vous les laissez sans autre choix que de renoncer à toute intégrité). Sans avoir l'air d'y toucher, dans le registre d'une farce graveleuse, le scénariste livre sa vision peu optimiste de la réalité socio-économique.

Un titre de série qui annonce un personnage principal méprisable, une succession de dessinateur à raison d'un par épisode, une scène d'ouverture dans l'exagération graveleuse : tout laisse supposer que Rick Remender se détend entre deux séries plus ambitieuses. Très vite, le lecteur se rend compte que l'alternance d'artistes n'obère en rien la qualité et la cohérence de la narration visuelle, à la fois grâce au coloriste, à la fois parce qu'ils font tous la démarche de respecter le même esprit narratif. Il se rend compte que l'intrigue n'a pas été sacrifiée à l'humour, que celui-ci est politiquement incorrect et drôle, et que l'auteur n'a rien sacrifié de son ambition littéraire pour exprimer sa vision pénétrante de certaines facettes de la société.
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Ajouté à ma PAL après avoir vu quelques pages dessinées par Lewis Larosa et avant d'avoir lu la table des matières qui attribue le graphisme des épisodes. J'ai naïvement cru que le contenu était entièrement à ce niveau. Grossière erreur de ma part. Pour le scénario, c'est un peu la même chose : l'exposition du concept dans le premier épisode est plus ou moins intéressant. le développement beaucoup moins. Sans compter que le coup de pouce aux terreurs quotidiennes entretenues par les média ne m'a pas spécialement enthousiasmé. La seule chose que je retiens d'un peu positif est l'analyse socio-politique de Batman, comme ça, en courant d'air, en a parte, aux deux tiers du bouquin.

Sinon, de manière plus anecdotique, le titre Scumbag (traduit Sac à merde en français) m'a traversé l'esprit quand j'ai déballé le paquet expédié par mon bouquiniste en ligne. En premier lieu parce que je déteste recevoir des bouquins d'occase avec un flutain d'énorme macaron rouge collé sur la couverture cartonnée d'un livre relié. En second lieu parce que sur le macaron, il était écrit "10 euros" alors que le prix annoncé en seconde main, et hors livraison, était de 12euros 50. Triste impression de m'être fait avoir. Doublement.

Sinon (bis), tout à fait hors de propos, j'ai découvert sur la demi-douzaine de pages de pub en fin de bouquin (très très propre et hyper bien présentée, coté éditorial l'ensemble du bouquin est du bel ouvrage - j'aurais préféré un corps de caractère un peu plus gros pour les textes, ceci dit, mais la perfection est pour le moins ennuyeuse comme la promesse d'un paradis figé à jamais dans une éternelle extase) que le scénariste, Rick Remender, était aussi responsable de Deadly Class dont j'avais plutôt apprécié les deux saisons de l'adaptation en série tv (disponible seulement en streaming, il a quelques années déjà).
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Lu une première fois en Vo et en version numérique, j'ai eu l'opportunité de l'acheter en VF et en papier. Je dois pouvoir compter sur les doigts d'une main les Bd qui m'ont autant fait rire cette année.
Sans compter le style graphique très agréable, où la diversité des dessinateurs ne dérangent pas du tout à l'unité artistique.
On y suit donc la pire personne du monde chargée, par un hasard qui se moque déjà complètement des procédés habituels des comics, de sauver le monde. Malgré quelques éclaircies de conscience (la critique de Batman comme symbole des suprémacistes blancs est top), le personnage ne faillit pas à être une véritable ordure.
Mieux encore, les méchants, des avatars d'un trumpisme débridé (c'est dire!) se battent en assénant chaque coup d'insultes anti-woke qui sont vraiment géniales.
Mieux encore, une 2ème menace semble croître dans l'ombre, ayant pour arme non pas la violence, mais .... l'INDIGNATION.
Chef d'oeuvre.
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Un premier tome d'une série complètement décalée où l'avenir du monde ne tient que sur un homme tout aussi cinglé.

J'ai tenté l'aventure grâce au prix d'ouverture très attractif du premier tome et je ne regrette pas. Les dessins sont excellents, l'histoire est amusante et intéressante et les dialogues, même si pas vraiment tout public, sont vraiment drôles. Ça reste assez trash dans l'approche mais ça vaut le coup au même titre que The Pro.

N'hésitez pas et tentez à votre tour.
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critiques presse (3)
ActuaBD
21 juillet 2022
Bon, qu’on se le dise, ce récit transgressif ne plaira pas à tout le monde. Soit on aime, soit on déteste, et cela dès l’entame de ce Comics. On ressort presque retourné d’une telle lecture de par l’intensité développée par les auteurs.
Lire la critique sur le site : ActuaBD
Sceneario
09 juin 2022
Venez découvrir The Scumbag, l'antihéros par excellence, le plus pervers des espions au look crasseux. Venez vous amuser dans ces aventures déjantées et contraires aux bonnes moeurs, imaginées par un Rick Remender en grande forme !
Lire la critique sur le site : Sceneario
LesComics
07 juin 2022
Scumbag est la nouvelle création de Remender. Et si ce n’est pour le moment pas son meilleur, il offre suffisement de bonnes choses et de possibilités pour donner envie de plonger dans cet univers. Affaire à suivre.
Lire la critique sur le site : LesComics
Citations et extraits (2) Ajouter une citation
La première fois que j'ai rencontré Ernie, il m'a dit : on n'en fait plus des comme moi. C'est le cas. Et c'est tant mieux.
Mais il a une certaine forme de charisme. Ça, on peut le lui accorder. Les rides sur son visage ne sont pas volées. Il ressemble à ce que sentent la vieille gnôle et le tabac froid. Et il émane de lui des relents de fermentation humaine qui ne peuvent pas s'évaporer. Parce que ça vient de l'intérieur. Chaque partie de lui ... De ses dents jaunes à son nez couperosé.. tout est le fruit passionnément cultivé d'années d'abus en tous genres.
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Les gens intelligents doutent beaucoup alors que les idiots débordent de confiance.
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