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EAN : 9782020389747
125 pages
Seuil (07/01/2000)
3.91/5   126 notes
Résumé :
"Je sursaute à cette seule idée : d'autres gens y habitent, dans notre maison. Et ça reste complètement insupportable. Combien de temps a-t-elle été à nous ? J'avais six ans quand on s'y est installés. J'en avais vingt-cinq à la mort de ma mère, quand elle a été vendue. Pourtant, je n'arriverai jamais à en parler autrement que de notre maison. On y a été tellement heureux et parfois, aussi, si totalement désespérés, nous tous, les dix enfants. Et nos parents. J'habi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (20) Voir plus Ajouter une critique
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« Chaque jour est un adieu », une citation empruntée à Chateaubriand, associe les aurores des petits matins à la campagne, riches de promesses, et les soirs où les souvenirs se font parfois plus douloureux.

C'est à l'âge où son père est mort, 53 ans, que l'auteur prend la plume, comme pour livrer aux lecteurs un album de famille jusqu'alors confidentiel.

Dans un style simple, mais avec beaucoup de sensibilité, Alain Rémond nous propose le témoignage de la vie d'une famille nombreuse et pauvre dans une maison de pays. Il évoque avec tendresse, pudeur et sincérité ses souvenirs d'enfance en Normandie, puis en Bretagne avec ses neuf frères et soeurs. Il relate son enfance puis le départ en pension, la découverte d'un monde nouveau. Sans jamais porter de jugement, il évoque avec simplicité les joies et les déceptions d'une initiation à la vie adulte faite d'amour mais aussi de malentendus et de heurts. L'univers de sa jeunesse, qu'il décrit, est touchant et chacun peut y retrouver, à sa manière, ses souvenirs du passé et parfois des regrets.

Au fil du récit, l'auteur nous livre ses souvenirs, ses émotions et ses moments de vie marquants. Il rappelle avec sincérité et tendresse, mais sans emphase, ce que chacun doit à sa propre enfance, la complicité, les joies, les déceptions et les peines.
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Alain Rémond, ancien chroniqueur et rédacteur en chef de la rubrique "Mon oeil" dans Télérama se souvient et écrit dans ce tout petit livre autobiographique le temps révolu de son enfance. Un de plus, me direz-vous, et je suis d'accord.
Mais la nostalgie est un terreau fertile pour tout un chacun, et en parler (ici écrire) refait vivre ce qui n'est plus, et que nous regrettons tant, quand nous nous rendons compte que nous ne l'avons peut-être pas apprécié à sa juste valeur.

Le livre démarre avec les souvenirs de l'auteur  ancrés dans la maison dans laquelle il a vécu avec ses neuf frères et soeurs et leurs parents. Il faudrait la vendre ; l'idée en elle -  même lui est tout simplement insupportable, impossible. Et c'est de cette douleur que surgit la mémoire, que fait face la nostalgie.

Mais déjà avant cette maison, il y en avait eu une autre, celle de Mortain,  qui se trouva en 1944 au coeur de batailles terribles ( la bataille de Normandie ) entre alliés et allemands les obligeant à fuir et nourrissant ainsi la légende familiale pour ceux qui n' étaient pas encore nés (dont l'auteur).
Les récits sur la guerre que les plus jeunes réclament aux aînés se succèdent.  "C'est devenu, entre nous une véritable  obsession, comme si tout venait de là, ce qui nous unissait, nous, la famille. "

La chronique de cette "famille nombreuse, bretonne, catholique" s'écrira ensuite à Trans,  à partir de 1952, dans une nouvelle demeure (même si le mot "demeure" est fort au regard du bâtiment ), bref, leur "royaume".
Pas très loin du Mont Saint Michel.

Et là, on se dit qu'on est vraiment des guignols.... dans nos maisons modernes à la jolie déco, car ce que décrit l'auteur c'est l'habitation sans eau courante,  sans chauffage,  sans WC (forcément puisque sans eau), sans intimité, avec des détails qu'on n'a jamais lus, même chez Zola, comme les extrémités corporelles glacées au réveil du matin qu'il fallait tremper dans l'eau chaude pour éviter le pire.

Le paradoxe, c'est que ces mômes débordaient de joie de vivre et que leurs jeux étaient dune inventivité incroyable.
" On a passé là,  dans la cour, des milliards d'heures de pur bonheur. Ma mère, en venant donner à manger aux poules et aux lapins, venait voir à quoi on  jouait, on lui faisait visiter, elle nous donnait des idées".
Dur dur quand on songe aux enfants d'aujourd'hui !! 
Et  aux parents stressés que nous sommes PARFOIS.

Et puis, la nature et ses risques encourus étaient bien différents aussi.
Une troupe de frères et soeurs pouvait joyeusement parcourir des kilomètres pour aller jouer au coeur de la forêt,  au bord du lac, le coeur nourri par des tonnes de lectures diverses et variées, pendant des heures, sans danger.

Grâce à l'absence du tube cathodique, même dans une famille humble comme celle-ci,  on lisait et pouvait ainsi parcourir les alentours comme les aventuriers à la recherche de la Toison d'or.

Et puis, il y avait la vie au bourg, qui en ces temps-là, se répartissait entre partisans républicains ou religieux. Les Rouges contre les Blancs, même si les pouvoirs parvenaient quand même à s'équilibrer.

Toutes ces anecdotes du temps passé qu'on ne retrouvera plus sont épatantes pour les gens, comme moi, qui n'ont pas connu ce mode de vie du milieu du siècle dernier, dans nos campagnes.

Enfin, même si les douleurs les plus profondes sont souvent les moins dites, Alain Rémond nous avoue, presque du  bout des lèvres que derrière ce bonheur gentiment vécu, délicatement décrit, se cache sa grande souffrance, "l'enfer du paradis terrestre". Une douleur qui ronge de l'intérieur et ne laissera personne dans cette tribu indemne.
Mais certains plus que d'autres.
Je me retiens de dévoiler ce qui, dans l'histoire familiale des Rémond a  (et continue) probablement de ronger le petit Alain devenu grand, et probablement le reste de la fratrie.

Les parents ne mesurent jamais quelles conséquences peuvent engendrer certains de leurs comportements,  carences comme excès, même si tout cela ne s'adresse pas directement aux enfants.
Certains spectacles devraient être évités. Et l'on saisit alors cette bulle de bonheur tissée psychiquement  par ces enfants. Pour survivre.  

Que la vie est douloureuse quand on est prisonnier d'une histoire qui toute notre existence nous a dépassé et nous ronge.
Que peuvent les mots d'un enfant devenu journaliste face à ÇA ?
Comment la douceur du récit et les caresses de la nostalgie heureuse peuvent - elles ôter le poids de ce bloc de silence qui écrase  la poitrine ?
Et si la résilience se trouvait  simplement dans les lectures partagées au sein de cette famille si singulière que ça ?
Lisez ... et vous jugerez pas vous - même.

"On n'a jamais fait de réveillon,  jamais. Notre luxe, c'est ce bol de chocolat chaud et ces biscottes.  Et la découverte des cadeaux : un ou deux livres, choisis et achetés par notre mère pour chacun d'entre nous."

Puis, ensuite, (et on l'espérait presque), apparaît la fracture sociale ressentie, souhaitée, revendiquée par l'adolescent et elle nous rapproche des écrits d'Annie Ernaux (une voisine littéraire et géographique !), même si le ton employé pour le dire différe.
Être au milieu des Autres, ça ressemble parfois "à de l'ethnologie" !

Peut - on guérir de tout ? Et comment ? du trop et du manque d'amour.
En lisant des poèmes d'Émilie Dickinson. En militant. En se goinfrant de culture....
Ce livre c'est le récit intimiste du parcours à faire quand notre enfance a été marquée et que ce sont les murs d'une maison qui parlent à ses enfants.

Voici là, selon moi, un court ouvrage FORMIDABLE, tellement dense et profond qu'il nous réaffirme qu'on ne dit pas adieu à son enfance, on vit avec elle, chaque jour du reste de notre vie.
Un régal. .....

Lien : http://justelire.fr/chaque-j..
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C'est la chronique de l'enfance d'Alain Rémond à Trans près du Mont Saint-Michel.
Une vie rude au sein d'une famille de dix enfants avec un père alcoolique, trois enterrements et les études en pension. Une vie remplie de souvenirs tendres malgré tout.

L'écriture de ce petit opus est très agréable. Il nous touche en nous parlant d'un temps que les jeunes ne peuvent pas connaître, celui où l'on n'avait pas l'eau courante.
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"Vivre intensément tous ensemble dans la chaleur de la tribu quand tout n'est que cendres au coeur même de la famille. Combien de temps cela peut-il tenir?"
C'est avec beaucoup de pudeur et d'émotion qu'Alain Rémond revient sur son enfance et adolescence à Trans dans cette maison à étage "mal foutue" où le bonheur d'appartenir à une famille nombreuse, avec une mère aimante, courageuse, qui avait sa "fierté", dans un "bled paumé", "territoire magique" était contrebalancé par la violence quotidienne d'un père cantonnier alcoolique.
Illusions perdues du paradis des prières d'un "enfant de choeur modèle", des prix d'excellence qui compensaient les vêtements rapiécés,du monde des jeux où tout devenait fête, des courses dans les ruelles où officiait un boucher qui pleurait chaque fois qu'il tuait un agneau,des visites au pensionnat où l'attente était bonheur...Chaque jour est un adieu à l'émerveillement qui protège les jeunes années des drames. Restent de beaux souvenirs tenaces et un amour avoué à la dernière minutes, les adieux touchants d'un père inconnu!
Chaque jour est un adieu, très agréable à lire ne tombe jamais dans le pathos: on se dit dix enfants mazette!!! Il est plein de vie et surmonte la mort; il couche les non-dits et leur cortège d'émotions sur le papier: amour,admiration,ressentiments,pardon,culpabilité,souffrance,soulagement,
angoisse,détresse,courage,révolte,impuissance....des sentiments qui forgent un homme et une sensibilité d'écrivain.
Romancier et biographe, Alain Rémond tenait (et tient toujours?) en l'an 2000 la rubrique "Mon oeil" dans Télérama dont il était (est?) le rédacteur en chef.
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Alain Rémond, Chaque jour est un adieu - 2000

« ...parce qu'on ne dit pas adieu à son enfance, on vit avec elle chaque jour de sa vie. »

Alain Rémond raconte ici son enfance et la fin de l'enfance, mais non pas l'oubli puisqu'on la sent encore toute vibrante chez l'écrivain de cinquante-trois ans. Il évoque avec beaucoup de précision les jeux, les rêves et les maisons qu'il a habités et si bien qu'on a souvent la sensation de faire partie du groupe. Je crois bien qu'il y a une part d'universel dans ce récit puisque j'y ai retrouvé un bout de ma jeunesse, de celle de mes frères et des gens de ma génération.

Et même si tout n'était pas rose dans la vie de sa famille, il nous fait le plaisir de ne pas s'appesantir et de ne pas sombrer dans le pathétique. Il en dit juste assez pour que nous comprenions la déception ou la détresse, les questions ou les attentes. Un livre sensible et tout en retenue.

Je vis chaque jour un peu de mon enfance. Avec elle, les saveurs, les couleurs, les sons s'enrichissent de sa présence dans l'instant, elle ajoute à l'expérience. Rémond me donne le goût de continuer.
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Citations et extraits (27) Voir plus Ajouter une citation
Je ne sais pas ce qui s'est passé, entre mes parents, je ne le saurai jamais. Je ne suis pas capable d'expliquer. Je n'en ai pas envie. Je n'ai pas voulu savoir qui avait tort, qui avait raison. Mon père buvait-il parce qu'il n'y avait plus d'amour entre eux ? Ou l'amour était-il mort parce qu'il buvait ? Un enfant ne peut pas se poser ces questions-là. Ce que je voyais, ce que je vivais, c'était ce mur de haine entre eux, ce gouffre où nous allions tous nous perdre. Tous les soirs, quand mon père rentrait, c'était la guerre qui reprenait : les cris, les insultes, parfois les coups entre eux, l'effroi qui nous glaçait, la descente au fond d'un cauchemar noir. Qu'est-ce-qu'on pouvait dire, qu'est-ce qu'on pouvait faire, nous les enfants ? Cette haine, ce désespoir qui habitaient nos parents, comment lutter contre ça, comment faire que ça n'existe plus, que tout redevienne comme avant ? Qui avait la clé du paradis perdu, qui avait la baguette magique ? Le soir, nuit après nuit, dans le secret de mon lit, à la maison ou en pension, je répétais comme une incantation cette prière à laquelle je voulais croire : "Faites, Seigneur, que mes parents s'entendent." Dans le noir, dans le vide, paroles dérisoires auxquelles je m'accrochais, pour me donner du courage. Mais rien, jamais, n'est arrivé. Toujours la guerre, toujours la haine.
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Quand on voulait se faire couper les cheveux, on allait chez le menuisier. Le samedi soir, il changeait de métier, recevait dans sa cuisine. On s'asseyait autour de la table, en attendant notre tour. Le menuisier sortait sa tondeuse mécanique et il coupait tranquillement, en prenant tout son temps, la cigarette papier maïs aux lèvres, la cendre qui nous dégringolait dans le cou. Il coiffait les hommes, exclusivement. Les vieux buvaient un coup, fumaient, discutaient, racontaient tous les potins du bourg, se rappelaient de vieilles histoires de famille, de fermes, de clôtures. Nous, les enfants, on écoutait, fascinés. Fallait surtout pas être pressés. On ressortait de la cuisine du menuisier à la nuit noire, la tête bien fraîche : son style, au menuisier, c'était la coupe au bol, bien dégagé très haut sur les oreilles et dans la nuque. Quand on rentrait à la maison, les autres se moquaient de nous. Pas grave : ils y passeraient à leur tour.
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Je sursaute à cette seule idée : d'autres gens y habitent, dans notre maison. Et ça reste complètement insupportable. Combien de temps a-t-elle été à nous ? J'avais six ans quand on s'y est installés. J'en avais vingt-cinq à la mort de ma mère, quand elle a été vendue. Pourtant, je n'arriverai jamais à en parler autrement que notre maison. On y a été tellement heureux et parfois, aussi, si totalement désespérés, nous tous, les dix enfants. Et nos parents. J'habite loin de Trans, maintenant, depuis longtemps, mais il m'arrive de repasser devant la maison, en tremblant. Et c'est comme si je brûlais, en approchant de la fenêtre. Parce qu'en même temps que ce bonheur, il y a eu trop de malheur.
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"Il y avait entre nous ce lien si fort de la tribu, il y avait ce bonheur de partager les mêmes rites, les mêmes histoires codées, la même mythologie. Mais, à cause de cette souffrance au cœur de la famille, de cette guerre entre nos parents, nous ne savions ni les mots ni les gestes de la tendresse. De l’amour. (...) Et voici que mon père, avec son sourire fatigué, sans doute aussi pour faire oublier le père lointain, étranger, qu’il avait été, trouve le courage de nous dire combien il nous aime, (…)" (p. 74 et 75).

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Mais qu'est-ce que c'était, ce cafard, à côté de ce qui me rongeait jour après jour, nuit après nuit, et dont il me faudrait maintenant parler ? Tout se paie. Le bonheur à Trans, ce bonheur que j'ai bu jusqu'à la dernière goutte, était un mensonge. Il y avait à l'intérieur de ce bonheur, un malheur plus grand encore. Et je ne sais pas si je vais trouver les mots pour avancer, dire l'enfer du paradis terrestre. J'ai compris un jour deux choses, peu de temps après notre installation à Trans : mon père et ma mère ne s'aimaient plus. mon père buvait. C'était la mort de l'amour, c'était la mort à l'oeuvre.
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Ma mère avait ce geste de Alain Rémond aux éditions Plon
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